AccueilAccueil  FAQFAQ  RechercherRechercher  MembresMembres  GroupesGroupes  S'enregistrerS'enregistrer  ConnexionConnexion  
-28%
Le deal à ne pas rater :
Précommande : Smartphone Google Pixel 8a 5G Double Sim 128Go ...
389 € 539 €
Voir le deal

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Dim 18 Sep 2022 - 23:26
TW : Violence gratuite, meurtre, sang, représentations visuelles.

5 Septembre 2016 - matinée - Lituanie


La nausée lui martelait le plexus, ses mains tremblaient, le talon de son pied frappait nerveusement le taillis de feuilles et de branches qui nappait l’humus de la forêt épaisse. Poings serrés, mâchoire crispée, Alec fixait le sol, le visage étrangement pâle. L’air matinal était encore frais de la nuit, la rosée perlant ça et là dans les fourrés, quelques gouttes échappées des sapins tombaient à rythme irrégulier sur le coton sombre d’un t-shirt beige déchiré. Le corps ne tressaillait jamais lorsque celles-ci l’impactaient en silence. Quoi qu’il aurait bien pu le faire ; qu’importe, Alec ne le regardait pas directement. Son regard passait au travers, arrêté sur les fourrés de fougères jaunis. La lumière était belle à percer au travers des feuillages, à divers endroits comme dans une cathédrale, elle teintait la forêt de pastel. Pourtant au même titre que le corps immobile, les bois s’enfermaient depuis deux heures dans un silence glaçant. Alec ne l’entendait plus. Ni le vide, ni ce qui le comblait atrocement de cris ou de gargouillis humides. Il fixait le balancement des feuilles, aveugle et sourd. Ses sens mêmes semblaient engourdis. Incapable d’entendre les suppliques lointaines ou de sentir le tiraillement de sa peau dans le froid. Ni le sang ni la boue n’accaparaient son attention, pas même les crampes qui heurtaient ses muscles.

Lèvres pincées, enfermé dans un mutisme rude, il n’y avait pour accrocher ses pensées que le balancement régulier d’une fougère, le choc aléatoire des gouttes d’eau et le frisson des feuilles dansant dans la brise matinale.

Pourtant son regard sauta soudainement jusqu’à l’amas de chair inerte. Battant un instant des paupières, Alec ne su s’il était certain ou non de ce qu’il venait de percevoir. Le mouvement, pourtant, repris. L’homme en tenue de travail, happé au sortir de sa salle de bain, à peine habillé de frais gisait-là, quelques heures après la scène. Les os de ses bras apparaissaient au travers du tissu déchiré et Alec eut beau le fixer un moment, il peina à intégrer ce qu’il percevait. Ça bougeait. Ses mains blessées se crispaient bien dans les feuilles mortes, son dos profondément entaillé se souleva même dans un soubresaut comme pour lui confirmer le diagnostic. Il lui manquait une chaussure. Et une partie du crâne. Pas simple pour fuir. La pensée parasite, profondément hors de propos et en décalage des émotions qui lui crachaient sous les côtes… demeura pourtant.

Avec un temps de latence, Alec s’immobilisa. Son pied d’abord, puis ses mains, jusqu’aux muscles de son visage par moment secoués de crispations erratiques : tout cessa. Le masque restait fendu pourtant : Les sourcils froncés, les mâchoires serrées, les muscles tendus, le jeune Rivers semblait avoir cessé de respirer, simplement toute attention profondément tournée vers le blessé qui se tordait d’une convulsion. Il lui fallu alors un temps atroce avant de réagir, de se souvenir qu’il n’était pas toujours spectateur, qu’il avait une présence, un poids sur le monde dans lequel il interagissait. En deux mouvements, son regard sauta jusqu’à la source des bruits immondes, perçant les feuillages pour tenter de repérer l’animal en plein festin avant de lui-même se propulser hors de la souche sur laquelle il était assis, arriver près de l’homme, lui saisir l’épaule et le basculer sur le dos. L’hébétude, enfin, l’avait quitté.

L’homme se tordit, laissant échapper un glapissement rugueux et une seconde, ils se firent face. Il sembla alors un instant à Alec que les chairs lacérées le fixaient bien davantage que l’homme qui les portaient puis chacun tenta d’articuler un mot, une phrase, une idée. Mais rien ne sortit. Pas même l’idée abracadabrante de le passer sur son épaule et de disparaître. Alors, brutalement, le ventre ouvert du type se contracta et se forma un cri au cœur de sa gorge, rapidement étouffé. Une main plaquée sur l’autre, les deux placardées sur ses lèvres, Alec l’empêchait de se manifester. Le mouvement était venu sans y songer, sans l’intellectualiser. Une seule pensée : ne pas rameuter l’animal affamé dont les crocs se plantaient au loin dans les chairs d’un autre homme. Ses doigts se crispèrent contre ses joues, au creux de ses plaies pour certains d’entre eux. Les ongles ripèrent sur la chair abîmée, s’enfonçant tandis que d’un geste, l’ancien Serpentard incitait le lituanien à se taire. Lituanie, oui, voilà dans quel pays il se trouvait. Dans une forêt, quelque part à l’Est. Alec n’était même pas certain de savoir situer précisément la Lituanie sur un globe alors savoir où Azalea les avaient amenés relèverait de l’exploit.

