AccueilAccueil  FAQFAQ  RechercherRechercher  MembresMembres  GroupesGroupes  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
Le deal à ne pas rater :
Cdiscount : -30€ dès 300€ d’achat sur une sélection Apple
Voir le deal

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas

[FB septembre] The Shortest Straw - Aldric

 :: Autour du monde :: Grande Bretagne :: — Angleterre
Ven 3 Fév 2023 - 17:23

 Mi-Septembre 2016


“Lundi en huit pour la prochaine consultation ?”
“J’vous fait perdre votre temps.”
“Nous nous sommes vues deux fois. Vous prenez votre temps, en ça vous vous préservez. C‘est positif. A la semaine prochaine, Sloan.”

Les lèvres pincées, Jordane sortit en marmonnant quelques politesses d’usage. La poignée lui semblait gelée dans sa main brûlante lorsqu’elle ferma la porte. Pourtant une fois de plus, la jeune femme était restée muette. Une putain de tombe.
Durant l’été, l’ancienne Serdaigle en était arrivée à la conclusion qu’elle n’y arrivait simplement pas. Qu’elle ne pouvait être celle qu’elle était avant, qu’elle n’arriverait pas à se tirer cette fois. Les gens qu’elle côtoyait comptaient trop. Kezabel comptait trop. Et pourtant voilà qu’elle n’avait été qu’un fantôme durant l’internement de cette femme qui cramait sa peau à chaque pensée. Elle qui avait été présente pour elle s’était retirée dès lors que Sanae l’avait mise face à l’évidence : à présent il allait falloir prendre une décision franche et s’y tenir. Rester ou partir. Aimer ou abandonner. Sauf que Jordane en avait été incapable. Alors durant tout l’été, elle s’était approchée du centre où Kezabel avait été isolée pour son bien. Elle avait tourné autour, passé des nuits à en observer les fenêtres, en avait passé les portes, s’était dérobée. Elle était coupable. Coupable d’une putain de lâcheté, coupable de faire du mal à celle qui lui défonçait le myocarde. Coupable, sans doute, aux yeux de la sœur, Sanae, ou l’aime sœur, Riley. Et pourtant elle avait essayé, tellement violemment qu’elle s’était perdue un peu plus à chaque seconde, noyée d’un besoin viscéral de compenser.
L’alcool, la dope, l’oubli. N’importe quoi tant qu’elle se sentait davantage elle-même. D’avantage sur un terrain connu. Ainsi oui, s’éveiller après trois jours dans les bras d’inconnu.e.s, incertaine du déroulé des dernières heures, marquées parfois de bleus et l’esprit brumeux, appartenait à la catégorie de la réassurance. Sans doute y serait-elle encore, à faire la conne et à se foutre en l’air s’il n’y avait eu aucune discussion avec Enzo. Elle avait mis à mal son couple, s’était comportée en garce finie. Et pourtant le jeune homme avait été là, calme, direct, à engager une conversation qu’elle ne pensait pas être apte à tenir. Sans doute toute autre personne que lui l’aurait-il faite fuir. Mais il y avait chez lui l’humanité et la patience dont elle n’était pas capable. Jamais la jeune femme n’aurait su exprimer le respect et l’affection qu’elle éprouvait pour lui.

Pas un scoop. Pas son fort.

Mais puisque l’idée de voir un psy était venue de lui… alors elle y allait. Et restait muette.

Comment apprendre à ouvrir sa gueule, se confier, creuser les plaies quand elle les esquivait depuis tant d’années. Ainsi Jordane était-elle conne, plantée sur sa chaise en plein patelin paumé d’Irlande. Comme s’il était utile d’aller si loin. Sa manière de limiter l’impact que tout ça pouvait avoir sur son quotidien.

En vérité Jordane savait. Elle savait qu’elle se rapprocherait de Kezabel, qu’elle ne faisait que gagner du temps, trouver le courage en elle de tenter de s’inscrire dans une dynamique affective profonde. De se faire confiance aussi, peut être. D’avancer. De fermer les yeux sur les taules du passé et les chutes à venir.
Ainsi en parallèle, si la jeune femme ne noyait pas ses peurs dans la chimie, elle retrouvait sans cesse un chemin non moins cahoteux. La Garde. Il semblerait sans doute à toute autre personne complètement délirante l’idée de se mettre en danger pour aller mieux. D’aller sur le terrain qui lui avait fauché son meilleur ami. De tenir les armes quand celle qu’elle aimait avait été mise hors jeu dans ces mêmes conditions.
Jordane n’était ni la plus posée, ni la plus avisée, ni la plus efficiente des membres de la Garde. Elle était jeune, c’était un fait. Trop habituée à ne dépendre que d’elle-même, difficilement en confiance, souvent impulsive et brute. Pourtant au sein de la garde, la jeune femme lâchait du lest. Très étrangement, elle y respirait mieux que dans son quotidien. En planque, à l’entraînement, en danger, à infiltrer un entrepôt ou à feinter les gardes pour aller déposer des liasses de journaux contrefaits en douce pour shunter les médias officiels, qu’importe le pourquoi, elle s’y sentait plus légère.

Ainsi la jeune femme avait rejoint Londres puis directement le QG en transplanant droit dans une salle d’atterrissage. La sensation subtile du léger roulis de l’eau fit basculer en une seconde son esprit à vif dans un calme étrange. Ainsi avait-elle appris à devenir, un peu plus jeune, dans ce qui lui semblait parfois être une autre vie. Personne ici n’imaginait. Pas plus qu’ailleurs. Ainsi lui était-il amusant d’entendre son supérieur hiérarchique la nommer “Siem” lorsqu’elle rencontrait de nouvelles personnes. C’était une demande récente.

Siem. Siem c’était surtout le surnom qu’on lui avait donné lorsqu’à seize piges, elle s’était retrouvée dans un squat, entourée de camés et qu’en quelques mois, la jeune femme avait cramé son compte en banque et dû trouver d’autres moyens d’avancer. Siem, c’était le nom qu’un ami lui avait trouvé avant de lever la voix et le poing. Avant, surtout, qu’ils ne se trahissent l’un l’autre. Siem, c’était une gamine paumée qui aurait pu, sans cet affrontement-là, finir comme sa mère, le corps percé au fond d’une ruelle. C’était pourtant le surnom qui lui était venu.
Beck était le second.
Joan, parfois.
Sloan aussi.

Mais Siem, ici, pour cette mission. Il aurait pu s’agir d’un détail comme d’un autre et pourtant, ce détail qui la faisait habituellement sourire lui glaça les sangs lorsque son binôme passa la porte.

Jordane était assise dans la petite salle de réunion depuis quelques minutes à peine quand l’homme passa la porte. Ils se trouvaient dans l’une des nombreuses salles étendues par la magie. Il y avait tout ici, salles d’entraînement, de réunion, d’interrogatoire. Pas ce qui était le plus utilisé pourtant, la Garde gardait des points de chute partout en ville et la majeure partie du temps, tout était plus ou moins séparé pour limiter les fuites. Ici, pourtant, se préparaient les missions, se stockaient les infos, se remontaient les comptes rendus. Les quelques binômes seraient envoyés aux quatre coins du pays pour surveiller certaines cibles et définir si oui ou non, certains Supérieurs identifiés avaient des contacts avec elles. Pour cela, Jordane qui connaissait le visage de nombreuses de ces enflures, avait été choisie et mise en binôme avec quelqu’un qu’elle ne connaissait pas.
Supposément pas.

Son visage déjà de marbre dans la petite salle du bateau, se ferma davantage en voyant l’homme entrer. Martellement sourd sous ses côtes, flashs dans ses prunelles. Elle resta droite, serra la main du type, ne quitta ses prunelles qu’une fois que leur supérieur reprit la parole, énonçant une nouvelle fois toutes les informations qu’ils avaient déjà validé en amont.
Sans un mot, la jeune femme s’assit du bout de la cuisse sur l’une des tables qui jonchaient les lieux, suivi la réunion, posa ses questions, s’assura d’être parfaitement opérationnelle.
Pourtant l’esprit n’y était pas.

A l’encontre de sa volonté, chaque battement de cœur la ramenait des années en arrière. La chaleur moite de l’île, les randonnées, les rires avec les locaux, l’arnaque aux hôtels de luxe, les soirées sur la plage et ça. Ce truc qui l’avait fait tomber sur cet homme.
Très étonnamment, Jordane l’avait immédiatement remis. Il y avait ça d’amusant qu’elle avait amené Kezabel là-bas quelques mois plus tôt, les deux jeunes femmes se nouant de désir près d’une cascade ou dans les jacuzzis d’un hôtel qu’elles avaient rejoint après que Jordane ait métamorphosé quelques vieilles bouteilles en deux bracelets d’hôtel, petit jeu qu’elle avait appris dans son adolescence. Mais ces images restaient loin de ses prunelles quand, à quelques mètres d’Aldric, elle replongeait la gorge sèche dans ses souvenirs.

Elle n’avait pas dû rejoindre l’île depuis plus de trois semaines et sans vraiment comprendre comment elle était passée d’une petite arnaque à la con à ce bordel, Jordane s’était retrouvée envoyée par un groupe de types récupérer des documents. L’arnaque, c’était elle, parce qu’ils l’avaient pensée compétente. L’arnaque, elle en était la victime, surtout, car le but était sans doute finalement, de provoquer une diversion. Qu’importe qu’elle risque d’y passer.
Aurait-ce été le cas si elle n’avait pas été française ? Si elle n’avait pas passé un mois à l’île Maurice dès ses dix-sept ans ? Aurait-ce été le cas, si seulement elle n’avait pas eu une chance insolente ce jour-là ?
Plongeant droit ses mains dans ses poches, les lèvres serrées l’une contre l’autre, le regard affirmé vers son boss, la jeune femme refusait avec acharnement de poser les yeux sur ce type.

Car ce type-là appartenait à l’autre camp ce soir-là. Il n’aura pas été le premier à la mettre à terre. Pas le premier à faire couler son sang et craquer ses os. Le premier pourtant, à qui elle avait rendu les coups.

Ce type contre lequel sa main s’était crispée dans le présent.

Jordane se revoyait, le sursaut qui avait pris son corps encore trop fin. Le nez dans des papiers, une main sur un tiroir, la seconde à plat sur le bureau, elle s’était retournée pour le voir arriver. Un instant, il lui sembla confondre souvenirs et présent, et supposa de la similarité entre l’expression du passé et celle du présent. Sans aucun douce, ce jour-là, cet homme avait voulu la tuer. La aussi, ni le premier, ni le dernier. Pourtant dans sa poitrine, à l’époque comme au présent, son cœur tambourinait de panique. Ça faisait alors cinq ans que Jordane s’entraînait sans relâche. Elle avait cru naïvement s’en sortir, forte d’années dans la rue, à se démerder par elle-même, à passer par le pire et le meilleur. La gamine avait pensé que cette fois-là, elle ne serait pas celle qui fini à terre. Que son corps fin et élancé, bien moins musclé qu’il ne l’était devenu, constituerait un effet de surprise.

Erreur.

En silence, un frisson crissa sous sa peau tandis qu’elle captait un mouvement d’Aldric, non loin. Il aurait été simple pourtant de le dénoncer, de se planter en muraille de refus, de parler des conditions dans lesquelles ils s’étaient rencontrés, de dire qu’il n’était pas fiable. Mais qu’en savait-elle ? Ce type n’était qu’un gars dans un bureau. Un gars dans des combines peu claires dans lesquelles elle avait trempé sans trop savoir ni à quel point ni pourquoi. Alors le dénoncer ?
Oui, elle le pourrait. L’idée lui semblait pourtant absurde. Dans la tension honnie installée entre eux, un accord tacite s’était forgé sans même qu’elle n’en prenne la mesure. Aucune parole, ce serait parler du passé et elle s’y refusait. Aucune parole, ce serait nier qu’en vérité, là, engluée dans le marasme du danger, Jordane se sentait bien plus à l’aise qu’à songer à Kezabel, Enzo et Will ou qui que ce soit d’autre. Idiot, dangereux, mais cet afflux d’adrénaline dans ses veines la soulageait. La crispation sourde de la peur dans sa poitrine avait ce quelque chose de commun qu’elle eut l’envie irrésistible de se laisser emporter dans cette impression familière.
Parler, ça aurait été admettre bien trop de choses. Qu’elle reste ainsi Jordane, la femme sortie de l’adolescence, issue d’une école de fous, ayant pris les armes et perdu des proches. Rien de plus. Ni vraiment Siem, ni vraiment Beck. Certainement pas Jo, la vraie Jo. Celle dont la gueule lui avait semblé voler en éclat, qui avait trop ouvert les cuisses pour obtenir ce qu’elle voulait. Qui, surtout, avait eu tant de réflexes de survie qu’elle en était devenue cette nana qu’il avait éclatée et qui lui avait échappé. Un coup de chance, un moment d’inattention et elle s’était esquivée, avait attrapé sa baguette, avait disparu. Pire encore, elle était revenue. Car Jo avait toujours été une tête de mule à l’égo plus solide que l’esprit. Ainsi elle était apparue derrière lui, avait récupéré les preuves qu’on lui avait demandé, s’était échappée.

Elle gardait de cette soirée une cicatrice à l’avant bras, éraflant le tatouage de double flèche qu’elle y avait encré des années plus tôt, et la marque d’une brûlure de balle à la jambe. Encore difficile de croire qu’on lui avait tiré dessus, pourtant elle se souvenait de la lame qu’elle lui avait fait lâcher et de la rondeur de ses yeux lorsqu’elle avait découvert un peu de sang sur sa cuisse nue. Rien en somme. On l’avait loupée. Elle avait eu de la chance. Rien de plus.

“C’est bon pour vous ?”
“ça m’va.”

De la chance.

Jordane se laissa couler hors de la table, posant le regard droit sur le type qui, des années plus tôt, aurait pu être son assassin. Un léger sourire flotta alors sur ses lèvres. Elle était partie avec les preuves qui accusaient ce type, les avaient lues, n’avaient rien compris et les avaient stockées quelque part. Jamais elle n’avait récupéré l’argent de sa course, consciente que si elle se ramenait auprès de ses employeurs, elle risquait d’y découvrir d’autres surprises. Consciente de s’être retrouvée au cœur de conflits criminels, d’avoir servi d’appât ou de chair à canon et de n’avoir pas connaissance de la moitié des données pourtant utiles, Jordane avait simplement pris le chemin de traverse. Disparue à la minute, les laissant tous dans leur merde.
Jo s’était effacée pour les uns, était apparue pour les autres. Quelques semaines, pas plus. S’en souvenait-il seulement ? A observer son regard sombre et le rictus torve de ses lèvres, Jordane ne se faisait aucune illusion. Ainsi eut-elle un regard vers le mur des disparus lorsqu’elle partit, droit vers le lieu de leur mission.

