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[MEXIQUE] One life, One dream ▬ OS

 :: Autour du monde :: Autres Continents
Jeu 25 Aoû 2022 - 15:09



Basse Californie – Mexique
Entre le 9 et le 17 septembre 2016

Jour 1 & 2

Deux jours qu’ils sont partis et les étoiles dans ses yeux de gamin fasciné n’ont pas disparu. Mieux que ça, elles brillent plus fort encore. A peine une semaine qu’il connait ces personnes et les voilà partis tous ensemble dans un périple qui gonfle son cœur jusqu’à le menacer d’exploser. Cinq personnes à bord du bateau laboratoire qui fend les flots tout le jour durant et se repose tranquille à quai le soir :  3 scientifiques, 1 capitaine et lui. Ce gosse dont la passion fait cramer les veines d’une joie que la pudeur le pousse parfois à maitriser. Qu’on le foute à la cuisine ou au ménage il s’en tape, il le fait avec bon cœur parce que rien n’est plus important pour lui que d’engranger tout le savoir et l’expérience que ces hommes et cette femme peuvent lui apporter. Il a briqué le pont sans râler, habitué ces derniers mois quand il était encore en Australie, et le refera autant de fois qu’il le faudra avec la satisfaction du travail bien fait. Parce que c’est le cas, il est bien fait ce travail et même si le boss ne laisse rien transparaitre il a perçu l’éclat dans son regard. Rien que ça c’est suffisant mais lorsque la main puissante du Capitaine s’est abattu sur son épaule pour le féliciter il a senti la fierté faire gonfler son torse il faut l’avouer.
Le trajet a été long mais parsemé de rencontres avec la faune marine locale. Oiseaux, dauphins, baleines, otaries … Toujours quelque chose à voir, à entendre, à sentir. A ressentir, surtout. Par Merlin qu’il est heureux, là, loin de toute l’obscurité du monde à vivre son rêve de gosse. L’émotion lui monte parfois à la gorge et rempli ses paupières d’un peu d’humidité alors qu’il a du mal à réaliser. Dans un coin de son esprit c’est comme s’il entendait la voix de ses parents parfois et peu à peu le quotidien sur terre s’estompe. Téléphone rangé dans la cabine il s’en détache et shoote de ses prunelles tout ce qu’il voit.

Ici les côtes grouillent de vie mais ils sont là pour une espèce en particulier : Le requin tigre. Un des plus dangereux spécimens de la famille des squales. Recensement, balisages, pose de caméra, analyses en tout genre, étude des mœurs, … Le prolongement d’une étude en cours de l’équipe à laquelle il vient se greffer avec humilité. Ils ont tous minimum quinze ans de plus que lui et une bouteille qu’il espère avoir à leur âge mais en attendant il prend des notes, qu’elles soient mentales ou posées dans un carnet qu’il reprend religieusement tous les soirs. Assis à la table après le diner qu’ils partagent tous ensemble et préparent à tour de rôle – sur le papier en tout cas – c’est comme s’ils faisaient ses devoirs et ça lui plait ça aussi. Alan, le boss, lui file aussi des tas de données à remettre au propre dans le logiciel de suivi et le garçon remercie silencieusement son petit ami de l’avoir habitué petit à petit aux ordinateurs. Un peu brouillon parfois il donne bien le change et lentement mais sûrement le fonctionnement des choses devient plus instinctif. Son cerveau tourne à plein régime sous l’effet de la stimulation, le shoot de sérotonine qu’il se prend en fonçant tête baissée dans ce nouvel environnement et tout ce qu’il peut en retirer pose un sourire sur son visage du matin jusqu’au soir.
Le soir, justement, c’est le moment où il relâche son attention et sa concentration pour sombrer dans une fatigue bien plus positive que celle qui lui bouffe de l’énergie bien souvent ces derniers temps. Tout ça n’existe plus dans cette parenthèse hors du temps et après 48h de « silence » où il n’a fait qu’envoyer des messages pour donner des nouvelles à ses proches il appuie sur la touche raccourcis de son téléphone pour appeler William. Allongé sur son matelas qu’il a retiré de la couchette pour le mettre dehors à l’avant du bateau il regarde les étoiles l’arrière du crâne posé sur l’une de ses paumes. Torse nu, caleçon, un genou replié qui sort du sac de couchage déplié, il est aussi calme que la nuit et le tintement des mats des autres bateaux du port le berce. Quelques centaines de kilomètres plus au nord Jackson décroche « Hey. » et la discussion s’installe « Un des mecs avec qui je partage la cabine ronfle comme un porc et de toute façon je galère les couchettes sont trop p’tites pour ma carcasse du coup je squatte le pont. » Un rire bref s’évade de sa gorge et secoue son corps en douceur. Ivan, le Capitaine du Silver Wave, fait presque autant de bruit la nuit que le moteur de son bateau le jour « C’est cool, j’suis bien. » Pas comme s’il avait peur d’avoir froid « Ça s’passe bien à la maison ? » La vie, le quotidien, les potes, lui. Holy, aussi, qui passe quelques jours là-bas. Il ne la connait pas très bien mais a rapidement compris à quel point le lien entre elle et William est fort. A quel point le fait d’être en sa présence fait du bien à la jeune femme. Il ne s’immisce pas dans cette relation, ne cherche pas savoir ce qu’ils partagent. Simple respect pour leur jardin secret, il se dit que finalement ça tombait plutôt bien qu'il s'en aille.
Tranquille il écoute avec attention ce que lui raconte le Californien en se passant une main sur le ventre sans trop y faire attention. Ils lui font du bien ces moments de solitude, il en a besoin alors que la vie en communauté grignote forcément un peu d’énergie « Ils sont là les monstres ? » Lune, Wax et Einstein. Bien sûr qu’ils lui manquent eux aussi et être loin de son chien lui fait bizarre. Les garçons passent en visio et un sourire étire ses lèvres alors qu’il voit le visage de son petit ami. Il le devine dans le canapé, laisse son regard courir sur les murs derrière alors que l’autre se met en mouvement. Heureux d’être ici la maison lui « manque » malgré tout « Salut Holy. » Elle le salue d’un sourire et d’un geste de la main qu’il lui rend et sur l’écran apparait bientôt la grosse tête de Wax. C’est un léger pincement qu’il ressent dans le cœur mais ça passe vite, ça passe dans les rires surtout quand Einstein lèche l’écran et que Lune se barre alors qu’il n’a qu’à peine eu le temps d’apercevoir le bout de sa queue. Chez lui. Chez eux. Un équilibre tellement salutaire et qui lui offre un refuge nécessaire.