L’homme chercha à le mordre et quelque chose suinta sur les bords de ses chairs à vif et pas une seconde Alec ne prit véritablement conscience de la pression exercée par ses incisives. Son cœur battait à tout rompre, un bourdonnement dans les tympans, un vent de panique dans les neurones. Des lèvres il tenta d’articuler quelques mots, de trouver l’idée à faire passer. Se taire pour lui éviter des souffrances inutiles ? Pour se mettre debout et partir, espérer survivre ? De le laisser soigner quelques plaies ? De le rassurer, lui affirmer qu’il ne lui ferait rien ? De ne pas chercher à aller chercher son mari, celui-ci n’avait pas souffert. D’éviter la zone à l’ouest de la maison où l’animal se repaissait, de courir sans se retourner.

Qu’importe. Sous ses mains, l’homme était mort.

Alec mit un moment avant de saisir l’information. Les narines ne frémissaient plus, la poitrine ne se soulevait pas et plus rien ne pulsait dans l’amas de chairs de sa joue. Lentement, le regard fixe, la pression exercée sur ses lèvres ouvertes s’allégea jusqu’à ce que le jeune homme ne tombe en arrière. De ses sens, ni le fer dans sa gorge, ni le bruissement des feuilles et les gargouillis lointains, ni l’odeur de terre humide et l’âcre relent des corps ne lui vint. Pas plus que le filet épais qui coula le long de ses mains lorsqu’il retomba en arrière.

Il n’y eut rien. Ni en lui ni au dehors. Seul un chaos sourd, une agitation vide dans ses veines. Assis dans les feuilles, Alec eut toutes les peines du monde à détacher son regard du corps avant de se lever pour s’en détourner. Un instant, une hésitation. Puis les automatismes reprirent leurs fonctions et d’un pas mou, il fini par rejoindre la maison au bord des bois.

D’extérieur rien n’évoquait véritablement le drame qui s’était déroulé en intérieur.
Sans poser le regard sur le jardin, obstiné à ne pas noter la bouteille abandonnée sous l’auvent, l’arbre encore dans son pot de plastique, près d’un trou creusé à la périphérie d’un pareterre de fleurs et dont le prix dépassait encore, accroché par une petite bandelette de plastique ou même la photo des deux hommes trônant fièrement dans la véranda, Alec entra. Chacun de ses muscles aurait pu être las, pourtant il n’était que nerfs et crispation. Sa semelle droite glissa sur le carrelage lorsqu’il eut fermé la porte derrière lui et le vibrato strident du caoutchouc lui vrilla les tympans, l’amenant à lâcher un râle sourd qui ne lui sembla pas provenir de son propre corps. La rage, le dégoût, le désespoir y sonnaient comme un concerto pourtant l’ensemble rendait en une note agressive et bestiale. Alors sans trouver quoi que ce soit à faire de mieux que de gueuler face aux photos d’une famille dévorée, Alec se remit au travail. Nettoyer les lieux. Laisser le temps aux autorités, cacher les traces. Il n’était pas certain d’être la personne approprié pour ça mais savait qu’il n’y avait là qu’une manière de lui mettre la gueule en plein dans l’horreur de la situation. De l’empêcher de s’en détacher. Était-ce son seul délire ? Celui des Supérieurs ? L’envoyait-on faire les merdes de ceux qui le débectaient ? L’intérêt même de ces morts ne filtrait même plus au travers du filtre rouge plaqué devant son regard. Il ne cherchait plus, ni à comprendre ce qu’ils étaient ni à entendre quel avantage ce savoir pourrait avoir pour ceux qui les combattaient.

Il y avait du sang, il devait l’enlever.

La magie s’agitait autour de lui, pourtant une éponge à la main, Alec lessivait les empreintes de pattes aussi grosses que sa paume. L’absurdité de ce quotidien immonde lui battait les tempes, ne laissant sa conscience percer que de quelques minutes par moment, l’esprit embrumé le reste du temps. Parfois c’était ainsi, parfois il restait atrocement connecté à chaque instant. Parfois il se battait contre les uns ou contre les autres… et parfois il lâchait. Jamais véritablement certain de la conduite à tenir. Même la géographie des lieux lui échappait, comme s’il découvrait chaque couloir, chaque porte déjà franchie l’heure précédente.