Ça serait quand même con non ? De décider de s’ouvrir et de se faire buter au détour d’une mission, sans véritable raison.
Oui. Ça serait con.

Leurs pas claquèrent dans le bateau jusqu’à ce que leur supérieur ne les laisse prendre un portoloin. Quelques paroles échangées encore, le cœur qui s’échappe de nouveau sous ses côtes. Quelques conseils, rappels, informations l’un sur l’autre et ses oreilles bourdonnaient. En cas d’urgence, se servir du tatouage ou du médaillon en forme de pic qu’ils portaient au cou ou au poignet. Ça aurait été si simple de jeter un sort là maintenant, prévenir, envoyer un appel à l’aide muet.
“Alors bonne chance” qu’il disait. Et elle, elle s’entendait répondre d’une cynique plaisanterie, classique de sa part. Toujours étrange, cette manière dont elle pouvait passer à l’automatique.

Main tendue, Jordane prit avec Aldric le portoloin et un vertige plus tard, ils étaient seuls sur le toit d’un immeuble.

Le temps d’un battement de cœur et elle avait bondit à distance, jeté un sort pour lever d’éventuels pièges, jeté un coup d’œil alentours. Personne. Ils étaient seuls.

Seuls.

Son regard reprit droit celui d’Aldric, esquissant un petit rire rauque en levant ses mains en signe d’apaisement. “Ok beau gosse, on est dans le même camp.” baguette à droite, comme souvent. Ambidextre, elle l’avait pourtant surpris des années plus tôt avec cette particularité. Bras nus, muscles dessinés, gestes assurés, Jordane avait changé et gagné en musculature depuis cette époque. Pas que. “Tu m’as niquée la gueule, j’vous ai légèrement enculé au passage, un partout balle au centre ?” Derrière son sourire mordant et l’éclat vif de ses prunelles, l’adrénaline battait la course.
code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Mer 8 Fév 2023 - 16:35


Angleterre | Mi-Septembre 2016
— Hé, Murphy ! Ramène-les cartes !

Vautrée dans un fauteuil, le cigare entre les lèvres, Brook lui adresse un grand sourire. Murphy lui répond de son haussement de sourcil si particulier. Il pose les gants de boxe dans leur compartiment de rangement, puis s’éloigne dans le couloir voisin avant de revenir avec un paquet de cartes. Il s’installe à la table de Brook, et hoche la tête.

Un grand taciturne, le Murphy.

— Aldric ! Ismahane !

A moitié redressée, la voix de Brook tonne dans le club, prête à réveiller les morts s’il le faut. Ismahane surgit des vestiaires, le pull qu’elle enfile coincé entre ses bras. Elle observe les alentours avant de croiser le regard de la blonde et de soupirer.

— T’es obligée de gueuler à chaque fois ?

Brook se contente d’un sourire mutin pour toute réponse, tandis qu’Aldric les rejoint enfin. Il a sa tête des mauvais jours, celle qu’il se trimballe lorsqu’il doit mettre le nez dans la comptabilité du club. Le genre de tête qui incite à ne pas l’embêter, mais comme d’habitude, Brook s’en fiche.

Elle se redresse sur son fauteuil et attrape les cartes pour les battre.

— Prêts à prendre votre raclée ?
— Prête à récupérer les chiottes une fois de plus, tu veux dire ?

Aldric se laisse tomber dans un fauteuil, le sourire moqueur sur les lèvres. Il ignore le regard de défi que lui jette Brook, tandis qu’Ismahane s’assoit avec eux. Elle les fixe avec sévérité ; pas parce qu’elle le reproche de jouer alors que le club ouvre dans moins d’une heure, mais parce qu’elle escompte bien leur arracher la victoire.

L’espoir naïf. Ismahane n’a jamais gagné une seule partie face à eux. Brook s’apprête d’ailleurs à lui rire au nez lorsque Murphy la coupe.

— La mise ?

Pragmatique Murphy. Toujours droit au but. Son regard glisse à chacun des employés de ce club, les questionne un à un. Brook l’imite, puis clame après avoir tiré sur son cigare.

— Une semaine de TIG.

Murphy hoche la tête. Ismahane hésite un instant mais approuve également. Aldric étouffe un rire.

— Tu t’appliqueras quand tu nettoieras les chiottes.

Brook lève les yeux au ciel mais ne rétorque rien. Elle distribue les cartes. Chacun récupère son jeu, jauge les autres et évalue sa meilleure stratégie. Ismahane a une ou deux cartes intéressantes, si Aldric se fie à sa manie de jeter des coups d’œil au-dessus de ses cartes. Brook aussi doit posséder une main intéressante, compte tenu qu’elle fanfaronne avec son cigare. Quant à Murphy… Murphy est toujours impassible. Une véritable tombe.

Les tours s’enchaînent. Ismahane se couche plutôt que tout perdre. Murphy suit un peu plus longtemps avant de jeter les armes. Il sait toujours se montrer raisonnable, pas comme Brook. Pourtant, elle paraît si fière d’elle, assurée de l’emporter, mais quand Aldric et elle abattent leur jeu sur la table, elle se redresse d’un bond, le choc et la colère dans la voix.

— Sale tricheur !
— Cause toujours, Brook.

Aldric s’apprête à relancer une partie lorsque son téléphone vibre dans sa poche. Il lève les yeux au ciel, puis peste entre ses dents quand il reconnaît le numéro qui s’affiche. Et merde.

Un sourire crispé sur les lèvres, il se redresse et salue ses employés.

— Ism, je te laisse t’assurer que Brook s’applique bien. Brook, je veux que ça brille. Et Murphy… toujours un plaisir.
— Quoi, peur de la revanche ?
— Plutôt peur que tu t’humilies encore.

Ismahane pouffe, à moitié cachée derrière ses cartes, et même Murphy esquisse un sourire. Aldric en profite pour disparaître loin du club avant que Brook vitupère contre son départ inopiné.

֍

Une journée tranquille. C’est tout ce qu’Aldric demande. Une journée à poser son cul au club, sans se soucier du reste. A regarder Murphy impressionner les clients avec sa stature de colosse silencieux. A observer Brook mettre au tapis des gamins insolents qui pensent mieux savoir qu’elle. A écouter Ismahane râler puis la voir intervenir pour éviter que Brook ne casse la mâchoire d’un gamin. Jouer aux cartes avec eux. Profiter des quelques venues de Nicholas, l’infirmier bénévole du club – mais rémunéré sous les dessous de table.

S’inquiéter pour ce sale gamin d’Alec qui a disparu du jour au lendemain sans prévenir personne. Il n’a même pas posé de lettre de démission. Il s’est juste… envolé.

Mais non. La tranquillité n’est qu’un mythe asséné à leurs oreilles naïves pour les pousser à rester dans le droit chemin. Ne faites pas de vague, et vous ne connaîtrez pas les problèmes.

Quelle blague. Les ennuis vous trouvent s’ils le souhaitent. Et ils sont rarement seuls. Ils se promènent toujours en meute, prêts à noyer leur cible ; et s’ils ne suffisent pas, ils appellent des renforts.

Le premier ennui lui est donc tombé sur la gueule. Son téléphone qui sonne ; celui de la Garde – Aldric n’est pas assez stupide pour donner un numéro personnel à la Garde, ou un numéro qui sert pour d’autres affaires. Comme il n’a pas répondu à l’appel, un message. Puis un juron. Et le voilà qui quitte son club pour rappliquer au quartier général de la Garde. Parfois, il se demande quelle idée de merde lui a traversé l’esprit quand il a choisi de s’allier à cette bande de rigolos.

Le deuxième ennui n’a pas tardé. Sitôt installé dans cette salle de réunion, à bord d’un navire, que leur supérieur leur annonce un départ en mission immédiat. Aldric retient un autre juron coloré, bien que certains mots lui échappent en créole mauricien. Et dire qu’il devrait être en train de plumer Brook aux cartes.

Le troisième ennui surgit sitôt après : la désignation de son binôme du jour. D’ordinaire, Aldric travaille en solitaire ; peu sont les membres de la Garde à frayer avec les cercles mondains des sang-purs, ce qui limitent leurs possibilités d’action. Il évite aussi un maximum les missions en binôme, ou plus, sous prétexte de son anonymat. Il ne manque jamais d’argument pour prôner sa solitude plutôt qu’une équipe. Et pourtant, voilà que leur supérieur leur assigne un binôme ; une jeune femme, Siem, qui a la même gueule d’insolente que Brook.

Il n’est pas tiré d’affaire.

Toutefois, quand il serre la main de Siem, Aldric comprend à quel point il a sous-estimé ce troisième ennui. Ou qu’un quatrième ennui s’est tapi derrière, prêt à le frapper de plein fouet. Cette femme, il la connaît, seulement avec quelques années en moins et une autre couleur de cheveux.

Sur l’Ile Maurice, Aldric a trempé dans bien des affaires, plus ou moins légales, plus ou moins sympathiques. Une guerre de territoires a longtemps fait rage à Port-Louis, et tous les coups étaient permis dans l’espoir de gagner du terrain sur ses adversaires.

Y compris jeter une gamine dans ce bourbier pour dérober des documents confidentiels.

Aldric ne fait pas dans la dentelle. Il ne l’a jamais fait. N’a jamais appris à le faire. Il tire avant de réfléchir, car l’hésitation est souvent le plus terrible des poisons. Alors face à cette gamine qui mettait le nez là où il ne fallait pas, il n’a pas fait dans la dentelle. Il a essayé de la tuer. De l’éliminer avant qu’elle ne disparaisse avec les documents. Pas un grand succès, à dire vrai, car il l’avait laissée filer par la force des choses. Il avait manqué de vigilance ; une demi-seconde qui lui a permis de décamper.

Une demi-seconde d’hésitation à laquelle Siem doit la vie.

Et elle le sait. Elle l’a reconnu, ou alors sa main ne serait pas autant crispée contre la sienne.

Mais ni l’un ni l’autre ne fait de commentaire à ce sujet. Ils se comportent en deux inconnus, prêts à coopérer pour cette mission de filature.

Sans un mot, Aldric les suit sur le bateau, ne prête aucune intention au baragouin de leur supérieur au sujet de la procédure à suivre. Il a toujours agi selon ses règles, sa procédure ; il ne compte pas changer de sitôt, même s’il fait équipe avec une autre personne. Ses habitudes lui sauvent la vie depuis des années ; il n’accorde aucune confiance envers les conseils proférés par la Garde. Il ne connaît pas ces gens, ceux qui élaborent ces stratégies, et ignorent tout de leur vécu. Peut-être n’ont-ils jamais eu à se battre comme il l’a fait pour survivre.

Puis un portoloin. Le déplacement, le vertige ; le changement de décor. L’air marin qui disparaît, remplacé par les hauteurs d’un immeuble.

Qui choisit d’atterrir sur le putain de toit d’un immeuble ?

Autant se peindre une cible en rouge dans le dos pour faciliter le travail des snipers.

Puis, tandis que Siem jette un sortilège aux alentours pour détecter d’éventuels pièges, Aldric se rappelle qu’ils traquent un Supérieur. Un idiot de Sup’ qui ne jure que par sa magie, comme toute cette tripotée de puritains qui ne comprennent pas le potentiel dévastateur des armes moldues.

Malgré tout, Aldric n’est guère serein d’être autant à découvert, alors il sort son pistolet, puis se replie vers l’entrée du toit. La porte n’est pas verrouillée, et la cage d’escaliers semble déserte.

La voix de Siem le ramène à sa présence. Elle lève les mains en signe d’apaisement. A-t-elle cru qu’il escomptait l’agresser sur ce toit, maintenant que plus personne ne les observe ? C’est vrai qu’il pourrait maquiller la scène, faire croire à un affrontement qui a mal tourné, un meurtre du camp ennemi.

Il le pourrait, mais les évènements sont bien plus complexes que Siem ne l’imagine. Par chance, elle l’a rencontré sur l’Ile Maurice, alors elle ne représente aucune menace pour sa couverture. Au pire, elle peut dévoiler ses accointances avec le monde criminel, tout comme il peut prétendre avoir raccroché en s’installant au Royaume-Uni.

— Beau gosse ? T’as essayé de me planter la dernière fois.

Un ricanement lui échappe, appuie sa répartie. L’un comme l’autre a ses raisons de rester méfiant ; il ignore combien de temps elle conservera le silence à son sujet. Même s’il peut s’en sortir, Aldric préfère éviter un tel scénario.  

Il lève à son tour les mains, son pistolet toujours dans sa main droite.

— Mais les documents n’ont jamais filtré, donc balle au centre disons.

Aldric a toujours redouté ce jour où les documents paraîtraient au grand jour, entre les mains de ses rivaux de l’époque, mais rien. Pas la moindre menace à ce sujet. Aussi étrange soit-il, cette gamine a achevé sa mission, mais n’a jamais livré sa course.

Il baisse finalement les mains ; il n’oublie pas leur position actuelle, avec un Supérieur à surveiller. Même si cela ne l’empêche pas de gratter quelque peu la surface des questions qui l’intriguent.

— Pourquoi d’ailleurs ?
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Mar 14 Fév 2023 - 11:38

 Mi-Septembre 2016


Combien y en a-t-il eu, de ces moments où le monde manque de basculer ? De ces instants où le souffle lui manque, le myocarde la fracasse. Elle s’y écrase, perd le Nord, ferme son âme et accepte bien qu’à rebours que c’est peut être la fin du compte à rebours. Elle le cherche, ne l’ignore pas. Qui d’autre serait responsable dans le fond, puisqu’elle est celle qui a fuit la chaleur d’un foyer, d’un père tentant de rattraper ses erreurs, d’une sœur apprenant à dealer avec les cratères de la vie. Elle est fautive. D’avoir marché droit devant elle sans se retourner, d’avoir cramé ses économies en quelques mois, d’avoir sourit à un homme ou écarté les cuisses. D’avoir tiré sa première latte et pris son premier rail, d’avoir perdu le fil et bouffé le vertige de l’ivresse. D’avoir mentis, volé, abandonné. Surtout d’avoir abandonné. Les uns et les autres, au fil des mois ou des ans, de partir, sans cesse, sans leur donner la possibilité de frapper après que d’autres l’aient trop fait. De ne pas avoir su parler, aimer, pardonner. Coupable, d’avoir vu le monde mais trouvé de l’argent facile. Ces batailles, pourtant, n’ont jamais été les siennes ; c’est bien la raison de son acharnement actuel : pour une fois, si Jordane tient c’est qu’elle a choisi de tenir les armes. Que le camp d’en face lui est véritablement hostile. Ou plutôt qu’elle, lui est.