A l’oreille et parce qu’il continue d’apercevoir la maison en arrière champ il devine le chemin qu’emprunte William à l’intérieur de celle-ci. C’est dans leur chambre qu’il va s’isoler, sur leur lit qu’il se laisse tomber. L’espace d’un instant l’envie de le rejoindre se manifeste par une douce chaleur dans le ventre. C’est vrai, ils ont vite perdu l’habitude d’être loin l’un de l’autre « J’sens que ça commence à me chatouiller les jambes, j’irai courir demain matin avant qu’on reparte en mer. » Parce qu’il a beau aimer passer son temps sur un bateau il reste malgré tout un animal terrestre – un animal dont le degré d’énergie est relativement élevé, aussi « D’ailleurs j’aurai sans doute pas le temps de repasser à la maison avant la soirée de vendredi. » La Pleine Lune, William n’a pas besoin de sous-titres évidemment « Ça va être un peu short mais je vais me démerder ça ira. Ben m’a filé les coordonnées d’un spot un peu en dessous de Seattle où je pourrais être tranquille, j’pense que j’irai effectivement là-bas ça me branche bien. » Ben. Il n'a jamais dit à Will qu'il était Lycan lui aussi mais ne s'est pas non plus refusé à lui parler ouvertement de cet homme qui lui apporte beaucoup depuis qu'ils se sont rencontrés. Une sorte de secret de polichinelle que chacun respecte et pour ce qui est du reste il a envisagé de changer au Mexique mais l’environnement ne s’y prête pas vraiment. Trop de danger, pas assez de connaissance du terrain, il préfère se fier aux indications d'Osborne avec qui il a été repérer les lieux brièvement avant de partir. Il n’aura qu’à trouver un endroit pour transplaner, surtout il devra trouver une bonne excuse pour fausser compagnie aux autres l’espace d’une nuit. Tout ce qu’il espère c’est qu’il n’aura simplement pas à le leur signaler. Un peu bancal comme organisation mais rater cette opportunité n’était pas au programme « On sera de retour samedi en fin d’après-midi normalement, j’te dirai. » Un peu plus d’une semaine complète loin de la maison mais au rythme de ses journées le temps passe vite. Les deux garçons continuent d’échanger encore un petit moment avant de se dire bonne nuit. Lorsqu’il raccroche un soupir d’aise lui échappe, il envoie quelques photos à Sovahnn, Kezabel et Caitlyn. Morphée vient l'emporter quelques instants après qu'il ait fermé les yeux.

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Enzo S. Ryans
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Enzo S. Ryans
Ven 26 Aoû 2022 - 11:59


Basse Californie – Mexique
Entre le 9 et le 17 septembre 2016

Jour 3

Aujourd’hui il a regardé avec un mélange d’admiration et de frustration les trois scientifiques se mettre à l’eau pour filmer le comportement des requins tigres. Appâtés avec des morceaux de poissons morts les squales ont commencé à arriver par nombre et même si l’envie de les rejoindre s’est fait brulante il s’est contenté d’en observer les ombres sous la surface. Peu de profondeur, une eau claire, il a pu les voir se mouvoir suffisamment bien pour avoir le cœur qui cogne à nouveau comme le tonnerre. Jusqu’ici tout ça tenait du rêve, une envie, aujourd’hui enfin il concrétise quelque chose qui semble lui coller tant au cœur qu’à la peau avec une évidence survenue dès qu’il a pu enfin s’autoriser à penser à demain. C’était là, en lui, ça l’a toujours été et si sa patience est malmenée il laisse exploser en lui chaque sensation qu’il ressent. De la joie, un peu de peur ancestrale à l’idée d’assister à un drame si l’un des squales comprend qu’il peut si facilement avoir le dessus sur un humain, rien que des émotions qui font pulser son sang plus fort encore dans ses veines.
Au-delà de ça les automatismes se mettent en place et le quotidien s’installe. Ils apprennent à se connaitre, ils apprennent à le connaitre. Bien des zones d’ombres qu’il ne peut dévoiler mais son discours est désormais bien rôdé. Né en Australie, une partie de ses études au Royaume Uni où il a rencontré son petit ami qu’il a fini par rejoindre en Californie. Quelques détours pour ne pas donner trop de détail et parce qu’il a la chance d’avoir des connaissances communes avec la majorité des membres de l’équipe on de l’interroge pas vraiment en détail sur son cursus. Ils voient bien à quel point il s’implique, ils ont compris aussi comme il s’est éduqué lui-même sans jamais perdre de vue qu’il est là pour apprendre. D’eux tous. Quand ils ont quitté le port ce matin personne n’a eu à lui demander de sauter sur le ponton pour détacher les amarres ou de relever les bouées de protection dès qu’ils ont pris la mer. Il se donne à 100% et qu’importe le degré de fatigue à la fin de la journée il ne ralentira pas la cadence.