Un sort, un saut qu’on vide, une éponge qu’on change, un autre enchantement et peu à peu, l’entrée reprenait un aspect plus norm…

La conscience ressurgit des brumes. Un grincement avait retentit et le jeune homme leva les yeux comme s’il avait vu un fantôme. En haut des marches, un gosse d’une dizaine d’années le fixait. Des traces rouges sur le visage. Ses mains rougies tenaient une minuscule peluche tout aussi vermeille. Une libellule.

De nouveau le temps sembla s’arrêter un instant, tous deux se figeant les yeux écarquillés, le regard braqué l’un dans l’autre, les corps tendus. Un instant suspendu, prêt à craquer.  Et puis le gosse articula un ensemble de syllabes mâchées qu’Alec mit un temps à analyser comme des suppliques dans une langue qui n’était pas la sienne. Sur les petites joues pâles, de lourdes larmes tombèrent et ses yeux noisettes volèrent d’une porte à l’autre. L’entrée. La véranda. La porte de derrière.

Le couple avait un gosse.
Le couple avait un putain de gosse. Ce môme venait de perdre ses deux pères qu’une tarée était en train de dévorer quelque part dans les bois. Et lui nettoyait comme une sous-merde bien docile les restes de ceux qui avaient été le monde de cet enfant. Alec eut un haut-le-cœur… Et le gosse amorça une course brutale et effrénée.

Sans y penser ni comprendre son geste, brutalement l’adulte fut sur pied, l’éponge au sol, son corps s’interposant non entre le gamin et sa fuite mais entre lui et les deux portes du fond. Un coup de menton, un regard vers la porte d’entrée et le gamin pilait devant lui, clairement paniqué. C’était absurde mais l’idée même de le toucher ainsi sale lui sembla si profondément immonde qu’Alec ne bougea pas d’un poil tandis que le môme reculait. Tous deux se dévisagèrent un instant avant qu’un nouveau mouvement du menton ne brise l’hésitation latente. Lorsque le gosse actionna la poignée, celle-ci cliqueta vainement. Étrangement cette fois le môme n’hésita pas, il pivota de trois quart dans un regard craintif vers l’adulte, attrapa les clefs dans une coupelle de cuivre d’un geste tremblant et le métal teinta. L’instant suivant, la serrure était actionnée. Le suivant, il avait disparu.

Et celui d’après, Alec avait fermé la porte d’un coup de pied, refermé à clef et remis l’objet dans la coupelle.

Il lui fallu un moment avant de reprendre ses esprits, de débarrasser toutes traces de sang autour de lui y compris de ce que le môme avait fini par toucher. L’esprit embrouillé il ne pu s’empêcher de jeter un coup d’œil dans la rue où les hauts lampadaires éclairaient encore le bitume de la zone résidentielle. Pas un bruit, pas un geste où que ce soit. Le gosse s’en était-il tiré ? Baguette à la main, l’homme fini par faire le tour de la baraque avant de sortir. Les sols, les murs, les objets, les photos, la salle de bain ou les clenches des portes ; rien n’avait été laissé au hasard et sa propre minutie lui laissait une nausée ferreuse dans la gorge. Il faudrait sans doute un moment pour qu’on finisse par mettre la main sur les corps des deux hommes perdus quelque part dans les bois. Seul un battement de paupière le sépara de la porte qu’il ouvrit par magie avant de sortir sur le perron du jardin clôturé.

Deux talons sur un paillasson où le dessin d’un cactus dansait dans son pot, Alec se figea. Un frisson glacial dégringolant le long de sa colonne vertébrale. Devant lui, au centre de l’herbe mal taillée, la panthère le fixait.
Un instant, il fut certain que sa grande gueule dégoulinante lui souriait.

Et qu’il avait attiré ce gosse droit vers elle... comme un prédateur rabat sa proie vers un autre.
Revenir en haut Aller en bas
Alec Kaleb Rivers
Break Me If You Can
Alec Kaleb Rivers
Alec Kaleb Rivers
https://impero.superforum.fr/t6334-alec-kaleb-rivers
Âge personnage : 24
Hiboux postés. : 4483
Date d'inscription : 12/05/2011
Crédits : Renard ; [url=https://www.tumblr.com/ellaenys]Ellaenys[/url] & once upon a time & andtheireawoman & queenbrookdavis
Double Compte : Logan, Takuma, Sovahnn, Maxence, Jordane, Oliver
Alec Kaleb Rivers
Page 1 sur 1
Sauter vers: