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Go Right Ahead - Sana

 :: Autour du monde :: Grande Bretagne :: — Angleterre
Mer 12 Aoû 2020 - 10:26
1er Avril
‘Tu m’as déjà vue chialer ? ‘

C’est vrai ce mensonge Jo ? Ce petit jeu de grosse dure à cuire ? Si Alec y croit c’est sans doute l’essentiel, pourtant toi et moi on sait qu’il n’en est rien. Toi et moi on sait que la brûlure de ses sorts dans ton dos hier soir t’a empêché de dormir une bonne partie de la nuit, trop percluse d’angoisses pour trouver le sommeil. Toi et moi on sait que si tu fixes le plafond ainsi ce matin, c’est que tu penses à une amie partie bien loin, que tu sais ne plus être tout à fait la même à présent. Toi et moi on sait que tu songes à faire de même, parce que tu es lâche à défaut d’être indépendante. Toi et moi, on sait surtout que tu as peur, que tu crèves de ne pas toujours comprendre la nature humaine, de ne trouver en difficulté, de voir ceux que tu aimes t’abandonner. Et que quelque part, c’est exactement ce qui se passe.

Les talons claquent contre le mur et la jeune femme les bascule au dessus de son corps allongé sur le matelas, la plante de ses pieds trouvant bientôt le chemin du parquet frais. Un soupir et elle attrape son téléphone. Un texto à Alec.

- Vous êtes quand même de sacrés tarés. –
-  Je sais. On arrête quand tu veux. –
-  Non c’est bon. Mais j’ai envie de cracher mon venin. –
-  Crache crache. Mais tu sais qu’il y a des pratiques plus sympas à faire dans l’intimité ? –
- Comme m’étouffer et me dessiner des merdes dans le dos ? –
- Oh l’étouffement il parait que ça peut être sympa hein. –
- C’est ça ouais, ptit con va. –

Un petit sourire dessiné sur ses lèvres alors qu’elle laisse le portable de côté pour filer sous la douche. Etrangement, ces échanges font du bien, rappellent qu’il s’agit toujours de son pote, qu’elle n’est pas réellement en danger avec lui, qu’il ne fait ça qu’à sa demande. Et d’ailleurs, à peine sortie de la douche, un nouveau message de lui.

- J’ai pas envie de faire ça, tu le sais. Je ne le fais que parce que tu me le demandes. –

Comme quoi, ce qu’il avait pu se passer avec Emily le tourmentait plus qu’il ne semblait le montrer.

- - Oh mais j’ai pas besoin que tu me dises qu’une jolie fille peut te faire faire n’importe quoi, je l’expérimente au quotidien..
- Ah si tu savais…
-Me tente pas.

Nouveau sourire.

C’est quand même con Jo, tu t’étais éloignée de lui. Tu sais comme il est facile de tomber dans ses filets, d’oublier à quel point il sait être toxique. D’oublier, surtout, qu’il pourrait appartenir au clan adverse. Il a suffit d’une belle gueule chez lui pour vous côtoyer de nouveau. T’as beau parler, t’as l’cœur sensible.

« Ou alors j’essaye juste d’oublier la belle gueule en question et de mettre une pause sur le bordel intérieur qu’il déclenche. »

T’as dit ça à voix haute.
Oui, ben ya personne, donc c’est pas un drame.

« Tu décaroches complet mon enfant… »
Haussant des épaules, elle éloignait ses prises de têtes, refusait de s’étendre sur Lex ou Aileen, de brasser ses blessures, de se complaire dans la douleur que tout ce foutoir pouvait provoquer, notamment l’envie de se barrer loin et de tout oublier.

T’as jamais fait les Dom Tom. Ça doit être chouette la Martinique. Ou St Domingue ? Hey la Crète ! T’as toujours voulu aller en Crète !

Un grognement et elle passait une brassière de sport. Plus technique, moins sexy que celle qu’elle mettait chez Alec, avouons-le. Tenue de sport et la voilà partie. Un baiser au petit, consciente que cette bouille avait fini par la faire craquer à force d’acharnement et, déjà, elle mordait dans un biscuit honteusement volé à l’enfant avant de transplaner bien plus loin, dans une forêt au nord de Londres. Personne, comme prévu. Il s’agissait d’une zone privilégiée depuis des années qu’elle utilisait régulièrement. Alors, téléphone dégainé, elle suivait les indications pour arriver à destination. Un peu de marche, certes, mais ne connaissant pas la zone, elle préférait s’y rendre à pied.

C’est ainsi qu’elle arrivait, un peu plus tard mais en avance, au bord d’une rivière. Coin calme, reculé, sans doute pu ou pas fréquenté, totalement perdu en pleine nature.

« Pittoresque… »

Joli, à vrai dire, surtout pour une randonneuse comme elle.
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Jordane Suzie Brooks
Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Sam 15 Aoû 2020 - 20:37
1er avril 2016 – Matin



Depuis combien de temps ne s’était-elle pas entraînée ?
Depuis combien de temps n’était-elle pas retournée à ses anciennes pratiques, celles qui lui avaient toujours servies à se canaliser, à désamorcer la bombe qu’elle traînait en elle ? Elle avait abandonnée ses routines, mises de côté par d’autres envies, d’autres plaisirs. Soucieuse désormais de remodeler sa vie, de la façonner sur une autre image, de l’adapter au mieux aux changements internes qui étaient les siens. La vérité, c’était qu’elle se sentait incapable de retourner à son ancien rythme. Et peut-être n’était-ce pas une mauvaise chose finalement. Elle découvrait de nouvelles expériences, elle se découvrait tout simplement dans d’autres domaines, d’autres jeux, d’autres rencontres. Et pourtant, jamais elle n’avait imaginé une seule seconde abandonner les entraînements : au contraire, elle avait bien l’intention de les multiplier, de les varier. Mais ils n’avaient plus vocation à faire taire la violence, à se décharger une bonne fois pour toute pour rendre les effets de la muselière plus aisés, non, elle comptait user de ces séances de combat pour s’exprimer aussi brutalement qu’elle le souhaitait, non pas pour se taire ensuite et jouer la douce guerrière en sommeil, mais pour apprendre à intégrer la violence avec plus de finesse, avec plus de maîtrise dans sa vie. Elle en était persuadée à présent : il ne fallait plus l’ignorer, mais apprendre à l’utiliser correctement, à ne plus en avoir honte, à afficher son plaisir.
Elle aimait ça, tout simplement.
Elle aimait se battre.
Elle aimait la rapidité des mouvements précis destinés à déséquilibrer un adversaire, à le mettre au tapis, à lui briser les os, à le prendre à revers, le surprendre, le coincer, l’immobiliser.
Elle aimait cette fièvre qui la prenait à chaque fois qu’elle brandissait les armes.

Elle se sentait s’éloigner des préceptes de son père : savoir se battre, mais choisir de n’user de violence qu’en cas extrêmes. En dernier recours. Mais que se passait-il lorsqu’on adorait ça ? Que se passait-il lorsqu’on voulait exprimer la bataille interne permanente ? Ce chaos-là, il fallait qu’il prenne forme physiquement, qu’il assouvisse ses gestes pleins de furie. Au placard, la retenue.
Du moins, en partie.
C’était justement de trouver l’équilibre, la limite à laquelle s’arrêter qui était encore difficile. Sans doute était-ce pour cette raison que Sanae ne s’était pas risquée à s’entraîner depuis les récents événements, depuis la dernière fois qu’elle avait vu Logan.  Cette fois où enfin, elle s’était libérée.
Il fallait aussi dire qu’il n’y avait pas grand monde pour s’entraîner depuis quelques temps et que la sorcière s’était retrouvée sans partenaire, sans adversaire de combat. Une bonne chose alors que Jordane l’ait contactée pour revenir sur sa proposition.

Serait-ce étrange de passer du temps avec une jeune femme qu’elle n’avait fait que croiser à la Garde, mais qui pourtant, avait été dans bien des souvenirs ? La tête d’Alec lui avait offert un aperçu de sa personnalité et elle ressentait une curiosité grandissante pour cette sorcière blonde qui semblait avoir ce feu de vaincre, elle aussi. Une guerrière, à n’en pas douter, qui avait ce même besoin de se défouler, d’extérioriser, de bouger.

Le rendez-vous avait été pris, et Sanae avait choisi le même emplacement qui était témoin des leçons qu’elle donnait à Kezabel. Elle aimait ce coin-là, près d’un cours d’eau, qui offrait une intimité entre les grandes arbres, une sérénité qui serait vite perturbée par la force d’une bataille amicale, sans volonté de tuer. Elle avait hâte de voir sa nouvelle partenaire à l’oeuvre, hâte de voir son niveau, hâte de l’affronter.
Cette fois-ci, cependant, la sorcière n’était pas arrivée en avance comme à son habitude. Et ce fut quelques minutes après l’arrivée de Jordane que Sanae fit son apparition. Un CRAC sonore retentit alors que sa silhouette apparut à quelques mètres de la jeune femme blonde. Les cheveux détachés, retombant sur ses épaules nues, Sanae avait enfilé un haut noir moulant qui laissait ses bras découverts et enserrait son dos dans des entremêlements de bandes de tissu, et un pantalon noir un peu plus fluide.

Son sac sur l’épaule, la sorcière fit un signe de tête à Jordane, un fin sourire sur le visage.

« On a appelé le service Défouloir ? Je suis là. » lança-t-elle.

Elle jeta son sac par terre, un peu plus loin et eut un sourire en coin alors qu'elle levait sa baguette dans les airs pour créer une bulle où elles ne seraient ni entendues, ni vues.

« Alors ? Sale semaine ?….Sale mois ? ….Sale vie ? »
fit-elle d’un ton mi-amusé, mi-blasé.

Elle prit l’élastique à son poignet et commença à attacher ses cheveux en queue de cheval bien haute, le regard toujours posé sur Jordane.

« Ah et félicitations pour ton intégration. Il est temps de passer au bizutage, c’est ça ? »

Elle lança un clin d’oeil amusé en sa direction.

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Sanae M. Kimura
Jana au Sapon
Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mar 18 Aoû 2020 - 14:22
Une sensation d’incompréhension et d’abandon cognait toujours dans ses tempes lorsque Jordane était arrivée sur les lieux. Perdue face au comportement de Lex, incapable de se positionner elle-même fac e à lui alors qu’elle s’était sentie trahie juste avant une déclaration enflammée qui l’avait littéralement soufflée, elle ne savait simplement plus comment agir ou se placer dans cette histoire. L’impression d’être la garce, la conne, l’incapable, lui barrait les mâchoires. Sensation d’être prise pour une idiote tout en étant inapte à donner suite à une telle déclaration même si elle n’avait pas été précédée d’un tel taulé. Comment elle se sentait face à tout ça, comment elle voulait agir, est-ce qu’elle voulait lui courir après alors qu’il était parti de chez Alec ? Elle n’en avait pas la moindre idée, plongée dans un réflexe parfaitement primaire : celui de la fuite. Pas envie d’affronter tout ça, tout ce qui était trop compliqué pour elle d’un point de vue sentimental. Et plus encore, derrière tout ça s’était rajouter la lettre d’Aileen. Elle oublierait une partie de celle qu’elle avait été. Plus de Logan, ça signifiait oublier certaines choses, certains vécus, certains souvenirs communs. L’oublier, c’était oublier la rage qu’elle avait eu envers elle quand elle avait compris qu’ils avaient déjà couché ensemble dans une vie antérieur, oublié qu’elle avait fini par accepter et lui accorder sa confiance, donnant à leur relation une profondeur qui serait à présent oubliée.
Takuma qui ne donnait toujours pas de signes de vie. Sovahnn plongée dans ses préparatifs pour l’arrivée de la petite. Ok, c’était injuste de penser ainsi, Jordane en avait conscience. Et pourtant, c’était là, ça pulsait dans ses pensées, coupait son souffle, embrouillait sa conscience.

L’Abandon. D’ordinaire, c’était elle qui partait, merde !

« On a appelé le service Défouloir ? Je suis là. »

Sanae était arrivée dans un craquement sonore, jetant son sac un peu plus loin avec un léger sourire en coin auquel Jordane répondait par effet miroir.

« Même pas d’attaque en fourbe ?! Sincèrement je suis déçue là. »

Oui, c’était ce à quoi elle s’était attendue. Trop tôt peut-être. Ou bien Jordane avait-elle simplement l’habitude d’un certain type de coatch.

« Alors ? Sale semaine ?….Sale mois ? ….Sale vie ? »

Il n’y avait pas de pointe d’agression dans sa voix, juste de l’amusement et une certaine lassitude, et pourtant la question venait piquer la cadette qui lâchait un grognement montrant chez elle un mélange d’agacement et d’amusement.

« Non, ça va, ma vie est cool. » Le réflexe de l’huitre qui se rétracte au premier jet de citron. Quoi ? Si j’avais dit la moule ça aurait été mal interprété. « Juste que là récemment… ouais, besoin de casser des trucs. Pour pas dire des genoux. »

Ceux de Lilian. Ceux d’inconnus, ceux de personnes que j’aime trop pour agir ainsi. Bref.
Et éventuellement ceux d’Alec parfois parce qu’il me fait mal ce con… même si je l’ai demandé.

M’enfin la femme face à elle ne pouvait connaître aucun de ces détails et elle ne risquait pas de les aborder comme ça, à froid.

« Ah et félicitations pour ton intégration. Il est temps de passer au bizutage, c’est ça ? »

Un petit rire léger. « C’est l’idée ouais ! Dorofei a déjà commencé, mais il est trop gentil.. Et merci. »

Pas qu'elle en tire une quelconque gloire, pour le coup.

Dorofei… trop gentil ?
Oui, bon, je suis maso aussi, ça joue.

« T’avais une idée en tête du coup ? Mis à part me bizuter. » Me péter la gueule, j’ai noté. Gentiment bien sûr. « Tu pratiques depuis longtemps ? Que j’ai une idée de la suite des évènements… »

Sachant qu’elle s’entraînait déjà par moments avec Margo et en gardait quelques traces encore aujourd’hui. Celles provoquées par Lilian sur ses bras et sa gorge demeuraient, jaunâtres.

« A vrai dire la question vaut pour tes autres activités. »

Comprendre, avec la Garde.
D’un coup de baguette, Jordane vérifiait au passage qu’elles étaient en effet bien isolées du monde autour. Oui, c’est que ça rend parano ces histoires.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Sam 22 Aoû 2020 - 13:11
 « Même pas d’attaque en fourbe ?! Sincèrement je suis déçue là. »
« Nan, je suis bien élevée, je dis bonjour avant. Mais promis, la prochaine fois je te fais bouffer la poussière directement, je voudrais pas que tu sois déçue à nouveau. »

Du tac au tac. Belle entrée en matière.
Elle y avait pensé pourtant, à commencer sans salutations, annonçant déjà la couleur. Mais comme des restes de retenue, Sanae avait besoin de savoir qu’elle pouvait se lâcher avec Jordane, qu’elle pouvait agir comme elle l’entendait. Pas sans limites, mais avec plus de liberté. Sa première réflexion venait confirmer ce qu’elle avait déjà vu d’elle : la sorcière s’annonçait être coriace. Cela la rassurait et lui plaisait. Elle n’allait pas s’ennuyer, ni se retenir de façon démesurée.

Elle lui avait lancé une perche étant donné le message qu’elle lui avait envoyé quelques jours plus tôt : besoin de se défouler. Elle pouvait comprendre. Peu importait les problèmes que Jordane avait, elle reconnaissait cette envie de lâcher les fauves, de se mouvoir avec toute la rage que faisaient naître les contrariétés, les souffrances, les doutes de la vie. Et immédiatement, elle sentit la sorcière être piquée par ses questions. Elle non plus n’était pas du genre à s’étendre sur ses problèmes. Bien.  Elle avait juste besoin de savoir à quel point elle voulait se défouler.

« Non, ça va, ma vie est cool. Juste que là récemment… ouais, besoin de casser des trucs. Pour pas dire des genoux. »
Un sourire amusé en coin, Sanae acquiesça. « On va voir si tu peux casser les miens de genoux. Et si je casse les tiens, l’avantage c’est que je suis médicomage, je pourrais te rafistoler si besoin. »

Même si elle se demandait si la sorcière était vraiment du type à se laisser soigner comme ça. Elle en connaissait des gens qui n’aimaient pas être à la place du patient…
Sanae la félicita pour son entrée dans la Garde, après tout même si la mission n’avait pas réussi, cela n’avait pas empêché Jordane ou Kezabel de trouver ou retrouver leur place parmi eux. Un bon point. C’est qu’elles n’avaient pas tout foiré donc. Et puis, ça permettait de parler bizutage.