Qu’importe, donc, qui lui fait face. Qu’importe la panique de ce jour-là, les coups qui s’y sont enchaînés, le fouet électrique qui lui a battu les veines lorsque le premier impact a manqué de l’atteindre et qu’enfin, pour la première fois, son corps a retrouvé ses réflexes. Dix ans à présent, depuis la mort de sa mère. Dix ans qu’elle s’entraîne quotidiennement, cinq à l’époque et Aldric n’avait pas été le premier à se dresser contre elle. Le problème c’est qu’un affrontement dans la vrai vie est bien différent de ceux qu’on opère sur un tatami. Acharnée, la gamine y a toujours été douée. Toujours la dernière à sortir de la salle, la première à y entrer, la dernière à tenir durant les matchs et la première à se relever chaque fois au sol. Qu’importe, pourtant, sa fougue ou sa ténacité, face à la réalité, la jeune femme n’avait jamais été qu’une gosse à tomber sous les coups. Une môme à freezer d’angoisse qui n’aura fait que se rouler en boule la gueule sur le bitume à espérer qu’à un moment ou un autre les chocs ne cessent. Nombreuses avaient été ces fois. Et consciente elle l’avait été, de ne pas avoir les épaules de survivre à un véritable affrontement. Ainsi si Jordane s’était écrasée bien trop à son goût, qu’elle avait dû sa survie à des compromis, de la chance ou des balafres à son égo sans compter bien évidemment la présence d’autrui, ce jour-là il n’y avait eu qu’elle et lui. Eux ; les armes ; la mort à portée de lame.
Même avec le recul, Jordane s’interroge toujours de ce qui l’a amenée à finir dans cette posture. Ses mauvais choix, sans doute ; c’est d’ailleurs toujours le cas. Alors en était-ce un de tenir sa langue ? Il aurait été si simple de tirer la sonnette d’alarme auprès de la Garde. Mais la vérité, c’est qu’elle n’a confiance qu’en quelques personnes de l’organisation et qu’à aucune elle n’a parlé d’elle. Ce truc-là, c’est entre eux qu’il se joue, aussi bêtement et factuellement que ce soit.

— Beau gosse ? T’as essayé de me planter la dernière fois. Toute l’ironie, partagée.
“Hm, histoire de substitut phallique : l’un n’empêche pas l’autre.” Millième degré, bien sûr.

Et puisque c’est entre eux, elle ricane en cœur, songe que des deux, c’est son sang qui a coulé. C’est qu’elle se souvient parfaitement des premiers coups, des premières prises. Le corps qui se met en branle, réagit et applique les gestes tant répétés qu’ils en deviennent réflexes. Elle se souvient même de l’instant où, l’espace de quelques secondes, elle a cru avoir la possibilité d’avoir le dessus. Ça n’aura duré le temps de quelques échanges avant que soudainement, en une fraction de seconde, l’évidente et glaçante vérité ne lui saute à la gorge : l’homme face à elle était bien plus expérimenté, efficace et puissant. Et elle allait crever.
Pourtant, elle est là, bercée d’humour, à faire face à un homme qui l’imite et lève les mains, arme à la main. Ce serait si simple de finir le job, bien sûr. Une part d’elle espère que l’issue sera différente, son cheminement de penser l’amenant dans une autre direction. Ou peut être un excès d’égo qui, encore, l’amène à penser qu’après tout, elle sera apte à s’en sortir. Mal sans doute, mais en vie.

— Mais les documents n’ont jamais filtré, donc balle au centre disons. Balle au centre, donc. Un accord très vite conclus. Trop vite, sans doute.

Un demi-sourire mais pas de confiance. Elle baisse les mains, lui aussi, jette un nouveau coup d’œil à la cage d’escalier que son partenaire du jour a vérifié quelques instants plus tôt. Calme.
Que se serait-il passé si ces documents, elle les avaient livré ?

— Pourquoi d’ailleurs ?

Un sourire, cynique, vient parachever la question du type. “Pourquoi pas ?” C’était, à ses yeux, une question plus pertinente. Naturellement, la jeune femme passe en français, qu’il comprend forcément étant donné que les trois quarts des mauriciens parlent cette langue. Et les autres. Créole, anglais, français. Un joli micmac dont ils semblent tous les deux faits sans qu’elle n’en ait de véritable preuve. “J’étais de passage, on m’a proposé un job et je pense que j’étais pas censée rentrer vu le comité d’accueil.” Lui, donc. “J’suis à peu près sûre d’avoir été mêlée à un truc qui me dépasse. Donc première option, c’est de chez eux que je serais pas ressortie, seconde option, ils m’auraient fait monter en grade et j’étais coincée. Or je leur dois rien.” Et certainement pas ma vie.
Le français, noyé d’un mélange d’accents, tombe avec aise entre ses lèvres. Sa langue natale en vérité, mais si son anglais ne souffre plus d’accent depuis longtemps, c’est l’habitude de brouiller les pistes qui s’invite.
Un léger mouvement de menton en sa direction. “J’les aient tes papiers. En guise de bonne foi.” Enterrés dans les steppes russes, falsifiés, transformés, métamorphosés et bloqués par un sort qu’elle seule pouvait défaire. Dans la théorie du moins.

Les lui rendre, c’est perdre un moyen de pression. Elle le sait.

Un instant, le regard de la jeune femme glissa sur l’arme de son binôme, se faisant la réflexion qu’il valait sans doute mieux se protéger ainsi et être attrapé en possession d’un gun plutôt que d’une baguette. De garder une option B, comme ce qui l’avait sauvée ce jour-là. Un souvenir, surtout, de la balle qu’il lui avait adressée et dont elle gardait une trace sur la jambe. Et l’impression, souvent fluctuante, de ne pas appartenir à sa propre vie tant son sens lui échappait parfois.  
Dans un geste, Jordane bloque la porte derrière eux, sécurisant définitivement le toit avant d’ajouter autour d’eux un sortilège de dissimulation. Personne ne les verraient, où qu’ils soient. Le son, seul, filtrerait tant que personne ne franchirait les limites de l’enchantement. “Tu le vois, le type ?” En posant la question, la jeune femme joignait la bordure du toit pour observer les bureaux en contrebas. Le suppôt - surnom préféré depuis longtemps par la jeune femme qui ne leur accordait pas leur fatuité - présumé était intégré dans la préfecture de Cardiff où ils se trouvaient. Le but était de déterminer s’il avait contact ou non avec Hartbrook, un membre identifié du gouvernement dont les idées ouvertement racistes, collaient avec celles des Supérieurs. Pour la première fois donc, observant les lieux, Jordane acceptait de tourner le dos à Aldric. Attendant qu’il la rejoigne, l’ancienne Serdaigle ajoute finalement : “Tu parles d’autres langues ? Autre que celle des flingues je veux dire..” avec un demi-sourire moqueur “… ça peut être plus sécure pour communiquer.” De la même façon qu’elle parlait en russe avec Dorofei s’ils étaient en mission ensembles.


code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Ven 31 Mar 2023 - 15:59


Angleterre | Mi-Septembre 2016
Seul, Aldric aurait déjà décampé de ce toit trop exposé. Mais qui atterrit sur un toit aussi découvert ? Un jour, ces crétins de la Garde auront sa peau avec leurs idées merveilleusement stupides. A croire qu’ils ne réfléchissent pas ; ou s’ils réfléchissent, ils considèrent les films moldus d’action comme référence absolue. L’un comme l’autre, Aldric se demande jour après jour pourquoi il reste aux côtés de suicidaires pareils. Un espoir absurde, sans doute. A trop se poser la question, il risque de se dégoûter lui-même, et dans les circonstances actuelles, il a d’autres chats à fouetter.

Un chaton, plutôt. Siem ne paraît pas très vieille, pas du genre non plus à trop réfléchir. Elle a certes eu le réflexe de lancer des sortilèges de protection, mais aux dernières nouvelles, ces boucliers invisibles n’arrêtent pas les balles. De potentiels snipers auront toujours l’avantage, mais il entend déjà les autres Gardes affirmer haut et fort que la présence de snipers est des plus improbables. Ils luttent contre les Supérieurs, qui méprisent les moldus de tout leur être. Jamais ne s’abaisseront-ils à utiliser les mêmes armes que les moldus ; des armes qui leur apparaissent des plus primitives. Quelle bande d’idiots.

Toutefois, il n’y a pas que les Supérieurs qui représentent une menace. Aldric n’oublie pas les Inquisiteurs, même si leur groupe a volé en éclats. Les Ombres. Ou encore n’importe quel timbré avec un fusil qui aurait envie de répandre le sang. Le danger peut venir de partout à la fois ; tout autant d’arguments pour prouver qu’atterrir sur un toit est une idée des plus stupides.

Vraiment, Aldric s’interroge sur la personne qui organise et planifie ces opérations. Du sabotage inconscient.

— Et tu plantes souvent les beaux gosses que tu croises ?

Un ricanement un peu graveleux. Les circonstances de leur première rencontre ont bien sûr été particulières, Aldric en a conscience. Il est d’ailleurs rare qu’il recroise les voleurs qui pensent mettre leurs sales pattes sur des documents importants. En même temps, les voleurs ne survivent guère longtemps d’ordinaire. Siem est quelque peu une exception, à la hauteur de son comportement intriguant.

L’usage du français le surprend un instant, mais il hoche la tête. Ce n’est pas comme s’il ne comprenait pas ; il a déjà mis les pieds en France, sans parler de ses années sur l’Île Maurice. Cela dit, Aldric a plus souvent parlé créole que français sur l’île, peut-être parce qu’il fréquentait surtout les locaux à l’écart des coins touristiques.

Et même si son français est un peu rouillé avec les années, il comprend sans peine les explications de Siem. Elle en revanche ne paraît pas avoir un français rouillé. Des origines, peut-être ? Après tout, il ne connaît pas grand-chose d’elle. Il ignorait même son appartenance à la Garde jusqu’à ce jour.

Un autre rire lui échappe. Non, en effet ; elle n’était pas censée survivre. Aldric aurait dû la tuer, mais elle l’a pris de court ; une latente qui lui a sauvé la mise. Il espère qu’elle mesure sa chance, et qu’elle n’est pas du genre à la jeter par la fenêtre. Ou à se jeter elle-même par la fenêtre.

— T’es pas aussi stupide que t’en as l’air.

Un compliment, donc. Un geste pour leur bonne coopération au nom de la Garde. Aldric ne tient pas à avoir un couteau planté dans le dos d’ici la fin de la journée. Puis l’étonnement ; une faveur à laquelle il ne s’est pas attendu.

— Tu comptes me redonner ces papiers ?

Il arque un sourcil. Un pas surprenant vers la confiance, alors que Siem a craint qu’il ne l’attaque ici même, sur ce toit à la vue de tous. Savoir qu’elle ne les a jamais utilisés a quelque chose de rassurant, même s’il ignore si elle les a lus ou non. Sans doute. Mais de là à dire qu’elle ait compris tous les renseignements inscrits sur les feuilles noircies par l’encre, c’était une autre affaire. Aldric n’écrit jamais de but en blanc les informations sur un papier qui pourrait tomber entre les mains de n’importe qui ; il code toujours les données. Une habitude prise de Rossignol.

Lorsque Jordane bloque la porte qui mène au toit, Aldric la dévisage avec une certaine incrédulité, avant qu’il ne peste en son for intérieur. Foutus sorciers qui ne réfléchissent qu’à moitié. Foutus sorciers qui ne se reposent que sur leur magie. Pas étonnant qu’ils tombent comme des mouches. Ils ne sont pas là pour commettre les mêmes tares que les Supérieurs.

Aldric n’aime pas les missions de la Garde, en particulier lorsqu’elles sont assignées au dernier moment. Il n’a pas le temps de prévoir, de se préparer, deux choses pourtant cruciales dans le cadre d’une mission d’infiltration.

S’ils évitent les emmerdes pour les prochaines heures, il s’estimera l’homme le plus chanceux du Royaume-Uni – pour la journée.

Pestant donc, il rejoint Siem au bord du toit. Il ne prend pas la peine de lui répondre par la négative, il se soucie plutôt de l’heure. 11h30. L’heure du repas approche.

— Ça dépend. Dis-moi plutôt ce que toi, tu parles comme langue.

Aldric ne propose pas le créole mauricien. Trop reconnaissable, trop évident. Si quelqu’un les entend, ce serait donner à l’ennemi un indice trop flagrant.

— Et au lieu de tenir comme une cible sur un toit, suis-moi.

Ils n’apprendront rien d’utile sur un toit. Ils ont besoin de se rapprocher, d’aller au cœur de l’action pour obtenir leurs renseignements. D’un geste, il fait sauter la protection de la porte et s’engage dans les escaliers. Il jette un regard en arrière pour s’assurer que Siem le suit, puis il daigne lui fournir un semblant d’explications pour éviter de l’entendre râler.

— Si on trouve le resto dans lequel il mange chaque midi, on aura plus de chances de l’observer et de savoir ce qu’on veut. Sauf si ta gueule est connue des Sup’ ?

Pour Aldric, la question ne se pose pas. Il est un sang-pur. Il participe aux soirées mondaines, côtoie ce gratin de la société qui se croit meilleur que les autres. Mais il a l’habitude de se fondre derrière les paraître et de prétendre être un autre. Il saura donner le change. En revanche, avec Siem, les doutes se font plus pressant.
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Jeu 13 Avr 2023 - 14:34
— Et tu plantes souvent les beaux gosses que tu croises ?
“Seulement les plus chanceux.”

La réplique se fait à voix clair, le menton dégagé, l’air paisible. C’est toujours ainsi avec elle, tant que le danger est encore gérable. Plus simple de dealer avec un type armé qu’avec les loupés du cœur et la peur de s’embourber dans un chemin impossible à fuir. Ça, c’est connu. C’est facile. Ça ressemble même à quelque chose qui appartient aux fondements de son être. Des bases rassurantes. Craignos, mais faciles à appréhender. Ce qui est plus dur en revanche, c’est de déterrer le passé. A devoir résumer les choses, Jordane fait court, balaye l’émotionnel, ne considère les faits. Elle y met une distance, rien d’autre à y faire que de considérer l’ensemble avec ce recul nécessaire.

— T’es pas aussi stupide que t’en as l’air.

Pas de réactions. Ni agacement, ni contentement, seulement la neutralité d’entendre la réflexion de la part d’un inconnu. Compliment, mépris, sarcasme, punchline réflexe, volonté d’amadouer. Sans doute un peu de tout ça. Rien d’essentiel, du moins, pour Jordane, qui se contente d’un regard en coin. Pas tout à fait mauvais… pas vraiment avenant non plus. Le genre de réflexions dont elle a l’habitude : jolie blonde, bien jeune, autrefois frêle. Clairement pas la première fois.
Ce qui l’intéresse davantage - bien plus que ce qu’il serait advenu d’elle si elle s’était pointée pour prendre son cachet après sa mission - c’est la réaction du type à sa proposition. Un sourcil levé, l’étonnement sincère, Aldric jauge, mesure. Le mec a vécu pire qu’elle, Jordane n’en doute pas, et n’accorde pas sa confiance. Ainsi le plus simple serait de se débarrasser d’elle, d’évacuer le passé, de balayer ce qu’elle pourrait savoir. Après tout, si elle en avait le pouvoir ou le courage, c’est ainsi que la sorcière penserait.