Néanmoins il a parfois besoin de s’ajuster alors qu’il découvre l’aspect un peu plus brutal et invasif de la Recherche. Quand il a dû faire face à la violence d’une capture quelque chose a grincé en lui. Ses mâchoires se sont serrées, il a senti le Loup se débattre comme se débattait le requin ayant mordu à l’hameçon sur lequel un appât avait été accroché. Il en a bouffé des minutes et des heures de documentaire sur le sujet mais y être soi-même et le voir de ses propres yeux c’est différent. C’est l’animal blessé en lui qui s’exprime et la compassion de l’être humain sensible qu’il est mais il ne fait pas de vague, se recentre, s’implique là encore de toute son âme. Il sait qu’ils doivent en passer par là c’est ainsi et que la violence que subit cet être puissant sera furtive. Qu’à lui seul il apportera tellement de données qu’il fera avancer les choses en donnant un peu de sa force vitale à l’humain dans le but d’être mieux protégé. Voilà le débat qui tient lieux et place dans l’esprit du garçon alors qu’à la force des bras Ivan ramène le squale contre la coque à l’arrière du bateau « Attache lui la queue et surtout tu tiens bien. On va le retourner. » Tout va très vite, son cerveau débranche de certaines considérations pour foncer dans l’action. Il ne réalise même pas tout de suite qu’il est en train de poser les mains sur l’animal qui hante ses rêves depuis tant d’années. Un cordage passé à la base de la nageoire caudale il contraste les muscles de ses bras pour immobiliser cette force de la nature, dans sa poitrine son cœur bat à tout rompre sous l’effet de l’adrénaline « T’as ma vie et celle de ma femme entre les mains garçon, pas de pression. » Alan, déjà occupé à faire pression sur l’avant de l’animal pour effectivement le retourner ce qui n’a rien d’une mince affaire vu son poids. Laurie est à l’eau près de l’animal et Arun, l’autre scientifique, prépare le matériel juste derrière eux. Aucun ne tremble, aucun n’a peur, les gestes sont calibrés à la perfection et font montre d’une expérience longue de plusieurs années.
Les requins ont cette réaction étrange du corps lorsqu’ils sont mis sur le dos, ils entrent en catalepsie. C’est la première fois qu’Enzo voit ça de ses propres yeux et la douceur avec laquelle il passe ses doigts sur le ventre et les flancs de l’animal amuse les autres. Il a l’admiration et le respect dans le regard, l’humilité face à une telle force de la nature, sous ses paupières l’émotion est visible « T’en avais déjà touché ? » Le jeune homme prend quelques secondes avant de réagir, secouant la tête pour décrocher de ce moment de stase où le reste du monde n’existe plus. Non, c’est la première fois et il n’est pas prêt de l’oublier.
Calé sur le dos le requin est tranquille, la surcharge sensorielle qu’il éprouve déclenche une sécrétion de sérotonine chez lui. Alan prend le temps d’expliquer tout ça plus en détail au garçon pendant que Laurie caresse l’animal et que Arun fait ce qu’il a à faire. Un prélèvement de peau, de sang, il prend également les mesures du spécimen s’avérant être un « jeune » mâle. Ensuite il fixe sur l’animal une balise GPS puis caméra qui remontera à la surface au bout de quelques heures. Là encore ils prennent le temps d’expliquer les choses et le jeune homme boit leurs paroles sans jamais quitter l’animal de sa paume, presque comme s'il essayait de lui transmettre un peu d'apaisement - pas réellement nécessaire - par ce geste simple. Il n’aura probablement jamais les mots pour exprimer ce qu’il ressent en cet instant « Arun ? » L’Américain d’origine indienne hoche la tête « C’est bon, elles sont fixées. » La concentration revient à son maximum, comme un chef d’orchestre Alan reprend le lead des opérations. Laurie a déjà retiré l’hameçon de la gueule du requin, le jeune Australien ressent un profond soulagement à le voir délivrer de cette entrave « Ok, tout le monde est prêt ? On le retourne. » La corde qui maintenait la caudale de l’animal est déroulée en douceur à mesure que ce dernier est roulé sur son flanc, il lui faut quelques secondes pour retrouver ses esprits et en un éclair, dans un éclat d’eau en surface, il disparait dans les profondeurs.

Enzo reste de longues secondes immobiles à fixer l’endroit où le requin a disparu, le cordage entre ses doigts, le silence comme compagnie « Ça va ? » Presque un sursaut quand Laurie pose sa main sur son bras. Il hoche la tête, incapable de formuler le moindre mot. Elle s’amuse de le voir comme ça, un éclair de tendresse traversant son regard alors qu’elle lui laisse le temps d’atterrir « J’suis pas certain de pas être en train de rêver. » Et pourtant, non, il ne l’est pas.
Après avoir poursuivi leur travail ils passeront un long moment à discuter tous les deux, elle lui parlera de cette manière douce avec laquelle on peut plonger le requin en catalepsie en le caressant à des endroits bien précis, de ses expériences les plus marquantes, de son fils aussi qui a le même âge que lui mais semble être totalement différent.

Lorsque Morphée vient le chercher à la nuit tombée il l’emporte dans un sommeil profond mais l’impatience d’être au lendemain pose un sourire sur ses lèvres alors qu’il sombre sous les étoiles.

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Enzo S. Ryans
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Enzo S. Ryans
Ven 2 Sep 2022 - 14:45



Basse Californie – Mexique
Entre le 9 et le 17 septembre 2016

Jour 4

La piste de terre est accidentée, des cailloux de taille diverses roulent parfois sous les semelles de ses chaussures mais il garde l’équilibre. Ce qui devait être un simple footing matinal se transforme en trail dans les hauteurs des collines au-dessus de la ville où ils sont amarrés depuis plusieurs jours désormais. La végétation ici n’est pas tellement différente de celle où il vit désormais et alors que le soleil se lève en douceur il a déjà croisé le chemin de plusieurs espèces d’animaux. Du serpent qui se dérobe dans la terre poussiéreuse au lapin qui disparait entre les épines en passant par un troupeau chèvres n’ayant qu’à peine relevé le nez pour le regarder passer. Des cactus, de l’herbe sèche un peu partout formant une sorte de maquis dans lequel il n’ira pas s’aventurer, on est loin de la verdure du Victoria et l’absence de massif plus important de végétation le conforte dans l’idée d’aller passer la Pleine Lune ailleurs. En contre bas la mer commence à s’illuminer sous la lueur du jour, il entend le ressac et devine une colonie d’otaries non loin de là.
Son cœur cogne dans sa poitrine, son souffle est régulier, dans ses oreilles pas de musique ce matin il avait plutôt envie d’écouter les bruits de la nature. Le Loup s’agite gentiment et chaque jour un peu plus mais ne se manifeste pas par autre chose qu’un besoin de se dégourdir les pattes auquel il répond depuis la veille. Passer la journée sur le bateau en pleine mer ou près des côtes n’a rien d’un supplice bien au contraire mais malgré un léger mal de terre lorsque ses pieds touchent à nouveau le sol il ressent ce besoin de pousser son corps dans l’effort. Alors c’est à peine le jour levé qu’il offre à son organisme de quoi se satisfaire quand personne encore n’a mis le nez dehors sur le Silver Wave. Un moment qui n’appartient qu’à lui qui plus est, quelque chose de nécessaire là aussi.