« C’est l’idée ouais ! Dorofei a déjà commencé, mais il est trop gentil.. Et merci. »

Sanae leva un sourcil, franchement amusée et surprise. Dorofei, gentil ? Elle n’avait pas imaginé entendre quelqu’un dire cela : elle connaissait peu le sorcier mais elle savait qu’il était plutôt d’un caractère dur, difficilement aimable lorsqu’on aimait pas les sarcasmes.

« Trop gentil... » répéta la sorcière en claquant sa langue contre son palais, un sourire en coin. « S’il entendait ça, pas sûr qu’il serait content. Mais je tâcherai d’être la moins douce possible si tu le demandes. »

La moins douce possible. Oui, elle aurait pu dire la plus violente, mais les efforts de Sanae s’attachaient davantage à ne pas retenir ses coups. Instinctivement, c’était plutôt un combat contre sa retenue, contre sa douceur qu’il fallait mener. Elle espérait s’en détacher complètement aujourd’hui, s’entraînant pour la première fois depuis...son bouleversement.

« T’avais une idée en tête du coup ? Mis à part me bizuter. Tu pratiques depuis longtemps ? Que j’ai une idée de la suite des évènements… »

Sanae resserra sa queue de cheval et étira ses bras. Un sourire toujours sur ses lèvres.
« Oh, une idée, oui. J’en ai toujours. » Un clin d’oeil, amusée. « Je pratique depuis mes sept ans. Donc ça fait vingt ans. J’ai fait un peu de tout mais j’ai mes préférences. Genre le Khridoli, le Krav Maga, le Penchak Silat...pour parler des sports sans armes. Et toi ? Tu pratiques depuis quand ? »

Depuis petite, Sanae avait eu besoin de canaliser son énergie débordante, cette rage qui menaçait sans cesse de déborder au même titre que l’ensemble de ses émotions. Alors son père lui avait fait goûter à tous les sports, de combat ou non, jusqu’à ce qu’elle établisse ceux qui l’intéressaient le plus, prennent dans chacun ce qui lui plaisait pour parfaire une méthode qu’elle s’était appropriée avec le temps. Si à un jeune âge on l’avait éloignée des pratiques de combat qui visaient non pas la défense, mais les attaques foudroyantes capables de tuer un ennemi en quelques coups, armé ou non, elle s’y était intéressée avec le temps, sans pour autant les privilégier. La sorcière avait donc un sacré panel de pratiques différentes en terme de combat : que ce soit du Aikido, de la boxe français, anglaise, et même d’autres, avec armes, comme le naginatajutsu qu’elle appréciait particulièrement.

« A vrai dire la question vaut pour tes autres activités. »
Un léger rire de gorge.
« J’y suis entrée en août de l’année dernière. » Après la mort de mon père et l’écroulement du monde sous mes pieds... « Mais je suis pas d’ici à la base. J’ai du déménager pour venir jouer avec nos grands copains au coeur pur. » ajouta-t-elle avec acidité.

Coeur pur, mon cul.
Elle regarda Jordane lancer quelques sorts pour vérifier que tout était sécurisé. Un sourire moqueur sur le visage, Sanae pencha un peu la tête « Je vois qu’on vérifie à deux fois... »

La sorcière s’éloigna de quelques pas et sortit sa propre baguette, traçant par un sortilège un cercle bleu d’un diamètre d’un peu moins de 5 mètres. « Ceci est un dohyō, c’est un espace de combat utilisé par les sumo mais on va faire à notre sauce hein. Le but est simple : éjecter l’autre du cercle. On a le droit de mettre l’autre à terre par contre. Utilise ce que tu veux comme technique. Je veux voir de quoi tu es capable, disons que...c’est une façon simple de faire connaissance. »

Sanae posa sa baguette près de son sac et alla se placer dans le cercle, bras derrière le dos, droite, le regard fixé sur Jordane.

« Quand tu veux Brooks. »

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Lun 24 Aoû 2020 - 9:39
« Nan, je suis bien élevée, je dis bonjour avant. Mais promis, la prochaine fois je te fais bouffer la poussière directement, je voudrais pas que tu sois déçue à nouveau. »

Un petit rire amusé passait les lèvres de la jeune femme.

« C’est bien aimable de ta part… »

Elle lui adressait un clin d’œil presque joyeux. Elle était là, cette douleur, ce besoin d’exploser qui battait entre ses côtes, toujours en filigrane dans son âme. Pas toujours sain comme réaction, on en convient. Et pourtant, c’était là, cette façon de fonctionner, ce besoin de se défouler, ce besoin de se rassurer lorsqu’elle était ou avait été vulnérable. Lorsqu’elle sentait qu’elle chutait, tout simplement. Dans une certaine reprise de contrôle.
Casser des genoux quoi. Parfois ça fait du bien de simplement re-larguer tout ce qui pourri en vous, qui prend trop d’ampleur, qui se développe comme un monstre qui s’éveille et s’agite en silence, prenant en force. Mieux vaut l’apaiser avant qu’il ne crève la surface, piqué d’autres drames. D’autres défaites. D’autres erreurs.

« On va voir si tu peux casser les miens de genoux. Et si je casse les tiens, l’avantage c’est que je suis médicomage, je pourrais te rafistoler si besoin. »

Lèvres pincées, un air dubitatif sur le visage, Jordane n’avait rien rajouté, restant dans sa posture comique, un brin d’amusement dans le fond de ses pupilles. Est-ce qu’elle risquait d’en chier ? Oui. Et ça lui allait. Tout comme lors des entraînements de Dorofei dont elle se moquait gentiment.

« Trop gentil... » Gentiment, oui, c’est ce que je dis.  « S’il entendait ça, pas sûr qu’il serait content. Mais je tâcherai d’être la moins douce possible si tu le demandes. »

Vanne sexuelle ? Ouh que c’est tentant. D’ordinaire, elle l’aurait fait, même face à une inconnue. Sans doute surtout face à une inconnue. Pourtant,  dans le cadre de la Garde, la jeune femme se contenait.

« Ouais, ça me permet de vérifier qu’il n’est pas planqué dans un coin. » Elle l’imaginait bien sortir des fourrés là, outré. Mais non, personne. Un petit rire de gorge se faisait entendre. « Non, en fait j’aime bien sa façon de fonctionner. Même quand il me paume en plein milieu de la Russie à trois heure du mat’. »

Logan aurait fait pire, elle le savait parfaitement, se souvenait de son état fébrile à la fin de la séance et de l’impression tenace, réelle et prenante d’avoir été véritablement en danger lors de cet entraînement. Et la réflexion pragmatique d’Alec : ‘tu l’étais. T’as géré’
Ok.
Tarés.

Pourtant, elle haussait des épaules, délaissant ce souvenir, consciente qu’elle préférait éviter d’être associée à l’ancien directeur par qui que ce soit.

« J’attends d’un enseignant qu’il m’aide à avancer. Pas qu’il me traître comme une poupée de porcelaine. On m’a assez dit que j’en avais la gueule, pas besoin d’en avoir le caractère. »

Ça casse ces choses-là.

Si elle était choquée, un peu secouée, c’était une bonne chose. C’est nécessaire pour se dépasser et sortir de sa zone de confort. Nécessaire pour avancer. Et éviter de rester figée face à des connards comme Lilian. Depuis toujours, si Jordane s’entraînait, ça n’était pas simplement pour relarguer un trop plein d’émotions délétères mais aussi et surtout pour être capable de réagir en cas d’urgence. Un besoin viscéral qui l’avait noyée dès le décès de sa mère. Pourtant, malgré tout, elle savait être capable de figer de terreur. Sensation insupportable. Alors oui, ne pas se sentir parfaitement en sécurité durant un entraînement ne lui semblait pas parfaitement idiot. Et si elle finissait avec un os en morceau… eh ben vive la magie.
Oui, doucement, ses réflexes de moldus laissaient place à ceux d’une sorcière. Les dires d’Alec. Sa façon de mesurer le danger évoluait au cours du temps, il n’avait pas tort.

« Oh, une idée, oui. J’en ai toujours. Je pratique depuis mes sept ans. Donc ça fait vingt ans. J’ai fait un peu de tout mais j’ai mes préférences. Genre le Khridoli, le Krav Maga, le Penchak Silat...pour parler des sports sans armes. Et toi ? Tu pratiques depuis quand ? »
« Bien ! Le double de moi donc…. Ce qui signifie que je vais me faire défoncer : parfait ! »

Comprendre : cool, quelqu’un qui peut m’apporter quelque chose.

Margo, Dorofei, Sanae… Elle était bien entourée.
Alec, pour les pratiques des familles de sang pur.
Logan de manière très épisodique, il y avait des mois de ça. Plus d’un an.
MACHIN, pendant quelques temps.
Et puis le champion de Boxe française là… dont l’arrogance ne l’avait pas préservé de la mort.

Oui, même ces dernières années, les ‘enseignants’ n’avaient pas manqué.

« Une dizaine d’années pour moi. Pas mal de pratiques éparses, de découvertes vu que j’ai pas mal voyagé. Mais quelques constantes. Taekwondo, boxe, Aikido/Aikibudo et autres dérivés, krav maga aussi… un peu de tir. »

Dit la nana qui a volé une arme dans un centre de tir et qui a shooté quelqu’un avec en étant mineure.
Un peu….d’Humour noir.
Le taulé que ça avait fait… l’avantage en France… c’est que les procès sont beaucoup plus secrets que dans certains pays, et qu’en temps que mineure, jugée coupable mais non responsable, son nom et son visage étaient restés anonymes.

Bref. Elle ne pouvait pas savoir. Enchaînons. La Garde donc ?

« J’y suis entrée en août de l’année dernière.  Mais je suis pas d’ici à la base. J’ai du déménager pour venir jouer avec nos grands copains au coeur pur. »

Une fort louable intention.

« Et ça va, ils sont bons joueurs ? »

Alerte spoiler : non.

« Tu es de quel coin ? »

C'est bien Jo, tu t'intéresse aux gens. Tu vois, ça rentre.

« Je vois qu’on vérifie à deux fois... »

Elle répondait par un sourire à son air moqueur. « Ouais j’me suis déjà fait un peu secouer par Néolina, je deviens parano côté sécurité. »

Ce qui n’est pas un mal.

Ceci étant dit, Sanae s’agitait, traçant un large cercle bleu au sol tout en expliquant ses intensions.

« Ceci est un dohyō, c’est un espace de combat utilisé par les sumo mais on va faire à notre sauce hein. Le but est simple : éjecter l’autre du cercle. On a le droit de mettre l’autre à terre par contre. Utilise ce que tu veux comme technique. Je veux voir de quoi tu es capable, disons que...c’est une façon simple de faire connaissance. »
Je connais oui.
Mais elle s’était contentée d’hocher du chef.

Une façon de savoir ce qu’elle avait dans le ventre surtout.

« Ok, pas d’échauffement, t’es comme ça toi. »

T’as marché pour arriver jusque là non ? Allez ça passe.
Evite les mouvements de trop grande ampleur quoi.
Avec un petit rire, elle allait poser sa baguette à côté de celle de la jeune femme avant de se positionner dans le fameux cercle.

« Quand tu veux Brooks. »

Calmement, elle hochait de la tête, commençait à effectuer des cercles larges, analysant la façon dont Sanae se déplaçait, la position de ses pieds, les inflexions de son regard, les points, diffus ou précis où il s’accrochait.
Si l’attaque était vive, elle n’avait pas pour but d’être réellement impactante, cherchant simplement à identifier ses réactions, à mesurer la vitesse de réaction de son adversaire, à jauger sa posture, ses appuis, les inflexions qu’elle pouvait avoir pour protéger certaines zones, pourtant. Pas une experte, loin de là, pourtant, au fil des années, Jordane avait acquis des réflexes, avait appris à mieux observer, à mieux comprendre le langage du corps. Alors elle attaquait, agile, esquivant systématiquement les répliques, cherchant surtout à jauger la situation, restant à distance. Habituellement, elle aurait surtout cherché à fatiguer l’autre avant de frapper un grand coup. Là, la fatigue qu’elle visait consistait surtout à vérifier chaque ouverture, à rester attentif en toute situation.

Et enfin, elle frappait plus massivement, une jambe volant vers le côté latéral de la jambe droite de Sanae, visant le tendon supérieur, cherchant la faille, là où le choc vrillerait les ligaments croisés autant que le tendon qui reliait les muscles à l’os. Et en même temps, elle s’apprêtait à glisser en retrait,  passant derrière son adversaire pour viser sa tempe, cherchant à assommer, profitant de la réaction inévitable du corps pour éviter le coup.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Lun 31 Aoû 2020 - 21:57
La sorcière blonde semblait correspondre pour le moment à ce qu’elle avait vu d’elle en souvenirs. Quelques répliques, le ton de sa voix, son attitude...tout indiquait qu’elle serait une partenaire de combat – ou une élève, mais Sanae commençait à se fatiguer de ce mot – surprenante et déterminée. Il y avait du caractère dans ces intonations, dans les traits de son visage, dans sa façon de se tenir et elle aimait ça. Ça promettait d’être intéressant. Surtout que la demande venait d’elle – et quelle demande ! Jordane avait contacté Sanae en exprimant un besoin de se défouler. Un besoin. Le choix de mot lui plaisait, venait titiller cette envie d’affrontement. Est-ce que Jordane ressentait elle aussi ce besoin d’assouvir sa rage ? Etait-ce davantage une façon de reprendre le contrôle plutôt que de lâcher prise ? Elle le découvrirait sûrement.

« C’est bien aimable de ta part… »

La sorcière lui fit un clin d’oeil joyeux et Sana y répondit par un rapide sourire. Son regard observait attentivement la jeune femme blonde qui semblait s’amuser à critiquer Dorofei. Il y avait étrangement quelque chose chez Jordane que la sorcière reconnaissait.

« Ouais, ça me permet de vérifier qu’il n’est pas planqué dans un coin. » Jordane eut un léger rire de gorge. « Non, en fait j’aime bien sa façon de fonctionner. Même quand il me paume en plein milieu de la Russie à trois heure du mat’. »  

Un large sourire fendit le visage de Sanae, amusée. « Ouais, j’vois le genre. C’est bien, il te fait voyager. J’suis sûre qu’il prend grand soin de toi. » Entendre...te faire galérer au possible en se foutant de ta gueule. Ce serait bien le genre de la maison.

Mais ça n’avait pas l’air de déranger la sorcière plus que de raison : après tout, si elle s’entraînait avec lui, c’était parce qu’il lui apportait quelque chose. Alors elle la vit hausser les épaules comme pour signifier que ça lui allait, qu’elle ne s’en plaignait pas.

« J’attends d’un enseignant qu’il m’aide à avancer. Pas qu’il me traite comme une poupée de porcelaine. On m’a assez dit que j’en avais la gueule, pas besoin d’en avoir le caractère. »

Penchant la tête sur le côté, Sanae l’observa un instant avec un sourire en coin. Elle eut un léger rire dans son souffle. « Une poupée de porcelaine ? C’est pas ce que je vois de toi. » Jordane n’avait rien d’une poupée, c’était évident. Elle n’avait pas même besoin de se référer aux souvenirs d’Alec ou aux informations qu’elle avait entendu de sa première mission. Rien qu’en la regardant, Sanae savait qu’elle avait devant elle une femme aguerrie. Forte. Et ce n’était pas parce qu’une femme était forte qu’elle n’avait pas des failles, là, sous l’attitude revêche et le sourire mutin. Si la vision ne suffisait pas, il restait l’ouïe pour capter tout ce que la sorcière disait plus ou moins explicitement : la détermination dans la voix, son besoin de se débarrasser de gestes inassouvis, son envie d’apprendre, d’aller plus loin. Sanae détourna légèrement le regard, le reportant plus loin avant de revenir vers elle. « Mais je préfère ne pas me considérer comme une enseignante vis à vis de toi : une partenaire de combat serait plus juste. Deux femmes qui veulent juste améliorer leurs techniques ou les entretenir. Aussi simple que ça. ».