— Tu comptes me redonner ces papiers ?
“J’peux aussi les encadrer pour les afficher dans mes chiottes, mais la main tendue serait moins évidente.”

D’un simple haussement d’épaule, le second degré se tisse dans ses mots par habitude. Oui, elle pourrait les lui rendre. Pourquoi pas ? L’ensemble ne lui apporte rien après tout. Alors bien sûr, il y aurait l’option du chantage. Garder les documents pour avoir quelque chose contre lui et entrer dans une dynamique d’affrontement. Pas qu’elle l’élimine tout à fait, simplement que ce qu’elle connaît de cet homme ne l’encourage pas à entrer dans un bras de fer. Grande gueule, certes, mais atrocement consciente que sous la carapace, elle n’est qu’une gosse qui affronte bien trop gros pour elle.
Quant à la suite, Jordane se plie seulement aux ordres établis lors de la réunion. Quelques fois déjà, elle s’est éloignée du cahier de route et sait trop bien que sa place à la Garde pourrait sauter bien vite. Identifiée comme trop jeune, impulsive, ayant l’habitude de faire cavalier seule, la jeune femme a été brieffée plus d’une fois pour s’assurer qu’elle suivrait les ordres. Ainsi les premiers mois ont été tendus, plus encore à la suite de la mort de son meilleur ami et frère d’armes, Zach. Impossible, même, de la tenir tout à fait s’il s’agissait de la tenir loin de certaines personnes. Pourtant Jordane est devenue plus discrète dans ses écarts, plus docile, lors des missions. Suivre les ordres devient facile, au fil du temps, ne serait-ce que pour lâcher prise du reste. Et si ce qu’elle estime être des conneries finissent par la faire tuer ? Ainsi soit-il.

— Ça dépend. Dis-moi plutôt ce que toi, tu parles comme langue.

C’est un rire cynique qui accueille la réflexion. “C’est beaucoup me demander.” Beaucoup lui demander à lui, alors ? Beaucoup de pays visités pour le baron du crime ? Une fuite ? Ou bien projette-t-elle simplement un peu trop ?
— Et au lieu de tenir comme une cible sur un toit, suis-moi.

Elle aurait pu lever les yeux au ciel à le voir balayer le cadre établi par leurs supérieurs, aurait pu se tendre à l’idée de sortir des clous ou de recevoir ses ordres de quelqu’un qui n’en as pas le matricule.. Mais dans le fond ça lui va. Bien sûr les lieux sont sécurisés, personne ne les voient, contrairement à ce qu’il semble craindre, mais isolés ici, ils sont loin et à titre personnel, Jordane n’aurait pas travaillé ainsi. Mais elle n’est qu’une enfant, après tout, a-t-on dit au sein de la Garde, quand elle s’est essayée à prendre des initiatives.

De quelques sorts, il démêle ses protections - pas si simple, et pas si mauvaise la gosse - et semble se rappeler qu’il est un sorcier. Peut être est-ce elle, qui s’est bien trop réfugiée dans le monde magique, pour fuir le moldu d’où elle vient. Ainsi Jordane laisse traîner un instant le regard sur ce flingue qu’il tient avec tant de facilité qu’il semble fait de sa chair. Qui est ce type putain ? Puis il s’engage et la française suit sans rechigner, pourtant consciente de l’écart.

— Si on trouve le resto dans lequel il mange chaque midi, on aura plus de chances de l’observer et de savoir ce qu’on veut. Sauf si ta gueule est connue des Sup’ ?

Les sorts fonctionnent encore ici. Aucune crainte, donc, à prononcer ces mots. “J’étais à Poudlard ces trois dernières années.” Séquestration, champs de bataille, violences sur mineurs. La raison, aussi, pour laquelle elle est là : ce type est passé quelques fois à l’école, Jordane saura le reconnaître. “Une élève parmi d’autres. Rousse aux cheveux lisses, avec une frange.” Rien à voir ni avec celle qu’il a rencontré quelques années plus tôt, encore moins à celle d’aujourd’hui. C’est que Jordane est passée du blond au brun avant de débarquer sur le toit. Les cheveux courts, ondulés et une paire de lunettes qui passe de sa sacoche à l’arrête de son nez. Chaque fois différentes, ses traits mêmes semblent éloignés de celle qu’elle est en dehors d’ici, trop habituée des jeux de maquillages, des sortilèges et des potions. Rien de bien dingue et très loin du polynectar, mais ça suffit pour la rendre étrangère à elle-même.  On pourrait croire que ça se limite à ça, mais les mouvements changeront. Rien de rocambolesque là non plus, mais par habitude, la jeune femme a pris le coup d’être autre chose qu’elle-même. De s’adapter aux autres ou à la situation. Non pas pour éviter les dangers que d’autres pourraient représenter, pas comme Aldric ou Edda le font depuis des années. Simplement pour se fuir elle-même, esquiver des proches, susciter le doute pour éviter une conversation délicate. Ou simplement être quelqu’un d’autre, le temps de gérer… quelque chose d’ingérable, justement. “Le danger est limité. Il a dû me croiser dans la foule qu’une ou deux fois.” Sincère, factuelle. Pas le moment ni le lieu de jouer avec le feu.
La peur joue, dans ses veines, sans que rien n’atteigne la surface, alors Jordane suit le mouvement et rajouter sans commenter davantage “Allemand, un peu. Japonais pour ce qui est du langage courant. Russe. Suédois. Isan. Certains créoles…” Le regard s’attarde un instant en s’enfonçant dans la cage d’escalier. Puis pour l’humour ; “Un espagnol rouillé du collège.” Pas si rouillé, à s’y perdre, en vérité, avec ou sans celle qu'elle aime. Tout comme la jeune femme possède des brides ou des bases dans bien d’autres langues. On apprend vite, quand on n’a pas le choix. “Sans doute d’autres.” Comme si elle-même ne savait pas.
“J'te suis.” Une pause. “C'est toi le pro.” Après tout elle n'est qu'une gamine stupide, impulsive et inexpérimentée, c'est ce que tout le monde semble penser à la Garde. Apprendre à exécuter les ordres, tout un défi pour elle, auquel elle se plie depuis que sa place a été menacée. Pas le droit à l'erreur, il parait. Alors elle suit, y compris un type en qui elle n'a aucune confiance et qui projette sans doute encore de se débarrasser d'elle. Une fois les papiers récupérés, peut être. Peut être avant.
Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Mer 26 Avr 2023 - 17:26


Angleterre | Mi-Septembre 2016
Siem est une femme étrange. Elle détonne dans cet environnement, à se demander ce qu’elle fiche dans la Garde ou pourquoi elle traîne encore ses bottes dans le secteur. Aldric n’a certes jamais calculé avant ce jour que Siem était la voleuse d’il y a des années, mais il a entendu parler d’elle au sein de la Garde. Comme avec les soirées mondaines des sang-purs, il a cette sale habitude de laisser traîner ses oreilles partout pour glaner les informations. Sans doute est-ce pour cette raison qu’il est toujours en vie, après toutes ces années ; il n’accorde sa confiance à personne. Même s’il a rejoint la Garde par conviction, il persiste sur le chemin de la méfiance, y compris - surtout - envers ses “frères d’armes”.

Alors Siem n’est pas un nom qui lui est inconnu. Aldric sait ce que les autres disent à son sujet, ce qu’ils lui reprochent surtout. Trop impulsive, incapable de suivre les ordres, un manque flagrant d’expérience… Les remarques négatives ne manquent pas, à croire que la jeune femme est une incapable qui ne brillera jamais avec n’importe quel talent qu’elle possède. Une appréciation qu’il juge désormais erronée, voire complètement stupide. Les membres de la Garde lui ont-ils seulement laissé sa chance ? Ont-ils essayé de dénicher ses véritables atouts afin de les exploiter au mieux, au lieu de lui donner des missions génériques ? Ou ont-ils décrété qu’elle ne correspond pas à leurs standards, et ont classé l’affaire ? Aldric s’interroge, car il connaît ce chaton sauvage. Il a déjà eu un bref aperçu de ses compétences, car elle a réussi à survivre à une rencontre face à lui, et en prime à voler des documents importants. Elle a d’ailleurs conscience de la menace qui plane au-dessus de sa tête, ce pourquoi elle lui a offert de les lui rendre. Malgré les apparences, elle sait mesurer la situation et ses dangers, et prendre des décisions en conséquence.

En vérité, si Siem était guidée correctement, et non réprimée à tout-va comme le fait la Garde, elle deviendrait un chat féroce. Au fond, peut-être que cette mission est l’occasion de lui donner ses chances, là où la Garde échoue depuis des semaines et des mois ? Toutefois, Aldric doute qu’une mission d’infiltration corresponde réellement à Siem - mais elle avait bien réussi à voler ces maudits documents, alors autant ne pas tirer des conclusions hâtives.

Tandis qu’elle le suit dans les escaliers et qu’elle répond à ses questions, Aldric réfléchit à la manière de faire, sans pour autant mettre leur situation en péril. Il se fiche bien de la mission ; leur vie importe bien davantage. Il n’est pas l’un de ces fous suicidaires prêts à donner sa vie pour la cause. Il n’a pas passé des années à fuir pour finalement trouver la mort à cause des Supérieurs.

Il s’arrête toutefois un instant pour se retourner et dévisager Siem. Avec ses cheveux bruns, et des années en plus, les Supérieurs ne la reconnaîtront pas, ce qui lui offre le voile de l’anonymat. En d’autres termes, Aldric peut la faire passer pour n’importe qui dans le restaurant où ils s’installeront. Il chasse toutefois la plupart des langues qu’elle énumère, qui ne correspondent pas du tout à son physique - ni au sien, d’ailleurs. Il réfléchit un instant, avant de se décider.

— Allemand, donc.

Bien que fluide, son allemande est rêche, presque écorché ; une façon de parler assez particulière qui participe à la création d’une nouvelle identité. Il reprend sa descente des escaliers.

— Tu t’appelleras Franziska. Fränze en surnom. Ma fille. Ta mère est allemande, Monica, tes parents divorcés. Tu es de passage à Londres pour tes études. Choisis ton domaine. Tu as choisi Londres pour rendre visite à ton vieux père que tu ne vois jamais, parce que je suis cet enfoiré qui préfère voyager plutôt que de s’occuper de sa famille.

Aldric lui crée une identité au fil de l’eau. Des détails simples, faciles à retenir, et pourtant des plus parlants pour quiconque d’un peu trop curieux. De quoi détourner l’attention et se fondre dans la masse sans sourciller. Pour Aldric, imaginer une nouvelle existence relève de l’habitude, presque du réflexe. Les mots sortent sans réfléchir, et s’agencent entre eux sans le moindre heurt. Il sait ce qu’il fait, sait à quoi il joue. Sans doute en dévoile-t-il trop sur l’instant face à Siem, mais il n’a guère caché son travail de faussaire auprès de la Garde. Il a seulement dissimulé l’usage personnel qu’il peut en faire, ou comment en est-il arrivé là. Toutefois, l’existence de Siem autour de lui se transforme petit à petit en danger ambulant, et ce même si elle a choisi de son plein gré de lui rendre les documents de l’époque. Par la chose des choses, elle engrange les informations à son sujet, et vient tôt ou tard le moment où elle en sait trop sur lui. Les solutions à cet égard sont en revanche limitées ; lui effacer la mémoire engendre trop de risques, alors il ne reste plus qu’une seule option.

Pour l’heure, Aldric la repousse. Il n’en est pas encore là, malgré ce que lui intime la prudence.

Les escaliers touchent à leur fin, tout comme les sortilèges de protection. Aldric jette un dernier regard à Siem, puis pousse la porte qui donne sur l’arrière du bâtiment. Personne dans la rue. Il lui fait signe de le suivre, et ensemble ils regagnent les rues principales. Quelques passants se pressent sur les trottoirs, mais la foule est encore dans les bureaux. Bientôt, les salariés quitteront leurs offices pour s’installer dans les restaurants du coin.

— Alors Fränze, où veux-tu manger ce midi ? Je t’invite.

Aldric ne connaît en rien l’image d’un père, ou plutôt, l’image d’un bon père. S’il prend Rossignol pour exemple, jamais n’inviterait-il sa “fille” au restaurant, même si elle présente d’excellents résultats. Par chance, Rossignol est loin d’être son seul modèle. Il se calque plutôt sur son mentor mauricien, qui a parfois reçu ses enfants dans sa demeure. Des souvenirs fugaces, qui l’aident à consolider son jeu.

Alors, l’air de rien, il s’approche des pancartes qui présentent les menus des restaurants. Il observe les alentours, la décoration de chaque établissement, l’apparence de la clientèle arrivée de bonne heure afin de deviner dans quel restaurant s’installera leur proie. Lequel fait assez chic pour un Sup’ ? Ou peut-être se trompent-ils, et que ce Sup’ cache ses accointances avec des né-moldus, ou pire, des moldus. Aldric balaie cette hypothèse de son esprit ; pas sur le temps de pause du midi, trop visible de tous.

Son choix se porte finalement sur un établissement cossu, dont le nom lui parle ; il est certain d’avoir entendu l’un de ces Sup’ en parler lors d’une soirée mondaine.

— Ça te va ici ?

Comme ils se sont arrêtés depuis plus de deux minutes devant la pancarte, un serveur accoure aussitôt pour les renseigner, et Aldric demande une table pour deux en anglais.