Vingt minutes plus tard, souffle un peu plus court et mains sur les hanches il retrouve les planches de bois du ponton auquel est amarré le bateau qui lui tient lieu de résidence depuis quatre jours et c’est le regard perplexe d’Ivan – le Capitaine – qui l’accueille « Vous avez beaucoup trop d’énergie vous les jeunes. » Il lève les yeux au ciel, un rire amusé secoue le haut du corps de l’Australien. Bras levé il passe son poignet sur son front et roule des épaules alors qu’une profonde inspiration lui permet de réguler sa respiration. Une main posée sur l’un des poteaux bordant le ponton il désigne le pont du bateau « Tu peux me jeter le sac sur le banc là s’il te plait ? » Ivan fait un demi-tour sur lui-même avant de trouver l’objet en question et le lui balancer par-dessus bord « Merci. » Le geste reflète la puissance de l’homme qui se tient contre le bastingage, le genre de type a qui vous n’allez pas chercher les emmerdes sous peine de finir comme une voiture à la casse : En cube de quelques centimètres carrés. Pourtant quand on apprend à le connaitre on découvre un homme certes un peu brut de décoffrage mais profondément calme et humain « J’ronfle si fort que ça ? » Enzo baisse le regard une seconde mais sur le coin de ses lèvres s’étire un sourire de sale môme qu’il tente de contenir comme il peut. Il a pris ses marques, l’assurance revient petit à petit et le gosse timide sort de sa coquille « J’risque ma place à bord si ma réponse te plait pas ? » Juste un peu de provocation, un silence d’une seconde ou deux et il se prend un chiffon en pleine figure dans un éclat de rire avant de disparaitre derrière les panneaux de bois d’une des douches du port.

Lorsqu’il en ressort il se sent léger, les muscles calmés par l’eau chaude, les cheveux propres en sachant pertinemment qu’ils auront rapidement de nouveau le goût du sel. Bermuda, T-shirt, pieds nus, il remonte à bord du Silver Wave et descend balancer ses affaires dans la cabine avant de remonter sur le pont pour filer un coup de main à Ivan sur diverses taches. Vingt minutes plus tard le café chauffe tranquillement dans la cafetière, ils sont plus ou moins tous autour de la table du petit déjeuner alors que le soleil commence déjà à taper. Sa peau est plus bronzée encore qu’avant son départ, sur ses joues la barbe de plusieurs jours le vieillit de quelques années. Arun lit le journal, Laurie est en pleine discussion avec Ivan et Alan boit son thé un peu plus loin sur le pont. Un fruit dans une main, le téléphone dans l’autre, Enzo répond à quelques messages sans s’attarder sur les actualités auxquelles il pourrait avoir accès par internet. Pas envie. Pas ici. Pas dans cette bulle hors du temps et du reste du monde. Chez lui la vie semble suivre son court tranquillement, un rire tendre secoue ses épaules alors qu’il reçoit une photo de Lune dans une position digne d’une contorsionniste professionnelle. Le manque est une caresse légère sur son cœur, il aimerait retrouver la douce chaleur de ce cocon qu’ils se sont fabriqués mais ne veut pas pour autant quitter l’endroit où il se trouve. Ça serait simple pourtant, un aller-retour en vitesse grâce à la Magie et le tour est joué mais l’idée de partir une semaine entière ne lui déplait pas. Ça fait du bien parfois de voir autre chose, de vivre pour et par soi-même. Tactile et câlin il ne s’endort jamais sans penser à William mais ils ont vécu un an chacun à l’autre bout de la planète alors ça ne les effraie pas d’être séparés quelques jours « J’espère que ta combi est prête, j’vais avoir besoin de toi à l’eau aujourd’hui. » Occupé à répondre une connerie à l’un de ses potes il entend mais ne réagit pas tout de suite. Ça lui prend quoi ? Deux secondes, peut être trois, avant de relever les yeux pour les poser dans ceux d’Alan désormais debout à côté d’eux. Le corps comprend avant l’esprit, son cœur s’emballe et cogne sourdement dans sa cage thoracique. Arun, Laurie et Ivan ne disent rien mais un sourire flotte sur leur visage à tous les trois. Est-ce qu’il est en train de dire que lui, le newbie, le môme fasciné, va pouvoir aujourd’hui plonger avec l’un des plus beaux prédateurs des océans ? Que sous la guidance de ces hommes et cette femme plus que qualifiés il va pouvoir réaliser ce rêve auquel il songe depuis si longtemps ? La bouche entrouverte il s’est arrêté au milieu d’un message sans l’envoyer, l’écran de son téléphone redevient noir « Hey oublie pas de respirer petit. » Ils éclatent tous de rire, s’il les dépasse quasiment toute d’au moins une tête ce « petit » sonne toujours comme un truc d’appartenance à ses oreilles.

¥

Les consignes sont claires, nettes et précises. Alan comme Laurie lui explique en long, en large et en travers, avec une insistance si ce n’est essentielle au moins compréhensible, les choses à respecter absolument pour la sécurité de tous. Y compris celle des squales. Non loin des côtes cette fois ils se sont arrêtés près d’un gouffre sous-marin où de nombreux requins viennent se nourrir et se reposer. L’eau n’est pas profonde, claire, le fond blanc parsemé de rochers laisse apercevoir quelques formes brunes qu’ils identifient comme des requins nourrices – espèce peu dangereuse, absolument pas agressive mais capable d’apprendre l’humilité à l’humain s’il devient trop envahissant. Pas qu’ils ne soient pas intéressant mais ils ne sont pas la cible de l’équipe aujourd’hui, patience étant vertu tous semble confiants sur l’arrivée imminente de quelques Tigres.
Le fond se trouve à une quinzaine de mètres de profondeur, dès qu’ils sont tous équipés – à l’exception de Ivan resté sur le pont en surveillance –  et que le réglage des bouteilles est effectué ils se mettent à l’eau. La sensation de plénitude qui envahit l’Australien est immédiate et alors qu’il reste concentré et attentif aux des consignes des scientifiques expérimentés qui l’accompagnent le bonheur de se rapprocher petit à petit des squales fait vibrer son cœur. Il a une préférence c'est vrai, les requins blancs auront peut-être toujours ce petit quelque chose en plus à ses yeux, mais habitué des dauphins ou autre créatures marines c’est la première fois qu’il se retrouve si près et surtout en immersion parmi eux. Les nourrices sont en somnolences et à l’exception d’un ou deux individus plus curieux que les autres mais à mesure que les minutes s’égrènent d’autres silhouettes apparaissent dans le périmètre autour d’eux. D’abord rien que des ombres mouvantes dans l’immensité bleue puis les contours se font plus affutés, plus francs. Les plongeurs se font signes, Alan pointe du doigts un individu plus imposant que les autres alors que Arun braque sa caméra partout où il y a du mouvement. Ils sont deux à filmer ou prendre des photos dans le but d’identifier les spécimens. Chaque détail compte. Une cicatrice à un endroit bien spécifique, la forme de la dorsale, le dessin des rayures sur leur flanc, un accro à la caudale ou une tache sur la peau sont autant de signes distinctifs. Car non, ça n’est pas une plongée pour le plaisir et chacun ici à un rôle bien défini. Chacun veille sur les arrières de l’autre.

Le royaume du silence résonne des battements de cœur du garçon qui s’abandonne à ce moment hors du temps. Tachant de garder le contrôle de sa respiration pour ne pas consommer trop rapidement l’air dans ses bouteilles il se concentre pour conserver son calme. Autour d’eux des requins de plusieurs espèces, quelques poissons curieux puis cette explosion de couleur dans les récifs fait montre de toute cette vie que l’on ignore de la surface. Lorsque Alan lui fait signe de ne pas bouger il se fige, une femelle Tigre passe si près de lui qu’il aurait pu la toucher s’il se l’était autorisé. Ça viendra, plus tard, lorsque les phalanges du jeune homme glisseront sur cette peau étonnement douce il le ressentira jusqu’à l’extrémité de ses orteils. Ô comme il se sent si petit, si humble, pourtant prédateur au milieu d’autres prédateurs. Ici il n’est pas l’animal, il n’est pas cet énorme Loup capable de briser la colonne vertébrale d’un chevreuil sans trop d’effort, il n’est rien d’autre qu’un humain ayant la décence de se savoir invité – et accepté – dans un élément où il ne règne pas en maitre.

Une fois remonté il n’aura pas les mots et sous le regard amusé du reste de l’équipe il ne pourra que sourire sans chercher à masquer son émotion. Comment exprimer ça auprès des siens ? Compliqué. Et cet étrange besoin de garder ça pour lui quelques heures, de rester dans ce calme silencieux qui n'a nul autre pareil. Juste le temps de revenir sur terre, dans tous les sens du terme.


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Enzo S. Ryans
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Enzo S. Ryans
Lun 5 Sep 2022 - 19:55


Basse Californie – Mexique
Entre le 9 et le 17 septembre 2016

Jour 5 & 6

Jour 5 & 6

« Tu connais Ocean Ramsey ? » Aujourd’hui le Silver Wave est rentré tôt au port, alors que le soleil décline tranquillement le jeune homme est occupé avec Ivan dans la cale. Des quatre autres personnes à bord c’est avec lui que l’Australien a noué le plus de liens, une sorte de feeling qui n’a pas besoin d’explication. Il s’entend avec tout le monde mais entre ces deux là se trouvent moins de barrières qu’avec les trois autres. Pas le même respect, pas la même admiration, un truc plus bourru presque fraternel même si le plus âgé pourrait sans doute être son père. Cette fin d’après midi ils sont occupés à faire le tour du bateau pour vérifier que tout fonctionne correctement. Remplir les cuves, resserrer quelques écrous, faire une vidange ou réparer un truc ayant souffert des jours passés en mer. Enzo en apprend autant avec lui qu’avec les scientifiques, il s’éclate tout autant et rempli d’autant plus de case à son propre savoir faire. La mécanique ça n’est pas son domaine de prédilection et ce pour des raisons évidentes mais après avoir passé quelques après midi à bosser avec Mateo sur sa bécane ou simplement en découvrant la façon de fonctionner de la partie moteur – entre autres – de son voilier il étoffe chaque jours son catalogue de connaissance.
Les mains pleines de cambouis il retiens une courroie qu’Ivan vient de nettoyer et qu’il s’apprête à remettre en place « C’est une question rhétorique je suppose ? » Amusé il cherche le regard du grand colosse d’origine Russe. Il a eu beau chercher une similitude avec Caem – ou même Cameron par extension – il n’en a trouvé aucune, réflexe un peu stupide mais que tout le monde semble avoir inconsciemment ou pas « J’vais pas mentir j’suis un peu amoureux d’elle. » L’autre homme écrase un rire grave et tend la main, Enzo y dépose la courroie avec un sourire amusé sur le coin des lèvres. Une femme qui murmure à l’oreille des requins ? Blonde en plus, et plus âgée que lui … Elle semble clairement sortie droit d’un de ses fantasmes autant l’admettre. Il aurait sans doute du la découvrir bien plus tôt s’il n’avait pas grandi dans un milieu où la technologie n’existe pas ou très peu mais mieux vaut tard que jamais.

Une demi heure plus tard les deux hommes remontent sur le pont, le garçon enchaîne en nettoyant le pont dans une sorte d’enchaînement de gestes réflexes tenant presque de la méditation. Arun est parti en ville de son côté, Laurie et Alan prenne un verre avec un ami au bar juste à côté et ce sont leur voix qu’il perçoit se rapprocher à mesure qu’ils reviennent vers le bateau. A l’approche de la Lune ses sens sont de plus en plus aiguisés, l’esprit et le corps bien occupés il n’a pas tellement le temps de s’arrêter sur les réactions de son corps. Possiblement les ordres deviendront de plus en plus compliqués à accepter mais ici personne ne joue au petit chef alors aucune raison pour que ça se passe mal.
D’un geste de la main il les salue sans pour autant s’arrêter, ils ont avec eux un autre homme qu’Enzo devine être l’ami en question. Il n’a pas retenu son prénom, peut être pas vraiment écouté non plus. L’ont ils seulement prononcé ? Ils vivent ensemble sur ce bateau mais personne n’a de compte à rendre de ces allées et venus tant qu’ils sont à quai et que le boulot et fait – ce qui l’arrange bien pour ce qui est de la Pleine Lune imminente. Il leur a déjà expliqué qu’il rejoindrait une bande d’amis descendus en vacances en Basse Californie avant de retourner à l’université, personne n’a cherché plus loin.
Lorsqu’Alan pose une main sur l’un des piliers du montant il interpelle l’Australien « Hey gamin, ça te dit de passer la journée avec Juan demain ? » Il désigne son ami d’un signe de tête « Il emmène des touristes dans le golfe. » Bahia de Los Angeles, c’est ce qu’il en conclus. Le paradis des plongeurs, de l’autre côté de la presqu’île. Ils ont bossé non stop depuis leur arrivée et la journée de demain était en principe réservée à la paperasse et au tourisme. Ce coin du monde il en a entendu parler mais n’y a jamais mis les pieds. Lorsqu’il a débarqué au Mexique un peu plus tôt dans l’année c’était directement sur le continent, de l’autre côté qui plus est. Son regard se pose un instant sur le fameux Juan qui le salue et lui adresse un sourire, un homme d’une quarantaine d’années à première vue. La méfiance est là même si rien ne transparaît dans sa posture ni son regard, partir à l’aventure avec un inconnu … il se souvient que c’est précisément ce qu’il vient de faire ou presque finalement. Réflexe de survivant, de traumatisé, toutes les merdes qui se produire traverse son esprit en un battement de cœur malgré tout. L’instant d’après il chasse ces pensées de son esprit « Carrément. » Rater une occasion pareil ? Il le sait, il le regrettera « Alors prends tes affaires, tu vas dormir à la maison ce soir ça sera plus simple. » L’accent hispanique de Juan tranche dans son anglais, ça lui rappelle la famille de Mateo. Son regard passe de Juan à Alan puis Laurie, tous son amusé par l’étincelle dans son regard de gosse. Dix minutes plus tard il descend sur le ponton avec son sac sur l’épaule – non sans avoir passé un coup de fil rapide à William pour le prévenir « Merci c’est super cool. » Juan claque gentiment sa main sur son épaule, Enzo se retrouve embarqué pour une soirée à la Mexicaine où il ne comprendra qu’un mot sur quatre et si le réveil le lendemain est un peu difficile il en prendra pleins les yeux tout au long de la journée. Trop tôt dans la saison pour les requins baleines malheureusement il aura eu la chance de voir un pod d’orques, des raies mantas et quelques baleines à bosses émerveillant son âme de gosse qui ne se lasse jamais d’un tel spectacle. Otaries et tortues seront elles aussi au rendez vous, la silhouette d’un jeune requin marteau passera sous la coque du bateau.

De retour à bord du Silver Wave le soir après une journée en mer et quelques heures de voiture – après des années de lute il parvient désormais à être relativement serein à bord – il s’écroule à peine le repas terminé.

▬ To be continued ▬
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Enzo S. Ryans
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Mer 14 Sep 2022 - 16:35


Basse Californie – Mexique
Entre le 9 et le 17 septembre 2016

Jour 7, 8 & 9

C'est cette ombre qui me suit du lever jusqu'au coucher du soleil
Une ombre discrète mais fidèle qui me lâchera seulement le jour où je m'en irai

Lombre

Il le sent, là, dans chacun de ses nerfs. Ses battements de cœur comme compte à rebours la nature profonde et puissante de l’être sauvage qui trace un sillon en son sein, s’éveille. Lentement, de plus en plus lourde, chaque heure plus impatiente que la précédente. L’esprit ailleurs, les mains nerveuses, le regard rivé sur le soleil et sa déclinaison. Et s’ils n’arrivaient pas à temps ? Il connaissait l’enjeu pourtant mais s’est lancé dans ce coup de poker avec défiance. Comme un effet miroir à son for intérieur la mer est agitée aujourd’hui, chaque fois que le Silver Wave claque sa coque contre la surface de l’eau après avoir passé une vague la douleur irradie sous sa peau. Sensible, intouchable à un certain point, heureusement il n’en est pas encore là et bientôt le soulagement envoie son message partout dans cet organisme aux abois.
Vient toujours le moment où l’humain atteint ses limites d’être terrestre. Il a beau aimer l’océan aussi facilement et instinctivement qu’il respire en lui cohabite deux entités dont l’une préfère sentir ses quatre pattes percuter l’humus. Avide de solitude et de silence, son organisme réclame le feu de la traque à laquelle il s’abandonnera bientôt. S’il a une pensée et quelques inquiétudes envers les autres lycans elles s’évaporent à l’inspiration suivante, son être tout entier a réclamé presque violemment cette nuit où rien ni personne ne viendra interférer. Une nuit pour retrouver l’essence même de ce qu’il est, un tête à tête avec l’animal sans aucune considération humaine. En tout cas de celles qui le plongent régulièrement dans le stress, la colère et l’angoisse ces derniers mois. Si le manque et l’envie semblent à vif il n’y répondra pas non plus, d’une part parce qu’il n’en a pas le temps ensuite parce qu’il n’a pas la volonté de laisser ses émotions humaines prendre trop de place. Amplifiées mais mises de côté, voilà comment il a formaté son esprit en se plongeant lui-même dans une sorte d’hypnose.

Une paix de l’âme chahutée par le temps qui passe.

C’est dans des gestes minutieux qu’il a préparé ses affaires et tandis qu’ils se rapprochent du port son regard se pose au-delà de l’horizon. Il effleure la crête des collines sans réellement les voir, se perd sur la végétation qui se balance au rythme du vent, s’égare dans les nuages alors qu’il plisse les paupières pour se protéger de la luminosité. La peau de ses avant-bras nus frissonne sous la caresse des embruns et de l’air qui se fend sous la vitesse du bateau, sa main vient se poser sur son ventre alors que les crampes commencent à se manifester. Quelques goélands s’amusent dans leur sillage avec l’espoir d’obtenir un repas facile et un vol de pélicans longe la côte dans la lueur du jour déclinante. Son rythme cardiaque s’emballe, une vingtaine de minutes plus tard il salue le reste de l’équipe et trace son chemin à la recherche d’un endroit où transplaner sans témoins. Son corps tout entier réclame la transformation et même s’il ne se passera rien tant que la Lune ne sera pas levée le malaise se fait de plus en plus présent.
Pas de Portoloin mais une succession de plusieurs transplanages pour couvrir la distance entre le Mexique et le Nord Ouest des Etats Unis, c’est en plein cœur de l’Olympic National Park qu’il atterri. Le choc est tant visuel que thermique, la chaleur du Sud laisse place à l’humidité du Nord où il a vraisemblablement plu une bonne partie de la journée. Les odeurs explosent dans ses capteurs olfactifs, le Loup s’agite à l’intérieur, ronronne de plaisir à l’idée de s’élancer dans ces contrées montagneuses. Pourtant relativement loin de l’océan il entend le roulis des vagues dans le lointain, ses sens de plus en plus affutés. Déjà les couinements d’un rongeur attirent son attention, un hibou hulule non loin de là. Le grand balai de la nuit et ses drames ne va pas tarder, une crampe plus violente que les précédentes lui fait serrer les mâchoires et se rattraper au tronc d’un immense séquoia. Le changement s’amorce, s’enclenche à l’intérieur, bientôt il ne sera plus capable de tenir sur ses jambes alors il presse le pas et dépose son sac au pied d’un arbre creux après s’être assuré qu’il est bien seul, qu’aucune autre présence humaine ne se trouve à proximité. Quelques sortilèges de protection, un autre de désillusion, encore un pour étouffer les sons, il est ainsi imperceptible aux sens des autres êtres vivants.

La fièvre et les frissons s’invitent à leur tour plus intensément, son corps tremble mais il parvient à maintenir son esprit dans cet état de quasi auto-hypnose qui lui permet de rester concentré. Les gestes sont minutieux, lents, semblables à une chorégraphie apprise par cœur. Malgré la fraicheur et l’humidité du soir il retire ses vêtements un à un, les plie puis les range dans son sac. Même chose pour sa chaine et sa montre. Sa baguette les rejoint au dernier moment car si la nudité n’est plus un problème aujourd’hui la vulnérabilité persiste. Ici, seul, s’il n’avait pas la Magie pour le protéger il serait une proie facile pendant la Transformation. S’il a choisi cet endroit c’est aussi parce qu’il sait le danger moindre, dès lors qu’il sera dans son autre peau il sera probablement le prédateur le plus imposant partout alentours car même les ours noirs ne font pas le poids. Pas de grizzly ici, les lynx sont trop petits pour lui faire du tort. Un puma affamé se risquerait peut-être à la confrontation mais face à sa carrure a plus de chance de reculer. De ne pas s’approcher, surtout. Les proies elles en revanche sont nombreuses et si l’humain lutte contre la nausée le Loup se débat déjà avec sa faim. Sa soif de sang, ce liquide chaud et épais qui fait déjà saliver le prédateur. Pour cette nuit encore il n’a pas eu à s’inquiéter du Tue-Loup mais au rythme où vont les choses il sait qu’ils doivent se montrer prudent et dans l’anticipation du pire, encore un truc auquel il n’a pas envie de penser ce soir. Tout ce à quoi il aspire c’est la liberté, celle de ne pas s’inquiéter pour les autres, pour le reste, d’être juste en parfaite symbiose avec cette autre facette de lui qui n’a plus vraiment le loisir d’être sereine depuis quelques temps.

Un dernier regard sur son téléphone, un je t’aime, à tout à l’heure envoyé à William sans plus de détails et il le range l’objet à son tour. Debout, les yeux clos et le visage levé vers le ciel, ses bras enroulent son torse et il pourrait presque entendre les rouages de son corps s’activer à l’intérieur. Il le sait, la première fracture est imminente et déjà sous sa peau roule les muscles. Le sang circule plus vite, ses gencives lui font mal, sa boite crânienne toute entière lui donne l’impression d’être proche de l’explosion. Vient toujours ce moment où tout devient trop. Les odeurs comme les bruits lui parviennent de manière presque agressive, sa peau est si sensible qu’elle ne supporte même plus la caresse de l’air, les battements de son cœur sont si rapides et irréguliers qu’il en a le vertige.
Le premier cri est étouffé mais la douleur si vive qu’il en reste muet, ses jambes cèdent il se retrouve à genoux et les deux mains enfoncées dans la terre meuble. Ses tatouages semblent se mouvoir sur son épiderme, sa colonne vertébrale s’arque brutalement et ses côtes s’écartent deux par deux pour élargir sa cage thoracique. Mâchoires serrées il s’abandonne à cette souffrance physique qu’il connait désormais par cœur, les ongles accrochent le sol, le griffent, déjà ses mâchoires s’allongent. La première fois il n’en a pas de souvenir mais c’est bel et bien la terreur qui l’a embrassé pendant des mois. Un traumatisme tant pour le corps que pour l’esprit et la Pleine Lune précédente le leur a prouvé à tous : certains n’y survivent pas. Certains ne s’en remettent pas. Cette considération il ne lui laisse pas la moindre place, pas cette nuit.
Les minutes passent dans la douleur, un cri rauque déchire parfois le silence de la nuit. Alors que ses jambes s’étirent à leur tour et forment un angle différent la noirceur de son pelage perce sa peau pour recouvrir son corps tel l’eau tracerait son chemin sur le sol. Lentement, sinueusement. Ses poumons et son cœur doublent de volume, ses épaules se retournent avant de reprendre leur forme initiale et sous la peau de son dos les os poussent comme s’ils essayaient de la déchirer. De moins en moins homme, pas encore tout à fait animal, l’entre deux est des plus terrifiants pour un regard non initié et lorsqu’un voile opaque recouvre ses yeux il s’écroule sur le flanc. Il s’agite encore un moment ce corps malmené, change du tout au tout ou presque, les soubresauts l’arquent avec violence et c’est contre le vide qu’il se débat. Les canines s’allongent jusqu’à former de puissants crocs, ses ongles laissent place à des griffes qui le sont tout autant, le changement n’est rien de plus ni rien de moins qu’un traumatisme tant pour le corps que pour l’esprit et sa peau hâlée par le soleil, marquée par l’encre, est désormais entièrement recouverte d’une fourrure noire de plus en plus drue.

Etendue sur le flanc la bête a l’air morte, sans réel signe de vie. Yeux clos, gueule entrouverte, son abdomen ne se soulève pas et les battements de son cœur sont pareils à ceux d’un animal en pleine hibernation. Une pluie fine fait scintiller son pelage de jais sous les éclats argentés de la Lune, un souffle brutal gonfle soudainement ses poumons. Le loup peine à se lever, chancelant sur ses pattes, haletant, le corps et l’esprit ont besoin de quelques secondes pour prendre leurs nouveaux repères mais une fois qu’il a pris pleine possession de cette seconde enveloppe malgré tout familière rien ne semble être capable de l’arrêter.
Puissant, bestial, létal, un grondement sourd prend forme dans sa gorge mais ce soir pas de hurlement. Il se sait seul, ne cherche pas les autres, n’a pas non plus envie de croiser la route d’un autre lycan qui pourrait décider de parcourir ces terres aussi forestières que montagneuses lui aussi. Un dernier regard vers l’intérieur du tronc de l’arbre creux, il s’ébroue et d’un pas supérieur passe la barrière magique qui le protégeait des autres. Il n’a plus besoin de protection, les créatures nocturnes qui disparaissent sur son passage en ont parfaitement conscience. Bien plus imposant qu’un loup du Mackenzie – son patronus – il n’a que faire des rongeurs qui se terrent en poussant de petits cris stridents. Il entend les branches craquer, la pluie frapper les feuilles et les épines des arbres qui l’entourent, une rivière qui court bien plus loin jusqu’à former un torrent qui mène droit vers l’océan. A la croisée des chemins il hésite un instant, hume l’air en levant le museau, décide de prendre la direction des pleines montagneuses. Le sol vibre sous ses pas lourds, si son corps est plus lent à mettre en mouvement que ceux de Caitlyn, Jody ou même Ever il devient machine lancée à pleine vitesse bien rapidement. L’instinct à vif, l’expérience lui a appris où trouver ce que l’animal en lui cherche du plus profond de son être. Il passe non loin d’un troupeau de cerfs hémiones sans y prêter la moindre attention, les chèvres des montagnes n’ont pas grand-chose à craindre de lui non plus ce soir. Trop hautes, trop agiles de toute façon. Un coyote hurle de défiance, il est tenté de le prendre en chasse mais ne détourne pas sa course.
Sous sa peau les muscles roulent avec aisance, la liberté pulse dans ses veines, son ventre se crispe de faim. Organisme éprouvé par la transformation il a besoin de remplir cet estomac vide depuis de nombreuses heures, lorsque la fragrance qu’il cherche lui parvient ses glandes salivaires s’activent immédiatement. Poussant sur ses reins il accélère la cadence et la traque commence dès lors que les Wapitis comprennent que le danger leur vient droit dessus. Un loup normal s’attaquerait à un individu malade, un jeune pas aussi fort et expérimenté qu’un adulte, un animal isolé … mais il n’est pas un loup normal et le sang qui fait battre la carotide d’un des plus gros mâles est beaucoup trop tentant. Il les contourne, sème la panique, explose le groupe en se lançant en son sein attentif aux défenses de ses proies qui n’en sont pas dénuées. Les femelles seraient prêtes à tout ou presque pour défendre leur petit, un coup de patte pourrait lui briser la mâchoire. Les mâles pourraient sans aucune difficulté lui perforer les organes en le chargeant et en cette période de l’année ils sont d’autant plus prompts à le faire. Il a compris dès l’instant où les cris atypiques de ces animaux ont résonné dans la nuit, la période de reproduction bat son plein dans les plaines Nord-Américaines. La réflexion de l’humain serait tel qu’il ferait demi-tour pour ne pas les déranger mais la nature profonde et animale qui l’habite n’a pas envie d’être muselée.

Il n’a pas envie de la museler.

Cette nuit le prédateur n’aura pas le dernier mot pourtant, après des heures de traque le Wapiti ira trouver refuge au beau milieu d’une large rivière où le loup ne se risquera pas. Si l’humain est presque plus à l’aise dans l’eau que sur la terre ferme ça n’est pas le cas de son alter égo mais sa faim sera étanchée par la mort d’une jeune femelle blessée. Une fois rassasié il a abandonné la carcasse aux coyotes plus qu’heureux d’un tel cadeau, même s’il ne l’a pas vu un puma a feulé son mécontentement sur son passage. Ses mâchoires ont claqué dans l’air par défis.

« T’endors pas. » Ce sont les premiers mots qu’il prononce pour lui-même une fois la transformation inverse opérée. Nu, transi de froid, épuisé, le moindre mouvement lui est pénible et il ne rêve que d’une chose : Rentrer chez lui. Se fondre dans la chaleur d’une couette épaisse qu’il ne supporte pas le reste du temps. Retrouver la présence de celui avec qui il partage sa vie et qui en cet instant lui manque presque violemment.
Le contact des vêtements sur sa peau est d’abord une agression avant de devenir soulagement. Il aura la peau à vif encore une heure ou deux et si l’urgence de retourner au Mexique est sa priorité il prend malgré tout le temps de laisser un message vocal sur le répondeur de son petit ami « J’vais bien. Tout va bien. » Sa voix est rauque, un rire bref lui échappe alors qu’il est étendu sur le dos au pied du Séquoia « J’ai jamais autant galéré à ne pas m’endormir mais ça va. » Là encore, des mots qui sont plus là pour lui qu’autre chose et c’est sans rien rajouter de plus qu’il raccroche. Un instant de flottement et il sombre, la lutte est véritable et les transplanages sont une épreuve, sa résistance poussée dans ses extrêmes.  Lorsqu’il arrive enfin à destination il s’arrête au café du port pour en commander 5 à emporter et c’est le sourire bourru mais bienveillant d’Ivan qu’il voit en premier sur le pont du bateau « Il est bien ce p’tit, faut l’garder. » Chaque pas lui coûte, il menace de s’écrouler d’épuisement à tout moment mais un sourire étire ses lèvres et plisse son regard fatigué « La nuit a été courte ? » Juste un hochement de tête, ils penseront tous qu’il a passé ces dernières heures à faire la fête sur une plage non loin de là.

▬ The End ▬
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