Un pied d’égalité, voilà ce qu’elle offrait. Un échange de bons procédés : Sanae avait besoin, elle aussi, de se défouler, d’entretenir ses armes et Jordane aussi. Peu importait les différences. Peu importait le nombre d’années passées à s’entraîner.

« Bien ! Le double de moi donc…. Ce qui signifie que je vais me faire défoncer : parfait ! »
Un clin d’oeil. « J’ai vu des confirmés faire des erreurs de débutants Jordane. L’expérience est primordiale mais elle ne fait pas tout. Tout dépend du mental. Voyons de quoi est fait le tien.»

Mais je crois déjà savoir…

Oui, elle se doutait fortement. Cela ne l’empêcha pas de se fendre d’un nouveau sourire, éclatant. Fier. Gentiment arrogant. « Mais oui, si ça peut te rassurer sur mes compétences, je risque de t’éclater. ».

La sorcière blonde lui parla de son expérience et Sanae fit une moue appréciatrice « Une dizaine d’années pour moi. Pas mal de pratiques éparses, de découvertes vu que j’ai pas mal voyagé. Mais quelques constantes. Taekwondo, boxe, Aikido/Aikibudo et autres dérivés, krav maga aussi… un peu de tir. »

Pas mal voyagé. Tiens, donc... « Bien. Voilà qui promet. » Une courte pause, pensive. « Je n’ai jamais pratiqué le tir. A part du tir à l’arc mais j’étais petite. » Une vague pensée pour la gamine qui avait failli se prendre une flèche alors que Sanae lui envoyait un regard noir après une moquerie lancée avec acidité. Elle était vite passée à une autre activité. Quant au tir, son père n’avait jamais été un grand fan des armes à feu. « Peut-être que tu pourras m’apprendre un jour. Je suis curieuse. »

Là, voilà, comme ça on n’était pas dans un schéma d’élève et de professeur standard. Sanae aussi pouvait apprendre de Jordane. Elle ne s’en cachait pas. Parce qu’au fond, la sorcière n’était pas enseignante : par la force des choses, elle l’était devenue pour Keza et pour Alec, mais ce n’était pas sa vocation.

Jordane lui posa quelques questions et la sorcière répondit avec amusement. Sanae lui expliqua qu’elle avait intégré la Garde en août dernier, rejoignant le combat contre les « coeurs purs ».

« Et ça va, ils sont bons joueurs ? »
Un rire franc. « Très mauvais. »

Mais ça, elle le savait déjà.

« Tu es de quel coin ? »
« Sud de la France. Marseille. » Une pause, anticipant la suite, presque comme une habitude. « Mais née au Japon. Tu y es allée ? » Question pas si hasardeuse puisqu’elle semblait avoir pas mal voyagé... 

Jordane fit quelques gestes avec sa baguette, vérifiant que la zone était sécurisée, sous le regard amusé de la sorcière. Elle l’avait souligné sans animosité, ni vexation.

« Ouais j’me suis déjà fait un peu secouer par Néolina, je deviens parano côté sécurité. »
Un hochement de tête. « C’est pas plus mal. » D’être parano. Après tout, dans le combat qu’ils menaient, ce n’était pas un surplus d’attention qui leur ferait du tort.
Il fut temps de s’y mettre et Sanae ne traîna pas : elle dessina d’un coup de baguette un cercle qui leur servirait d’espace d’entraînement. Comme un jeu, il faudrait tout faire pour expulser son adversaire du cercle. Elle lui laissait le champ libre sur la technique, voulant voir l’étendue de ses compétences. Rejoignant l’intérieur du cercle, Sanae l’attendit patiemment.

« Ok, pas d’échauffement, t’es comme ça toi. »
« Nos chers amis ne te laisseront pas le temps de t’échauffer. »

Quoi ? Tu crois qu’avant de les affronter, tu auras le temps de faire un échauffement ? Attendez, j’suis pas prête, faut que je m’étire et que je m’échauffe un peu là. Commencez sans moi.

L’image était drôle cela dit.

Sanae donna le feu vert et Jordane se mit en mouvement, se déplaçant en de larges cercles. La sorcière, elle, la suivait des yeux, le menton un peu bas. Ses pieds placés légèrement écartés, sans trop, répartissant son poids de façon équilibrée. Elle paraissait tranquille, calme, n’effectuant pas de mouvements larges, pas de mouvements du tout en fait. Son corps suivait simplement ceux de Jordane, se repositionnant souplement en fonction d’elle. Ses muscles étaient légèrement tendus. Elle était attentive, elle se préparait aux premiers coups de son adversaire, ses mains prêtes à contrer, ses jambes, à fuser. Elle aimait ce petit moment suspendu avant la première attaque, comme les quelques secondes précédant une pluie battante. On sentait l’humidité dans l’air mais rien ne s’abattait encore. Et puis, enfin, Jordane attaqua. C’était comme une joie sauvage dans l’adrénaline du moment, comme si son coeur sursautait férocement, vrombissait de plaisir. Sanae répliqua immédiatement, vive comme un serpent fondant pour mordre, ses mains traversant l’air pour  contrer, repousser. Un léger sourire étirait ses lèvres. Là, en coin, demeurait le plaisir de l’affrontement et dans ses prunelles sombres, des flammes intenses s’intensifiaient.

Sanae gardait néanmoins une distance, à l’instar de la sorcière blonde. Elles faisaient connaissance, se mouvaient pour chercher les réactions de l’autre et Sanae ne faisait pour l’instant que contrer, qu’esquiver habilement, voulant pousser Jordane à lui montrer toute l’étendue de ses talents. Elle ne donnait pas toute sa force, se contentait d’échapper aux prises, aux attaques, de répondre à certaines, ses réflexes prenant le dessus, son envie de piquer aussi. Piquer l’autre, lui montrer un dixième de ce qu’elle avait sous le pied. Et lorsqu’elle attachait, Jordane montrait elle aussi qu’elle pouvait esquiver. Un bon point. C’était un sourire appréciateur qui étirait alors sa bouche.

Enfin, son adversaire commença à attaquer pour de vrai. Une jambe vola pour atteindre son tendon et Sanae bascula son bassin sur le côté, déplaçant sa jambe rapidement, évitant le choc trop brutal, avant de revenir contrer le coup qui visait sa tempe. Ses bras fléchis se levèrent pour protéger sa tête et une fois le moment de recul de Jordane entamé, Sanae fondait sur elle, attrapant le bras qui l’avait visé, venant au contact rapproché, effaçant la distance de sécurité. Vive, précise dans ses mouvements mécaniques mais passionnés...la rage du combat insufflait un feu qui irradiait tous ses membres. Et son regard transperçait celui de Jordane. Cette fois-ci, elle ne la laissait pas s’échapper, esquiver. Pas d’échappatoire. La tranche de sa main vint frapper fort au cou tandis que son poing venait rencontrer le foie, l’impact contrôlé pour faire mal sans abattre pour autant. Un pas en arrière et Sanae fondait à nouveau, son poing cherchant à s’abattre sur le thorax.

La chaleur réchauffait son ventre, ses muscles. Son souffle était maîtrise mais elle ne cachait pas sa joie de combattre, ou celle de trouver une partenaire avec qui s’affronter. La sorcière recula, prête à esquiver les prochaines attaques, ses yeux demeurant sur Jordane alors qu’elle était attentive à ses mouvements, ne voulant pas briser le contact visuel déstabilisant qu’elle instaurait.

Allez Jordane, frappe plus fort.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Jeu 3 Sep 2020 - 20:36
Elle aimait être secouée,  aimait les défis, le challenge. Tête de mule dans l’âme, acharnée de travail, le traitement que lui réservait Dorofei pouvait sembler dur pour certains mais ne faisait que convenir à sa vision de l’entraînement. Rester dans sa zone de confort n’aide pas à progresser. Cela peut permettre de renforcer les acquis, de laisser au corps le temps de s’adapter, de se construire, de se rassurer aussi, de laisser à l’esprit la possibilité de gagner en sérénité et en confiance. Loin d’être inutile donc, mais tellement frustrant.

« Ouais, j’vois le genre. C’est bien, il te fait voyager. J’suis sûre qu’il prend grand soin de toi. »
« Oh pas de soucis pour ça. Et je lui rends bien. »

La joie rageuse d’avoir pu le mettre à terre au moins une fois, alors qu’il pensait la prendre par surprise restait là, brillant joyeusement au fin fond de ses prunelles.

« Une poupée de porcelaine ? C’est pas ce que je vois de toi. »
« Bien ! »

Un ton étrangement léger s’élevait, comme si ça n’avait pas d’importance.

Ça tombe bien, ça n’est pas le cas.
Néanmoins elle savait pouvoir en jouer, de cette gueule lisse de poupée parfaite. Certains idiots ne s’en méfient pas.  

« Mais je préfère ne pas me considérer comme une enseignante vis à vis de toi : une partenaire de combat serait plus juste. Deux femmes qui veulent juste améliorer leurs techniques ou les entretenir. Aussi simple que ça. ».
« Ça me va. »

Est-ce qu’elle avait véritablement beaucoup à lui apporter ? Beaucoup, sans doute pas. Mais quelque  chose, oui, c’était certain. Elle s’entraînait depuis moins longtemps, bien entendu, mais avait peut-être connu plus d’enseignants, s’était certainement baladée bien plus loin qu’elle. Ou pas d’ailleurs. Mais quand bien même. On a beau se targuer d’être expert dans un sujet, fondamentalement, on ne peut jamais tout connaître. Peut être ce qu’elle avait pu apprendre dans les pays de l’Est, par exemple, pouvait alors être particulièrement intéressants pour Sanae.

« J’ai vu des confirmés faire des erreurs de débutants Jordane. L’expérience est primordiale mais elle ne fait pas tout. Tout dépend du mental. Voyons de quoi est fait le tien.»

Un petit sourire moqueur se glissait sur ses lèvres.

« Tu sais, si tu ne veux pas te manger le statut d’enseignant, évite d’en être… Et évite d’enfoncer des portes ouvertes, elles se sont fait défoncer depuis longtemps. »

C’était un petit sourire provocateur qui flottait sur ses lèvres. Oui, je sais que les confirmés font des erreurs, je sais l’importance de l’expérience, je sais pourtant qu’il suffit de peu pour se planter et trouver la mort. Je sais. Evite de me prendre pour une enfant naïve. Je ne fais qu’énoncer une vérité, je n’attends pas d’être bichonnée et rassurée.

« Mais oui, si ça peut te rassurer sur mes compétences, je risque de t’éclater. ».
« Voilà ! Là on est bons ! Là on part sur des bases saines ! »

Et elle riait, amusée. Oui parce que c’est très sain de se foutre sur la gueule. Ça maintient en forme.

. « Bien. Voilà qui promet… Je n’ai jamais pratiqué le tir. A part du tir à l’arc mais j’étais petite. »
« J’en ai fait un peu aussi. J’aimais bien. »

Plus jeune, avant le décès de sa mère. Apparemment, elle n’était pas la seule acharnée de la pièce. Sanae était-elle hyperactive pour avoir tant enchaîné d’activités ?

« Peut-être que tu pourras m’apprendre un jour. Je suis curieuse. »

Le tir ? Elle n’avait pas touché une arme depuis ce fameux jour. Coupable mais non responsable. Le club avait pris à sa place. Jugé sans suite. Pourtant, elle sentait encore les vribrations dans son bras, l’impact de la crosse, la sensation qu’avait fait son cœur en cessant de battre quelques secondes alors que là-bas, l’homme tombait. On aurait pu penser qu’elle avait eu cet instant suspendu dans les airs, hors du temps et des Hommes, où elle avait vu la mort quitter son regard avant qu’il ne tombe. Mais on ne meurt pas sur le coup. Et elle ne l’avait même pas vu tomber. L’impact était ancré dans sa rétine mais pour elle ne savait quelle raison, un battement de cils plus tard et il était au sol, et le bruit qu’il émettait resterait à vie gravé dans ses oreilles. Juste avant que le brouhaha ne l’emplisse tout à fait, il était resté ce son immonde.
Tout comme le hurlement du second, sa face ensanglantée resterait sur ses rétines.

Un des gros avantages de la magie, c’est certain, c’est qu’elle peut au moins faire les choses proprement.
Un souffle, et il n’y a plus personne.

« Ouais ça marche. »

T’es sûre de toi ?
Oui.

Il est des fois où les démons, plutôt que de nous mettre à terre peuvent nous sauver la vie. S’en cacher serait puéril et lâche. Elles pouvaient toujours parler d’un jeu.
Mais à celui-là, il n’y avait pas mille options : il fallait vaincre.

« Très mauvais. »

At that game, We win or we die, quelque  chose du genre. Jordane, arrête de regarder Got à la salle, tu vas finir par faire moins attention à tes gestes et te blesser, c’est complètement con.
Oui mais je veux savoir ce qui arrive à Tyrion moi !!
Bref.

« Tu es de quel coin ? »
« Sud de la France. Marseille. »
« Ok. »

Non, pas de suite. Ni pour lui demander l’origine de sa famille (NE FAIT PAS CA MALHEUREUSE !!!!), ni pour répondre ce que tout autre aurait dit : « Ah c’est drôle, je suis française aussi, de Bretagne. » Et paf, ça aurait parlé Kouign-amann et bouillabaisse…. Ou meurtres de gang et blooms toxiques. Au choix.
Mais non, elle n’irait pas lâcher cette information comme ça. C’était sorti tout naturellement avec Lex pour elle ne savait trop quelle raison, ça n’avait pas vocation à devenir une habitude.

« Mais née au Japon. Tu y es allée ? »
« Ah ouais ? »
Et c’est là qu’on se sent con, parce qu’en réalité, la question qu’elle avait évité naturellement avait un véritable fondement et ne pas la prononcer pouvait correspondre à un manque d’intérêt pour l’autre plus que flagrant. Dommage, en soi, puisque ce pays la fascinait depuis la pré-adolescence. Hey génération Minikeum la Jordie.

« Et oui, j’ai fait un petit tour de l’Asie à une époque…. » Un petit tour ? «… enfin de plus d’un an mon petit tour. J’y ai vécu un moment.»

Quelques mois à en arpenter les rues, à visiter les îles, à découvrir la ville autant que les coins plus paumés, comme ce qu’elle avait fait dans l’Est.

« C’est tout le souci, on fini par devoir se forcer à bouger, il y a trop à voir, on finirait par y vivre une dizaine d’année avant de se décider à bouger de pays. Mais j’y retournerai un de ces quatre. »

Comme ailleurs. Elle n’avait pas eu le temps se s’établir au Vietnam, n’avait visité aucun des DOM TOM alors qu’ils faisaient partie de son propre pays – pays qu’elle avait totalement délaissé cela dit en passant – il y avait tant à voir. Et Jordane e trouvait de nouveau libre, tentée – admettons le – de retourner à ses amours de vagabondage. Elle n’avait jamais fait ni l’Italie ni l’Espagne non plus, n’avait fait qu’effleurer l’Afrique, sans parler du Moyen Orient.

Alors que veux-tu faire ? Porter les armes ou fuir ?
La fuite ou la lutte, l’éternelle question.

« Nos chers amis ne te laisseront pas le temps de t’échauffer. »

Elle se serait presque entendue, là où Dorofei lui répliquerait qu’il ne servait à rien de se blesser pour le plaisir, que ça ne fait que nous fragiliser pour le jour J. Deux points de vue qui se tenaient. Elle prenait de l’un et de l’autre, haussait des épaules, acceptant les règles sans broncher.

Le temps s’était suspendu un moment, Jordane tournait, glissait autour de son adversaire, vive, fluide, testait ses réactions, la rapidité de ses mouvements, la précision de ce regard l’aigle qui analysait chacune ses inflexions comme elle cherchait à le faire. La position des pieds, l’angle du bassin, la flexure du poignet. Elle voyait nettement l’influence japonaise dans le placement de ses pieds. Tandis que les siens empruntaient plus à la Corée. Pour le reste ? Aucune idée. Elle n’en était pas là dans ses capacités d’observation.
Chaque esquive était précise, fluide, facile même. Elle contrait avec rapidité, comme si chaque geste faisait partie d’elle. Tellement répétés qu’ils lui appartenaient à son corps dans une  mécanique bien huilée.

La réaction à sa première véritable attaque n’avait pas tardé à s’abattre sur elle. Le bras capturé alors qu’elle pivotait, évitant l’impact mordant du choc prévu et l’instant suivant, déjà, ses poings rugissaient dans l’air, le premier percutant son cou, le second, son torse. Bras libres, donc, elle se savait touchée avant même que l’impact ne la percute, la flamme dans le regard de son adversaire la giflant en premier.
Alors ses propres mains en profitaient. Vous la connaissez, la technique du ‘foutu pour foutu’ ? Ses poignets claquaient sur ses oreilles.

Etourdir l’adversaire, brouiller ses sens.

Souffle coupé par le choc, elle avait tout de même eu le temps de voir cette contracture dans le bras vengeur, prêt à s’abattre.  Partir sur la droite, pousser sur le pied gauche, le droit doit stabiliser, les genoux rester souples, permettre le mouvement… puis pivoter de tout son corps, le coup doit partir du talon, accompagné par la hanche qui donne la force et enfin, le poing percute les flancs.

C’était ce qu’elle avait fait, n’atteignant pas sa cible à sa grande frustration. Mais le dernier coup visant son thorax ne l’avait pas atteinte non plus, étant passée à l’extérieur, avançant là où l’instinct hurle de reculer, pour atteindre l’adversaire sur le côté, percutant les côtes flottantes. Mais Sanae s’était dérobée sous elle, Jordane reculant immédiatement, retrouvant une distance de sécurité, le torse contracté, légèrement penché sous la douleur, son cou irradiant tandis qu’elle relâchait les mâchoires, inspirant doucement, la douleur distillée dans tout son corps.

Et pourtant, c’était bien le plaisir qui brûlait ses prunelles.
Comme chaque fois qu’elle s’entraînait en confiance, comme avec Margo, comme ça avait pu l’être dans le passé, à Poudlard et avant. Le feu de la bataille circulait déjà, la dévorant toute entière.

Si tu as mal, c’est que tu es en vie.

C’était là exactement ce que son corps lui hurlait de tout son être. Vivant, prêt à répliquer, brûlant de cet affrontement soudain. Libérer la colère, libérer la frustration, prouver ses capacités, montrer qu’il ne se laisserait pas faire, que les coups ne le mettraient pas à terre si vite. Cette flamme, elle les consumait toutes deux, grisant leurs prunelles. Un demi-sourire en coin, Jordane non plus ne lâchait pas l’acier de ce regard braqué sur elle.
Attaquer avait toujours été le plus compliqué pour elle qui s’était entraînée à se défendre à l’origine.

Mais la meilleure des défenses n’est-elle pas l’attaque ?

Précise, violente, fourbe. Elle revenait à la charge.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Sam 12 Sep 2020 - 15:20
Est-ce qu’elle avait prévu de discourir avant l’affrontement ? Non. Elle ne s’était d’ailleurs pas attendu à ce que Jordane lui pose des questions. Au fond, elle n’était pas plus à l’aise qu’elle pour ce qui était d’être sociable : elle l’avait trop été, voulait s’éloigner de cette façon de toujours s’intéresser aux autres à défaut de s’intéresser à elle-même. Si elle faisait l’effort, c’était parce qu’elle recherchait cet équilibre entre le refus de l’autre et l’acceptation. Fine ligne qui était si difficile à trouver.

« Oh pas de soucis pour ça. Et je lui rends bien. »
« Je n’en doute pas. »

Elle n’en doutait pas. Dorofei lui aussi pouvait se montrer féroce et il ne rechignait pas à utiliser des méthodes vicieuses ; c’était toujours bénéfique de s’entraîner avec les autres, de voir comment ils fonctionnaient, d’apprendre d’eux et de s’y mesurer. Jordane avait eu de bons professeurs. De très bons...

« Ça me va. »

Ainsi, elles ne seraient pas élève-professeur, elles seraient seulement partenaires de combat. Un lien qui allait mieux à Sanae aujourd'hui. Du moins, elle le pensait. C'était parfois dur de lutter contre l'instinct, hein? Ce n'était pourtant pas sa vocation, elle était médicomage merde!

Le sourire moqueur de Jordane ne lui échappa pas. Il venait danser avec ses nerfs.

« Tu sais, si tu ne veux pas te manger le statut d’enseignant, évite d’en être… Et évite d’enfoncer des portes ouvertes, elles se sont fait défoncer depuis longtemps. »

Du calme, Sanae. Du calme. Ne réplique pas. Ce n’est pas vraiment une attaque. Plutôt une défense, parce que tu la mets dans une position d’élève naïve sans le vouloir. Alors, respire. Heureusement qu’elle n’était son enseignante, elle aurait trouvé de quoi la punir immédiatement.
Et le sourire de Jordane, provocateur...qui l’échauffait drôlement.
Elle lui servit un fin sourire froid, crispé, fugace. Un sourire qui voulait dire « je vais te défoncer, toi. Je vais te bichonner. Cordialement. En toute amitié.  ».

Sa prochaine réplique avait semblé la rassurer, son rire venant détendre l’atmosphère et les nerfs de Sanae.

« Voilà ! Là on est bons ! Là on part sur des bases saines ! »
« Bien. On est d’accord. »

Les questions ne tardèrent pas à affluer. Quelques informations de base, pour se connaître un peu mieux, savoir d’où venait l’autre, savoir aussi à quoi s’attendre dans leur premier affrontement. Jordane, elle aussi, avait testé bien des techniques. Comme quoi, elle n’était pas la seule à aimer la diversité des méthodes combatives.

« J’en ai fait un peu aussi. J’aimais bien. » Rapport au tir à l’arc, qu’elle n’avait, elle, que peu pratiqué. Ne pas foutre un arc et une flèche dans les mains d’une gosse pas encore capable de se maîtriser. L’idée avait vite été abandonnée. Cela dit, si Jordane pouvait lui apporter quelque chose, Sanae n’allait pas refuser, ni laisser passer l’opportunité. Histoire d’avoir plus d’une corde à son arc…Quoi ? Trop facile comme blague ? Je vous emmerde.

« Ouais ça marche. »

Un hochement de tête, pas plus. Cache ton enthousiasme Brooks, il me vrille les tympans là.
Etait-ce un trouble qu’elle voyait poindre dans les prunelles de la sorcière blonde ? Il disparut bien vite, balayé par d’autres questionnements. Cette question, Sanae y était habituée et elle faisait s’enchaîner d’autres.

« Tu es de quel coin ? »
« Sud de la France. Marseille. »
« Ok. »

Un sourire en coin avait étiré ses lèvres. Tu te retiens de demander, hein ? Oh, fais toi plaisir. Elle s’en fichait bien, elle, alors elle embrayait presque par automatisme. Avait-elle pensé à dire qu’elle était adoptée ? Non. Elles n’étaient pas dans une démarche de confidences. Elles s’en foutaient de savoir ces choses-là, la conversation n’avait de sens que parce qu’elles se parlaient vraiment pour la première fois et que les convenances voulaient qu’on n’attaquait pas directement. Un effort qui coûtait mais qui permettrait plus tard de ne pas s’en embarrasser.

« Mais née au Japon. Tu y es allée ? »
« Ah ouais ? » Bah ouais. « Et oui, j’ai fait un petit tour de l’Asie à une époque… enfin de plus d’un an mon petit tour. J’y ai vécu un moment.»
« Joli petit tour. » s’amusa-t-elle. C’était rare de croiser des gens autour d’elle qui avaient voyagé autant. Est-ce qu’elle avait pensé elle-même à demander d’où venait Jordane ? Non. Elle ne s’engouffrerait pas dans une conversation qui ne l’intéressait que peu au fond.

« C’est tout le souci, on fini par devoir se forcer à bouger, il y a trop à voir, on finirait par y vivre une dizaine d’année avant de se décider à bouger de pays. Mais j’y retournerai un de ces quatre. »

Bouger. Sanae l’avait trop fait sûrement, suivant son père de pays en pays dans ses déplacements professionnels, incapable de se détacher de lui. Pourtant, elle avait vu des pays sans vraiment s’y arrêter, cloîtrée dans des Ministères, dans des chambres d’hôtels, ne visitant que rarement. Elle n’avait pas profité, toute obnubilée qu’elle avait été par Masa. L’espace d’un instant, elle s’imagina valdinguer dans le monde entier, libre. Envie fugace. La guerre la maintenait à bon port. Mais l’idée de retourner au Japon ? Elle y avait pensé quelques fois, avait senti l’envie s’immiscer en elle avant d’être vite balayée. Pourquoi vouloir y retourner ? Pourquoi maintenant ? La réponse, quelque chose la lui soufflait au fond d’elle-même, mais elle n’était pas prête à l’écouter.

« Un de ces quatre... » répéta Sanae en soupirant. Elle aussi aurait aimé partir quelque temps, profiter d’autres paysages, mais trop de choses la retenaient ici. « En attendant, voyons si l’on peut s’occuper en faisant chier ces connards. »

Pas besoin de précision sur les connards en question ?
Toute la classe a suivi ?
Bien.
Vous aurez une gommette.

Allez, en place. On commence.

L’affrontement n’avait pas tardé à se faire rapide, violent, acharné. Toutes deux ne semblaient pas vouloir perdre de temps par de vaines escarmouches. Elles préféraient le coeur de la tempête, la fièvre de la bataille.

Le choc sur les oreilles, étourdissement éphémère mais brutal. Et d’un seul coup, la rage qui montait d’un cran, rugissait dans un grognement lâché entre des dents serrées. Les prunelles sombres de la sorcière n’étincelaient plus, elle flamboyaient dangereusement. Une flamme brutale, prête à tout dévorer, y dansait furieusement. Les coups s’enchaînaient avec la même force de vaincre, la même envie de laver leurs membres de tous ces gestes qui les démangeaient violemment, de faire s’en aller cette frustration, cette impuissance à ne pouvoir hurler à plein poumons tout ce qu’on aurait voulu vomir. Sanae recherchait cet instant fugace d’après combat où l’on se sentait fébrile, épuisé, endolori, mais soulagé. Le soulagement d’après bataille. Sentiment de rassasiement intense. Elle aimait tout autant la tempête que le calme qui la suivait. Est-ce qu’il en était de même pour Jordane ? Ce besoin de violence, en combien d’êtres était-il présent ?

Ce n’était pas pour rien si elles avaient appris à se battre, ce n’était pas pour rien si elles continuaient à perfectionner leurs défenses, leurs attaques, s’endurcissant à mesure que le temps passait. Et si Sanae avait d’abord appris à se battre pour canaliser cette chose en elle qui grondait, elle devait aujourd’hui apprendre à se battre pour la laisser rugir, pour en apprécier les sensations vives, vibrations du corps et de l’âme. Mais aussi de l’esprit...et cet esprit, il battait violemment en cet instant. Il voulait s’échapper, fondre, se déverser.

Non.

De la maîtrise. Une meute à la fois, lâchée sans brides. Jordane était une sœur d’arme, pas une ennemie. Il fallait s’en souvenir, faire le rappel constant, apprendre à ne pas se laisser glisser vers son esprit, ne pas s’étendre pour fendre les barrières éventuelles. Bien plus difficile que de retenir ses coups. Bien plus difficile que de retenir des mots acerbes. L’effort constant de ne pas se déchaîner complètement. Et cette envie-là plus assourdissante encore que le bourdonnement dans ses oreilles après le coup.

Déjà, elle fondait à nouveau, évitait les attaques de Jordane tandis que la sorcière blonde faisait de même, esquivant le coup au thorax, tentant de frapper à ses flancs. Les corps allaient vite, réagissaient mécaniquement, habitués aux mouvements, entraînés à les contrer. Pourtant, Sanae n’était pas aussi scolaire qu’avant dans sa technique. Autrefois, elle aurait salué son adversaire, aurait laissé le temps de reprendre son souffle, se serait éloignée, se serait laissée attaquer pour contrer simplement, toujours dans la défense, jamais vraiment dans l’attaque puissante, ou seulement pour mettre fin au combat. Même dans ce dernier, elle s’était toujours retenue, subissant par empathie exagérée les coups portés à l’autre.
Or, aujourd’hui, elle se faisait plus vive, plus puissante. Sa force, elle ne la cachait plus. Elle fondait, frappait, esquivait avec une agilité déconcertante. Un animal qui se mouvait adroitement, en proie aux sensations, alliant un esprit reptilien à la force des pulsions. Pas de merci. Elle ne laissait pas le temps de reprendre son souffle, elle attaquait, attaquait, n’avait plus que ça en tête.

Jordane avait reculé, le souffle court, penchée légèrement en avant après le coup porté, violent. La flamme de son regard faisait écho à la sienne et toutes deux souriaient férocement. La distance fut réduite rapidement, Jordane revenait à l’attaque et Sanae laissant échapper un rire sauvage, appréciateur. Son sang semblait s’écouler si vite dans ses veines qu’elle en oubliait le lieu, le temps.  Toutes pensées quittaient son esprit ; elle n’était même plus dans l’analyse mais dans le plaisir. Ses traits se déformaient, se crispaient délicieusement à mesure que l’affrontement se poursuivait. Elle voulait voir Jordane attaquer, attaquer vraiment, et non plus se défendre.

Allez, putain, sois aussi féroce que tu l’es à l’intérieur.
Sois la force brute, bestiale.
Fais-moi mal pour de vrai !
Frappe, ne t’arrête pas, ne recule pas !


Et Sanae revenait à la charge elle aussi, tentait par ses attaques de la faire reculer pour tester ses réactions, pour la rapprocher de la ligne bleue qui les encerclait. Son poing fendit l’air pour viser la mâchoire, force qui s’appuyait sur les jambes, genoux légèrement pliés, tandis que son autre bras demeurait en défense, prêt à contrer la réplique qui viendrait sûrement, l’attendant patiemment. Et dès que le coup fut parti, tentative de distraire son adversaire pour occuper le haut du corps tandis qu’un pied venait s’élever pour s’abattre sur la jambe de Jordane, au niveau du genou, pour la déséquilibrer. Et les coups s’enchaînaient, un autre poing venant viser l’épaule. Menton légèrement vers le bas, bras prêts à réagir aux coups éventuels portés au visage, prête à défendre sa propre mâchoire. Elle préférait nettement prendre des coups aux cotes que sur la gueule. Il fallait faire des choix en combat. On ne pouvait pas tout protéger, on ne pouvait pas rester intact. Et la douleur, elle s’en fichait, elle la ferait sienne autant que la victoire.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Dim 13 Sep 2020 - 14:06
Pas envie de converser non plus, pas envie de parler, de lâcher des infos, ni vraiment d’en apprendre plus sur l’autre. C’était le cas pourtant, mais pas là, pas maintenant, pas alors qu’elle gardait cette fureur qui grondait en elle. Malmenée, blessée, esseulée. Envie de rugir, envie de mugir, de se cabrer, de se débarrasser de toute cette merde qui encombrait ses veines. Alors ouais, la socia, elle la faisait parce que dans le fond, Jordane gardait un garde fou, surtout au sien de la Garde, face à ceux qu’elle considérait comme ses supérieurs hiérarchiques. Garde fou seulement. Ses mouvements se faisaient précis, brutaux. Et dans ses muscles, la fièvre de la bataille, la rage de sentir s’écraser les poings, se crasher les chairs, se briser les os. La douleur, elle l’acceptait, l’attendait, fureur guerrière que de s’acharner, anticiper l’adversaire, déjouer ses pièges. Les corps s’affrontaient, ripostaient, précis, percutants. Le contrôle n’était pas resté là longtemps car déjà, dans leurs prunelles, flambait la rage de vaincre. Cette volonté sauvage, puissante, de dominer, de sortir vainqueur, de sentir son adversaire faiblir. Ce besoin cruel, instinctif d’entendre hurler ses propres muscles, de brûler toute énergie, de percuter les chairs, maîtriser ses gestes, n’être plus qu’un corps qui se bat pour la vie, pour la victoire.

Qu’importe l’impact, il ne faisait que faire vibrer en elle la corde de la bataille. Celle qui rugissait dans ses tempes, se foutait de ses deuils, se foutait de ses pertes, se foutant de Lex, de la honte, de la culpabilité. Elle voulait cogner, s’en sortir victorieuse un peu, délaisser cette sordide immobilité qui l’insupportait. Elle voulait vaincre, sentir la puissance de ses coups se crasher, percuter un corps et le sentir geindre. Peut-être nocif, peut être malsain, et pourtant cette violence, elle la retrouvait dans les prunelles de son adversaire, s’en gorgeait comme elle pouvait le faire dans l’intimité. Même principe, même rage, même fourgue, même force d’un corps qui s’enrage d’exister.  Malgré les coups, malgré la peine, malgré les doutes. C’était ainsi qu’elle savait avancer, chaque coup faisant battre plus fort dans son âme la tempête de la résistance, le refus de capituler.

Les impacts s’enchainaient, se faisaient rudes, puissants. Elle savait se défendre et encaisser alors pourquoi ralentir rythme et force ? Non, chacune de ses cellules s’enrageait de la faire capituler, de se montrer plus forte, plus rapide, plus imprévisible que ce qu’on pourrait croire, attendre de sa gueule de poupée. Et le plaisir se répondait l’une à l’autre quand les chairs s’écrasaient, se frappaient, douloureuses, percluse. Ce vice de se sentir en vie.
Mâchoire sauvée, corps ébranlé en arrière tandis que son poing, vorace, percutait un poing sensible, ganglion de nerfs douloureux, mais déjà une jambe partait sur elle et Jordane esquivait de peu, tombant dan le piège, un coup porté à l’épaule, comme pour la punir. Puissant, l’articulation crissait, mais elle pivotait déjà, hors de portée, le coude parti en direction de la mâchoire de son adversaire. Et déjà la rage, la puissance, repérant une faille, ténue. Elle avait toujours eu bien plus de force dans les jambes que dans le haut du corps, marques des années de Taekwondo qui s’étaient enchaînées naturellement. L’évidence même, car sentir la puissance de ses muscles s’abattre faisait fuser son sang, le changeait en lave, la gorgeait de rage.

Les corps se percutent, les muscles tendus donnent tout ce qu’ils ont. Ça n’est plus la retenue qui dirige ses coups mais l’envie de vaincre, réelle, puissance, celle qui sature ses nerfs, débranche ses pensées et ne laisse chez elle plus que la guerrière avide de victoire. Les gestes sont naturels, répétés, se retrouvent, cherchent à percer les défenses. Et chaque coup est porté avec une violence sourde, chaque opportunité est prise, exploitée, dévorée. Jordane restait attentive, cherchait les pièges, loin de n’être qu’une boule de rage sans analyse. Mais la majeure partie de celle qu’elle était habituellement avait disparu. Il ne restait plus que l’instinct, le cerveau reptilien papillonnant, bouillonnant, les influx nerveux parcourant chaque fibre de son corps. Chaque signal parcourant ses neurones, prises d’informations autant que réactions puissantes et immédiates. Si elle frappait, c’était pour toucher, sans filtre, sans ce fameux garde fou qui était encore présent peu de temps plus tôt. La douleur, elle ne la sentait pas vraiment. Ça viendrait, plus tard, avec les crampes, les courbatures, les hématomes. Mais la fureur de vivre hurlait trop fort pour laisser le reste l’emplir. Voilà ce qu’elle aurait aimé être face à Lilian. Voilà la puissance qu’elle aurait voulu lui opposer et le briser, le détruire, arracher cette supériorité hautaine dans ses prunelles. Le disloquer, pulvériser ses os, arracher ce petit air supérieur et voir la peur s’insinuer, violente, dévorante. Parce qu’elle n’était pas une saloperie de pauvre petite victime qu’on emporte dans une cave pour se gorger de ses plaintes. Elle n’était pas un cadavre dans un parc. Elle était celle qui se relevait à la fin de la bataille, le corps perclus, le sang sur les mains mais la vie bien présente au fond de ses cellules. S’il devait y en avoir un debout, ce serait elle.

Les impacts faisaient crisser ses os quand ils atteignaient leur cible. Corps en ébullition, nerf à vif, elle donnait tout ce qu’elle avait, évitait ce qui pouvait l’être, acceptait le reste, laissait son espace de sécurité aux oubliettes, balancé aux cachots depuis longtemps. On a mal pendant un affrontement, c’est normal, et elle l’acceptait parfaitement, faisant de la douleur une arme, une banderole contre la mort.

Si t’as mal, c’est que t’es en vie.
T’imaginais pas ça pour ta fille je suppose.

Et pourtant, par morgane qu’elle  s’éclatait en cet instant, définitivement vivante, malgré les échecs, malgré les erreurs, malgré la douleur, fulgurante, dans sa mâchoire, son flan, son épaule, ses bras, ses cuisses. Elle évitait systématiquement chaque point sensible, préservait genoux, coudes, organes vitaux, et pourtant elle s’en mangeait des coups, acceptés chacun comme un pied de nez à sa propre existence. A ses propres souffrances. Tant que le corps souffre, l’esprit se tait. Ça lui allait comme ça.

Cri de rage, elle s’en prenait de nouveau, en évitait d’autre, déjouait des pièges, et frappait de côté, coup pivoté, jambe envolée, puissante, mordante.

Nouvelles passes et en partant pour frapper à son tour le genou de Sana, elle perdait pied. Erreur, fatigue, douleur, la voilà qui se mangeait le coup de plein fouet, encaissé par la puissance des muscles qui protègent les os, balancée au sol une énième fois, les ongles enfoncés dans la terre sombre, elle se relevait par réflexe, s’éloignant, pivotant, roulant en dehors des coups, l’esprit brumeux, le crâne choqué, la vision qui valse sans vraiment se stabiliser. Sans réellement s’en rendre compte, ses jambes ne la tenaient plus et voilà qu’elle chutait en dehors du cercle. Enième coup, sans doute celui de trop pour cette première. Les muscles tremblent, s’ancrent pourtant au sol quand elle se redresse douloureusement, posant le regard sur le cercle bleu, juste là, sous son corps. Et au dessus d’elle, la flamme du regard de Sanae.

« Eh merde.. »

Perdu.
Echec attendu.

Et d’un rire sonore, elle se laissait pivoter sur le dos, le crâne, le corps toujours en vrac. Hilare, exaltée.
Depuis combien de temps ne s’était-elle pas battue comme ça ? Viscérale.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Dim 20 Sep 2020 - 0:16
Lorsqu’elle était beaucoup plus jeune, Sanae avait peu de patience alors elle se pressait d’apprendre.
Incapable de rester sur un échec, incapable d’admettre la défaite, incapable de s’arrêter dès lors qu’elle sentait qu’elle ne maîtrisait pas un apprentissage. Elle retentait, et retentait encore, allant plus fort, plus loin, s’acharnant à réussir, heure après heure, geste après geste, livre après livre. Elle voulait tout savoir, tout contrôler, même les fois où elle tombait. Cela avait été d’ailleurs la première leçon qu’elle avait apprise. Apprendre à tomber pour mieux se relever ensuite. Elle éreintait ses tuteurs, ses entraîneurs, les rendait fous par sa volonté infaillible, par son entêtement féroce. Elle échouait, tombait à nouveau ? Elle réessayait. Encore. Encore. Encore. Sans jamais s’arrêter. Parce que s’arrêter, c’était stagner, c’était abandonner, se complaire dans la défaite. Non. Jamais. « Je vous surpasserai. » avait-elle répété à ses professeurs, à son père. Envie motrice d’avancer, de prouver quelque chose, de se délester de cette impuissance qui avait été la sienne durant sa petite enfance. Et puis, avec les années, maîtrisant tout ce qu’elle pouvait, Sanae s’était radoucie, avait mis de côté le feu de bataille, l’envie de dépasser le Maître. Bridée jusque dans ses gestes, jusque dans sa volonté, jusque dans sa magie. Ne pas dépasser du cadre. Alors les entraînements s’étaient faits plus doux, plus respectueux, elle avait appris la patience, la douceur. Ferme, mais souple. Forte mais respectueuse. Têtue mais sans l’audace insolente de son plus jeune âge. Parce que finalement, ce père, ce Maître-là, elle ne voulait pas vraiment le dépasser, cela lui aurait enlevé tout son pouvoir, tout son mystère. Alors, elle s’était retranchée dans des projets plus altruistes. Sauver des vies. Elle s’était éloignée d’elle-même jusqu’à oublier sa véritable force, sa véritable puissance, si bien...qu’elle ne l’avait pas exploitée depuis longtemps. Jusqu’à ce que Logan ne la réveille de sa torpeur, jusqu’à ce que sa magie ne brise les chaînes.

Et ses gestes n’étaient plus entravés désormais.
Elle se mouvait avec force, avec agilité, vive et efficace, brutale et féroce. La peur d’abattre son ennemi pour de bon s’était envolée avec celle de s’assumer elle-même. Ce premier entraînement, il était tout aussi nécessaire pour Sanae que pour Jordane. Elles devaient faire rugir leur force, laisser se mouvoir leurs corps pleins de rage et de douleur. Là, il y avait quelque chose à se prouver à soi-même, plus qu’aux autres. Là, il y avait cette impuissance qui était écrasée par un combat acharné. Là, elles se retrouvaient véritablement chacune à leur manière.

Oh, comme elle se sentait légère sans ses poids à ses chevilles. Oh, comme elle fendait l’air avec joie, comme elle laissait ses membres rejeter, prendre, donner les coups qui rythmaient l’affrontement. Un affrontement qui n’était pas vraiment l’une contre l’autre mais plus contre toutes ces choses qu’elles devaient affronter, toutes ces choses qui leur faisaient mal, toutes ces choses qu’elles retenaient. Elles étaient le réceptacle de la rage de l’autre, et il n’y avait alors pas de volonté de s’abattre réellement, de se tuer. Simplement celle de rugir. Fort. Et peu importait si elles ne se connaissaient pas : qui avait besoin de connaître la couleur préférée de l’autre, ce qu’il et ou elle aimait manger, d’où il venait, ce qu’il faisait en dehors de la Garde. On s’en fout. Aucune importance. C’était bien plus personnel de partager ce moment. Bien plus intime de se rencontrer dans la brûlure mordante des coups qui percutaient les corps. Leurs regards se répondaient avec violence et elles retrouvaient alors chez l’autre cette même envie et ce même plaisir de se battre.
Même brutalité, même besoin de se propulser dans la bataille qui rageait.

Et bataille il y avait. Les coups pleuvaient, les ripostes s’accéléraient. Mais aucune d’elles ne s’arrêtaient, ne ralentissaient le rythme. Au contraire, elles se faisaient plus rapides, plus percutantes, plus puissantes, s’ajustant à la folie frénétique qui les prenait. Une folie que la sorcière tentait de maîtriser autant que d’en embrasser les sensations. Le bon dosage, Sanae. Le bon équilibre. Ne pas perdre de vue que ce n’est pas un ennemi en face de toi. Juste une partenaire de combat. Un corps à ne pas briser, juste à percuter. Elle se concentrait sur les mouvements, les siens et ceux de Jordane. La sorcière blonde était féroce, ses gestes contrôlés, ses positions travaillées. L’expérience était là, bien présente, ancrée dans sa façon de se mouvoir, de capter le regard de l’autre, d’analyser les techniques employées. Sanae, elle, avait abandonné l’analyse scolaire en cours de route : l’urgence était de ne pas aller trop loin, de ne pas perdre l’équilibre précaire. L’urgence était de se sentir vibrer par la violence. L’instinct se couplait à sa propre expérience, aux membres qui, mécaniquement, savaient quoi faire, à l’esprit qui, reptilien, trouvait les failles.

Jordane esquivait les coups, les lui rendait avec la même force et Sanae sentait son corps rugir à chaque impact : il ne rugissait pas de colère, mais de plaisir. Oh, comme son sang circulait si vivement dans ses veines ! Oh, comme son coeur semblait grésiller à ses oreilles !

La mâchoire s’était dérobée, vive esquive de la sorcière blonde. Une esquive qui la mena à se prendre un poing dans l’épaule, attaques enchaînées rapidement, en des mouvements éclairs. Loin de s’arrêter à cause de la douleur, Jordane faisait fuser son coude vers le visage de Sanae. Une main fusa pour l’arrêter mais elle ne put se protéger de la jambe qui percuta la percuta. L’impact se répercuta jusque dans son os : la force des jambes de la sorcière ne faisait aucun doute et la douleur l’irradia comme une brûlure vive, lui coupant le souffle un instant. Un souffle coupé entre des lèvres qui souriaient joyeusement, voraces. Et l’éclat de ses prunelles s’enflammait un peu plus.
Les coups repartirent de plus belle.

Regardez-les fendre l’air. Regardez ces corps de femmes, puissants et acharnés, qui démontrent toute leur force. Leur façon de frapper, de jouer des failles de l’autre, d’en créer, de se pousser, encore plus loin, de s’abattre avec plus de brutalité...Oui, elles vivent ces femmes, elles hurlent, elles brandissent leur violence, leur rage, leur échecs, leur faiblesses, leur doutes et elles les transforment en force de frappe. Guerrières, conquérantes...elles n’auraient jamais permis qu’on les soumette. Parce qu’il était temps de se battre, temps de hurler son acharnement au ciel et à la terre.

Sanae sentait son esprit s’affoler. Il voulait rugir, miroir des gestes. Et les regards se percutaient, se répondaient toujours et ce putain d’esprit qui voulait se tendre, accélérant son rythme cardiaque déjà bien haut. Alors elle luttait, mais ce n’était pas simple : tout en elle était tendue vers Jordane, vers l’affrontement, et tout se mêlait. L’esprit bloqué sur l’adversaire, les membres qui répondaient aux attaques incessantes. Puissances de feu qui vibraient en écho. Cela devait prendre fin, là, très vite. Ses tripes lui disaient d’arrêter le combat, de sortir de l’intensité du moment pour ne pas se perdre, pour ne pas briser la limite. Elle la sentait se rapprocher, cette limite, à mesure que les gestes se remplissaient d’une nouvelle violence. La douleur n’était plus, elle turbinait en fond, et sa conscience rejetait les sensations, se saisissait de toutes les autres. La fièvre du combat la prenait. Tout entière. Brutalement. Quelque chose vrombissait à ses oreilles, ses muscles crissaient, son ventre se tordait.

Alors Sanae se laissait emporter par la fièvre de vaincre, repoussant l’envie dévorante de son esprit agité, tout en elle lui criait de combattre plus vite, plus fort, d’encaisser tout ce qui venait heurter son corps qui s’en prenait autant qu’il donnait. Chaque coup traçant une onde de choc sur elle. Oui, là elle se sentait vivante, là, elle se sentait plus ancrée dans la réalité qui lui avait échappée ces derniers jours. Elle revenait à des choses concrètes, revenait sur la terre ferme plus violemment que jamais. Mais pour combien de temps ? Serait-ce éphémère, cette impression d’être tout à fait dans le présent ?

Et puis Jordane s’acharnait davantage, poussant un cri de rage, revenant à l’attaque avec sa jambe. Cette jambe qui avait une force de bête, et que Sanae se prenait d’un seul coup, poussant à son tour un cri enragé, son coeur explosa dans sa poitrine. Fureur. Chaos. Sa jambe fendit l’air pour se propulser vers la même épaule qui avait pris un coup un peu plus tôt. Exploitation d’une douleur récente. Et son poing venait rencontrer les cotes avec puissance, ses phalanges sentait les os sous les muscles, se cognant à ce corps tendu. Son adversaire tombait à terre, se relevait. Et les coups pleuvaient. Rien ne défaisait Jordane de son envie de vaincre pourtant, et la sorcière souriait dans sa fureur, appréciatrice de la combativité qu’elle lisait chez l’autre. Souriante, oui, même lorsque Jordane lui rendait ses coups, réactive, tenace, mordante. Ah, comme cela lui faisait du bien de sentir quelqu’un rejeter la douleur comme elle le faisait et s’acharner à aller plus loin !
La fièvre, elle lui montait à la tête.

La sorcière blonde voulut viser le genou et là… Là, la faille. L’erreur. Un coup de pied violent au menton, soulevant la tête, la sonnant. Et elle roulait à terre, ongles enfoncés dans l’herbe. Se relevant, elle s’extrayait de sa prise, évitant la reprise des coups, pivotant pour être hors d’atteinte. Son regard était troublé, le choc rendait ses jambes fébriles et le sourire de Sanae s’étirait davantage. Arrêtons les frais. Un coup porté à la jambe gauche, la déstabilisant davantage et Jordane chutait en dehors du cercle.

La jambe fléchie, Sanae se redressa et soupira, le regard porté sur le corps de son adversaire à terre. Elle avait beau n’avoir rien contre Jordane, cela la remplissait de joie de la voir vaincue. Le joie de la guerrière victorieuse. Les muscles endoloris, le souffle court, Sanae fit quelques pas, passant le cercle bleu tandis que Jordane se redressait. De toute sa hauteur, la sorcière la fixait avec un sourire conquérant, ses prunelles enflammées par la frénésie de vaincre. Pire drogue au monde, non ?

« Eh merde.. »

Un souffle amusé, légèrement arrogant.
Et Jordane, qui laissait reposer son dos dans l’herbe, rieuse.

Sanae pencha légèrement la tête.

« Tu es... comme ton surnom l’indique….une véritable arme. »


Elle vint s’allonger dans l’herbe à côté d’elle, un bras replié derrière sa tête. La douleur s’emparait de son corps, de ses os, de ses muscles. Une main posée sur son flanc, elle sentait que demain apparaîtraient dans des couleurs bariolées toutes les marques, tous les bleus.

« Non pas que ça m’étonne, mais c’est toujours utile d’avoir confirmation. »

Elle grogna légèrement, étirant son bras en faisant craquer son articulation.

« Bah heureusement que demain, j’bosse pas. »
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mar 22 Sep 2020 - 20:46
Les coups s’enchaînaient sur sa carcasse, sans cesse rendus, la force dans ses muscles sans cesse appelée, invoquée, autant que sa vivacité. Mais là, dans le fond, la rage, le besoin de vaincre, ne cessait de combler les vides, d’emplir son âme autant que son corps, cherchant la victoire, la puissance, la dévastation. Sanae était trop douée pour réellement risquer quoi que ce soit, alors à peine limitait-elle ses coups, consciente qu’elle en limiterait les dégâts, les éviteraient pour la grande majorité. Dans ses veines, la lave circulait. Celle qui l’avait tant maintenue à flot depuis la mort de sa mère, celle qui rugissait de s’abattre de nouveau, qui refusait d’être maltraitée, celle qui préférait frapper plutôt que de laisser un genou à terre. Elle avait été le reflet de Sanae, acharnée, violente, butée. L’envie de s’en sortir, le besoin de maîtriser la discipline, de  surpasser le maître, de se prouver à elle-même qu’elle était meilleure. Non, pas meilleure. Viable. Capable de survivre à sa propre existence, capable de passer outre, d’avancer, de mettre à terre ceux qui pourraient l’agresser. Viable. Qui peut vivre. Qui ne terminera pas comme un cadavre à pourrir dans une saloperie de parc. Dont on n’annoncera pas la mort entre le plat principal et le yaourt. Qu’on n’attendra pas toute la soirée en rassurant la petite sœur alors qu’on ne cesse soi-même de téléphoner pour comprendre où sa mère est passée. Viable. Forte. Elle vivait avec un regret. Un regret aberrant et abusif. Celui de ne pas avoir été dans ce parc pour frapper à mort cet homme. Celui de ne pas avoir accompagné sa mère à ce moment de son existence, d’avoir eu la flemme de faire des efforts, d’être restée avec sa sœur devant la télé. Celle de ne jamais avoir senti la chaleur du sang de l’ordure qui avait détruit sa famille sur ses poings, sa vie entre ses mains. Ça n’était pas pour se contenir qu’elle avait voulu prendre le contrôle. C’était pour rugir plus fort, pour exister en plus grand, pour prendre la place qu’on lui refusait. Car soudainement, il lui avait semblé que dans les ombres, un prédateur rôdait qui cherchait à la réduire au silence, à la peur. La défaire par sa domination. Il voulait l’annihiler, la supprimer de par sa simple présence, orgueilleux, destructeur, tout centré sur ses besoins pervers qu’il était. C’était sa rage d’exister qui crissait sur ses os, qui acceptait la douleur, qui rugissait plus fort que l’agression, plus fort qu’une mort possible. Probable. Envisagée depuis des années.
Elle s’était retrouvée seule, à bouffer de la solitude, à bouffer de l’insécurité. Alors c’était elles qu’elle frappait, sa haine de l’existence poussée au creux de sa gorge. Parce que la solitude, l’insécurité, le rejet, ils vibraient dans ses os à l’heure actuelle. Aileen partie, ayant oublié un grand pan de leur relation. Emily partie, sans demander son avis. Légitime départ, bien sûr, elle n’avait rien à faire là dedans. Et pourtant, ça la bouffait, rongeait son âme. Parce qu’elle gérait mal les départs, qu’elle préférait s’effacer, elle, couper les ponts en premier plutôt que de subir l’absence d’un être aimé. Parce qu’elle savait que des membres de sa famille étaient portés disparus et que la question affreuse, bouillante, coulait sans cesse contre son épiderme : sa faute ? Leur fait ?
Et parce  qu’il lui manquait. Autant qu’elle le haïssait de ne pas chercher à la retenir. Autant qu’elle se haïssait de ne pas vouloir faire d’efforts, d’attendre de le voir ramper, la supplier, la demander, quémander auprès d’elle.  C’était fourbe, vil. Oui. Pas de contre argument. Juste l’envie de se dégager de l’impression vorace d’être une sous merde faiblarde, de se laisser avoir, de ne jamais être à sa place, à la hauteur. C’était le besoin de se défouler, d’exister, d’être elle-même qui crevait ses nerfs, faisait bouillir son sang. L’envie de retrouver de la maîtrise, de rugir à nouveau, de vivre, à travers les coups, la violence, la précision et la puissance des gestes échangés. Echangés, oui, parce  qu’il s’agissait bien de ça. D’un échange. Echange nécessaire, violent et brutal, oui, mais tellement jouissif. Et c’était bien ça qui brûlait dans leurs rétines, qui illuminait leur visage, qui transcendait leurs muscles. Le besoin de se dépasser, de lâcher les chiens, de se délester des brides.

Et les coups s’enchaînaient, le corps fatiguait mais rugissait pourtant, si fort de cette sensation exaltante de se sentir vivant, puissante. Cette douleur, elle la faisait vibrer, chaque impact prouvant la vivacité de son existence. Ondes crissant sur ses os, impacts mordant ses muscles pourtant bandés pour limiter les dégâts, elle encaissait, aimait ça, en redemandait. Et perdait, pourtant. Echec annoncé qu’elle connaissait, réaliste mais pas défaitiste. Si Jordane se battait, c’était toujours avec ses trippes, avec la volonté farouche de vaincre, d’étaler son adversaire. De faire mal, même, parfois. Une envie qui faisait crépiter ses veines mais dont elle se cachait en règle générale. Ça, Alec le comprenait, elle le savait. Mais sans doute était-il le seul.

Seulement, là, dans les flammes du regard de son adversaire, elle y trouvait la même volonté destructrice. Celle qui la bouffait au corps, qui cramait ses cellules, qui y faisait battre la rage de vaincre en elle. Elle ne voulait pas s’arrêter, ne voulait ni flancher ni capituler, et pourtant plus le temps passait, plus elle se prenait les coups, son corps encaissant avec aisance au début commençait à lâcher du lest, fatiguant, épuisé, endolori, moins stable, moins affirmé, moins précis. Jusqu’au coup, fulgurant, percutant son menton, brouillant sa vue, assommant son esprit. Douleur cuisante qui irradiait, percutait sa mâchoire, claquait dans ses dents, griffait jusqu’à ses tempes, son occiput, ses vertèbres. Elle vacillait, tombait, refusait, se relevait, instinct de survie jusqu’au bout de ce qui aurait pu être des griffes. Nouveau coup, incapable d’être esquivé et elle chutait tout à fait, voulait se redresser et découvrait le cercle bleu sous elle. Merde. Défaite, toujours amère, agréable bataille pourtant.

Alors elle retombait sur le dos, grimaçait, offrait un regard perçant, agressif presque, face à l’air arrogant de Sanae au dessus elle. Et elle riait. Parce que dans le fond, bordel ce que c’était bon, ce que ça faisait du bien de se battre comme ça, de sentir tout son organisme vibrer, n’être plus qu’un corps, laisser ses pensées loin derrière.

« Tu es... comme ton surnom l’indique….une véritable arme. »

Le temps d’envisager de se tordre, sa jambe venant percuter sa cheville, le moment était déjà passé et Sanae se trouvait hors de portée, venant s’allonger près d’elle, la faisait rire plus encore, joyeuse de cet affrontement. Joyeuse de ce truc naturel tissé entre elles surtout, de trouver une réponse à la lave qui couvrait ses muscles en la personne de Sanae.
Et puis, le tilt. Compliment du présent autant que retour dans le passé. Jo. Arme de bois dur avec laquelle elle s’était tant entraînée, qui avait laissé tant de marques sur son corps et dans son âme, à tel point que c’était qui elle avait fini par devenir. Jo. Alors elle riait doucement, fermant quelques secondes les paupières, l’esprit vacillant. Ça passerait, le temps que le cerveau se remette du choc.

« C’est vrai. Le Japon. J’airais dû capter que tu ferais le lien. »

Ça semblait évident pourtant. L’Aikido avait été son premier contact avec les arts martiaux. Avant de changer d’île, se mettant au Taekwondo bien avant même de quitter réellement la France pour la première fois.

« Non pas que ça m’étonne, mais c’est toujours utile d’avoir confirmation. »

Sourire sauvage sur ses lèvres. Toujours un plaisir d’entendre ce genre de choses. Etait-ce la réputation qu’elle se forgeait à la Garde ? Si tel était le cas, son égo se gonflait de fierté.

« Bah heureusement que demain, j’bosse pas. »

Nouveau rire, franc, qui faisait crisser ses cotes douloureuses.

« Tu vois, gros avantage à pas avoir de job.. »

Au moins elle avait ses journées dégagées pour s’entraîner tranquillement, à la salle, avec Dorofei, avec Alec, avec Margo, qu’importe. Sana à présent. Car au vu de l’exaltation qui cognait entre ses cotes endolories, elle n’envisageait pas de ne plus s’entraîner ainsi.

Goût de fer dans la bouche, Jordane se redressait, vertige contre la moelle épinière, mais elle n’en disait rien, n’y prêtait même pas réellement attention. Lèvres vermeilles que le sang venaient colorer. Une entaille à la langue lors du coup, pas grand-chose. La langue, c’est comme l’arcade, ça saigne beaucoup pour un rien.

« Tout le problème d’une arme de bois. Ça manque d’acier tout ça. »

Un crachat rougeâtre sur l’herbe et elle retrouvait sa position initiale. Ça serait cicatrisé dans la demi-heure à venir. Elle posait une main sur ses cotes, les tâtait doucement. Flan gauche, encore une fois.

« J’ai une faille ? A gauche ? Je trouve que c’est souvent ce côté qui pend, j’en déduis que je dois mal tenir ma garde. »

Déséquilibre sur ton pied gauche Jo !
Ça va, je sais.
Elle pensait pourtant avoir réglé le problème. Mais avec la fatigue, avec l’angoisse de terrain, la réalité concrète d’une bataille, ça revenait parfois.

Deux fois, son bras gauche avait brûlé à Poudlard. Lorsqu’elle avait chuté chez Lilian, c’était à gauche qu’elle s’était pris les marches.

« Ou c’est juste mon côté dominant, donc celui qui encaisse le plus.. »

Gauchère. Coup de chance. Avantage statistique en cas de bataille, notamment au corps à corps.

D’une main, elle cognait le ventre de Sanae, réplique plus amicale qu’autre chose, comme pour se ramener à la réflexion précédente.

« J’vais quand même prendre ça pour un sacré compliment. Mais si c’est qu’une confirmation, c’est que t’avais déjà ton avis sur la question non ? Doro ? »

Ouais, Doro. Pas Cooper, ni Coop’ ni Dorofei. Quand leur relation était-elle devenue si… intime ? Elle n’en savait rien, s’efforçait de ne pas paniquer face à l’affection qu’elle ressentait pour lui. Concentration de tout instant pour ne pas fuir comme une idiote face à un truc qu’elle ne maîtrisait pas.

« T’as une sacrée force de frappe. »

Sans compter la technique.
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Jordane Suzie Brooks
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Jordane Suzie Brooks
Ven 2 Oct 2020 - 18:56
Qu’y avait-il en elles pour engendrer une telle violence ?
Comment cette flamme, cette lave, ce geyser de brutalité pouvait exister dans ces deux corps de jeunes femmes ? Même pas encore à la moitié de leur vie, et pourtant si abîmées déjà par les coups qu’on leur avait envoyé droit dans le thorax, dans le ventre...et peut-être finalement était-ce la tête qui avait le plus morflé. Parce que sous ces coups-là, une envie était née quelque part au milieu de la colère : celle de vouloir se battre. Rendre chaque coup, chaque parole, chaque trahison, chaque choc venant percuter leur existence. Ne jamais rien lâcher. Ne jamais rien délaisser qui les constituait entièrement.

Oui, nous vivons, fortes mais ébranlables ; intelligentes mais impulsives ; déterminées mais capricieuses. Imparfaites âmes qui chevauchent la sauvagerie. Féroces guerrières sans être dépossédées de leurs failles, de leurs sensibilités. Nous vivons et nous nous mouvons parmi les autres sans nous jamais nous départir de notre rage de vaincre, d’exister et d’écraser ceux qui veulent réduire cette existence à néant.

Ce combat, c’était celui des frustrations qui se percutaient, sentiments non digérés se heurtant les uns aux autres, comme des échos de toutes les fois où elles n’avaient rien dit, ou trop parlé ; de toutes les fois où elles avaient souffert en silence ou à grands cris ; de toutes les fois où leurs corps avaient été meurtris par le regard des autres, par les abandons, par les tragédies, par ce putain de sentiment d’impuissance qui aurait pu les faire gerber sur place. La bile, là, acide au fond de leurs estomacs, se trouvait remuée par la fièvre de l’affrontement. Délogée de leurs entrailles, elle se libérait pour s’échapper et se transférer sur l’autre avec une animosité qui n’était en rien de la haine envers l’autre. Non, elles étaient le réceptacle, tout simplement, de la rage qui suintait de chaque pore de leur peau. S’affronter l’une l’autre pour pouvoir mieux affronter les autres, le reste du monde. Sans honte, sans gêne, montrant autant les faiblesses que les forces.
Oh, cette force qu’elle sentait émaner de la sorcière blonde et qui répondait à la sienne...elle venait la prendre entièrement, se mélanger dans une joie tempétueuse. Son corps s’animait dans la violence : quelque chose dans ses doigts, dans ses mains, dans ses jambes, dans son ventre, dans chaque muscle, chaque membre, chaque parcelle de son épiderme hurlait, s’écriait férocement de pouvoir vivre enfin dans la puissance des émotions, des pulsions. La frustration se prenait coups sur coups, abattue par la brutalité des gestes qui venaient la réduire presque à néant. Frustration de ne pas avoir vécu, de ne pas avoir été vue, de ne pas atteindre ses objectifs, de ne pas savoir se maîtriser et paradoxalement, de l’avoir trop fait. Frustration d’encaisser sans se plaindre toutes les absences, les non-dits, les abandons répétitifs. Tout ce qui avait mordu sa peau, déchiré ses entrailles, se trouvait perclus de douleur dans un combat acharné. Et si douleur il y avait dans ce corps qui vivait si ardemment, ce n’était que pour venir renforcer la résistance, renforcer les efforts, renforcer la rage de la victoire. Mais à vouloir se défaire de l’impuissance, on en venait irrémédiablement à ce besoin de dominer, de vaincre, d’abattre, de faire mal et d’en jouir dans une allégresse étrange et pour tant de personnes, si détestable. Un sentiment qu’on disait peu à voix haute, voire pas du tout, trop craintif de voir dans le regard des autres, un jugement brutal et immédiat. Oui, elles aimaient se battre, mais elles aimaient encore plus gagner. Parce que bon sang ce qui circulait dans leurs veines en pleine victoire pouvait être grisant, intoxiquant, délicieux. Là, dans cet instant où l’on sent son adversaire faillir, se perdre, s’affaisser sous les attaques pour finalement vaciller complètement...cet instant...il était plus que jouissif, plus que délirant. On ne se sentait pas seulement vivre, mais exulter dans  la violence inouïe des gestes et des sensations.
De la honte ?
Plus maintenant.
Plus jamais.
Qu’on les juge. Elles les boufferaient tous.

Parce que ça..c’était pour les fois où elles avaient fermé leurs gueules ; ça, c’était pour les fois où elles avaient souri alors qu’elles souffraient ; ça, c’était pour les fois où elles avaient senti les regards des hommes sur leurs corps ; ça, c’était pour les fois où on avait voulu leur faire croire qu’elles ne seraient jamais assez bien, jamais assez satisfaisantes.

Alors, s’il fallait juger, c’était davantage toutes ces personnes, toutes ces choses qui avaient fait en sorte qu’elles en étaient arrivées là aujourd’hui. On survit comme on peut et comme on veut.
Elles étaient vivantes, et ça, c’était une victoire écrasante.

Victoire qu’elles partageaient.
Sans même savoir qui était vraiment l’autre, sans même le vouloir, sans même en avoir besoin. Quelque chose entre elles passait plus limpidement qu’une conversation sur leur passé. Et malgré l’entente muette, toutes deux savaient qu’il n’y en avait qu’une qui pouvait gagner cet affrontement. Contrat accepté.

Alors les coups pleuvaient, les corps rugissaient autant d’acharnement que de souffrance. La fatigue irradiait, les membres se couvraient de marques qui ne tarderaient à devenir plus colorées. Les dégâts, elles s’en fichaient toutes les deux. C’était pour l’après. L’après combat. Pour l’instant, il n’y avait que la victoire qui comptait. Les mouvements s’accéléraient. Jordane rendait coup sur coup, esquivait, revenait à la charge comme un animal qui ne voulait pas se défaire de sa prise, têtue, enragée, puissante. Et Sanae souriait, presque gourmande. Comme c’était bon de faire face à une autre guerrière, comme c’était bon de se laisser aller. Même un peu. Même à demi. Juste, relâcher la bride et la laisser être secouée par la vivacité du corps qui se ruait.

Ce fut le coup de grâce, et Jordane flancha, retombant sur le cercle bleu tandis qu’essoufflée, Sanae arrêtait ses attaques. Tout son corps crissait de fatigue et de douleur ; les émotions fortes retombaient lentement, secouant encore par vagues l’esprit en transe et les membres chatouillés par la fièvre du combat qui se terminait. Et à l’air satisfait et victorieux de Sanae, répondit un regard agressif de Jordane. Un souffle amusé passa entre les lèvres de la sorcière brune. Elle comprenait cette envie de faire ravaler l’arrogance suprême du vainqueur. Sentiment naturel.
Le rire de Jordane perça le silence qui s’était installé entre les souffles erratiques. Sanae sourit et s’approcha pour prendre place aux côtés de la sorcière blonde. Et puis, un compliment, aussi simple qu’une constatation dans l’hilarité grisante du moment. Sanae retrouvait une respiration plus calme, allongée là dans l’herbe, ses yeux se fixant sur le ciel dégagé entre la cime des arbres. Le rire de Jordane finit par s’éteindre.

« C’est vrai. Le Japon. J’airais dû capter que tu ferais le lien. »
Un léger rire de gorge alors qu’elle passait un bras sous sa tête.
« Vu ta façon de te battre, c’était d’autant plus évident. »

Ses muscles se faisaient de plus en plus entendre ; ils gémissaient silencieusement, grognaient. Heureusement qu’elle avait de quoi atténuer tout ça et soigner ce qui devait l’être. Un mauvais moment à passer avant de ressentir l’apaisement qui viendrait. Heureusement, elle n’avait pas encore repris le travail. Elle n’était pas prête.

« Tu vois, gros avantage à pas avoir de job.. »

Un autre rire, plus franc. Elle ne répondit pas néanmoins. Oui, c’était un avantage probablement. En vérité, elle n’était pas pressée de revenir à l’hôpital. Il lui semblait, étrangement, que cette vocation appartenait à une autre vie et elle n’y retrouvait pas encore une motivation qui lui était propre, dans son entièreté, pour s’y replonger. Il le faudrait pourtant. Mais elle n’y avait pas vraiment songé depuis quelques jours : elle repoussait ce moment, comme tant d’autres.
Pensées interrompues par Jordane qui se redressait pour cracher du sang dans l’herbe. Elle eut un sourire en coin. Le sang dans la bouche. Les bleus sur la peau. La douleur dans les cotes, dans les jambes, dans sa mâchoire, contre ses tempes...tant de choses qui lui hurlaient qu’elle était en vie. Une partie d’elle les savourait.

« Tout le problème d’une arme de bois. Ça manque d’acier tout ça. »

Elle avait repris sa position et Sanae fronça les sourcils.
Une voix soufflait dans son esprit. Une voix qu’elle n’avait pas entendu depuis bien des jours...

Rien de plus tranchant et résistant qu’un alliage, là où le matériau brut ne cesse de céder.

Sors de ma tête. Et viens plutôt me voir.
Elle balaya l’agacement amusé.

« Si t’étais faite d’acier, je serai pas en état de parler. Alors, je vote pour le bois personnellement. » fit-elle en riant doucement.

Elle sentit un mouvement sur sa droite et son regard retomba sur Jordane. Ses doigts tâtaient ses cotes en grimaçant.

« J’ai une faille ? A gauche ? Je trouve que c’est souvent ce côté qui prend, j’en déduis que je dois mal tenir ma garde. »

Un sourire.

« Ou c’est juste mon côté dominant, donc celui qui encaisse le plus.. »
« Si tu veux, j’peux frapper le côté droit, là tout de suite, histoire d’égaliser. » Amusée, elle leva un sourcil provocateur, avant d’ajouter. « Et oui, j’ai frappé ton côté gauche justement parce que tu es gauchère et que c’est ton côté dominant. » Elle réfléchit un instant. « Quand j’étais plus jeune, j’ai eu pendant quelques mois un entraîneur qui était ambidextre : il avait une technique redoutable parce qu’il faisait semblant d’être droitier pendant la première partie du combat et puis d’un seul coup, il désarçonnait l’adversaire en se mettant à être gaucher. Il avait moins de force de frappe mais ça déclenchait tellement la surprise qu’il avait un gros avantage. C’était terrible. Je me suis mangée de ces coups... »

Elle ne se souvenait plus de son nom mais elle se souvenait des bleus qui avaient parsemé son corps. Sans qu’elle ne s’y attende, toute occupée à tenter de retrouver le nom du gars, Sanae se prit un coup léger dans les cotes, affichant une grimace qui se transforma en sourire, se redressant un peu sous le choc. Elle rit par saccades. Ses cotes, elles, ne plaisantaient pas.

« J’vais quand même prendre ça pour un sacré compliment. Mais si c’est qu’une confirmation, c’est que t’avais déjà ton avis sur la question non ? Doro ? »

Un souffle amusé.

Dorofei...ou les souvenirs d’Alec ? Hm. Elle ne pouvait pas répondre ça. C’était étrange et amusant d’être en présence de quelqu’un qu’on avait vu par bribes dans l’esprit d’un autre.

« Oh, bah j’ai eu le temps de me renseigner depuis le moment où tu as voulu … venir jouer avec nous. » Elle lui adressa un sourire éclatant. Une façon de répondre sans vraiment confirmer ou infirmer quoique ce soit.

« T’as une sacrée force de frappe. »
Elle se redressa, grimaçant sous la douleur et tendit pour faire venir son sac jusqu’à elle.
« On dirait pas en me voyant hein. » s’amusa-t-elle.
Elle était fine, pas très grande finalement, mais il fallait dire qu’elle s’entraînait depuis si longtemps, toujours en mouvement, toujours emportée dans une activité ou une autre, que son corps était musclé sous les vêtements qui le recouvrait autrefois entièrement. Aujourd’hui, elle le découvrait un peu plus. Et puis, elle avait des traits fins, un visage doux si l’on ne regardait pas dans le fond de ses prunelles. Tu crois que t’es la seule à être prise pour une poupée Jordane ? C’était le lot de beaucoup de femmes malheureusement.

Le sac s’envola et Sanae l’agrippa, ses phalanges crissant dans le mouvement. Elle en sortit une bouteille de whisky qu’elle ouvrit sans plus de cérémonie. Une gorgée à même le goulot.

« Cela dit, ça faisait un moment que je ne m’étais pas entraînée. Ça me rassure de pas être rouillée. »

Sans la regarder, les yeux fixés sur l’étendue d’herbe devant elle et les arbres qui les entouraient, Sanae tendit la bouteille à Jordane.


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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Ven 9 Oct 2020 - 9:55
Ce qu’il y avait derrière cette violence ? Des années de souffrance muette, des années de coups encaissés, des années d’angoisse, de solitude, de faiblesse. Des années à bouffer cette putain de sensation de n’être qu’une proie et de devoir accepter cette situation. Accepter que les femmes se fassent tuer, accepter la normalité de cette situation. Accepter de n’être que le sexe faible, d’être un morceau de viande, d’être vulnérable aux autres. A leur regard. A leurs demandes. A leurs complaintes. A leurs envies. A leur brutalité. Voilà ce qu’il y avait derrière cette violence. La rage inassouvie de siècles d’asservissement. Des siècles à se taire, à laisser couler, à sourire, à se violenter, finalement, bien autant que les autres le faisaient. Toute la fureur d’une vie mise sous chape.

Jordane n’avait pas résisté longtemps, n’avait pas accepté longtemps d’être la demoiselle tranquille, efficace, souriante, forte, bienveillante, performante qu’on attendait d’elle. Elle l’avait été, oui. Durant l’enfance, l’adolescence. Elle avait tout pris en charge au décès de sa mère, avait encaissé, avait géré la maison, la famille, sa sœur, son père même, inconnu débarqué dans sa vie sans prévenir. Elle avait fait face à celui qui avait fuit… avait fait face à ses injonctions à être l’adulte, à bien se comporter, y compris avec lui. Avec celui qui avait pourtant nié ses responsabilités, les avaient oublié, elles trois, et revenait la bouche en cœur. Mais ça n’avait pas duré. Rien que le temps d’être rassurée, rien que le temps de lui accorder assez de confiance pour lui laisser sa sœur. Lui accorder assez de confiance, à elle. Deux années à s’enterrer sous les responsabilités, sous le poids d’une famille qui n’était plus tout à fait la sienne et dans laquelle elle devenait à mesure du temps une parfaite étrangère quand son père, l’inconnu, en devenait le centre. Comme toujours. Alors elle avait fuit. Mais si lui pouvait revenir la bouche en cœur, ça n’était pas son cas. Toujours étrangère dans son propre univers, elle était la méchante et lui le gentil papa présent.

Et cette impression de s’être niée, elle lui revenait en pleine face. N’était-ce pas ce qu’elle avait fait avec Lex ? Se prenant ses besoins, ses envies, ses projections sans que les siennes n’aient réellement d’importance. Pire, elle s’était mise sur pause, en aimant ça, oui, mais à présent, l’impression nocive de n’avoir pas tout à fait d’intérêt la griffait de nouveau. Sans compter l’attaque de Lilian qui revenait encore une fois à lui rappeler qu’elle était remplaçable, oubliable.

Après tout, Lex ne l’avait pas encore contactée non ? Oubliable, donc.

Rien qu’un corps dont on peut disposer, une âme dont on peut se débarrasser à sa convenance. Pourquoi s’étonner, donc, que face à de telles violences, les réactions le soient tout autant ? Son corps vibrait d’allégresse d’en sentir un autre ployer. Et pourtant, c’était elle qui avait chu. Destin prévisible, elle le savait bien, mais la frustration noyait tout de même ses cellules. Le besoin de gagner, quelque part, dans son cerveau reptilien. Celui d’être la puissante, pour une fois. Celui de briser, comme elle avait brisé les os de Lilian les uns après les autres. Aurait-elle pu aller plus loin si Anna n’était pas arrivée ?

Oh si tu savais.. Si tu savais comme la poupée de porcelaine peut devenir vaudou à l’occasion, cachant bien des méandres poisseux d’un esprit violenté.

« Vu ta façon de te battre, c’était d’autant plus évident. »

Un sourire.

« L’Aikido m’a rapidement ennuyée. Je sais, j’vais m’en prendre une, mais j’étais jeune, et j’avais besoin… d’impacts. Les mouvements étaient trop lents, trop déconnectés de la réalité. »

Une réalité crue, qui vous écorche. La vérité, ça n’est pas un agresseur qui vous laisse le temps. Alors bien sûr, c’était nécessaire pour apprendre, et sa sensei avait tendance à l’épuiser, comprenant son besoin d’explosion. Mais c’était bien dans les sports coréens qu’elle avait trouvé la puissance qu’elle recherchait. Le besoin de rendre coup sur coup. De sentir l’autre frémir, d’entendre la force de l’impact, dévastateur. D’imaginer les chairs compressées, les os frémissants sous la violence du coup. Le self défense était revenu ensuite, comme un besoin d’équilibre entre la force pure et l’utilisation de celle des autres, l’agilité et la puissance. Le temps de comprendre.

Comprendre comme on peut dominer quelqu’un en douceur, par quelques mouvements précis.
Comme une simple pression, une simple posture peut s’avérer efficace pour désarçonner quelqu’un, l’emplir de douleur et l’immobiliser totalement.

« Si t’étais faite d’acier, je serai pas en état de parler. Alors, je vote pour le bois personnellement. »

Nouveau rire amusé qui lui faisait pourtant crisser les côtes, ses muscles à l’agonie. Bordel ce qu’elle aimait ça, pourtant. Cette douleur absurde qui vous fait vous sentir tellement en vie, tellement puissante de pouvoir résister, encaisser, enchaîner. S’améliorer.

« Si tu veux, j’peux frapper le côté droit, là tout de suite, histoire d’égaliser. »

Un sourire  en coin, vorace, et elle se retournait vers elle, son regard percutant le sien.

« Ouh, oui, dis moi des choses salaces.. »

On parle de violence, là ? Oui. Bon.

« Et oui, j’ai frappé ton côté gauche justement parce que tu es gauchère et que c’est ton côté dominant. »

Pas d’ouverture spécifique donc, rien que la normalité d’un corps qui doit bien encaisser d’une façon ou d’une autre.

« Quand j’étais plus jeune, j’ai eu pendant quelques mois un entraîneur qui était ambidextre : il avait une technique redoutable parce qu’il faisait semblant d’être droitier pendant la première partie du combat et puis d’un seul coup, il désarçonnait l’adversaire en se mettant à être gaucher. Il avait moins de force de frappe mais ça déclenchait tellement la surprise qu’il avait un gros avantage. C’était terrible. Je me suis mangée de ces coups... »

Un nouveau rire plus léger passait ses lèvres.

« J’ai essayé pendant un temps de développer mon adresse des deux côtés… bon c’est pas ça. Mais l’idée est efficace j’en suis certaine oui… C’est con j’aurais bien aimé voir ça. Ça ferait du bien à mon égo bafoué. »

Marre d’être celle qui fini au sol à chaque fois ? Un peu. Même si elle avait accepté ce jeu-là depuis longtemps, la frustration d’être celle qu’on balance, bardée de coups, sur le côté de la route restait bien présente en elle. Un lien avec Lex ? Avec Lilian ? Son passé ? Bien plus qu’avec l’entraînement en lui-même, oui, bien sûr.
Pour ce qui était de Sanae et de ce qu’elle savait d’elle… oui, sa supposition venait essentiellement de Dorofei. Lorsqu’elle avait décidé de squatter son canapé, elle n’imaginait pas obtenir une chambre et une place réelle auprès de lui, ni même de l’apprécier comme elle l’appréciait. Et le respectait.

« Oh, bah j’ai eu le temps de me renseigner depuis le moment où tu as voulu … venir jouer avec nous. »
« La fourbe, elle connait les joueurs avant la partie de poker… »

Traduction, elle ne dirait rien. Quand même ceux qui n’ont pas spécifiquement de secrets se mettent à en avoir les uns avec les autres… merde, pourrait-elle un jour avoir une conversation normale avec qui que ce soit ? Il lui semblait être toujours à la croisée des non dits, et si la majorité du temps, elle n’en avait cure, parfois ça avait quelque chose de pesant. D’autant qu’au sein de la Garde, il n’y avait plus tant de secrets à avoir. Mais elle était nouvelle. Normal qu’on se méfie.

« On dirait pas en me voyant hein. »

Un sourire en coin et elle se redressait, le corps hurlant sous le mouvement. Rien à foutre. Si t’as mal, c’est que tu es en vie.

« Ça fait longtemps que j’ai appris à me méfier des belles femmes. »

Ses paroles ? Non, celles d’Alec qu’elle citait avec un sourire en coin.

« Paroles d’un ami. »

Etait-ce seulement vrai ? Si c’est une belle femme qui a ta peau, je me marrerais sur ta tombe, beau gosse. Spéciale dédicace. Elle se reconnaîtra.

Jordane se redressait, posait son regard sur le corps de Sanae où les zones rouges apparaissaient, signe de l’affrontement qui l’avait mis à l’épreuve. Musclée la poupée. Moins qu’elle, la génétique  européenne jouant sans aucun doute face à ses allèles asiatiques. Sans compter la volonté de la jeune femme de soulever de la fonte pour se sculpter depuis des années, ce que Sanae ne faisait sans doute pas. Musculature fonctionnelle quand la sienne était également esthétique, faite pour sous-entendre une certaine puissance.
Moins marqué, donc, sa force restait plus profondément cachée, comme un secret à éloigner du regard des indiscrets. Quel beau déguisement que celui de la faiblesse.

Elle se revoyait attendre, encore et encore, se contenir, laisser passer les ouvertures, taire la puissance alors même qu’elle observait le regard de Lilian s’embraser d’envie. Celles, sanglantes, que le meurtre fait couler dans les veines. Seulement ? Non, pas selon son analyse.

Assise en tailleurs, elle étirait muscles et tendons endoloris, posant un regard curieux sur le sac qui volait jusque dans la main de Sanae et qu’elle ouvrait déjà. Des soins ?

Mieux.

Quelques gorgées de poison en bouteille. Ah ben voilà, là on s’entend !

« Cela dit, ça faisait un moment que je ne m’étais pas entraînée. Ça me rassure de pas être rouillée. »
« Ben disons que si ça c’est de la rouille… j’risque de voir mes jambes se balader sans mon corps le jour où tu seras en forme quoi. »

Avec un sourire, elle attrapait la bouteille à son tour, la vidant de quelques gorgées.

« Je m’entraîne plusieurs fois par semaine, j’ai jamais lâché le rythme, y compris à l’école… mais ça faisait un sacré paquet de temps que je m’étais pas donnée comme ça. »

Avec Alec, Margo, Dorofei. Mais rarement comme ça, à froid, sur un combat net, tranchant. La majorité du temps, elle travaillait la technique, la réactivité, bossait la puissance, l’agilité, la vitesse. Moins bourrin, plus précis. Moins de risque de se blesser bêtement. Mais les choses étaient différentes aujourd’hui.

L’alcool brûlait les plaies dans sa bouche, râpait contre son œsophage, enflammait son estomac. Bon dieu que ça faisait du bien de se sentir en vie. La tête tournait toujours un peu, oreille interne perturbée par le dernier coup assené.

« Par contre heureusement que j’m’entraine parfois en dehors, parce que bonjour j’me fais rétamer à chaque fois moi. Entre toi et Margo… Doro j’ai une chance au moins. »

Un clin d’œil. Oui, mettre au sol Cooper avait quelque chose d’assez jouissif, surtout en connaissant son statut d’ancien auror. Quelques nouvelles gorgées avalées en souriant et elle lui rendait la bouteille, redressant son dos malgré la complainte de son flan gauche.

« Et puis ça change des moments où on doit jouer à la gentille poupée justement. Et ça ça fait sacrément du bien. »

Plutôt que de manquer de se faire buter par un psychopathe dans une cave tu veux dire ? Tu m’étonnes.

Et puis, finalement, elle se redressait. Léger vertige, on tient le choc ! Et d’un geste de la main, elle enjoignait Sanae à la suivre.

« T’as fait un truc tout à l’heure, j’ai rien capté ! Montre-moi. »

Elle se remettait en place, expliquait de quel moment elle parlait, feignait le geste, attentive à ceux de Sanae, de sa posture, de l’endroit où son poids se déportait, de la torsion de son buste.
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Jordane Suzie Brooks
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Lun 26 Oct 2020 - 19:02
« L’Aikido m’a rapidement ennuyée. Je sais, j’vais m’en prendre une, mais j’étais jeune, et j’avais besoin… d’impacts. Les mouvements étaient trop lents, trop déconnectés de la réalité. »

Un sourire en coin.

« C’est pas moi qui vais te contredire... »

Besoin d’impacts. Oh, comme elle comprenait, comme ce discours faisait écho à sa propre expérience. Lorsqu’elle avait commencé les entraînements il y a des années, elle aussi s’était sentie frustrée de l’apprentissage lent et mesuré. La patience, la frustration, étaient les enseignements les plus difficiles auxquels elle avait du se confronter. Et si autrefois elle les avait maîtrisés, il n’en était plus rien aujourd’hui. Vraiment plus rien ? Où étaient passées ces compétences jadis acquises sur un chemin tortueux ? Avaient-elles complètement disparu ? Elle avait l’impression de repartir de zéro, de cet état dans lequel son père l’avait trouvée à 7 ans, incapable d’attendre, incapable de se confronter à l’échec, incapable de supporter la frustration. Une enfant sauvage, recluse dans son propre esprit loin des autres. Enfant qui avait fini par s’ouvrir...mais à quel prix ? Celui de se renier, de brider sa force pour protéger les autres, pour convenir à un père qui lui promettait affection et acceptation...Pour une orpheline, ce prix n’avait pas paru si effroyable. Sans doute parce qu’elle n’avait pas senti tout du long à quel point elle s’était enchaînée, sans doute qu’il avait fallu que son monde s’écroule pour prendre la mesure de ce qu’elle s’était infligée, et sans doute avait-il fallu également l’esprit d’un autre pour se confronter à l’horreur de sa cage, dans la pleine conscience de sa douleur. Alors oui, elle comprenait ce besoin dont parlait Jordane et qu’elle sentait vibrer à l’unisson entre elles : l’affrontement, la collision des corps qui se combattent.

Mais était-ce suffisant ?
Il n’y avait ici qu’un jeu, une illusion de bataille. Qu’en était-il de ce besoin de plus...de trop qui venait la mordre de l’intérieur et qu’elle n’assumait pas encore tout à fait ? Pourtant, elle le savait là...tapis dans l’ombre de son être, sifflotant en attendant son heure.

L’envie...l’envie de sentir l’autre tomber pour de bon.
Pas pour s’entraîner, pas pour jouer, pas pour mimer la défaite.
Une vraie soumission, une vraie bataille.
Une victoire, totale, sur la vie.
Le pouvoir, le vrai, entre ses mains.

Et à cette pensée, un long et terrible frisson de plaisir.
Balayé.

Elle quittait cette pensée, la repoussait au loin, s’engouffrait à nouveau dans la conversation fluide et facile qui se tramait. C’était agréable de pouvoir être davantage elle-même, plus simple avec quelqu’un qui ne l’avait pas connue auparavant. Pas d’attentes particulières, pas de souvenirs de son ancienne elle, pas de regrets, pas de souvenirs en jeu. Elle était libre d’apparaître comme elle était, comme elle le voulait. Et ce n’était pas pour déranger Jordane.

« Si tu veux, j’peux frapper le côté droit, là tout de suite, histoire d’égaliser. »

« Ouh, oui, dis moi des choses salaces.. »
Un rire franc franchit ses lèvres. Elle lui adressa un clin d’oeil, un large sourire étirant son visage.
« T’es aussi barrée que moi Brooks. »

Un compliment, au final. Parce que toutes les deux avaient apparemment cet attrait pour la violence qui avoisinait le plaisir. Avoisinait, Sanae ? Peut-être que dans son cas, cela allait bien plus loin...beaucoup trop loin. Quelque chose qu’elle découvrait à peine, qu’elle explorait petit à petit...mais jusqu’où ? Jusqu’à quel point ?

« J’ai essayé pendant un temps de développer mon adresse des deux côtés… bon c’est pas ça. Mais l’idée est efficace j’en suis certaine oui… C’est con j’aurais bien aimé voir ça. Ça ferait du bien à mon égo bafoué. »
« Ah ! Ca...je suis sûre que t’aurais été heureuse de me voir me faire laminer. »

Parce que ce n’était jamais agréable de perdre, jamais agréable de trouver plus fort que soi...à moins de pouvoir apprendre de son adversaire, auquel cas...on repartait avec d’autres choses que le sentiment amer de la défaite. Il y avait quelque chose de paradoxal au fond, à vouloir rechercher la victoire autant que l’ennemi capable de nous abattre. Dangereuses pulsions.

Et puis vint la fameuse question...Elle avait tendu la perche, c’était sa faute. Question qu’elle évita en sachant pertinemment que c’était assez vague pour titiller la curiosité. Oui, elle partait avec un avantage certain, parce qu’elle avait eu quelques aperçus de la sorcière avant même d’avoir une première conversation avec elle. C’était toujours étrange de voir, entendre, connaître des choses ou des gens à travers l’esprit d’un autre ; peut-être qu’avec les années, elle s’était faite à la chose et cela ne lui paraissait plus aussi déstabilisant, mais il y avait toujours une sensation étrange lorsqu’on faisait appel aux souvenirs de quelqu’un d’autre comme un tiroir qu’on ouvrait dans la multitude de souvenirs qui ne lui appartenaient pas.

« La fourbe, elle connaît les joueurs avant la partie de poker… »
« C’est ce qui s’appelle être un joueur avisé. »

Large sourire. Un joueur avisé qui n’avait pas l’air d’être dangereux à première vue, n’est-ce pas ? On se méfiait trop peu des femmes, trop peu de leur force, de leur talent, de leur esprit combatif. Une erreur redoutable que Jordane connaissait bien, pour en jouer sûrement très souvent.

« Ça fait longtemps que j’ai appris à me méfier des belles femmes. »
Un souffle amusé alors qu’elle s’était redressée, son os crissant dans sa chair. Le souffle se transforma en soupir et son regard se perdit dans l’azur du ciel.

« Paroles d’un ami. »
Elle aurait parié sur l’identité de cet ami. Son sourire revint, au bord des lèvres. Sans se retourner vers la sorcière blonde, l’hypothèse d’un visage s’imposa naturellement. Peut-être était-ce parce qu’elle y pensait là, en cet instant, qu’elle pariait sur lui.
«En voilà un ami intelligent…. »

Trop. Mais cela suffirait-il ? L’intelligence se trouvait vite balayée par les pulsions.
Et les siennes de pulsions ? Où s’arrêteraient-elles dans leur course insensée ? Encore qu’elle comprenait aujourd’hui la nécessité grandissante d’en laisser exister certaines dans des entraînements brutaux, capables de les canaliser un minimum. Pourtant, elle les sentait grandir à mesure que les jours passaient. La faim ne s’arrêtait pas, la soif n’était jamais étanchée.
Mais comme c’était bon d’évacuer...

« Ben disons que si ça c’est de la rouille… j’risque de voir mes jambes se balader sans mon corps le jour où tu seras en forme quoi. »
Elle rit, l’amusement la trouvant facilement auprès de Jordane.
« Oh, je te fais confiance pour survivre. Je ne me fais pas de souci pour toi. T’es solide. »

Elle avait l’air en tout cas. Mais quelles étaient les fêlures, les cassures qui entaillaient son âme, là, dissimulée ? Que cachait ce besoin de se battre aussi violemment ? Les questions lui venaient, mais son esprit demeurait rétracté sur lui-même, impatient néanmoins de se dégourdir les jambes, lui aussi. Il turbinait en silence, patientait, criant dans son crâne son envie de contact. Jordane s’était redressée à son tour et la bouteille passait entre ses mains, sans que Sanae ne lui jette un regard. Elle observait la quiétude des lieux alentours, peu soucieuse des expressions et des réactions visibles de sa partenaire du jour. Elle entendait les inflexions de sa voix, les mots employés, parfois plus appuyés, et cela lui suffisait pour avoir une image, un ressenti. C’était parfois reposant de ne pas regarder l’autre, de se garder de cette tentation de plonger dans les âmes. Elle captait les mouvements de son corps, à ses côtés, la sentait s’étirer et se mettre en tailleur.

« Je m’entraîne plusieurs fois par semaine, j’ai jamais lâché le rythme, y compris à l’école… mais ça faisait un sacré paquet de temps que je m’étais pas donnée comme ça. »
Elle acquiesça.
« Ah, ça...je dois dire que je ne suis pas déçue. Ça fait du bien de pouvoir...lâcher. » Un sourire en coin. « Je m’entraînais bien plus souvent auparavant. Mais avec le boulot, mon temps est plus limité. »

Il fut un temps où elle s’était noyée dans son emploi du temps impossible. Toujours occupée, toujours en action. Elle fuyait, sans doute, ce qui hurlait en elle. Temporairement, ses journées s’étaient vidées pour lui donner l’occasion de se confronter à elle-même. Mais le temps ne semblait pas ralentir, il accélérait étrangement...où était-ce elle qui courrait trop vite ? Pourtant, ce moment...là, après l’affrontement, elle le chérissait bien plus qu’il n’y paraissait. Le soulagement de l’après, l’apaisement...éphémère, annonciateur de la reprise brutale d’un esprit instable. Elle savait que son humeur chuterait, que la vague apaisée ondulerait à nouveau plus violemment, ou alors, il pleuvrait dans la mer de son existence une tristesse atroce.

Le whisky donc. Elle attendit que Jordane reprenne quelques gorgées avant de la récupérer, se tournant cette fois-ci vers elle.

« Par contre heureusement que j’m’entraine parfois en dehors, parce que bonjour j’me fais rétamer à chaque fois moi. Entre toi et Margo… Doro j’ai une chance au moins. »

Un léger rire. « Tu multiplies les adversaires, forcément tu te confrontes davantage à la défaite. » S’adapter à chaque fois à quelqu’un d’autre demandait une agilité de corps et d’esprit ; c’était plus simple de se consacrer à un seul adversaire et d’en apprendre les techniques, les réflexes, les rouages… Quant à sa remarque sur Dorofei, elle la fit sourire moqueusement. Quoi ? Elle disait ça parce qu’il était à moitié aveugle ? … Ouais nan, mieux valait se retenir de faire cette blague.

Mieux valait la faire à l’intéressé.

« Et puis ça change des moments où on doit jouer à la gentille poupée justement. Et ça ça fait sacrément du bien. »

Voilà des paroles que Sanae ne pouvait contredire…
Un léger rire amer franchit sa bouche alors qu’elle la portait à la bouteille.

« Amen. »


Amen, oui. C’était presque des mots religieux que Jordane énonçait. Des mots qui venaient faire écho tout particulièrement avec elle. Elle, autrefois si sage. Elle, autrefois si lisse. Elle, autrefois si muselée.

Aujourd’hui, libérée.

Jordane se redressa et Sanae la suivit des yeux. Elle referma la bouteille et la posa dans l’herbe. Un geste et Sanae la suivait. Son corps tout entier gémissait, s’activait comme des rouages rouillés. Elle se releva, faisant craquer son cou, allongeant ses bras pour les étirer dans une grimace.

« T’as fait un truc tout à l’heure, j’ai rien capté ! Montre-moi. »

Un sourire amusé et déjà, elle se mettait en mouvement, montrant à la sorcière blonde l’enchaînement, gestes souples mais brutaux, expliquant à sa partenaire où frapper, avec l’efficacité vive d’un animal enragé.

Parce qu’au final, l’animal, c’était elle. Elles. Avides, affamées. Se prenant des coups et les rendant avec férocité, survivant dans le tumulte d’une vie pleines d’obstacles, naviguant dans cette envie de tout défoncer, de tout éclater, au risque de s’éclater soi-même sur les parois des limites qui demeuraient, malgré tout. Mais ces limites, elle les sentait parfois frémir, prêtes à flancher, prêtes à craquer...la vitesse de l’impact, la force de la rage enflammée de tout ce à quoi elle avait renoncé...tout ça ne risquait-il pas de briser ces parois ? A quel moment devait-elle s’arrêter ? A quel moment les entraînements ne suffiraient plus à assouvir sa faim ? A quel moment ces instants de connexion se transformeraient en affrontements purs ?


A quel moment la faim s’arrêtait ?

Jamais.
Jamais vraiment.


FIN TOPIC
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Sanae M. Kimura
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