Et l’espace d’un instant, il se demande s’il n’y aurait pas eu un meilleur scénario possible qu’un père et sa fille au restaurant.
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Lun 8 Mai 2023 - 17:30

 Mi-Septembre 2016


Elle ne cille pas, ne tremble pas. Depuis son entrée à la Garde, Jordane a trop sentit qu’on s’interrogeait sur son cas. Pas que personne ne lui ait porté d’intérêt, sans cela elle ne se serait pas entraînée avec Margo ou Sanae, pas plus qu’avec Dorofei. La première et le dernier lui ont montré des marques de respect et de confiance mais dans le lot, il s’agit des seuls. Eux, et Néolina. Pour elle, Jordane est partagée. Elle a gardé le silence sur le débordement que la jeune femme a eu lorsque Kezabel l’a appelée plus d’une dizaine de fois lors d’une mission, alors même qu’elle et Dorofei étaient dans la pire des périodes post-traumatique. Si Jo est impulsive ? Elle l’est. Plus habituée à se la jouer solo et à ne faire confiance en personne, elle s’est pris deux blâmes à son arrivée à la Garde, le premier pour ne pas avoir donné les noms de ceux qui pourraient lui en vouloir - comment retiendrait-elle chacun d’eux ? - le second pour avoir mis un mouchard chez l’un de ces types. Deux blâmes en une journée. Une putain de journée lors de laquelle, encaissant encore la mort de son meilleur ami et frère d’arme, Zach, elle est tombé sur un pauvre type farouchement vexé de Poudlard. Violent, manipulateur et très probablement libidineux, il n’a pas fait que lui reprocher la fin désastreuse de son couple mais l’a emportée dans sa cave pour le lui faire payer. Jordane a encaissé. Heures après heures, jouant l’angoisse et la faiblesse, jusqu’à entrevoir une ouverture et mettre le type à terre. Dorofei l’a félicitée. Pour ne pas avoir paniqué, ne pas avoir montré ses capacités, avoir su se dégager de là et avoir effacé sa mémoire. En revanche, pour la Garde, l’accueil n’a pas été le même. Deux blâmes, donc.
Depuis elle est en général cantonnée aux missions de second ordre : surveillance, vérification, aide, ravitaillement. Quelques infiltrations, plus récemment. Doucement, l’opinion ploie sous le poids de son acharnement. Il faut dire que depuis la mort de Zach puis l’enlèvement de Kezabel et Dorofei, Jordane est sur tous les fronts. Aucun boulot annexe, elle s’entraîne, s’occupe du môme de Dorofei sans l’admettre à qui que ce soit, s’entraîne, et participe aux missions. Le temps libre est un temps d’abandon où l’alcool se mêle aux insomnies et où le sport englue la colère. La vérité c’est que son caractère fermé et son refus de lier des liens ou de prêcher pour sa paroisse la dessert sans doute.

— Allemand, donc.

Le choix s’arrête sur la langue qu’elle maîtrise le moins mais cette fois, Jordane ne fait aucun trait d’esprit. Pas de cynisme, elle acquiesce seulement et cherche déjà dans sa mémoire de quoi déterrer ce qu’elle a acquis à l’école et dans l’enfance, puis durant ces quelques mois qu’elle a passé ici et là avant de bifurquer jusqu’à la Pologne puis la Suède. La Russie ensuite, langue dont elle use sans cesse avec Dorofei pour retrouver sa fluidité.
La conscience du danger que représente Aldric n’a pas changé mais celle qu’elle est se doit d’être mise de côté pour laisser place à la mission. Entrer dans le personnage, avancer. Et puis il y a la peur, qui l’amène à taire ses sarcasmes pour davantage se concentrer et éviter une erreur qui pourrait être fatale. D’autant plus à présent qu’elle n’est que la bleue, la petite jeune à qui on a dit de suivre les ordres des autres.

— Tu t’appelleras Franziska. Fränze en surnom. Ma fille. Elle fronce des sourcils, tique, ne dit rien. Ta mère est allemande, Monica, tes parents divorcés. Tu es de passage à Londres pour tes études. Choisis ton domaine. Tu as choisi Londres pour rendre visite à ton vieux père que tu ne vois jamais, parce que je suis cet enfoiré qui préfère voyager plutôt que de s’occuper de sa famille.

Cette fois c’est autre chose qui lui garde les lèvres closes. A peine Jordane laisse-t-elle échapper un rictus. Oh oui, l’enfoiré de père absent, elle connaît. Une relation père-fille plus ou moins fonctionnelle, en revanche, ça lui échappe. Alors son regard le fixe une seconde de plus et de nouveau, hoche la tête dans un signe d’assentiment.

“Géographie et Aménagement. Je fais du … - comment ça se dit cette merde en allemand ?! - … ping-pong et de l’escalade depuis gamine. Tu me laisse penser que tu me crois quand je dis que je passe mes weekends à la BU. Si j’suis là c’est que j’essaye d’éviter les conflits même si j’apprécie pas la situation.” L’allemand revient, avec une certaine latence au début, puis de manière plus assurée. Un coup d’oeil sur son téléphone et en quelques secondes à peine : “Bayreuth, l’université. La même que sa mère. Et ton job ?”

Elle est devenue factuelle, froide même. Son parler s’est chargé d’un accent allemand non pas subtile mais léger bien que franc. Une seconde, elle s’imagine déjà ceux à qui elle a fait face. Celui-là n’a pas pointé sa gueule l’année passée, lorsqu’elle était encore au château pour vivre les deux dernières attaques les plus violentes et meurtrières. Il l’a croisée pourtant au tout début, il y a quatre ans au total. Quand ils les faisaient encore tous marcher au pas - du moins semblaient-ils le croire - et qu’il a fallu faire avec. La rage est là, avec le reste des épreuves vécues, et ne pointe pas davantage dans le regard vif de la jeune femme.
Il y a un père absent pourtant dans le fond de ses veines. Une mère assassinée. Une sœur trahie. Une autre abandonnée. Laquelle des deux est-elle, Jordane n’en sait rien. La connasse, sans doute.
Alors plutôt que de penser, elle passe une main dans sa sacoche ensorcelée et en sort un petit gilet sobre, presque BCBG. Le genre qui ne lui correspond pas mais tel est l’intérêt.

Lorsqu’un dernier regard lui est lancée, Jordane le soutient sans un mot. En vérité, une question la taraude sans qu’elle ne trouve l’idée même de la prononcer : ça ressemble à quoi, un père et sa fille un midi en ville ?
Mais ça reviendrait à admettre des données sur elle-même et ça, ça n’entre jamais en ligne de compte. Elle s’apprête donc à passer la porte avec lui sans un mot mais l’arrête d’un bras lui barrant le passage avant de quitter la zone de protection. “Mon frère. T’es trop jeune pour être mon père.” Alors ils accordent leurs violons. Mêmes circonstances, frère issu du père absent.

A peine a-t-elle mis un pied dehors que la démarche de la jeune femme a changé. Plus fluide, comme si elle marchait sur la pointe des pieds. Les épaules plus lâches, le corps plus souple. Ainsi, elle devient même élégante, elle sont la stature tend à éclater des gueules à coup de talon. Son pas habituellement sec, voire raide, est devenu féminin et léger. Et son regard d’ordinaire droit et affirmé se fait plus hésitant, docile et volatile.
Être quelqu’un d’autre n’a rien de nouveau.
Après tout, même à la Garde, elle n’est pas elle-même. Siem n’est pas Jo. Jo n’est pas Beck. Beck n’est pas Fränze.

Alors la jeune femme observe autour d’elle, comme si elle découvrait les décors, l’architecture, même les gens. Une bonne excuse, donc.

— Alors Fränze, où veux-tu manger ce midi ? Je t’invite.
“Oh, grand prince !” Grand sourire aux lèvres, regard brillant sans sembler gourde pour autant. Piquante même, d’une certaine façon. C’est comme ça que ferait une petite sœur face à son grand frère d’un probable premier mariage, absent et d’une dizaine d’années plus vieux qu’elle ? Peut être. “Si c’est toi qui paye alors…” Un léger basculement vers l’avant et joue d’une complicité feinte - pas assez pour être celle d’une enfant, un peu trop pour celle d’une jeune adulte mais parfaite pour être celle de la jeune adulte qui tente d’amadouer l’autre et de compenser l’état d’une famille fragile. L’attitude de sa propre sœur - Jordane apaise ce petit mouvement vers l’avant par une attitude plus adulte bien que guillerette tandis qu’elle observe les cartes, note les tables libres, les devantures. Finalement c’est sur un restaurant face à l’immeuble cible qu’ils jettent leur dévolu.

— Ça te va ici ?

Elle le rejoint, passe une main sur son coude comme elle a vu d’autres filles le faire avec leur père ou leur frère - attitude qui l’a toujours agacée mais qui a l’avantage de ne pas être la sienne - se penche sur la carte en acquiesçant joyeusement en allemand auprès de son prétendu frère. L’instant suivant, elle laisse échanger les hommes et se laisse guider jusqu’à une table.
Le serveur la choisie excentrée, impossible d’y voir quoi que ce soit tant elle se trouve recluse dans un petit coin. Alors Jordane joue de la moue, explique qu’elle aurait préféré une table exposée à davantage de soleil histoire d’en profiter avant la fin des beaux jours. Celle-ci par exemple ! Qui offre une bonne vision sur la salle comme sur l’extérieur mais qu’un paravent de végétation cache en partie à la vue des clients. Impossible qu’on place qui que ce soit à côté, les deux tables sont occupées et ils n’en sont qu’aux entrées. Ainsi auraient-ils vue sur la grande table là-bas. Celle qui semble réservée.
La première intervention est en allemand, le temps de capter l’assentiment d’Aldric autant que d’assurer son personnage. Puis la seconde reprend dans un anglais simple mais fluide. Comme quelqu’un dont le père est anglais, qui a dû partager sa langue… mais sans la pratiquer au quotidien si longtemps qu’elle l’aurait pu. Comme elle, donc. La subtilité n’a ainsi rien de compliqué à mettre en œuvre. Jordane et Fränze sont pour l’heure, sur un plan d’égalité qui déplaît à la française.
Sait-il des choses qu’il est censé ignorer ? Réflexion idiote, il n’y aurait aucun intérêt. Pourtant l’interrogation lui serre les côtes tandis qu’elle s’assoit, tous sourires, remercie le serveur puis son “frère” avant de poser regard sur sa carte.

Si elle étudie un instant le menu, Jordane reprend une conversation qui semble naturelle. Une histoire de fac, de galères administratives. Derrière ses sourires et sa complicité feinte si aisée à mettre en place quand elle n’a pas de sens, la sorcière observe un instant l’homme qui lui fait face. Celui qui est armé, qui réfléchi peut être - sans doute même - à se débarrasser d’elle. Derrière le masque qu’il se donne, elle retrace l’homme du passé, l’affrontement, si court soit-il, qui lui a laissé quelques estafilades et lors duquel elle ne se serait sans doute pas sortie si cette fois-là encore, elle était restée en sidération. Elle craint, cette sensation de n’avoir face à elle que des ennemis. Pourtant c’est bien celle-ci qui l’apaise et l’empêche de penser qu’elle ghoste celle qu’elle aime et fait encore une fois plus de mal que de bien.
La gueule de la psy si elle se mettait soudainement à parler et déblatérer tient. “La dernière fois j’ai mangé avec un mec qui a failli me tuer il y a cinq ans, j’ai véritablement envisagé qu’il sorte un gun de sous la table façon pulp fiction. Il s’est fait passé pour mon frère pour repérer en douce l’un des tarés qui m’ont séquestrée dans un château magique pendant trois ans. Ça va vous ?”
Sous couvert d’une blague évoquée entre frère et soeur, Jordane esquisse un sourire véritable à cette pensée.

Pourtant au détour de leur conversation, son regard s’arrête une second en arrière du visage d’Aldric. Cet homme, là, elle le connaît. Il entre, jette un regard circulaire au restaurant et dans ses pupilles brille le dédain. S’il vient celui-là, ce n’est pas pour la gastronomie, et il ne s’agit pas de leur cible. Sous ses côtes, un burin frappe sans relâche lorsqu’elle monte quelques doigts à ses cheveux pour en replacer les mèches. Pour barrer son visage, surtout, le temps que le regard ne passe et que le sien s’arrête dans les prunelles de son coéquipier. Rien d’insistant, à peine le laisse-elle peser. Dans l’idée, ça lui semble suffisant. Il glisse de de nouveau en arrière lorsque l’homme avance tout droit et ignore le serveur qui vient à sa rencontre. Sans aller jusqu’à lui, s’arrêtant sur les drapés de quelques rideaux au loin, Jordane s’assure surtout du coin de l’oeil qu’Aldric a compris le message.
L’homme, lui, disparaît au fond de la salle.



code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Ven 23 Juin 2023 - 14:00

The Shortest Straw


🙤 Angleterre
🙤 Septembre 2016

 ft. @Jordane Suzie Brooks
Leurs identités se tissent au fil des mots. Aldric a donné la première note, et Siem embraie à son tour. Les détails qu’elle apporte à son personnage sont simples, faciles à retenir, mais parlants. Elle ne s’embête pas à chercher quelque chose d’alambiqué pour donner corps à Franzë ; elle sait que rester au plus simple est sa meilleure garantie pour maintenir les masques. Et la Garde la croit empotée et incapable ? Ils n’ont surtout jamais pris la peine de lui donner sa chance. Du coin de l’œil, il contemple une jeune femme en pleine possession de ses moyens, vive d’esprit et capable de rebondir selon les circonstances. Elle prend en main l’identité de Franzë comme si elle était la sienne, change d’ailleurs leur filiation - frère et sœur, pour mieux coller à l’âge, et Aldric ne s’y oppose pas - et joue le jeu. Pour quelqu’un censé n’en faire qu’à sa tête et ne pas écouter les ordres, elle jauge la situation avec une clarté remarquable.

Aldric s’adapte donc, joue finalement le frère issu du même père absent, et fournit les détails manquants. Il n’oublie pas que son visage est connu, et que les Supérieurs ont déjà mis une identité sur ce même visage. L’histoire qu’il se crée doit coller avec ce que leurs ennemis savent déjà. Une cohérence simple, des plus basiques, mais terriblement efficace.

Alors il rectifie certaines notes, en lien avec son autre partition dont Siem ne connaît pas grand chose. Même au sein de la Garde, il ne fournit jamais des détails quant à son identité auprès des Supérieurs.

— Notre père est mauricien. Notre mère n’a jamais voulu de ce mariage arrangé entre sang-purs, et elle est retournée en Allemagne. Il a repris contact avec moi y a quelques années. J’ai repris son business, et je suis venu à Londres en tant que commercial.

Les explications filent, claires et limpides. Ils n’ont pas besoin de davantage, alors ils se risquent au grand jour. Ils s’installent dans un restaurant, jouent le jeu du frère et de la sœur qui se retrouvent après un temps de séparation. A aucun moment il n’a besoin d’accorder un regard silencieux à Siem pour qu’elle rectifie son jeu. Elle s’est véritablement emparée de son personnage, jamais dans l’excès, tout dans la précision et les intérêts de leur mission.

La table isolée évitée, les voilà installés au soleil, dissimulés par un paravent et une pleine vue sur la table réservée. Aldric s’est mis dos à cette table, pour éviter d’être reconnu trop vite ; aussi pour prétexter ne pas avoir vu leur cible. Jouer sur les coïncidences, le heureux hasard, alors qu’il n’en est rien. Il remercie Siem d’un léger hochement de tête quant à son attitude auprès du serveur. Elle a bien joué son coup.

Les yeux tantôt sur le menu, tantôt sur Franzë, tous deux discutent en allemand, de tout et de rien. Ils rattrapent le temps perdu, râlent sur les galères administratives de la jeune femme, tandis que son frère aîné lui fournit quelques conseils. Il lui parle aussi de son travail, qui l’a conduit à s’installer à Londres quelques années plus tôt. Des discussions banales, sans incidence, sans enjeu.

Puis il capte le regard de Siem, fixé derrière lui. Il arque un sourcil, jette un coup d’œil à l’heure. Leur cible les a-t-elle déjà rejoints ? Son instinct lui souffle que non. Le regard de la jeune femme lui murmure que non. Alors qui ? Il l’interroge du regard, n’est pas certain de comprendre, bien qu’il devine une possible contrariété.

Mais il ne lui pose aucune question. Il poursuit leurs banalités en allemand, attend qu’un serveur vienne quérir leur commande ; il demande un plat du jour. Puis le serveur repart, et là, Aldric change le ton de la conversation. Toujours en allemand, toujours de manière légère, comme s’il parlait des amis de Franzë.

— Tu le connais ?

Une question simple, qui n’attire pas l’attention, mais qui attend des réponses concrètes.
(c) Taranys
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Dim 25 Juin 2023 - 2:23

 Mi-Septembre 2016


On aurait pu croire qu’elle ne jouerait plus jamais ce genre de jeux. Être une autre, laisser de côté son identité pour se draper d’une autre. Ce n’était qu’un mécanisme de défense. Un moyen de laisser de côté ses erreurs et ses dérapages. De quoi balayer le passé pour faire place nette au présent. De quoi se donner du courage également. Après tout, la femme qu’Aldric fixe n’est pas Jordane, pas plus que ne l’était celle qui a passé la chambre d’inconnus ou accepté quelques deals véreux à une époque donnée. C’est sans doute la raison qui l’a poussée à ne se présenter que comme “Jo”, à son entrée à la Garde. Puis à présent comme “Siem”, surnom issu d’un passé lointain. D’autres surnoms, parfois. Ici, ailleurs, ça lui donne l’impression que l’inconstance la protège. Que personne ne pourra vraiment la retenir tant ils n’obtiennent rien d’elle.
Et pourtant, à côté, tout l’inverse a lieu. Le coeur bat trop fort, l’affection fait trop mal. Donc oui. Elle compense.

Elle compense même à merveille tant jouer à Fränze  en devient naturel. Pas la première fois, ni dans sa vie, ni au sein de la Garde. Ça n’empêche pas la peur de lui fendre les veines ou l’angoisse de rythmer son débit cardiaque. Mais cette peur n’a pas de sens pour Fränze, alors Jordane tente d’effacer la nervosité et de se contenter d’avancer. Ça, elle sait faire. Une chose après une autre. Ses angoisses à elle peuvent bien attendre. Peut être qu’à force de les remettre à plus tard, elles pourront disparaître.
A croiser son regard dans le reflet de la devanture du resto, il lui semblerait presque ne pas se reconnaître. Le maquillage, les cheveux, la couleur des yeux. Il en faut peu pour changer un visage du tout au tout. Nombreux ont été ceux qui ont même pu la sauter pour ne pas la reconnaître quelques semaines plus tard.

Comment la reconnaître, donc, quatre ans plus tard ? L’homme s’éloigne, Aldric réagit mais ne se précipite pas. Pas plus qu’elle ne le fait. Il n’empêche, l’autre a eu du flair. Pourquoi se retrouver ici ? Dans un restaurant moldu. Pas le genre des gus, même si pour x raison, leur boulot nécessite un contact avec ce monde au travers de la préfecture ou de n’importe quelle industrie.
Concentrée, les pensées se disloquent et la maîtrise de la langue se fait plus délicate.Pas si simple, de jongler avec toutes celles qu’elle connaît ou a connu. Les souvenirs s’estompent vite lorsque les habitudes foutent le camp et sans la Garde et Dorofei pour lui réveiller ses anciens réflexes, la jeune femme n’aurait jamais réussi à tenir la route. Ainsi les mots son simples, les discussions maîtrisées. Et le type ne reparaît pas. Pourquoi ? Il ne bosse pas aux cuisines, si ?

Tu le connais ?

Tout naturellement, sans sembler parler d’autres choses que ses histoires de frasques et d’amis dans une fac où elle n’est jamais allée.
Le regard léger et le sourire facile. Fränze a les paupières légèrement plus ouvertes que Jordane, le menton un brin plus bas, les épaules en avant. Plus joviale. Aldric non plus n’a plus rien d’Aldric. Même elle, aurait envie d’y croire. D’oublier le type qui, face à elle, a brillé d’un éclat bien plus animal des années auparavant. Mais à ces souvenirs-là non plus, elle n’adhère pas tout à fait, toujours marquée par cette impression étrange que rien de ces années là n’est tout à fait réel.

Le sourire se tisse, les gestes miment l’incertitude.

“J’en sais rien. Peut être oui.” Carrément même. “J’ai cru reconnaître le père de mon ex.” D’où sort cet ex dont personne n’a jamais entendu parler ? Il fallait bien trouver un point d’accroche. “ Un sale type, ça m’a fait bizarre.” Pas jojo le type en question. Un Supérieur. “ Tu sais, du genre à se vanter d’être un étalon pur sang… enfin tu vois l’idée.” Un sang pur, donc. Du genre qu’on recherche, mais pas le bon. “Je crois qu’il jouait au foot en national.” ça se dit ça ? Pas sûre. Enfin t’as compris l’idée. Quidditch. T’as compris hein ? “Un vrai balai dans le cul ce mec.” Là t’as compris. “Je l’ai croisé quelques fois à la fac ‘y’a longtemps mais je sais pas trop ce qu’il faisait là.”

Mine de rien, elle observe les lieux. L’homme a disparu derrière le comptoir, dans un petit couloir qui longe peut-être une autre salle de restauration, de réception ou quoi que ce soit d’autre. La cuisine aussi sans doute. Peut être autre chose. Un truc qui ne concerne pas les moldus.
“C’est les toilettes là-bas tu crois ?”

Ah, les filles... toutes des pisseuses.
Doublées de fouineuses.

code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Mar 11 Juil 2023 - 17:21

The Shortest Straw


🙤 Angleterre
🙤 Septembre 2016

 ft. @Jordane Suzie Brooks
Pas la moindre fausse note. La partition se joue et se dévoile, claire et mélodieuse. Malgré tous les reproches de la Garde proférés à son encontre, Siem apprivoise Franzë, s’approprie cette identité comme si elle a toujours été cette jeune allemande aux parents séparés, qui retrouve autour d’un bon repas son frère si souvent absent. Elle ne commet pas d’excès, ajoute une justesse détaillée à son personnage pour lui donner vie. A croire que Franzë est une seconde peau dont elle ne se débarrasse pas, et qui a toujours existé. Aldric imagine déjà quantité de situations où un tel talent profiterait à Siem pour le compte de la Garde. Avec le bon encadrement, elle ferait des merveilles, et serait un atout pour leurs actions contre les Supérieurs.

Si leur mission est une réussite, il entend bien défendre Siem de la sorte, avec leurs résultats à l’appui. Toutefois, pour cela, il faut d’abord que leur cible se présente dans ce restaurant, et que l’autre personne qui distrait soudain la jeune femme ne leur pose aucun problème. Les inconnues se multiplient dans les équations de leur plan, et Aldric préfère jouer la carte de la prudence. Il prend son temps, ne pose aucune question précipitée pour éviter tout soupçon de s’attarder sur leur tête. Et en face de lui, Siem comprend la démarche. Elle adopte le même rythme. Le même ton. Une personne extérieure croira simplement qu’elle parle de ses connaissances de fac. En revanche, Aldric saisit les insinuations et les sous-entendus.

Un sang-pur, donc. Il hoche la tête, se demandant ce qui les attirent tous dans ce restaurant. Il ne se rappelle plus pourquoi il a déjà entendu certains Sup’ parler de cet établissement cossu, et il doute que la seule raison tienne à la gastronomie. Les Sup’ n’iraient pas si loin en province pour un simple restaurant, et ce peu importe le transplanage ou les portoloins.

Et surtout, il perçoit les non-dits de Siem, les secrets qu’elle cache et qui la lient à cet homme. Des secrets qui risquent à tout instant de mettre en péril leur mission, mais d’un côté, Siem ne ressemble déjà plus à la Siem du toit. Pour l’heure, elle est Franzë, cette jeune femme allemande qui profite de ses retrouvailles avec son frère au restaurant. Et Aldric espère qu’elle a assez de jugeote pour ne pas causer d’esclandre, en particulier lorsqu’elle annonce se rendre aux toilettes.

— Sûrement.

Aldric n’épilogue pas sur les indications qu’elle lui a fournies. Cet homme n’est pas leur cible, et il préfère se concentrer sur leur mission. Toutefois, lorsque Siem se lève pour s’éclipser aux toilettes, il garde un œil sur elle, espérant être en mesure d’intervenir si jamais la situation dégénère.

Un serveur leur apporte carafe d’eau et corbeille de pain, mais ne prend pas la commande. Il attend le retour de Franzë, puis il s’éclipse pour accueillir un groupe. Aldric glisse en regard en biais derrière lui. La table réservée. Il reconnaît en un clin d’œil leur cible, qui s’installe en coin de table, avec quatre autres sorciers. Certains visages lui sont familiers ; vaguement. Il en a déjà aperçu deux lors d’une soirée mondaine, sans pour autant les approcher.

Et surtout, leur cible leur offre la raison de leur présence ici sur un plateau d’argent. Le but est de savoir si leur cible entretient des liens avec Hartbrook, un membre identifié du gouvernement aux idées ouvertement racistes. Leur cible mange tranquillement au restaurant en compagnie d’Hartbrook ; que faut-il de plus comme preuve ? Quelques photos, et le tour sera joué.

Aldric jette un nouveau regard vers la porte des toilettes qu’il aperçoit au loin. Il sait que Siem furète au sujet de l’autre homme, mais pourquoi prend-elle autant de temps ?
(c) Taranys
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Mer 12 Juil 2023 - 15:28

 Mi-Septembre 2016


Les carreaux de la salle de bain sont parsemés de motifs géométriques. Ils dessinent de larges formes au dessus des lavabos, empiètent sur la peinture, rejoignent la porte qui y emmène. En silence, Jordane fixe son reflet et se lave les mains sans l’évier. Les traits plus fins, les cheveux noirs qui lui mangent les traits, le maquillage qui change le tracé de ses contours. Vraiment ; méconnaissable. Elle baisse le regard, semble analyser quelque chose sur son ongle quand une femme sort derrière elle des toilettes. Un regard, de quoi retenir son visage.
Un peu plus tôt, lorsqu’elle est arrivée aux toilettes, la jeune femme en a profité pour se tromper de porte : hommes plutôt que femmes. Coup de bol, sur chacune des portes était inscrit un trait d’humour en anglais. De quoi perdre une allemande dont le phrasé n’atteint pas les expressions du pays. De quoi, surtout, lui permettre d’apercevoir une lueur sous l’une des cabines entrouvertes. Vides. La femme qui sort à présent des toilettes en lui jetant un petit sourire pincé était là également, non loin de la porte en question. Soudainement mal à l’aise, elle s’est précipitée vers l’entrée, répétant entre quelques rires nerveux qu’elle s’est trompée, que les toilettes pour femmes sont ailleurs.

Ah ces anglais ! …
C’est sans doute ce que Franzë aurait pensé.

C’est ce qui passe dans son regard de fausse timide quand elle laisse la femme sortir de la salle de bain avant elle.
Doucement, sans se presser malgré ce cœur qui bat à cent à l’heure, l’ancienne Serdaigle ressort d’ici. Aucune mention de l’homme qu’elle a suivi jusque dans les toilettes, pas plus de la femme qu’elle y a croisé à deux reprises : disparus.
En revanche, un autre a fait son apparition. Leur cible, celui qu’elle repère en un instant en passant près des tables jusqu’à rejoindre Aldric qui raccroche son regard dès qu’elle s’assoit.

“C’était bien les toilettes.” Elle pourrait presque le voir lever les yeux au ciel dans son fort intérieur. Et ça pourrait presque la faire sourire. Impossible d’échanger quoi que ce soit de plus, le serveur arrive, prend leurs commandes - pas ce qu’elle aurait naturellement commandé - et repart.

Sans immédiatement reprendre le sujet qui leur importe, la jeune femme interroge le frère de sujets et d’autres sans grand intérêt. Au gré des réponses, elle laisse traîner son regard sur le restaurant, s’arrête plus longuement sur un tableau, les bêtises d’une enfant près du lieu où leur cible est attablée, esquisse quelques sourires maternels - qu’elle suppose maternels - et, l’air de rien, surveille. A chaque mouvement de leur part, Jordane sent son cœur s’emballer et devine ses prunelles se dilater. Alors après un instant, elle arrête. Pas encore au point.
Enfin, lorsque les plats arrivent, elle sort naturellement son téléphone et demande à “son frère” de positionner leurs assiettes au mieux pour une belle photo. Très instagramable. Surtout lorsqu’on vise entre deux clichés leur cible.
Un selfi entre frangins vient compléter la manœuvre. Sa main tremble parfois un peu, l’espace d’une seconde ou deux avant d’être sous contrôle. Ses mains sont moites. Sous contrôle, elle se sait à risque et calme ses nerfs. Les violences de Poudlard ressurgissent par moment. Sur elle, sur d’autres. Celles du passé, tout autant. Celle d’Aldric, quand elle s’approche de lui tout sourire pour fixer l’objectif de son portable. Mais elle fait, les traits détendus, l’air léger.
Dix ans qu’elle bluff. Ce n’est pas parfait, mais ce n’est pas non plus l’œuvre d’une débutante en la matière.
Quant à prévenir d’une zone cachée côté sanitaires, elle cherche encore comment s’y prendre.

La mission est remplie. Ne reste qu’à partir.
Sans esclandre. Sans “initiative personnelle importune”, comme ils disent…

Jordane apprend à suivre les règles. Elle n’oublie pas, surtout, qui elle a en face d’elle lorsqu’elle laisse tomber son cul sur la chaise du restaurant et s’attaque sans faim à son repas.
Joyeusement, comme Franzë le ferait.

code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Mer 12 Juil 2023 - 16:30

The Shortest Straw


🙤 Angleterre
🙤 Septembre 2016

 ft. @Jordane Suzie Brooks
Une mission rondement menée.

C’est tout ce qu’Aldric retient de la suite de leur repas. Siem revient à table sans problème à ses trousses, le serveur leur apporte les plats, et le frère et la sœur discutent de tout et de rien pour rattraper le temps perdu. Rien dans leur attitude n’attire l’attention, ils ne se démarquent pas des autres tables. Même lorsque Siem attrape son téléphone pour photographier les pieds, puis pour prendre un selfie avec son frangin, aucune fausse note ne se glisse dans leur partition. Derrière, à la table réservée, aucun des hommes ne remarque le stratagème, ni se doute que la Garde les espionne.

Le reste de leur repas se déroule sans accroc. Aldric note parfois quelques gestes parasites dans l’attitude de Siem, comme des mains qui tremblent, ou des regards furtifs, mais il les remarque par expérience, parce qu’il connaît le langage corporel. Parce qu’il a passé des années à être sur ses gardes et à se méfier de tout le monde, à observer et à étudier ces petits gestes afin d’anticiper les identités cachées derrière les visages. Alors forcément, la tension qui habite Siem par moments ne lui échappe pas. Elle vacille, puis se reprend. Elle met du cœur à l’ouvrage pour ne pas faillir, et Aldric devine sa volonté de bien faire pour montrer qu’elle est capable de bien faire à la Garde.

Dans son rapport, Aldric compte bien passer sous silence ses antécédents avec Siem, mais il ne taira pas les qualités de la jeune femme.

Au gré de leur discussion, ils terminent leur plat. Un serveur les débarrasse, leur propose le dessert du jour, mais ils refusent. Inutile de s’attarder ici alors qu’ils ont obtenu ce qu’ils cherchaient. Inutile de prendre des risques inutiles. Ils refusent le café également, et ils paient l’addition ; Aldric paie même la part de Siem, même si ce n’est probablement pas à son goût. Il s’en fiche. C’est plus rapide, plus simple, un geste aussi pour le serveur qui n’a pas besoin d’encaisser deux personnes au lieu d’une seule.

Ils quittent ensuite le restaurant, et Aldric songe que, de toute façon, l’établissement n’en vaut pas la peine et que c’est cher pour ce que c’est.

Sans se précipiter, le frère et la sœur déambulent dans les rues du quartier, comme une promenade digestive, et leurs pas les ramènent à l’immeuble de départ. Aldric pousse la porte, commence à grimper les escaliers, mais s’arrête au milieu de la cage d’escaliers. Il préfère discuter là que sur les toits, à la merci de tous, peu importe les sortilèges protecteurs mis en place.

— Beau travail.

Simple, efficace. Sans fioriture. Aldric pèse ses mots. Il reconnaît le travail de Siem, son habileté à endosser un rôle qui n’est pas le sien et à le tenir toute la durée de la mission, sa capacité d’adaption pour recueillir des preuves sans alarmer leur cible.

— Il s’est passé quoi derrière ?

En revanche, l’histoire des toilettes l’intrigue. Siem n’a pas mentionné une seule fois son “ex” après son retour des toilettes, alors qu’elle s’est levée précisément pour l’espionner.
(c) Taranys
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Mer 12 Juil 2023 - 19:58

 Mi-Septembre 2016


Plus qu’à payer, à partir, à rejoindre la Garde. Une mission qui se déroule sans accrocs, presque facile. Ça change, soyons honnêtes. Les informateurs : c’est là le groupe que Jordane avait visé de prime abord. Trop jeune, trop inexpérimentée, on l’a relayée aux activistes le temps qu’elle fasse ses armes, qu’elle prouve sa valeur… et qu’elle déçoive, manifestement, avec son histoire de miroir enchanté planqué chez un Supérieur. Pas de bol, ce dernier aurait pu apporter des données utiles mais le type est parti… et la Garde a refusé d’utiliser cette option. Pourtant les faits sont là : elle est habituée à fureter, disparaître, changer de gueule et passer inaperçu. Pire encore, elle a traîné dans bien des milieux, a déjà ouvert les cuisses pour bien des raisons, participé à de nombreuses magouilles. Bref, les compétences ne sont pas si inexistantes que ça.
Et elle ne le comprend pas, ce recul concernant le miroir ensorcelé. La soufflante qu’elle s’est pris, le rappel à l’ordre, le contrôle qu’il y a derrière. Pas de vague. Même là, avoir été aux toilettes seule pourrait lui être reproché. Ou pas ? En vérité, Jordane n’en sait rien. Le fait est qu’ils ont dérogé aux ordres initiaux dès le moment où Aldric a décidé de descendre du toit. Les initiatives, Jordane les a remballé. Elle n’est plus qu’un bras, un outil. Elle suit, agit, fait. Et pour être honnête, ne pas penser, se laisser glisser, se savoir en danger mais ne plus avoir jusqu’à la responsabilité de sa propre existence… la soulage.
Alors pour l’heure, elle se lève pour le suivre jusqu’au comptoir, laisse le grand frère payer, le charrie en allemand tout en y décochant un léger coup du coude avec l’œil brillant de la frangine qui fait une référence à une quelconque blague commune issue de leur enfance. Suzie, en sous-texte, dans chacun de ses gestes.

Ne pas être soi est parfois si reposant.

Ça la poursuit encore, la laisse un peu plus fébrile à chaque pas qui l’éloignent du restaurant. Mètres après mètres, le retour à Jordane la laisse à penser qu’il y aura dans les minutes à suivre le risque d’une réponse de la part d’Aldric. Jordane reste celle qui connaît son rapport à la pègre… pas simple d’avancer dans ces conditions.

Ainsi, lorsqu’ils s’isolent de nouveau dans l’escalier du vieil immeuble et que l’homme s’y arrête pour poser sur elle ses petits yeux sombres et fixe, Jo sent son corps se tendre, la peur affluer… son regard se planter sur lui, assurée.

— Beau travail.

Simple oui. Si simple qu’il lui semble une seconde que ces deux mots lui échappent. Le retour à l’anglais, l’improbabilité de cette remarque, le décalage entre la peur de se faire égorger entre ces murs et le compliment qui lui est adressé : rien ne colle. Alors oui, ça met un moment à tracer son chemin. Assez pour qu’elle ne réponde pas. Les félicitations, les mots doux… ça n’a jamais été son truc, alors savoir comment réagir lui est toujours peu familier. Surtout quand il s’agit d’un type qui a voulu vous tuer quelques années plus tôt pour une raison qui lui est encore assez obscure.

— Il s’est passé quoi derrière ?
“Un passage ou une pièce. Le type a disparu. Hobble, Hubble, Noble, quelque chose comme ça. Il est passé à l’école quelques fois. Il y a un passage, dans les chiottes du milieu côté homme. Les lieux étaient vides, mais y’a eu quelque chose derrière. Une autre nana y était, elle m’a suivie côté femme et est repassée côté homme quand je regardais ailleurs. Idem : pas une trace. Y’a des trucs sur le mur, façon style graphique. Elle les fixait quand je suis rentrée, ça a peut être un lien. Et la nana savait pas se servir du sèche-main.” Beaucoup de choses qui convergent vers la même idée. “ ’Capable de les reconnaître.” Une info. Un semblant de caution survie également. Pas que ça suffise s’il a décidé de la tuer, mais c’est toujours ça.

Lorsque le silence s’installe, Jordane l’observe un instant et revoit l’homme de ses souvenirs.

“Et maintenant ?”

code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Jeu 13 Juil 2023 - 20:59

The Shortest Straw


🙤 Angleterre
🙤 Septembre 2016

 ft. @Jordane Suzie Brooks
De toute évidence, quelque chose leur échappe. Aldric le pressent. Pourquoi autrement leur cible a-t-elle choisi ce restaurant pour son repas d’affaire ? Pour le standing de l’établissement ? Peu probable. La présentation des assiettes laisse à désirer, les saveurs s’avèrent fades et peu originales. De la cuisine passe-partout, sans couleur, qui convient à l’ouvrier qui a besoin d’une cantine régulière pour les midi - et encore, il trouve le menu du jour cher pour ce qu’il propose. Alors quoi ? La décoration, le charme des lieux ? Il a en effet retenu le critère sur ce critère, ainsi que les intitulés alléchants du menu exposé devant la terrasse. Mais non, il doute que ce soit aussi simple. Ça ne peut pas être aussi simple.

Alors il reste pendu aux lèvres de Siem, à ses explications. Que s’est-il passé dans ces toilettes pour qu’elle mette autant de temps à revenir, sans pour autant causer le moindre grabuge ? Leur cible a certes choisi la terrasse, mais ils sont partis avant elle. S’ils étaient restés plus longtemps, peut-être en auraient-ils appris davantage. Aldric grince des dents. Leur mission s’arrête à ce qu’ils ont fait. Ils ne sont pas censés aller plus loin, peu importe ce qu’ils trouvent. Quelle règle stupide ! Personne ne les avait remarqués. Ils auraient pu attendre, tenter leur chance, mais à coup sûr, la Garde le leur aurait reproché. Il retient son soupir.

Il opine d’un hochement de tête aux explications de Siem. Il réfléchit en même temps, tente de percer le mystère des toilettes.

— Probablement une salle secrète, réservée à leur “élite”. A tous les coups, notre cible s’y rendra lui aussi.

Mais la mission est terminée. Ils doivent rentrer, ce qui n’est pas sans engendrer une certaine frustration chez Aldric. Alors il reviendra, plus tard, au cœur de la nuit, pour étudier ces toilettes et tâcher de comprendre. Il tendra l’oreille aussi lors des soirées mondaines ; peut-être qu’il en apprendra davantage ? Rien ne l’empêche d’essayer d’approcher leur cible en toute innocence lors de l’une de ces soirées, si jamais l’occasion se présente.

Et tandis qu’il réfléchit à un plan, Siem brise le silence avec une question toute simple mais pourtant lourde de sens. Aldric redresse la tête pour la dévisager. Il pèse ses possibilités. Il n’oublie pas qui est Siem. Cette gamine de Maurice, qui l’a pris de court et lui a volé des documents importants. Une gamine qui connaît ses accointances criminelles, du moins dans une autre vie, bien qu’elle n’ait pas ses détails. Une faille dans le récit qu’il conte au quotidien sous le nom d’Aldric O’Phellan, mais une faille qu’il a lui-même jugé insignifiante une heure plus tôt.

— Et maintenant on rentre.

Son regard soutient celui de Siem. Il sait bien que ce n’est pas ce qu’elle attend comme réponse.

— Tu me rends les documents. En échange, je te soutiens au sein de la Garde. Puis on fait comme si de rien n’était. Comme si aujourd’hui était notre première rencontre.

Aldric compte déjà la soutenir et appuyer ses capacités, à condition de bien l’encadrer et de la placer dans le bon domaine, mais ça, Siem ne le sait pas. Alors il place l’argument dans la balance, une gentillesse supplémentaire pour jouer la carte de la bonne foi.

— Et franchement, si j’avais voulu te tuer, tu n’aurais jamais quitté ce toit.

Dès la fin du transplanage, il aurait tiré. Propre et net. Sans bavure. Quand il s’agit de défendre sa peau, Aldric ne se pose pas trois milles questions à la seconde. Il prend des décisions, et agit en conséquence.
(c) Taranys
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Jeu 13 Juil 2023 - 23:19

 Mi-Septembre 2016


Il ne faut pas grand chose pour que la vie bascule. D’un côté, comme de l’autre. Décider de suivre la mission, de mettre de côté sa propre existence. Faire le choix de chercher des foutus papiers, puis de ne jamais les remettre à leur commanditaire. Faire un pas en avant, tendre la main quitte à se faire couper le bras. Aimer. Haïr. Frapper. Fuir. Échouer. Tant de choix, tant de chutes, tant d’embranchements qui l’amènent là, ici, précisément. A discuter avec un type qui estimerait sans doute sa mort comme la chose la plus pratique qui soit. Aucune illusion à ce sujet. Pourtant à mesure qu’Aldric et Jordane se font de nouveau face, elle y songe bien sûr. Que faire d’autre ? Elle pourrait disparaître, là. Chose putain de pathétique. A son image, donc, sans doute.

— Probablement une salle secrète, réservée à leur “élite”. A tous les coups, notre cible s’y rendra lui aussi.

Ils auraient pu rester. Elle y songe. N’a pas la carrure pour faire entendre sa voix dans cette organisation. N’en a ni l’énergie ni la volonté. Elle n’est qu’une gosse. Une bleue. Assez pour suivre ses ordres, à lui, sans l’avoir jamais vu dans la Garde précédemment. Nouveau ? Possible. Pas moyen qu’elle l’interroge, ni sur ça, ni sur quoi que ce soit d’autre.
Ainsi sans doute aurait-elle dû taire la question qui tombe finalement, lourde et cassante, à leurs pieds. Faire l’idiote, passer tout ça sous silence, espérer qu’il ait oublié et passer entre les mailles du filet ne lui ressemble pas.

— Et maintenant on rentre.

Les regards se soutiennent l’un l’autre. Qu’y trouver dans le sien ? Si elle écoutait la peur qui noue ses tripes lorsqu’elle lui fait face, Jordane baisserait sans doute les yeux et se détournerait. L’égo et la vie lui ont appris à faire autrement. Pas de sourire pourtant, un signe qu’il y a en elle autre chose que du rejet vis à vis de cet homme.

— Tu me rends les documents. En échange, je te soutiens au sein de la Garde. Puis on fait comme si de rien n’était. Comme si aujourd’hui était notre première rencontre.

En échange il “la soutient” ? Un stade au dessus de lui laisser la vie et ça, ça fait beaucoup. Ça fait même trop et à son avis, ça tinte comme le son d’un piège grossier. Pourtant la jeune femme se tait, avise. La Garde importe ; elle symbolise même pour elle un pilier qui l’empêche au quotidien de se fracasser sur les rives d’une détresse ingérable. Pour autant, elle n’a ni la force ni la volonté d’y défendre son bout de gras. Encore moins ses opinions.
Quant à la gentillesse ? Refait-là lui sans trembler des genoux, elle songera peut-être à y croire.

— Et franchement, si j’avais voulu te tuer, tu n’aurais jamais quitté ce toit.
“Je sais.” ça ne tremble pas. Ni les mains, ni la voix, ni le regard. Étrangement, face à cette possibilité, Jordane est en meilleure maîtrise de ses propres angoisses. “Tu pouvais faire ça sans moi…” Une photo et sa présence ne présentait plus d’intérêt. Pas pour un type prêt à se débarrasser du premier obstacle sur sa route à coup de TNT. “.. Et sans t’emmerder.” Du peu qu’elle connaît de lui, Aldric ne semble pas du genre à s’encombrer de poids. Et c’est ce qu’elle pouvait être - a peut être été - ; un poids.

“Quel intérêt de faire ça ?” Qu’il s’agisse de la garder en vie ou de la soutenir au sein de la Garde. “ça ressemble soit à de l’humour macabre..” Et elle sera morte avant de reparaître au QG. “…soit à un investissement.”

La réflexion est là, mais n’attend pas de véritablement de réponse ; Jordane se détourne et engage la remontée vers le portoloin. “Les documents, j’te les rends avant le rapport au QG ou tu me laisses repartir et on fait semblant tous les deux que mon “frère” va pas me stalker jusqu’à ce que je les ais récupérés ?” Son regard clair se pose dans le sien. Pas si différents.

code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Sam 15 Juil 2023 - 23:59

The Shortest Straw


🙤 Angleterre
🙤 Septembre 2016

 ft. @Jordane Suzie Brooks
Une fine cassure. L’incompréhension. Siem le regarde presque comme du merlan frit ; ou tout du moins, Aldric a cette impression. Elle peine à intégrer ses dires, ce qu’il sous-entend et promet par la même occasion. Elle reste focalisée sur la menace de mort, palpable pourtant une heure plus tôt, lorsqu’ils se sont serré la main, à faire croire qu’ils ne se connaissent pas. Aldric ne prétendra pas ne pas avoir réfléchi à la question. Il a pesé le pour et le contre, en une fraction de secondes, comme à son habitude. Prendre une décision rapide, sans hésitation, parce que l’hésitation est parfois la plus cruelle.

Il a choisi d’épargner Siem. De lui donner sa chance au cours de cette mission de routine. Parce que c’était le plus simple, le plus arrangeant aussi. Il aurait pu la tuer, maquiller la scène en accident ou en altercation avec les Supérieurs. Mais combien de risques aurait-il pris en ce but ? Combien de risques planeraient encore au-dessus de sa tête des semaines, des mois après ? Un accident ou un meurtrie signifie un interrogatoire, plus la tache indélébile dans son suivi auprès de la Garde, la marque du coéquipier qui n’a pas su protéger son acolyte. Et si jamais ils croisent d’autres Supérieurs, comment justifier que personne n’a connaissance de ce meurtre ? Non, trop de risques à prendre, alors que Siem l’a connu sur l’île Maurice. Tisser un alibi derrière ne se heurte pas à autant de difficultés.

— Ouais. J’aurais pu.  

Aldric ne s’en cache pas. Il n’aime pas travailler en équipe. Trop de risques, trop de paramètres à prendre en compte. Des façons de fonctionner qui ne correspondent pas. Des méthodes qui ne s’additionnent pas. Quand il s’est pointé au QG plus tôt et qu’on lui a annoncé cette mission en binôme, il ne nie pas avoir tiré la gueule.

— Mais ce type connaissait ma gueule. Seul, il aurait pu me remarquer, me taper la discute. J’aurais pu griller ma couverture. Être deux a été profitable.  

Et malgré tout son rejet de l’idée même de coopération, Aldric cerne les avantages de leur duo dans cette affaire. Sans Siem, leur cible l’aurait certainement abordé, et récupérer une preuve aurait pris une tournure bien plus délicate. Il le reconnaît, et salue la performance de la jeune femme dans cette mission. Elle a su s’approprier le personnage de Franzë sans discuter, lui donner corps et vie jusqu’au bout, et ce sans fausse note. Tout n’a pas été parfait, Aldric a remarqué à plusieurs reprises quelques moments vacillants, mais rien de trop flagrant.

Puis la question tombe. Siem ose l’interroger sur ses ambitions. Elle tâte le terrain, se risque à exiger la vérité. Aldric hausse les épaules.

— Faut bien que la jeunesse fasse ses armes.

Les paroles d’Ajay Veerapen cognent dans son esprit. Son mentor mauricien s’impose et répète les mêmes préceptes qu’il lui a adressés des années plus tôt. Siem a du potentiel, et il serait idiot de le gâcher pour si peu.

— Tu me les rends d’ici la fin de la semaine.

Ça lui laisse quelques jours pour les retrouver et les lui rendre. Rien de trop pressant, mais une échéance malgré tout pour marquer l’obligation. Aldric n’épilogue pas davantage, et reprend son chemin jusqu’au toit de l’immeuble.
(c) Taranys
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Dim 16 Juil 2023 - 12:34

 Mi-Septembre 2016


A quel moment sont-ils devenus ainsi ? Si rudes face à la menace. Jordane sait ce dont son adolescence a été faite. Régulièrement elle met de côté, minimise, balaye. Rien de ce qui s’est passé n’est vraiment là, pourtant son attitude trahi chacune de ces expériences. La peur, viscérale, celle qui vous noue les tripes et cimente vos jambes ; celle qui l’a maintenue inerte sur son premier champ de bataille. Tout ça n’est pas loin. Mais leur génération a appris, s’est adapté. A fait “avec”. Ainsi pourrait-elle trembler face au regard sombre de l’homme avec qui elle vient de travailler. La peur est là mais ne paralyse pas. Elle l’amène à considérer ses options, à peser ses mots, à affirmer son attitude. Jordane n’est que le produit des coups et des mauvaises décisions.

En observant son petit jeu, elle se demande dans quelle mesure c’est son cas également. Difficile de supposer de qui est cet homme quand on sait qu’il semble passer d’une identité à l’autre sans en informer qui que ce soit. Quelle est la part de lui dans chacun de ses mots, ses gestes ou ses choix ?
Et quelle en est la part disposée à l’éliminer, elle ?

— Ouais. J’aurais pu. Pas une surprise. — Mais ce type connaissait ma gueule. Seul, il aurait pu me remarquer, me taper la discute. J’aurais pu griller ma couverture. Être deux a été profitable.  Raison pour laquelle elle n’est plus utile à présent. Ou plus exactement, ne le serait pas s’il n’y avait pas eu cette femme que personne ne connaît et dont le visage est à présent gravé dans sa mémoire. Une bien maigre monnaie d’échange, mais une monnaie sur laquelle elle s’est jetée sans hésitation.

Que sa présence soit profitable, voilà bien une nécessité pour elle, donc. Aucune illusion là-dessus.

— Faut bien que la jeunesse fasse ses armes.

Dans un regard en coin, Jordane note la réflexion.

“Aucun intérêt de s’emmerder à affûter une arme si c’est pour l’enterrer dans le jardin.”

Les marches accueillent leur remontée vers le toit autant que le ton factuel de la conversation. Pas que Jordane se détende au fil des mots échangés ; la vie lui a appris à ne pas baisser les armes, à ne faire confiance en aucun prix. Alors si dans sa vie personnelle, la jeune femme apprend, au sein de la Garde, elle se referme.

De ce discours sont extraites bien des données, majoritairement faites pour l’apaiser. Elle entend sans y consentir.

— Tu me les rends d’ici la fin de la semaine.

Une seconde, Jordane s’arrête un pied posé sur la marche suivante. Aldric avance malgré le regard qui s’attarde avant que sans un mot, la jeune femme ne reprenne son ascension. Ne veut-il pas tarder un œil sur elle ? S’assurer de récupérer son bien ? Qu’elle ne disparaisse pas ? Quelle garantie a-t-il ? La suivre pour l’éliminer une fois ses papiers retrouvés, voilà le plan qui lui semblerait le plus sécuritaire. Mais tel n’est pas son choix.
Une façon bien à lui, de faire un pas ?
Jo pince des lèvres, plonge ses mains dans ses poches, gonfle discrètement ses poumons. Une semaine. A sa place, elle lui laisserait cette semaine. Ou disparaîtrait.

“Ok.”

Rien de plus.

***

Une semaine plus tard
Il lui aura fallu bien des nuits blanches pour en arriver là. Brassière, large jogging ; entraînement. La gueule démontée par Margo, comme à son habitude, les muscles bandés et la peau luisante de sueur, Jordane enchaîne les coups, se moque de l’épuisement, pare, frappe. Sa supérieure le sait, le voit ; elle manque de patate. Pourtant l’ancienne Serdaigle insiste, se crame les muscles et le cardio, balance tout ce qu’elle peut sans trace de lassitude. Qu’importe le nombre de fois où la guerrière l’envoie au sol, qu’importe l’acide qui ronge ses muscles.
Les gestes sont mécaniques. Exutoires.
Ça l’a toujours été, le sera jusqu’à la fin.

La deadline est demain, détail qu’elle n’a pas loupé. De nombreuses fois, la jeune femme a imaginé partir, tout larguer. Le perso, les amis, la possibilité de retrouver Kezabel et de passer un cap qui lui semble impossible… mais également la Garde. L’engagement qui est le sien, la bataille qu’elle a fait sienne. Partir. Disparaître dans les ombres une nouvelle fois. Ne plus être qu’un nom qu’on perd au fil des années. Une silhouette indistincte. Lui-même, elle l’a croisé plusieurs fois, songeant qu’il reste, tout autant qu’elle.

Ainsi lorsqu’elle le voit du coin de l’œil passer dans le couloir, Jordane esquive un coup, entre dans le champ de mouvement de son adversaire, balance son poing dans la gorge de sa formatrice. Aldric est là. Pas qu’ils se soient donnés rendez-vous, mais elle s’est montrée dans le coin depuis deux jours, rien d’étonnant à ce qu’il lui donne de quoi le trouver.
La pensée passe. Un choc dans ses jambes lui arrache une grimace et Jo se déporte à droite, tente d’esquiver l’impact, sent les muscles de sa cuisse exploser sous le coup.
“Bien tenté mais ton genou aurait pu y passer.”
Au sol, la jeune femme grimace en écoutant les conseils. Attentive… mais l’esprit déjà vif de l’avenir proche.

Il faudra encore quelques minutes avant que Margo ne reprenne l’entraînement en solo, rejointe par Sanae, et que Jordane ne fuit les lieux, peu incline à échanger de quelque manière que ce soit avec cette dernière.
Une bonne excuse, surtout.

Ça tremble un peu sous les côtes, lorsqu’elle passe la porte. Aldric est seul, dans l’une des salles de réunions. Seuls, quand leurs regards se croisent et qu’elle referme le battant de la porte pour les isoler.
Sans un mot, Jordane resserre l’élastique qui maintient ses cheveux devenus roux en queue de cheval.
Pas un mot de plus lorsqu’elle ramène la petite besace qu’elle traîne partout jusque sur l’avant de ses hanches et y plonge une main. Cette dernière s’enfonce jusqu’à mi-bras et ressort un petit bouquin aux pages cornées qu’elle largue sur la table de réunion, face à lui.

“Tient, le polar dont on a parlé. Page 213, t’as une référence qui devrait te parler.”
Le regard droit, les épaules solides, elle inspire calmement.

Livre ensorcelé, tous les documents y sont.
Qu’a-t-elle dit déjà ?

Un partout, balle au centre.

Un battement de cœur supplémentaire, et la voilà sortie. S'il laisse faire.

- Sans doute fini pour moi -
code by EXORDIUM. | imgs by tumblr


Revenir en haut Aller en bas
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
https://impero.superforum.fr/t6879-jordane-brooks
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 2268
Date d'inscription : 02/10/2011
Crédits : CaptainMarvel
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Alec, Maxence, Oliver, Jessen
Jordane Suzie Brooks
Lun 17 Juil 2023 - 15:12

The Shortest Straw


🙤 Angleterre
🙤 Septembre 2016

 ft. @Jordane Suzie Brooks
Les opinions et les doutes s’affrontent, se confrontent. Où se dessine la fine frontière de la confiance, celle qui tracée dans le sable peut s’effacer dès les premières vagues ? Au fond, Aldric fait un pari sur l’avenir, bien qu’il ait estimé des risques minimes. Un pari sur cette gamine méprisée par la Garde, jugée inutile alors qu’il décèle en elle un potentiel assez important pour qu’il le remarque - et qu’il se donne la peine de lui donner sa chance. Face à d’autres, il aurait tourné les talons sans sourciller, dans une indifférence froide. Au lieu de ça, il lui tend la main, compte la recommander auprès de la Garde pour que ces idiots cessent de la rembarrer et de la prendre pour une idiote.

A la remarque cynique de Siem, Aldric se contente d’hausser les épaules sans s’arrêter. Qu’elle pense bien ce qu’elle veut ; il n’est pas là pour lui tenir la main, encore moins pour la rassurer. De toute façon, elle a assez la tête sur les épaules pour affronter les doutes et aller de l’avant. Si elle ne l’avait pas, elle n’aurait pas tenu son rôle dans ce restaurant alors qu’elle a aperçu une vieille connaissance. Il a bien noté quelques instants de flottement, des indices qui ont trahi le double-jeu, mais il remet les évènements dans leur contexte ; c’était une première, ou presque. Il ne peut guère exiger d’elle les mêmes précision et rigueur qu’il s’impose au quotidien.

Sans mot de plus, ils rejoignent le portoloin qui les ramène à leur point de départ - Aldric songe que transplaner comporterait moins de risques que de laisser un portoloin en libre-accès -, avec cette promesse silencieuse de se retrouver d’ici la fin de la semaine.

֍ ֍ ֍

La semaine passe. La date butoir est pour le lendemain, mais Aldric ne s’alarme pas. Son pari ne comporte pas de risques tragiques, quand bien même ne récupère-t-il pas les documents. C’est sa parole contre celle d’une gosse mal aimée au sein de la Garde. Sa parole, celle d’un occlumens rompu à l’exercice des multiples existences et aux mensonges perpétuels, contre celle d’une gamine qui tente de gagner sa place. Alors il ne s’inquiète pas et laisse venir, un fin espoir dans le cœur malgré tout que Siem respecte sa part du marché.

Il traîne donc ses pieds au QG avec une régularité qui détonne avec son quotidien. Il prétexte des missions, des renseignements variés obtenus lors des réceptions sang-pures ; des raisons et autres explications qui n’ont rien de mensonge. La reprise de l’année scolaire est toujours propice aux rencontres et aux soirées, et Aldric ne les manque pas. Il continuera d’ailleurs ce petit cirque encore une semaine ou deux après avoir récupéré les documents, afin de ne pas éveiller les soupçons.

Même au sein de la Garde, il reste plus prudent que jamais.

Alors quand Siem le rejoint dans une salle de réunion, où il attend quelqu’un d’autre, le dos droit et les épaules solides, il apprécie son naturel et le jeu qu’elle met en place. Pas la moindre mention des documents, encore moins d’un passé commun. La discrétion à l’état pure, celle qui passe entre les mailles de la surveillance et qui n’alerte personne. En son for intérieur, Aldric salue cette lucidité.

Il récupère le livre, le feuillette un instant avec un hochement de tête appréciateur.

— Merci. Je te dirai ce que j’en ai pensé.

Pas un mot de plus. Siem repart comme si de rien n’était, Aldric range le livre dans la poche intérieur de son manteau.

Balle au centre, comme ils disaient sur les toits.
(c) Taranys


Fini également :boom:
Revenir en haut Aller en bas
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
Ajay « Aldric » Tivari
https://impero.superforum.fr/t6785-aldric-o-phellan-carnet-d-adr
Âge personnage : 37 ans
Hiboux postés. : 375
Date d'inscription : 14/01/2023
Crédits : awonaa
Double Compte : Shura, Gaby & Rachel
Ajay « Aldric » Tivari
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Page 1 sur 1
Sauter vers: