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Blood On My Name - Sana

 :: Autour du monde :: Europe :: — France
Ven 17 Juil 2020 - 23:15
31 Mars

Si on vous demandait de lister tous vos secrets, qu’est-ce qui ressortirait ? Si on vous obligeait à hiérarchiser vos souvenirs, du plus intime au plus accessible, qu’est-ce que vous cacheriez ? Ces questions, Alec se les posait depuis des semaines, des mois voire des années même. Il y a des gens qui communiquent, qui s’expriment sans cesse sur les sujets douloureux. Des gens qui s’ouvrent aux autres, qui font part de leurs pensées intimes à leurs psys, qui évoquent les souvenirs sans gène. Et puis il y a les autres. Ceux à qui on a appris à grand avec un masque sur le visage. Ceux qui craignent sans cesse ce que l’honnêteté pourrait provoquer. Ceux qui se cachent… qui se dissimulent derrière une image construite depuis des années, parfaitement adaptée, assumée. Et qui ne savent ce qui pourrait se passer si jamais un jour les digues cédaient.

Alec était de ceux-là. Pas que personne ne le connaisse, non, bien au contraire, mais il avait fallu batailler pour passer outre chacune de ses défenses. Il avait fallu comprendre avant qu’il admette, deviner, avant qu’il ne s’ouvre. Aujourd’hui comme les semaines précédentes, il avançait en connaissance de cause, sachant parfaitement qu’il donnait l’autorisation à une inconnue de violer le plus intime qu’une personne puisse avoir : ses pensées, ses souvenirs, sa nature profonde.

Jusque là, la pratique l’avait pris de court par sa douceur et le respect dont son enseignante pouvait faire preuve. Une bienveillance qui l’avait agacé au possible, ne tardant pas à le faire s’impatienter, montant au créneau. Logan avait toujours été violent, à l’image de leur famille et de l’exigence dont il faisait sans cesse preuve au sein même de son existence. Pendant deux ans, il lui avait appris à compartimenter son esprit, à moduler ses pensées, à enfouir le plus loin possible certains souvenirs pour les empêcher de remonter à la surface dès qu’il craignait que qui que ce soit les atteigne, travaillant depuis des mois pour les faire plonger alors que tout un chacun a tendance à les faire remonter à la surface dès qu’ils étaient évoqués.

Quoi de plus compliqué de ne pas penser à un éléphant quand on vous demande ce qui est grand, gris, possède une trompe et pèse dans les 5 tonnes ?

Alors… Qu’est-ce qui ressort si on vous demande ce qui doit absolument rester secret ? A qui vous pensez si je demande quelle est la personne que vous aimez le plus au monde ? Et si je vous demande où se trouve le fugitif numéro un… à quoi pensez-vous ?

Alors Alec travaillait là-dessus, toujours frustré du manque de violence dont Sanae faisait preuve, perturbant ses perceptions, lui donnant l’impression de ne pas avancer. Pourtant, il l’avait compris, en agissant ainsi, elle lui apprenait à être plus précis, à détecter les intrusions plus souples, infimes, habiles. Si Logan était un boulet de canon, une vague furieuse déferlant en lui sans qu’il ne puisse rien faire d’autre que de s’y noyer, Sanae, elle, s’insinuait en douceur, discrète, elle était l’eau qui coulait par chaque interstice. Rien qu’un souffle d’air qui glissait, trop lent pour provoquer ne serais-ce qu’un son. Il n’avait pas l’impression que son cerveau entier se trouvait fendu de coups de cutter avec elle, pourtant la douleur montait, douce et froide, jusqu’à l’emplir totalement en fin de séance, plus fourbe encore. Après plusieurs séances, il l’admettait sans ombrages, sa façon de faire, plus pernicieuse, pouvait s’avérer bien plus dangereuses tant il n‘était pas aisé de la repérer lorsqu’elle se traçait un chemin dans votre conscience. En douceur, elle venait l’effleurer, démanteler ses défenses, s’introduisant plus profondément, à la recherche de ses secrets. Pour la majorité des personnes, ceux-ci restent parfaitement en surface lorsqu’on les évoque, mais il avait fait ses preuves sur ce plan. Rien de parfaitement abouti, son esprit n’était qu’un capharnaüm sans nom mais l’idée était là, les parois en constructions autour de ses différents souvenirs, les uns entremêlés dans les autres, certaines barrières plus solides que d’autres, simplement vaporeuses. Ça venait. Chaque intrusion lui permettait de comprendre les rouages de cet art à la fois instinctif et affreusement complexe. Il fallait faire de sa mémoire un véritable labyrinthe autant qu’une forteresse imprenable. Savoir dresser des murs sans sembler toujours les ériger. Qu’était l’esprit de Logan ?

Une pensée fugace le traversait régulièrement alors qu’il s’acharnait à construire ses murailles… n’était-ce finalement pas qu’une question de temps pour que quelqu’un comme Logan ne se perde dans son propre esprit ?

Au début, Sanae n’avait fait que tester ce qu’il avait appris jusqu’ici, testant ses compétences, comprenant d’instinct la façon dont Logan lui avait appris à procéder.

Nouvelle question : ne lui donnait-il pas ainsi des armes pour s’insinuer en lui également ?
Logan avait appris de manière parfaitement instinctive, brutale. Sa façon de faire ne se trouvait sans doute pas dans les ouvrages et ce, même s’il n’avait fait que la renforcer d’années en années. N’était-ce pas dangereux d’agir ainsi ?

Ils lui donnaient tous deux les armes pour les détruire. En parfaite connaissance de cause.

Et puis, au fil du temps, elle l’avait testé un peu plus, entraînant ses réflexes, lui proposant des exercices entre les différentes séances. Subtile ou franche, elle variait les attaques, lui donnant des objectifs, des souvenirs à dissimuler, des chemins de pensées.
Alors bien sûr, si au début, Alec s’était trouvé rassuré de voir qu’il était finalement bien avancé, il n’avait pas tardé à déchanter.

Un échec n’est qu’une clé pour mieux réussir. … Eh bah putain, il y a des jours où cette affirmation est plus simple à intégrer que d’autres.

Et chaque fois qu’il échouait, c’était un peu de lui-même qu’il lui offrait.

Alors, quels sont les souvenirs qu’un homme comme Alec consentirait à utiliser comme appâts ? Rien de bien recherché au début. Des souvenirs de cours, de ceux de Poudlard, se tournant pour communiquer par des gestes avec Jayden, Jordane ou Julian. Le gang des J. Quelques match de Quidditch, celui où Sovahnn avait volé pour la première fois, faisant gagner son équipe à la surprise générale, et son sourire une fois au sol, la née moldue qui trouve finalement sa place. Lui, assez indifférent, mais pas assez pour oublier. Souvenirs de Logan, enseignant, faisant trembler d’un regard les autres, exigent sans cesse de lui plus encore. Rien de bien dingue. Des souvenirs qu’il acceptait de laisser errer, qui pouvaient être démasqués car ils ne lui importaient pas, ne trahissaient pas d’affection démesurée et dangereuse, ne dévoilaient aucune données personnelles.

Et puis ils étaient passés à l’étape suivante. Le plus dérangeant. Ou du moins le début. Elle commençait à fouiller plus profond, insistante, efficace. Le réel entraînement arrivait.

Il y a plusieurs sphères d’intimité. Ce qu’on accepte de montrer, ce qui est dérangeant mais qu’on assume… et ce qui pourrait nous détruire.

Ils avaient déjà travaillé les deux premiers cercles.

Mais alors qu’avait-elle vu dans le second ?

La majorité des personnes mettent leurs erreurs dans le dernier cercle. Alec, lui, y avait fait de la place. Alors elle y avait découvert ce qu’il savait être : une mauvaise personne. Elle y avait trouvé les piques, la rage, la violence qu’il avait envers les autres. Elle avait effleuré son cynisme, son homophobie, sa fureur, ses accès de violence infectes, parfois simplement lâchés pour blesser, pour faire mal, pour se sentir mieux en se déchargeant sur autrui.

Si peu… si banal par rapport à ce qu’il cachait encore.

Alors qu’est-ce qui restait dans le dernier cercle ? Que contenait-il, lui ? Neuf autres zones ? Dante posait-il une organisation sur son enfer personnel ?

La dernière fois, elle l’avait vu envoyer chier ses proches, acceptant les coups de Caleb, blessant tour à tour tant de ses amies, cessant soudainement de communiquer avec Kezabel, frappant Aileen de plein fouet, balançant un sympathique « t’es mignonne, mais assez pour écarter les cuisses, pas pour l’ouvrir » à Jayden, accordant un « ouais, j’avoue que j’aime assez son côté salope » à un type dont il ne se souvenait même plus.

Paupières closes, Alec brassait le deuxième cercle, celui qu’il ne cessait d’assumer depuis des années. Celui qui faisait de lui un type haïs bien souvent et par la majorité des gens. Celui où violence, alcool, drogue coulaient à flot. S’il avait encaissé le regard de sa formatrice, Alec était rapidement parti, refusant le dialogue, conscient qu’elle devait regretté d’avoir accepté de l’aider. Mais une femme comme elle est trop digne pour rompre sa promesse non ? Il comptait là-dessus, espérant ne pas se tromper et trouver porte close cette fois-ci.

Car à présent, elle l’avait prévenu, ils toucheraient à ce qu’il souhaitait le moins voir ressurgir. Parce que naturellement, il y avait dressé des digues. Parce que, surtout, c’était là que les Supérieurs chercheraient s’ils l’attrapaient. Là qu’il devait être le plus efficace. Là, surtout, qu’il cachait le plus intime, le plus personnel, ce qui devait simplement disparaitre aux yeux d’un quelconque intrus.

Et il ne savait que trop bien ce qu’elle risquait d’y trouver chaque fois qu’il échouerait. Parce qu’il échouerait.

C’est ça d’apprendre.

Déglutissant en silence, les mains fourrées dans ses poches, Alec braquait un regard noir sur la porte où elle le recevait à chaque fois. Inspirant profondément, il toqua, conscient que parmi son pire à lui, il y avait aussi bien le meilleur… que l’horreur.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Dim 19 Juil 2020 - 22:27

Ce serait le dernier cercle. Celui qu’il redoutait le plus.
Jusqu’à ce que les coups furent frappés sur la porte, elle n’était pas sûre qu’il reviendrait ; pas sûre qu’il assumerait ce qu’elle avait vu la dernière fois, et ce qu’elle verrait aujourd’hui. Il était parti, refusant d’en parler, sous son regard impuissant mais doux. Aucun de ses mots n’aurait pu l’apaiser, elle le savait. Il ignorait, lui, toute l’ampleur de son être : il ne connaissait pas les laideurs, les aigreurs qu’elle cachait. Elle aurait presque voulu lui dire, lui avouer qu’elle non plus, n’était pas toute blanche, qu’elle non plus renfermait, en son sein, bien des choses qu’elle n’osaient exprimer. Ce qu’elle avait vu de lui...elle ne le jugeait pas, ne s’en dégoûtait pas. Il était comme il était, et il fallait bien du courage pour se regarder dans la glace. Un courage qu’elle n’avait pas, elle, au fond. Alec se servait de ce deuxième cercle comme d’un rempart, dure protection pour évincer ceux qui s’approchaient de trop près. Il brandissait son cynisme comme un étendard, dressait des murs pour qu’on ne voit pas ce qui était bon. Tout à son contraire, il placardait son pire visage comme une protection tandis qu’il cachait le meilleur. Et pourtant, il était parti ce jour-là. Quand elle avait touché du doigt ce qu’il voulait assumer mais qui semblait le dégoûter, il s’était enfui, trop peu sûr alors de ce qu’elle pourrait dire, ne voulant pas affronter les retombées, refusant l’intimité que leurs sessions engendraient. Une intimité fausse ; tout comme lorsque des semaines durant elle ouvrait son esprit à Logan, lui, demeurait inaccessible. Pour Alec, c’était la même chose. Elle ne lui donnait rien, prenait tout. Rien d’elle-même, de son esprit, de ses souvenirs...Cependant, n’était-ce pas son temps qu’elle lui consacrait ? N’était-ce pas sa discipline, son exigence, son indulgence et son expérience qu’elle lui offrait en cadeau ? Pour le protéger, pour l’aider, pour apaiser la peur, endiguer l’angoisse.

Elle lui avait répété, pourtant, bien des fois lors de leurs entraînements : pas de jugement, pas de sermons. Elle n’était pas là pour ça. « Ce n’est pas un tribunal, Alec. » lui avait-elle rappelé. La sorcière n’était pas juge, ou bourreau. Il n’y avait rien à craindre de son avis, de son opinion ; ils n’étaient rien, n’avaient aucun pouvoir, aucune raison d’exister. Tout ce qu’elle verrait, entendrait, ressentirait à travers lui...n’avaient d’importance que pour lui. Pour ceux qu’il voulait protéger et pour ceux qui voulaient l’atteindre. C’était à eux qu’il fallait penser. Mais son regard d’enseignant pesait malgré elle. Elle redoublait de douceur, de prévenance, tâchait de gommer les craintes, les doutes, tentait de lui faire comprendre que c’était seulement par l’échec qu’il fallait avancer. Parfois, elle souriait, en coin, quand sur le visage d’Alec se dessinait la même frustration qu’elle avait ressentie enfant. Celle de sentir qu’elle ne progressait pas, qu’elle continuait à faire des erreurs, qu’elle n’allait pas aussi vite qu’elle l’aurait souhaité. Le pincement de son coeur quand il comprenait qu’il échouait. La crispation des mâchoires. Les froncements de sourcils. Les remarques acerbes, cyniques qui venaient parer l’angoisse, piquer au vif. Elle s’était souvent confrontée à son système de défense, l’avait accepté comme une manière de vouloir reprendre un peu de contrôle lorsqu’il se sentait démuni, trop exposé.

A mesure que les séances passaient, Alec semblait se familiariser avec son mode de fonctionnement. D’abord surpris par la douceur de ses intrusions, par la subtilité de sa présence, habitué à la tornade que pouvait être Logan, il avait fini par comprendre. Toutes les intrusions n’étaient pas violentes, et ce n’était pas parce qu’elles semblaient être d’infimes caresses à peine perceptibles qu’elles n’étaient pas efficaces. Un concept qui l’avait beaucoup frustré les premières fois jusqu’à ce que la réalisation se fasse lentement : la façon dont Sanae utilisait son don, aussi perturbante qu’elle pouvait être pour lui, était plus perfide. Moins violente, elle s’infiltrait, sinueuse, entre chaque interstice, chaque faille, chaque trou de serrure, comme l’eau s’infiltre dans une maison qui s’inondait et alors qu’elle remplissait le cercle, allait partout, sillonnait les souvenirs avec une patience froide, calculatrice, de cercle en cercle, de paroi en paroi, elle continuait son chemin, pénétrait toutes les portes, s’écoulait dans chaque cuve jusqu’à toutes les dominer. On avait beau mettre des linges, renforcer les murs, l’eau continuait à percer les défenses...parce que c’était bien cela qui était dur...de savoir où elle était, de sentir l’eau infiltrer les couloirs, silencieux ruissellement qui ne cessait de s’écouler ; la réalisation était souvent amère : les pieds dans l’eau, c’était déjà trop tard. Comment une présence pouvait se faire aussi douce, discrète, parfois même invisible, et être d’une volonté si implacable, presque cruelle car sans merci aucune.

Face à lui, la sorcière faisait preuve d’une patience imperturbable. Jamais son ton ne s’était élevé, pourtant ferme, exigent. Elle lui donnait des exercices à faire chez lui, pour préparer son esprit, réfléchir aux stratégies mentales, aux défenses à construire et il les faisait toujours, élève motivé par la volonté de survivre.  S’il remettait en doute ses pratiques, elle le regardait sans ciller, rigide mais pas froide, expliquant d’une voix calme le fondement de son apprentissage, lui montrant qu’avec un peu de patience, il comprendrait. Il avait compris. Au fil du temps, elle avait intensifié les entraînements, changé les habitudes. Plus rapide, plus insistante, elle avait cherché à le déstabiliser, le distraire pour voir s’il allait perdre de sa concentration, essayant plusieurs scénarios, trouvant de nouvelles entrées, touchant du doigt des failles qu’il fallait colmater. Il résistait, ardemment. Mais elle ne s’en était pas étonnée, il s’entraînait depuis longtemps. Les souvenirs de Logan en tant qu’enseignant ne quittaient pas son esprit : dur, implacable, cruel, violent...elle avait goûté la terreur  des élèves qui passaient devant lui, avait vu Alec se débattre, lutter, dresser des barrières, avait aperçu à nouveau ce désir de lui plaire, d’obtenir sa fierté, son approbation. Sentiment qu’elle connaissait...Ce n’était jamais aisé d’être l’élève d’un professeur avec qui on est lié.

Sanae jeta un dernier regard au dehors. Elle s’était assise sur le rebord de l’immense baie vitrée qui donnait sur le jardin. Une étendue verte, entourée d’arbres fruitiers, d’oliviers, et d’où s’élevait, l’été, le chant des cigales. En contre-bras, un escalier de pierres qui rejoignait la plage. Combien d’entraînements, combien d’heures passées à exercer son esprit avait connu ce jardin ? Elle se revoyait plus jeune, impétueuse, impatiente, effrontée souvent, devant l’imperturbable père qui la regardait avec l’affection d’un enseignant bienveillant, mais dur. Tant d’années après, la sorcière avait du mal à croire qu’elle avait été cette enfant...tant de chemin parcouru, tant d’efforts difficilement maintenus. Le professeur n’était plus là pour la guider et elle devait trouver son propre chemin. Elle s’était faite une raison elle aussi : accepter l’échec pour apprendre, pour progresser. Déconstruire, finalement, des habitudes malsaines ; construire les nouveaux termes du contrat avec elle-même. Qu’aurait-il pensé de tout ça ? Des choix qu’elle faisait. Un soupire, long, pénible. Elle secoua la tête, chassant cette pensée.

Elle traversa le grand salon ouvert, moquette blancche, bibliothèques aux murs, tout était confortable, rassurant. Des peintures abstraites et d’autres, de paysages marins. Des tons doux, blancs, bleus, sable. Univers apaisant de son enfance écroulée. Mais plus de photos sur les meubles, elle y avait renoncé. Trop dur. Trop douloureux. La sorcière avait l’impression de traverser le cimetière d’une vie passée. Mais ce n’était pas pour rien qu’elle avait donné ce lieu ce rendez-vous à Alec : isolé, inconnu de tous sauf de Kezabel, près de la maison où se terrait encore Logan, cela leur offrait un endroit hors du temps pour s’exercer. Changer d’environnement, prendre du recul, mettre de la distance avec ses ennemis.

La main sur la poignée, Sanae ouvrit la porte après une courte hésitation. Une inspiration. Elle se mettait dans son rôle. Dernier carcan qu’elle continuait à s’imposer pour dispenser ses leçons, de même lorsqu’il s’agissait de Kezabel. Cette dernière, elle l’avait vue passer dans l’esprit du sorcier. Elle avait serré les dents, n’avait dit mot, avait retenu l’envie de son âme de grande sœur de le menacer. Il devait se douter, n’est-ce pas ? Se douter que s’il faisait du mal à Keza, elle lui ferait payer. Au double, au triple...peu importait. Son regard sur cet instant avait du le lui indiquer. Mais elle avait pincé les lèvres, silencieuse. Et elle était passée à un autre souvenir.

La porte grinça et Sanae sourit avec douceur, se poussant légèrement pour laisser le passage.

« Alec... » le salua-t-elle, l’invitant à entrer.

Elle referma la porte après lui et se dirigea, comme d’habitude, vers la cuisine.

« A boire ? » proposa-t-elle sans vraiment le regarder.

Elle passa derrière le comptoir, ouvrit le frigo et en sortit une carafe d’eau fraîche. Elle se servit un verre en attendant sa réponse. Il savait qu’il n’aurait pas d’alcool, ce n’était pas la peine de demander. Un esprit clair. En pleine possession de ses moyens, c’est ce qu’il fallait. Puis, relevant doucement ses yeux vers lui :

« Je sais que la dernière séance a été éprouvante pour toi. Tu te sens prêt pour aller plus loin encore ? Je dois te rappeler les bases ? »

Pas de jugement. Pas de tribunal. Son avis n’importait pas, il ne devait pas s’en soucier. Elle ne faisait que lui donner les outils, les instruments pour se défendre.

« Tu fais beaucoup de progrès Alec, je suis contente de nos séances. Je conçois la difficulté de l’exercice pour toi mais je suis fière de ce que tu accomplis à chaque fois. »


Une pause, un éclat moqueur dans les yeux.

« Bon, allez, j’arrête les compliments. Ton égo va exploser partout sur la moquette et c’est super chiant à nettoyer. » Un sourire taquin. « On se dirige vers le dernier cercle. Plus qu’auparavant, tu devras contrôler tes réactions. Peu importe à quel point c’est douloureux. Comme toujours, évidemment, tu as le droit de me dire d’arrêter si tu n’en peux plus, à n’importe quel moment. »

Mais connaissant son caractère assez bien à présent, la sorcière en doutait.

Qu’allait-elle découvrir ? A quels désastres, à quels traumatismes allait-elle assister ? Au fond, elle redoutait elle aussi de quoi ses souvenirs étaient faits. Ils s’apprêtaient à franchir un palier important, le coeur de tout.  
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Lun 20 Juil 2020 - 1:14
Afficher comme une arme, une muraille, les aspects de soi dont on n’est pas toujours fier, provoquer la chute, présenter en pâture certaines erreurs ou en préserver d’autres. Accepter d’être blessé pour dissimuler ce qui méritait de l’être. Choisir, simplement. Garder au plus profond ceux qu’il souhaitait épargner. Ce qu’il cherchait à garder secret aussi. Appliquer comme défense la stratégie de l’erreur. Avouer une bêtise n’est-il pas la meilleure des choses lorsqu’il s’agit s’en dissimuler une bien plus grande ? Chaque esprit est différent, chaque âme se construit selon ses propres codes, ses circonvolutions. Lui présentait trois digues concentriques. Aujourd’hui, elle ferait tomber la dernière. Alec aurait pu penser bêtement qu’il saurait résister, qu’il réussirait à mettre en place les stratégies qu’elle lui présentait, que celles que Logan lui avait inculqué sauraient le mettre à l’écart des attaques. Mais il savait que c’était faux. Qu’il fallait en passer par là pour le pousser aussi dans ses derniers retranchements, qu’il se devait d’appliquer ce qu’il savait et que jamais il n’aurait plus de motivations pour y parvenir qu’en cherchant à garder pour lui tout ce qui restait là, dans le creux de son esprit. Il lâchait un soupir, soufflant son angoisse, ses peurs enfouies. Il n’avait pas beaucoup parlé de ce qui se trouvait là. Certaines choses étaient connues, par les concernées essentiellement. D’autres avaient été affrontées, d’autres devinées. Rarement, il les avait abordés de lui-même. Jamais sans être à bout. Jamais à une parfaite inconnue. Kezabel exceptée.

« Fait chier, allez.. »

Pas le choix. Affronte. Ce n’est qu’une personne qui prend possession de l’essence même de ce qui t’a permis de te construire tout au long de ta vie après tout.
Voyons Alec, ce n’est rien, ne fais pas l’enfant…

Elle lui ouvrait, apparaissant dans l’encadrement de la porte, prononçant son prénom en l’invitant à entrer, ce à quoi il répondait par un petit sourire un peu tendu. Pas à l’aise, non, jamais lorsqu’il s’agissait de dévoiler son intimité.

« A boire ? »
« Ouais. »

S’il te plait, merci. Les gens normaux font ça mon cher je te signale.
Pourtant, il entrait sans faire plus de commentaires, inspirant de nouveau, déjà concentré, déjà fatigué à vrai dire, de ce qu’il lui donnait l’autorisation d’aller chercher. Planté derrière elle alors qu’elle lui faisait dos, s’agitant dans la cuisine, il lançait quelques sorts, vérifiant qu’il n’y avait rien de dissimulé qui puisse ressembler à un piège. Moins d’un mois et il virait déjà parano, tout va bien dans le meilleur des mondes.

« Je sais que la dernière séance a été éprouvante pour toi. Tu te sens prêt pour aller plus loin encore ? Je dois te rappeler les bases ? »

Comme toujours, il s’était détourné, l’observant du coin de l’œil en parcourant la pièce, son regard s’attardant quelques temps à l’extérieur. Par moment, il lui venait l’affreuse sensation qu’il était ici en dehors de tout, extrait des conflits. Dangereuse illusion dans laquelle il ne voulait pas se bercer. Après tout, aujourd’hui, il emplirait l’air de chacune de ses défaites, de chaque affrontement, de chaque victoire, de chaque perte.

« J’serais pas là si ça n’était pas le cas. »

Etrange cette façon qu’elle avait de toujours s’assurer de son consentement.
Oui, la dernière séance était éprouvante. Non, il n’avait pas envie d’en parler, ne se justifierait en aucune façon de ce qu’il était, ce qu’il faisait. Après tout… toutes les raisons, tous les sacrifices, toutes les décisions étaient là. Bientôt à découvert.
Pas besoin de parler, donc.

« Tu fais beaucoup de progrès Alec, je suis contente de nos séances. Je conçois la difficulté de l’exercice pour toi mais je suis fière de ce que tu accomplis à chaque fois. »

Ses yeux s’étaient étrécis doucement, suivis par un léger froncement de sourcil, toujours perturbé des quelconques compliments qu’on puisse lui apposer. Humour ? Cynisme ? Il restait incapable de le déterminé, systématiquement pris de court lorsqu’elle faisait ça, jamais tout à fait persuadé qu’il s’agissait réellement de son opinion. Et puis, un air moqueur. Il préférait ça. Plus accessible.

« Bon, allez, j’arrête les compliments. Ton égo va exploser partout sur la moquette et c’est super chiant à nettoyer. »

Un petit souffle amusé, réel rire, plus apte à se détendre face à l’humour que devant des compliments. Est-ce qu’il avançait réellement ? Il lui semblait pourtant faire bien souvent du sur-place. Les bases étaient posées depuis bien longtemps, mais il apprenait à présent à être plus attentif, à repérer les attaques plus fourbes, à les contrer autrement que par la force brute également, à jouer se pièges dans son esprit de façon détournées. Pas que Logan n’en propose pas. Pas les mêmes.

« On se dirige vers le dernier cercle. Plus qu’auparavant, tu devras contrôler tes réactions. Peu importe à quel point c’est douloureux. Comme toujours, évidemment, tu as le droit de me dire d’arrêter si tu n’en peux plus, à n’importe quel moment. »
« Ouais… ok. »

Pouvoir dire stop, une notion qui lui était étrangère.
Alec venait prendre son verre, y prélevait déjà une gorgée avant d’aller s’assoir à la place habituelle, posant le récipient à son côté, callant son dos sur le dossier, le regard braqué sur Sanae. Un rituel auquel il ne prêtait même plus attention.

« T’as prévu de procéder comment cette fois ? »

Finissons-en.

Alec haïssait se positionner en élève, faible et malhabile, incapable et ignare. Cette position de faiblesse, il en avait déjà trop bouffé et lorsqu’il était arrivé à Poudlard, il avait eu le gros avantage de se découvrir en avance sur bien des matières. Etrangement, le jeune homme préférait même la méthode de Logan. Plus attendue. Il s’y retrouvait, était dans son élément, connaissait les façons de faire des sangs purs et pouvait les anticiper. Avec Sanae… sa douceur et sa bienveillance déclenchaient chez lui des réflexes de protections évident, toujours méfiant, toujours sur le qui-vive, attendant l’action retorde, le coup en traître de celle qui amadoue avant de mettre à terre.

De toute façon, son enfance n’allait pas tarder à ressortir il s’en doutait. Trois cercles. Et dans le dernier, des cases. Familles, amis, ennemis. Amour, mépris, haine. Secrets dévoilés.
Pas de jugements hein ? Juste la vérité crue.

Merde ouais, finissons-en.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Jeu 23 Juil 2020 - 1:00
A le regarder ainsi, de l’autre côté du comptoir, Sanae se faisait la réflexion qu’il avait l’air d’un enfant ; un enfant qui tentait de survivre à ce que la vie lui envoyait en pleine face, un enfant apeuré de ce qu’elle trouverait en son âme, tapis tout au fond, là où personne n’allait. Et pourtant, si son regard ne s’accrochait jamais vraiment au sien, de biais toujours, comme à l’affût d’un mouvement suspect mais fuyant le contact, Alec était bien là devant elle. La peur au ventre, sûrement, mais prêt à supporter une nouvelle intrusion, prêt à subir le remoud des vagues à nouveau. Serrer les dents et continuer à se battre, à survivre. Il n’avait pas le choix, n’est-ce pas ? Quelles perspectives d’avenir ? Quel présent ? Tout semblait empêtré dans un passé qui menaçait de le faire sombrer. Il en savait trop, était dans la ligne de mire de nombreux esprits détraqués qui voulaient l’arracher à sa liberté, - aussi minime était-elle désormais – et le faire tomber, lui, son cousin, leurs proches. Le prix d’un affront, d’un geste aux conséquences désastreuses. Et pourtant, la lutte avait été nécessaire – elle l’était toujours.
Un enfant qui ne supportait pas la douceur, la tendresse, ni même l’approbation dont il aurait eu grand besoin ; incapable d’accepter les compliments, ne voyant en ce monde que manipulation, violence, dédain, et souffrance. Quand on a vu le pire, on ne peut plus voir le meilleur sans frémir. Quelles atrocités allait-elle encore découvrir ? Sa tête lui avait déjà fourni de nombreuses preuves de tourment, elle avait remonté les pistes, souffler sur les parois pour les déplacer, atteindre les souvenirs qui constituaient les deux premiers cercles. Elle n’y avait pas de trouvé de joie, d’allégresse. Un tourbillon infernal d’erreurs, de paroles pleines d’acide, d’abandon. Pavé de mensonges, de déceptions, de rancoeurs. Sa colère peignait sur les murs de son esprit une fresque sans nom. Les mots, du reste, auraient été dérisoires. Comment résumer un naufrage interminable, seulement perturbé par de courtes éclaircies, trop faibles pour dissiper les nuages ?


« J’serais pas là si ça n’était pas le cas. »
Elle acquiesça en silence. Un seul mouvement de tête. Bien.

Oui, il était prêt. Elle le savait. Mais les rituels qu’elle imposait durant leurs séances, les petites habitudes, sa façon de toujours lui offrir l’opportunité de s’exprimer, de reculer s’il le souhaitait, d’énoncer les doutes et les frustrations, étaient autant de manière de créer l’environnement stable dont elle avait besoin pour ces leçons. L’acte en lui-même brisait toutes les barrières et elle compensait par un rappel du consentement, une sécurisation qui devait agacer profondément Alec. Pourtant, elle continuait à énoncer les règles, les bases, rappel constant de leurs rôles. Surtout aujourd’hui, où la séance s’annonçait plus que délicate.

Ce n’était pas non plus pour rien qu’elle tentait de palier la frustration de l’échec, même constructif, par l’assurance qu’il progressait. Des compliments qui ne faisaient que tendre le sorcier.
Sa méfiance la rendait triste et elle se revoyait petite : elle aussi avait eu du mal à accepter la gentillesse des autres. Mais elle avait eu la chance d’avoir un père insistant ; lui, n’avait rien eu de tout ça. Cela n’empêchait pas les blessures, bien cachées depuis trop longtemps, d’être toujours là. Ça n’aurait sans doute servi à rien de lui dire, de casser cette figure d’enseignante toute lisse : la sorcière reprenait, pour lui, son masque d’artifices. Il fallait bien ça pour se contenir. Il était son élève et il aurait été hors de question de faire peser sur lui son fardeau. Fardeau dont elle savait à présent qu’elle devait se libérer, peu à peu, ajustant les humeurs, trouver un tout nouvel équilibre.

Il était si tendu que la sorcière décida qu’il était temps d’alléger l’atmosphère par un trait d’humour. Un souffle amusé et le malaise qu’avait fait naître les compliments fut en partie dissipé. Il prit le verre d’eau et but une gorgée, allant directement se placer sur le long canapé d’angle gris. L’élève prenait sa place habituelle et l’enseignante le regardait, un sourire en coin, alors qu’elle prenait son verre et s’asseyait en tailleur devant lui, sur la moquette blanche, comme à son habitude.

« T’as prévu de procéder comment cette fois ? »


Elle pinça les lèvres, redressa le dos, ne quittant pas son regard. Elle y voyait la crainte mais aussi la détermination d’en finir avec cette étape. Pressé ? Bien. Tant mieux.

« Maintenant que j’ai pénétré les deux premiers cercles, que je les connais, je sais mieux naviguer dans ton esprit, ce qui veut dire qu’en théorie, je peux plus facilement accéder au dernier. Tu as construit de bonnes murailles, établis des stratégies pour me guider là où tu le souhaitais, mais je passerai aujourd’hui à travers les deux cercles plus rapidement avec un peu moins de douceur. Ne faisons pas traîner ça, n’est-ce pas ? » Une courte pause, elle ne lâchait pas son regard. « Une fois que j’aurai pénétré le dernier cercle, je me ferai plus discrète. Ce sera à toi d’essayer de m’emmener  et de me coincer où tu le voudras pour que je n’atteigne pas le...centre. » Autrement dit, le pire du pire. « Testons déjà si tu réussis à garder ton calme et ta maîtrise dans cette dernière couche de souvenirs. Nous irons vers une intrusion de plus en plus spécifique. J'ai d'abord besoin de savoir comment fonctionne le dernier cercle. »

Elle posa son verre sur la moquette, se pinça les lèvres.

« Prépare-toi, je compte entrer avec un peu plus de...véhémence. »



Une inspiration. Sanae attendit de percevoir les signes qui annonçaient qu’il était prêt et alors qu’elle faisait le vide en elle, invoquant un calme concentré mais toute la force de son esprit, l’éclat de ses prunelles scintilla plus ardemment. Elle entra. Pas aussi brutalement que Logan pouvait le faire, mais d’un seule vague puissante qui s’acharna à envahir d’un seul coup l’esprit du sorcier. Les deux premiers cercles, enchevêtrements de couloirs, de murs dressés pour tromper, pour protéger, se remplirent avec force. Les vagues cognaient contre les murs, effectuaient des virages endiablés, ne s’arrêtaient pas sur les pièges qu’elle connaissait déjà, ne cherchait plus à explorer les failles possibles pour lui signaler où renforcer les murailles, non elles remplissaient tout, partout, plus violente qu’elle ne l’avait jamais été avec lui auparavant, pressée d’atteindre le dernier cercle, celui qu’il fallait à tout prix apprendre à dissimuler. C’était bien lui qui avait réclamé plus d’intensité, non ?

La résistance d’Alec s’était faite plus ferme, plus maligne, au fil des leçons et elle sentait la différence lorsqu’elle pénétrer son esprit. Il ne sentait lui, que la force contraire qui le transperçait, mais elle, sentait plus ardemment qu’au premier cours, que les murs étaient plus épais, mieux construits, que l’esprit se faisait plus retors, moins malléable. Quand elle disait qu’il faisait des progrès, ce n’était pas pour rien. Mais s’ils avaient renforcés les premières couches, il fallait passer à celle qui leur importait le plus.

Celle qui alors qu’elle se précipitait, vagues au galop, se présentait enfin. Elle sentit l’épaisseur du mur, s’y cogna brutalement et redoublant de force, finit par en fissurer l’entrée : il suffisait d’une seule petite fissure, et l’eau s’écoula lentement à l’intérieur. Plus de tsunami, plus de monstrueuses vagues. Comme une tempête qui se calme soudainement, Sanae retrouvait sa lenteur, sa douceur, un souffle, un léger écoulement, rien de plus mais pourtant, elle était bien là. Elle était entrée dans le dernier cercle.

Reste calme Alec. Ne flanche pas où les murs s'écrouleront. Tu es assez fort.


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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Jeu 23 Juil 2020 - 3:12
Alec n’aimait pas faire ça, c’était là le moins que l’on puisse dire. Accepter de se dévoiler, de donner des armes pour le contrer, de tendre le bâton pour le battre sur une intimité dont il se préservait depuis toujours, ça n’était clairement pas une partie de plaisir. La peur, oui, battait en lui. Parce qu’ici, là, face à elle, il était vulnérable d’une façon qu’il ne savait pas gérer. Sanae était une inconnue qui avait et aurait accès à tout ce qu’il y a de plus personnel et s’il faisait bonne mesure, s’il encaissait, s’il travaillait avec autant de sérieux et d’acharnement dont il était capable, c’était aussi pour masquer ce profond malaise que la situation faisait naître chez lui.

Pour autant, il lui en était reconnaissant, vraiment. Mais si depuis qu’il était môme le jeune homme n’appréciait se retrouver en situation de faiblesse, il lui semblait arriver ici au paroxysme de ce phénomène. Pourtant il en redemandait, espérant gagner en efficacité. Les Rivers ne baissent pas les bras après tout. Ils encaissent, se relèvent, acceptent l’échec s’il leur permet de progresser. Ils ne se plaignent pas et dépassent leurs propres limites.

Alors Alec agissait comme ça, se conformant bien malgré lui à un modèle qui l’avait forgé bien qu’il en rejetait certains aspects. Et si elle était confrontée au pire de ce qu’il était, soit. Sanae ne semblait pas le mettre à la porte pour autant, fidèle à sa parole. Alors il n’irait pas remuer le sujet de lui-même, peu conscient qu’elle pouvait finalement bien mieux comprendre l’ambivalence de ce qu’il était qu’il ne pourrait jamais l’imaginer.

S’asseyant sur le canapé, posant son verre à ses côtés, il plantait ses prunelles sombres dans les siennes, lui demandant comment ils procèderaient, s’accrochant aux process pour fuir la réalité de la réalisation. Focus sur les faits, pas sur la peur.

« Maintenant que j’ai pénétré les deux premiers cercles, que je les connais, je sais mieux naviguer dans ton esprit, ce qui veut dire qu’en théorie, je peux plus facilement accéder au dernier. Tu as construit de bonnes murailles, établis des stratégies pour me guider là où tu le souhaitais, mais je passerai aujourd’hui à travers les deux cercles plus rapidement avec un peu moins de douceur. Ne faisons pas traîner ça, n’est-ce pas ? »
« Ouais. » Il affrontait son regard direct, acquiesçant à cette demande de sa part. Merde, il lui donnait l’autorisation de violenter son esprit maintenant. C’était presque psychologiquement plus violent que ce que faisait Logan.
« Une fois que j’aurai pénétré le dernier cercle, je me ferai plus discrète. Ce sera à toi d’essayer de m’emmener  et de me coincer où tu le voudras pour que je n’atteigne pas le...centre. » L’âme. Celle qui fait ce qu’il est, celle qu’il cache naturellement depuis toujours. Un avantage des Rivers, il n’en doutait pas une seconde. Des sangs purs, sans doute, de manière générale.  « Testons déjà si tu réussis à garder ton calme et ta maîtrise dans cette dernière couche de souvenirs. Nous irons vers une intrusion de plus en plus spécifique. J'ai d'abord besoin de savoir comment fonctionne le dernier cercle. »

Garder son calme. Contrôle-toi Alec. Gamin, ado et adulte violent, impulsif, le jeune Rivers se trouvait face à un besoin de maîtrise en face de ses propres émotions ravageuse qu’il n’était pas certain de savoir mettre en place.
Cependant, il en avait fait du chemin depuis ce soir-là, dans un bar. Cette soirée qui l’avait amené tout droit à Poudlard. Vers l’enfer des uns, mais sa liberté à lui.

« Ok. On fait ça. »

Tu te rends compte de cette capacité à prendre le contrôle là où tu n’en as pas ou pas du tout ? Bon, passons.

Elle posait son verre, plantait sur lui ses pupilles de jais. Il lui semblait parfois s’y perdre tant ils l’englobaient par moment, se fondant en lui, le dévorant soudainement.

« Prépare-toi, je compte entrer avec un peu plus de...véhémence. »

Pieds ancrés dans le sol, dos et bras droits, les mains plantées dans le canapé gris, tendus de chaque côté de lui, les mâchoires serrées. Plus de retour en arrière possible. En silence, il se repassait chaque information, chaque conseil glanés auprès de ses deux enseignants et, encore une fois, se préparait à accueillir la douleur.

Un signe de tête et elle déferlait. Contrairement à son habitude, elle l’avait percuté de plein fouet, envahissant chaque fibre de son être, déferlant sur son esprit, se jouant de tout ce qu’il pouvait y mettre en place. Qu’importe les pièges, qu’importe la force brute, elle sillonait en lui comme si les moindres recoins de son esprit n’étaient déjà plus que son terrain de jeu.

Une sensation qu’il vomissait. Et alors qu’elle rejoignait sans trêve le centre de son âme, alors qu’il tentait de l’en empêcher presque par réflexe, l’agrippant de ses griffes alors qu’elle lui échappait comme de l’eau entre les doigts, les muscles du jeune homme tremblaient doucement sous le choc de ce que son organisme affrontait. Pas moyen, elle se faisait insaisissable, plus puissante qu’elle l’avait jamais été en lui. S’il avait pensé la surprendre et réussir à l’éloigner des deux premiers cercles, c’était foutu. Et la vague trouvait enfin la muraille intérieure, celle qu’il devait apprendre à protéger de son mieux, à rendre infranchissable.  

Qu’importe la force qu’il avait pu mettre pour la repousser, elle avait fini par biser l’entrée. Rien de fracassant finalement, rien d’aussi magistral que lorsque Logan entrait, dévastant tout, pulvérisant ses murailles difficilement mises en place. Lorsqu’il voulait faire mal, montrer les failles, alors il foudroyait. Elle non, dès la première fissure, elle avait cessé les attaques et, déjà, la tempête s’essoufflait. Déjà il ne sentait rien.

Son propre souffle, à l’effort, se faisait poussif, irrégulier.

Alec la savait présente, parfaitement conscient de n’être pas seul dans sa propre conscience mais de prime abord incapable de la repérer. Ça aurait en tout cas été le cas sans le mois d’entraînement qu’ils avaient eu. Ça n’avait pas été immédiat, il lui semblait sonder sa propre conscience, évitant de tomber dans le piège de faire ressurgir du même coup les pensées qu’il ne voulait surtout pas laisser à vif.

Ne pense pas à l’éléphant… putain de connerie.

Ne pas lui laisser un chemin tout tracé. Alors il scannait de part et d’autre, sans s’attarder, sans délaisser des coins, de manière anarchique. Pas parfait. Il aurait aimé réussir à se scinder, à être partout à la fois afin de ne laisser aucun interstice sans surveillance mais il en était loin. Merde, comment faisaient-ils ça, se déverser comme ils le faisaient, comme s’ils emplissaient soudainement toute partie de son être ?
Et là, soudain, un frisson, comme un ondoiement anormal.
Vous savez, cette sensation qui vous prend lorsque vous entrez dans une pièce qui a été votre unique lieu de vie durant des jours, des semaines ou des mois et où une chose, une seule, n’est plus à sa place ? Cette impression d’étrangeté qui vous emplis avant même de comprendre où se situe le problème ? C’était ainsi qu’il l’avait repérée. Près des murailles, non loin de la brèche qu’il n’avait pas réellement su repérer tout de suite tant la violence de l’attaque l’avait emplis, pas toujours apte à distinguer les impacts des fêlures. Mais elle était bien là. Une goutte d’eau dans l’océan.
Pas de murailles ici. Du vide, immense, remplis d’une brume insondable. De quoi se perdre, de quoi chuter… du moins il l’espérait, car ça n’était pas nécessairement sa nature profonde. Ça et là restaient les murs d’acier ébranlés. Pas simple de se construire comme on le voudrait, pas simple de réinventer son fort intérieur de sorte à changer de stratégie. Force brutale, résistance froide, pièges, détours avaient déjà été utilisés. Alors il tentait autre chose. Là, il essayait de ne pas montrer qu’il l’avait repérée, se décidait à l’apposer sur ce qu’il espérait être un sol instable, la forçant à trébucher afin de l’amener à sa façon à tourner en rond. Mais pas sans rien à se mettre sous la dent. S’ils entraient sans rien trouver, alors ils sauraient qu’ils s’étaient fait avoir. On est dans le dernier cercle non ? La dernière barrière, le dernier rempart. Il leur fallait trouver des souvenirs plausibles pour un tel lieu sans qu’ils ne soient trop compromettants. L’y faire glisser, l’y amener sans y sembler. Quitte à lui faire voir des souvenirs, autant choisir lesquels. Prise de vue réelle, risques acceptés, challenge relevé. Faire penser à l’intrus qu’il avait fouillé, trouvé le plus secret sans y récolter ce qu’il souhaitait. Parce que ça n’existait pas sans doute.
Faux. Mais viable.
_

« Jay putain ramène toi tout de suite ou j’te bute ! JAY !?! »

Réveil brutal dans le dortoir à Poudlard, seul dans la grande pièce, un des grands rideaux repoussé, le drap en partie sur le corps, les mains entravées. « JAY… putain mais quelle conne… windgardium leviosa…. Ouais ben on pouvait toujours tenter hein… Genre ça va marcher comme ça soudainement sans baguette tient… » Les liens fermement resserrés contre ses poignets et là, soudainement, un visage familier qui se pointait, un homme, un petit sourire en coin, plus qu’amusé de la situation.
« … Heeey ! Salut ! Un peu d’aide peut-être ? Non ? Hey te barre pas !! » Assume. L’important c’est d’assumer…

__

« Bordel, Alec, j’te garantie que tu vas arrêter tes conneries tout de suite ! »

« Ça va Jo, je la ramène pas, j’dois y aller. Tu comptes faire quoi au juste ? »

Il avançait, s’imposait dans les couloirs des sous-sols de Poudlard, posait une main ferme sur le bras de la jeune femme, le regard brûlant et lourd posé sur elle, la repoussant violemment… sans réellement comprendre ce qui se passait. Elle se dérobait une première fois et, sentant le danger approcher, il frappait… dans le vidé. L’instant suivant, pris de court, sans comprendre tout à fait comment la jeune femme venait de faire pour glisser en dehors de sa frappe, il lâchait un cri de surprise, son poignet brutalement retourné en un sens peu conventionnel, les doigts de la jeune femme sur lui soudainement d’une puissance qu’il n’aurait imaginé, ses ongles enfoncés dans ses nerfs, la douleur fulgurante lui déchirant le bras.

Poignet brisé. Jo remporte la première manche.

Pas de mention d’Emily pourtant non loin de là. Souvenir altéré.
__

Les ombres se referment sur son être. Plus aucun sens en éveil et les émotions qui hurlent, s’éveillent, s’entrechoquent. Et l’air qui déserte tout son organisme. « Je pourrais te tuer là tout de suite Alec. » La voix de la femme résonnant à ses oreilles, brutalement, comme si elle seule existait dans ce monde qu’elle lui avait forgé. « Pas de Logan pour te sauver. Allez, fait de ton mieux misérable petite chose… » il étouffait, sentait à peine le sol percuter ses genoux – ou bien était-ce l’inverse – irradiant dans ses os une douleur sourde. Et là, dans les ténèbres de ses sens supprimés, la peur, hurlant dans chacune de ses cellules. Asphyxie.

L’entraînement avec Sloane, sous les ordres de Logan.

__

« Debout Alec, allez, sérieusement, t’es capable de mieux que ça, tu es lamentable à jouer les victimes. »

Et les coups pleuvaient de nouveau, sourds, violents. Logan et sa puissance de feu, les sorts qui s’enchaînent, qu’il contre, encore et encore, qu’il évite, dévie, attaque à son tour. Mais le torrent se fait ingérable et une nouvelle fois, il vole, se prend les murs, le souffle coupé, percute le sol au même endroit que la fois précédente. Et le bois est déjà imbibé de son sang.

« C’est sérieusement le mieux que tu puisses faire ? »


Et ses os se tordent sous la violence de la pression. Et la lumière vacille sur ses rétines.

Logan. Premier entraînement après l’enfermement. Vous vouliez des tensions entre nous ? Les voilà. Donner la haine, cacher l’amour.

__

Les paroles, violentes, froides de Caitlyn, la jeune femme en soutien-gorge qui l’envoyait chier, le frappant au passage, passant un pull, dardant sur lui le feu de la colère.

Assume tes responsabilités. Ne te cache pas derrière ton passé, ne te drape pas d’un statut de victime, assume d’être un connard ou avance.

La samaritaine cesse de l’être.
__

« C’est bon, arrête, t’es baisable, c’est tout. A un moment, sois belle et tais-toi. »

Jayden. Mauvaise passe. Le coup qu’il s’était pris lui vrillait toujours la mâchoire.

__

« Mais putain, vas-te faire foutre Alec, qu’est-ce qui déconne chez toi sérieux ?! »
« J’en sais rien mais moi j’ai pas besoin d’un bon samaritain pour me baiser pour me sentir vivre. »
« Va chier sérieux. »

Sovahnn. Il ne savait même plus comment ça avait dérapé ainsi à propos d’Enzo. Sans doute parce qu’elle couchait avec les deux et que dans le fond ça le faisait chier sans réelles raisons. Sans doute pour exister, lui aussi, justement.
__

« Ah ouais ? Tu crois vraiment que t’as le cran pour savoir me gérer ? »

Une soirée dans la salle commune des Serpentards. Une fête qu’il avait organisée. Musique à fond, sortilèges de protections, alcool, drogue, rires et là, contre lui, Jordane, un doigt contre son torse, le glissant sur sa peau, traçant les contours de ses muscles nus pour il ne savait plus trop quelle raison d’ailleurs… et elle atteignait sa ceinture, l’agrippant pour le rapprocher d’elle, glissant à quelques centimètres de ses lèvres : « Désolée mais j’crois que t’as pas l’étoffe… »

Putain de nana…

Déjà elle s’éloignait, un sourire amusé aux lèvres, le regard toujours braqué dans le sien, se délectant de l’envie qui irradiait ses prunelles alors qu’elle rejoignait Jayden, l’attirait à elle pour l’embrasser et l’emmenait sur la piste de danse, sa main glissant sur sa hanche, les deux jeunes femmes disparaissant parmi les autres.

« Sympa la nouvelle copine… »

Première rencontre avec Jordane.

__

Trop de situations, placées là volontairement. Assez personnelles pour y avoir leur place. Honte, mépris, haine, rejet, amusement aussi. De quoi fournir des armes contre lui, des choses qui faisaient réellement mal, qui blessaient… mais qui étaient gérables. Nulle part on y voyait l’affection qu’il pouvait avoir pour certaines de ces personnes. A aucun moment il n’y laissait transparaître la moindre information.

Pas si mal non ? Ou je me plante ?
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Mar 28 Juil 2020 - 13:53
 Le dernier cercle.
Elle l’avait senti lutter, remuer son esprit pour repérer où elle se cachait, si fine et invisible présence qu’elle était devenue au franchissement de la dernière barrière. Quelques instants de flottement, de silence pesant dans leurs deux esprits. L’air autour d’eux s’était chargé d’une électricité habituelle durant leurs séances. Une pièce plongée dans l’immobilité alors que tout était mouvant en pensées.
Sanae se faisait minuscule dans l’esprit du sorcier, elle ne sillonnait pas le dernier cercle, elle demeurait à l’entrée, à la brèche par laquelle elle était entrée. Elle attendait, attendait de voir ce qu’il ferait, ce qu’il mettrait en place pour l’arrêter ou pour l’emmener avec lui...où il le désirait. Comment as-tu construit le dernier cercle Alec ? Quelles murailles ? Quels pièges ? Quelle stratégie ? Montre-moi de quoi ton âme est faite. Tente de m’empêcher de l’emplir toute entière, d’y déceler tes moindres secrets, d’en voir tous les recoins.

Elle se sentait comme une souris dans une pièce baignée d’ombre, tentant d’échapper au projecteur qui se dirigeait de tous côtés. Échapper à la lumière de son attention, ne pas se faire voir, ne pas se faire entendre, infime brise, écoulement silencieux, goutte d’eau posée dans les méandres de l’esprit...figée. Tout autour n’était qu’une étendue de brume, plane, sans murailles apparentes, sans couloirs, sans portes, sans cadenas. Le calme plat. Alors, c’était ce qu’il avait choisi. Malin. Amusant. Bravo Alec. Mieux valait parfois perdre son ennemi dans le rien, dans le néant, dans un brouillard intense qui pouvait le désorienter, et où rien ne semblait construit, rien ne semblait à portée de mains. Comment percer une brèche lorsqu’on ne voyait pas de mur ? La solution était toute trouvée. Ingénieuse. Ce n’était pas un Rivers pour rien.

Un léger et fin sourire en coin naquit sur les lèvres de la sorcière.

Elle se sentit glisser. Elle ne résista pas. Et puis le défilé de souvenirs commença…

« Jay putain ramène toi tout de suite ou j’te bute ! JAY !?! »

Sa voix perça dans sa tête comme si elle vivait la scène. Lui, attaché, torse nu, couvert d’un drap. Piégé. Une bonne blague apparemment. Ou pas. Il maugréait, appelait, mais cette Jay semblait l’avoir laissée à son sort. Un élève passa, mais ne le délivra pas. Amusant. Légèrement humiliant pour certains. Mais pas pour lui...il lui en fallait plus, elle en était sûre. Pas un souvenir qui valait le dernier cercle…
Et c’était comme ça qu’elle savait qu’il l’avait repérée. Parce que c’était évident qu’il avait choisi ce souvenir exprès...cela ne dévoilait rien sur son âme. Rien qui puisse être utilisé contre lui. Rien qui n’était vraiment délicat à montrer.

Hm.

Quoi d’autre Alec ? Je ne suis pas convaincue.


« Bordel, Alec, j’te garantie que tu vas arrêter tes conneries tout de suite ! »
« Ça va Jo, je la ramène pas, j’dois y aller. Tu comptes faire quoi au juste ? »

Poudlard, toujours. A force de souvenirs, Sanae finirait par connaître cette école de fond en comble. Jordane. Elle l’avait déjà vu dans d’autres souvenirs, commençait à connaître son caractère via les altercations qui fourmillaient dans la tête d’Alec. Altercation, oui, c’était bien le mot. Les gestes vifs, rapides, étudiés...les os qui craquent. Le poignet dans une position qui déclencha la douleur du sorcier. Malgré sa tentative, il avait échoué à la frapper, n’avait pu éviter le coup de son adversaire. Il n’était pas difficile de reconnaître des compétences dont elle était elle-même familière. Cette Jordane lui plaisait. Un bon point pour la jolie blonde. Et un os brisé pour Alec.
Pourtant, quelque chose cloche dans le souvenir. Un grésillement, infime, à peine perceptible. Sanae fronça les sourcils, concentrée. Hm. Intéressant…

D’autres images affluent et elle n’a pas le temps d’étudier la question. L’ambiance changeait, plus sombre, plus perturbante. Ah, s’enfonçait-on dans des souvenirs plus douloureux ? Une femme se penchait sur Alec qui peinait à trouver de l’air, asphyxié. Les mots, durs, tranchants. Et la peur qui tiraillait tout son être, les sens privés de leur liberté. Elle ressentait tout comme si c’était elle qui recherchait désespérément l’air dans ses poumons. L’angoisse, terrible, la prenait aux tripes.

Et puis d’un seul coup, le visage de Logan apparut. Changement de pièce, mais l’ambiance demeurait aussi tranchante qu’une lame sous la gorge du sorcier. Un entraînement. Les sorts pleuvaient, s’abattaient, ne laissaient aucun répit à Alec qui tentait de les contrer, de rendre les coups. Mais Logan, intraitable professeur, profitait de chaque instant, de chaque reprise de respiration pour lancer de nouveaux sorts. Et Alec était propulsé contre les murs, son corps subissant les attaques, laissant du sang sur le sol. « C’est sérieusement le mieux que tu puisses faire ? ». Elle reconnaîssait la voix, les intonations, la dureté. Quiconque assisterait à une telle scène pourrait les croire ennemis, pourrait entrevoir la haine ou le mépris dans la violence de l’enseignement. Pas elle. Oui, Logan était violent. Ses méthodes, à l’opposée des siennes, faisaient crisser les os de son élève, le maltraitaient, le défiaient sans cesse à rendre les coups, toujours plus forts. Mais elle s’était tenue assez près des deux cousins pour y voir l’affection qui résidait au fin fond d’eux...une interprétation qui était sienne, mais qu’elle ne pensait pas fausse pour autant. Ce n’était pas un hasard si Logan était aussi dur avec Alec, pas un hasard s’il l’entraînait autant, s’il se souciait des défenses qu’il pouvait mettre en place, s’il voulait qu’il s’endurcisse autant que possible...une affection brutale, mais...quelqu’un d’aussi violent que lui ne pouvait aimer autrement. Et Alec, oh, elle se doutait qu’il y avait de la colère, de la rancoeur, et pourtant...il était toujours revenu le voir, avait cherché à le sortir du silence, à le retrouver comme il était avant, malgré leur passif, malgré les choix, les erreurs, les insultes...L’entêtement de deux cousins, presque des frères, qui ne semblaient pas pouvoir se lâcher...pas encore...même s’il aurait fallu, parfois, s’éloigner. N’était-ce pas ce que Logan voulait faire à présent ? N’était-ce pas la conclusion qu’il avait exprimée ? Se détacher, s’éloigner.

Le souvenir disparut, emporté par de nouvelles images. Une jeune femme en colère, remettant ses vêtements alors que ses traits exprimaient toute la rage de l’instant. Le geste, brutal. Les paroles, acides. Assume d’être un connard.

C’est ça que tu veux à  montrer à tout prix Alec ? Que tu es mauvais ?

Comme un enchaînement logique, une trame bien ficelée, la scène suivante donnait des éléments de réponses pour le spectateur. « C’est bon, arrête, t’es baisable, c’est tout. A un moment, sois belle et tais-toi. ». Le coup ne tarda pas. Elle reconnut le visage de Jayden, autre nom parmi ceux de l’esprit d’Alec qui devenait familier.

Une autre jeune femme en colère. Combien y en avait-il Alec ? A ce rythme, c’était un défilé de nanas vexées. « J’en sais rien mais moi j’ai pas besoin d’un bon samaritain pour me baiser pour me sentir vivre. » D’autres paroles malheureuses, odieuses. Quel beau tableau tu peins pour ton visiteur Alec. Elle l’admettait : c’était convainquant.

Jordane à nouveau. L’ambiance était différente. Électrique, suave, chaude. Une fête. La musique, l’alcool, la drogue… mais les rires, la joie sauvage de se lâcher, de s’amuser. Alec, torse nu...(pourquoi était-il toujours à moitié nu dans ses souvenirs?!), debout dans la salle commune tandis que la sorcière blonde traçait les contours de son torse. Le désir faisait flamber ses veines à lui. Mais quelques mots susurrés avec amusement rompirent le charme. Déjà, Jordane s’éloignait, pleine d’une fierté moqueuse, et allait danser avec Jayden, d’une façon qui n’aurait pu que faire râler tous les hommes et femmes de l’assistance qui les trouvaient à leur goût.

« Sympa la nouvelle copine… »


C’était donc ainsi qu’ils s’étaient rencontrés. Une belle entrée en matière. Elle pensait de plus en plus de bien de cette Jordane décidément.

Mais l’amusement avait assez duré.
Sanae fit quelque chose qu’elle n’avait pas encore fait avec lui, qu’elle n’avait pas essayé...pour la simple et bonne raison qu’elle ne maîtrisait pas totalement cette façon de faire encore. Elle était une vague qui remplissait tout, d’un seul coup, d’ordinaire, mais en cet instant, les vagues se décuplaient, se multipliaient, partaient dans plusieurs directions à travers le brouillard. Ca, elle le devait à Logan. A force de subir ses assauts, à force de se confronter à sa manière d’opérer dans son esprit, elle avait vu comme il pouvait être partout, tout à la fois. Et l’attention de l’hôte devait se faire plus grande. Concentre-toi. Raconte-moi plusieurs histoires en même temps.

« Est-ce donc tout ce que tu as à me montrer Alec ? » susurra-t-elle.

Durant leurs entraînements, elle avait séparé des moments d’intrusion silencieux et des moments où elle lui parlait, tentait de faire vaciller sa concentration, de faire surgir des images spécifiques comme lors d’un interrogatoire. Aujourd’hui, elle le poussait à garder davantage ses murailles invisibles dressées.

« Ce sont de bien bonnes histoires...mais personne ne se contentera de si peu. Concentre-toi, empêche-moi de voir ce que tu veux tant cacher. »

L’eau et le brouillard se mêlaient ensemble. L’emplir, rechercher à travers l’opacité de son esprit des  trames différentes, des chemins tortueux qu’il ne voulait pas qu’on emprunte.

« Sers-toi de la violence des souvenirs pour qu’ils s’imposent à moi, pour que je ne puisse pas leur échapper. Pique ma curiosité, convainc moi qu’il n’y a rien ailleurs de plus croustillant. »


Prouver à l’intrus qu’il avait atteint le coeur, qu’il s’était repu du repas qu’il croyait avoir découvert par lui-même...que ce n’était pas un buffet trompeur qu’on lui donnait pour le satisfaire. Allez Alec, tu te débrouilles bien, continues.

« Toutes ces informations qu’ils veulent...ces détails que tu dois préserver...ils sont quelque part...un brouillard ne réussira pas à les dissimuler éternellement. Creuse des trous, emporte-moi à l’intérieur. Piège-moi. »

Si la brume du dernier cercle était assez épaisse pour ne pas s’y retrouver, il fallait qu’elle le soit également assez pour qu’on ne puisse pas voir ses pieds, qu’on tombe là où il le souhaitait, qu’on ne puisse plus remonter, qu’on se perde, vraiment, dans des profondeurs fausses.

Amuse-toi Alec, c’est ton esprit, ton territoire...

Alors, elle se faisait plus insistante, plus puissante, comme des jets d'eau partant vers plusieurs endroits. Elle explorait en gardant un point d'ancrage, sa présence se faisait double, triple...se scinder ainsi n'avait rien de facile. Il fallait qu'il tienne autant qu'elle, qu'il ne perde pas le contrôle, et elle...qu'elle ne s'éparpille pas au risque de perdre de sa concentration, de ne pas remarquer les petits détails importants. Un défi pour tous les deux.

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mar 4 Aoû 2020 - 3:38
Garde ton calme. Ne te laisse pas abuser par son calme, la finesse de ses actions, la discrétion de sa présence. Elle est là. Et si ce n’était pas elle, ça pourrait signifier la fin de bien des personnes. La sienne pour commencer. Il serait bien hypocrite de penser qu’elle lui importait moins que celles des autres, mais ce serait faux. Il les voulait en sécurité… il se voulait en sécurité. Mais rien de tout ça ne serait possible. Du moins pas dans l’état actuel des choses. Alors oui Alec, garde ton calme, respire, reste concentré.

Ça n’est pas assez. Alors tu dois l’amener ailleurs. Là dans les ombres, là dans les brumes, tu sais ce qui se cache. Là, or de sa vision, tu sais ce qui gronde.

A l’instant même où il se battait contre lui-même, refusant de l’amener sur un terrain qu’il n’était pas capable de gérer, il l’avait sentie exploser. En un instant, c’était une sensation familière qui l’emplissait. Comme Logan, elle semblait éclater en million d’étincelles. Un instant, elle était là, repérée, sous contrôle, et le suivant, elle lui échappait, claquant dans son esprit partout, ingérable. Planque ce qui ne doit pas être trouvé, empêche-là d’y accéder Alec. Tu sais le monstre qui gronde. Tu sais l’horreur au fond de toi. Tu sais ce qui ne doit pas être trouvé… tu sais ce que tu ne peux laisser en libre accès… mais surtout tu sais ce qui n’a rien à voir avec tout ça et qui mugit là au fond de toi. Eloigne-là. Sois meilleur que ça.
Ô comme tu crains qu’elle s’en approche….

La peur. Celle qui te prends aux trippes, celle qui gronde et que tu ne contrôle pas, celle qui t’entraîne, meurtrière, t’engloutie, te gobe, te digère sans que tu ne puisses rien y faire, entraîné vers les profondeurs par ses serres plantées en toi, te lacèrent et t’étranglent. La peur immuable, brutale, violente, assassine. Celle qui t’empêche de respirer, d’avancer, t’exister, qui te fige et te dévore. Celle contre qui une seule chose arrive encore à lutter. Un seul truc pour te maintenir la tête hors de l’eau, te donner un peu de contrôle, un peu de puissance, te rassurer dans les ténèbres.

Alors il réussissait à éloigner le monstre, à le mettre sous clef, à en couvrir les rugissements. Donner autre chose. Tout sauf ça. Et pourtant, ce qu’elle avait fini par atteindre y était tellement lié. Si proche… pourtant inaccessible. Il lâchait autre chose.

__

Janie était là, les larmes plein les yeux, le regard droit pourtant de sa sœur. Et tout l’amour qu’il éprouvait pour elle, tout le sentiment de stabilité qui déjà s’effritait le rongeait, l’emplissait. Corrosif, déjà, l’abandon.

« J’suis désolée Alec, je peux juste plus je… »
« Je sais, magne toi, on a déjà eu cette conversation. Ça sert à rien de te faire prendre. »

Pré-ado, il se tenait là, sa main dans la sienne une seconde, les traits difficilement maintenus calmes alors qu’elle l’embrassait sur le front avec un dernier sourire.

« Ça ira bien tu verras. »

Pour toi. La réponse acerbe, piquante qu’il ne lui assenait pas. L’enfant l’aimait trop pour ça, pour la retenir, pour lui faire affronter de nouveau leurs parents, leur précepteur et l’autre, le monstre, le même qui grondait dans les tréfonds de sa conscience, celui qu’il arrivait à ne pas rattacher à elle, qu’il laissait de côté, qu’il gardait sous cape.
Alors l’enfant à l’aube de l’adolescence lâchait de lui-même sa main, rompant le contacte. « Barre-toi, dépêches-toi, je gère. »
« Merci… J’te revaudrais ça. »
« T’as intérêt frangine. »

Qui sait ? Si on ferme les yeux, on vivra vieux…

Alors il la lâchait, se retournait, lançait le plan élaboré quelques jours plus tôt, ne s’arrêtant qu’une seconde pour regarder la silhouette de sa sœur passer la porte d’entrée. Elle quittait les Rivers par la grande porte. De tous, c’était toujours elle qui avait eu la plus grande gueule. De tous, c’était celle qui assumait le mieux. Une saloperie de masque foutrement bien conçu.
Jamais elle ne reviendrait ici.
Et il demeurerait le seul à pouvoir de nouveau la contacter une fois que tout se serait calmé.

Car bien sûr, il le savait, les géniteurs risquaient de vriller. Une héritière dans la nature, ça la fout mal.

__

Et Sanae continuait d’exploser en lui, trouvant la suite sur son chemin. Souvenirs douloureux sur lesquels il s’était construit. Plaies toujours ouvertes, incapacité à avancer. Seules Mack et Kezabel savaient. Vraiment ?
__

La solitude englobait tout, l’engluait dans un sentiment d’abandon, de danger, d’insécurité. Il restait seul ici. Seul face à un danger qu’il réussissait encore à garder hors de portée de Sanae. Mais le monstre grondait, là, non loin. Sa présence hantait la brume. Pour autant, pour l’instant, seule restait l’entrée furieuse de ses parents dans sa chambre. Le corps du gosse qui vole, la rage du paternel, le dégout de sa mère. Les paroles, mordante, semblaient dégueuler d’un mépris qui l’avait marqué bien plus que les mots qu’il lui avait servi. Les coups, les sorts, l’impression que tout son corps cesserait à l’instant de se battre alors que les questions de son père pleuvaient. Où était sa sœur ? Par où était-elle partie ? Qu’avait-elle fait ? Il leur fallait réagir au plus vite pour la protéger.
Cherchez…. Insistez, frappez, dégueulez toute votre haine, votre rage. Je ne parlerai pas.

Ils l’avaient compris, bien sûr. Alors dès le lendemain, Alec avait été demandé en bas du grand manoir, mains dans les poches, regard dur et froid se posant sur son oncle et son fils. Pas un mot non, alors que les adultes parlaient. Pas un mot non plus entre les deux cousins. Pourquoi les amener ici ? A vrai dire, le jeune homme s’en doutait un peu. Le grand frère de son père avait pour réputation d’être bien meilleur que son cadet.
Alors, même s’il les regardait sans flancher, dans ses poches, ses mains, humides, tremblaient.

« Bon. Laisse-nous Steven. Nous allons discuter un peu ensembles. »

Envie de partir en courant, envie de s’arracher les muscles à fuir le plus vite possible, quitte à en crever sur place. En cet instant, Alec se sentait le plus démuni au monde, vulnérable au possible, amputé de sa moitié. Il n’avait pas treize ans et il lui semblait qu’il ne pourrait jamais se remettre de ces dernières heures. Pourtant, il ne fallait pas lâcher, pas flancher, pas maintenant. Janie avait besoin de temps pour mettre de la distance entre eux. C’était son rôle de tenir.
Alors il avait suivi les deux hommes…

« Assis-toi. »

…Et s’était exécuté, le cœur au bord des lèvres.

« Logan. C’est à toi. Prouve donc que tu sers à quelque chose dans cette famille. »
« C’est drôle de la part d’un type dont le frère est en train de renverser le pouvoir. »

Le coup était parti sans prévenir, traçant une plaie rouge qui scintillait déjà à la lumière des lampes sur la joue de l’adolescent qui, visage baissé, souriait doucement, redressant le regard pour le planter droit sur son père.

« Intéressant… »

Un silence tendu s’était installé entre les deux Rivers, chacun s’affrontant du regard, laissant le jeune Alec incrédule. Pas tout à fait l’ambiance qu’il imaginait entre eux.

« Occupes-toi de lui c’est tout. »
« Bien messire… »

Si Alec adressait à son père un sourire provocateur en toute situation dans ces cas-là, Logan agissait comme s’il avait le dessus sur son père et ce, malgré les ordres que celui-ci lui donnait. Et étrangement, sans que le jeune homme n’arriva à mettre le doigt dessus… il semblait que ça n’était pas une sensation totalement usurpée.
Le regard qu’avait dardé Logan sur lui l’avait fait frémir, le regard perçant de l’adolescent semblant le transpercer de toute part, lisant en lui comme dans un livre ouvert.
C’est quoi cette blague ?  
Il n’avait pas eu le temps de répliquer quoi que ce soit que déjà, une douleur sourde semblait fendre son crâne en deux. Première fois. Pris de court, plongé dans l’incompréhension la plus total, Alec avait hurlé, les larmes aux yeux face à la violence soudaine de l’intrusion qui le laissait parfaitement faible et impuissant. Là, en une seconde, Logan avait tout pris de lui, raclant chaque part de son esprit, en arrachant les parois sans clémence. Et il ne comprenait pas, tout comme il ne s’était pas attendu à ce que ses souvenirs ressurgissent comme un orage à la présence de son cousin. Et l’instant suivant, il n’y avait plus rien, le laissant simplement au sol, incapable de se rappeler quand il était arrivé là, le nez en sang, les gouttes frappant le parquet au centre de sa vision brouillée. Alors il s’était retourné, tremblant, s’accrochant à sa chaise, le regard valsant de l’un à l’autre, totalement perdu à l’époque face à ce qui venait de se passer. Et Logan n’avait pas bougé, le corps relâché, une main dans une poche, ses prunelles étrécies posées sur lui sans un mot malgré les sollicitations incessantes de son père.

« Il ne sait rien. »

Premier réel contact entre les deux cousins.

Ce matin-là, Logan préservait Janie de leur famille, lui laissant l’opportunité de fuir. Ce matin-là, ils s’enfermaient tous deux dans leur premier mensonge, leur première connivence.
Et pour la première fois, c’était dans la douleur qu’il le protégeait.

__

Sans Logan ce jour-là, Janie aurait-elle pu obtenir sa liberté ? Se construire en dehors de tout cet univers ? Que serait-elle devenue ? Et là, il se sentait glisser, un autre souvenir remontant, aussitôt intercepté par Sanae, investi avant qu’il n’ait le temps de réagir, de le ravaler, de l’enfoncer de nouveau dans la brume.

Le soulagement, immense, insupportable  presque, dévorant qui l’avait empli devant la cheminée d’une salle commune vide. Les larmes qui coulent devant les flammes. Une première depuis l’enfance. Mais Janie allait s’en sortir malgré la maladie, et rien d’autre le comptait. Qu’importe les sales traces sur son abdomen, qu’importe ce qu’il avait pu faire pour en arriver là, qu’importe les violences subies, qu’importe sa propre mort. Sa sœur vivrait. Le reste on s’en fout.
Une belle brune entrait, le rejoignait, s’asseyant à ses côtés devant le brasier, sa main dans la sienne, épaule contre épaule, des sourires, de la tendresse, les larmes effacées avec un temps de latence, acceptant la vulnérabilité face à une amie.

Jill. Née moldue. Il repoussait le souvenir avec violence, tellement concentré là-dessus qu’il perdait le contrôle, le reste suivant par association d’idées.


« Putain, déconne pas mec j’ai pas dormi depuis trois jours. »
« Et ? Ne va pas dire que le grand Rivers n’est pas capable de tenir le coup. Allez, on en attend encore de toi si tu veux vraiment qu’on te rende ce petit service concernant ta soeur. »

Mâchoires serrées. Un petit service. Le laisser subir une opération pour lui permettre de survivre à une merde qui la dévorait ? Sale con.

Le souvenir changeait, sans contrôle. La violence : il tombait à genoux devant le même type, le corps tordu face à la violence d’un sort interdit.

Et il changeait de nouveau, Alec retrouvait du contrôle, l’amenant vers quelque chose qui ne le mettrait pas en danger devant les Supérieurs, rejetant celui qui arrivait en trombe, impliquant Emily, expliquant la réaction de Jordane. Non, il devait rester sur des choses plus sécurisées, même si l’image que Sanae conserverait de lui faisait mal.

« Alors ? Il choisi quoi le Rivers ? On en fait quoi du gamin ? On le met à l’étude ? On s’en débarasse… ou on le laisse partir ? Tu connais la situation. A toi de choisir. »
Le regard du jeune homme se posait sur le môme. Douze ans à peine, de l’espoir brouillant ses yeux humides. C’était un élève, il ne le condamnerait pas, lui, cette fois, il avait une chance de s’en sortir.
« Tuez-le. »

Deux mots. Deux putains de mots qui claquent comme un impact de balle.
T’avais aucune chance de t’en sortir gamin. Moi oui. Ma sœur oui. Désolé.

Et ce putain de sourire carnassier du Supérieur un pouce sur sa mâchoire, qui le fixait avec une joie sauvage. « Eh ben voilà on va pouvoir en faire quelque chose de celui-là. »
« Si tu crois que j’ai vraiment besoin d’un connard comme toi pour être quelqu’un, t’as été bercé sacrément près du mur, sache-le. »

Et le gosse tombait derrière lui. Et il n’adressait pas un regard au corps. Droit face au Supérieur, il ne le lâchait pas du regard, un demi-sourire vaniteux accroché aux lèvres.
Masque des Rivers. Ne jamais perdre le pouvoir. Rappelle-toi de ton cousin.

Depuis quand tu l’imites ?

L’esprit flanche.

__

Emily s’écrasait contre le mur. Il avait tenté de retenir le coup pourtant, agissant en arrière plan, par des sorts informulés qui s’ajoutaient en surcouche aux violences qu’il lui infligeait réellement, appliquant sur sa peau bien des stigmates fictifs. Et pourtant, il voyait ce regard. Cette haine, puissante, totale, celle qui la transperçait à chaque nouveau coup. Elle ne pardonnerait pas, ne comprenait pas ce qu’il tentait de faire.
Ce qu’il était tenté de lâcher prise, de s’en foutre, de véritablement frapper, de la détruire comme il avait appris à le faire dès le plus jeune âge. Ce serait si simple après tout. Pourquoi ne pas le faire ? Simple d’être le monstre puisqu’il se résumait à cela dans leur regard incisif. A défaut d’avoir toujours tors pour chacun, pourquoi ne pas simplement choisir un camp et s’y laisser dériver ? Correspondre, enfin. Choisir la solution de facilité.

« Putain Alec ! »

Jordane.
Voilà comment il avait fini avec le poignet brisé. Voilà comment les deux jeunes femmes s’étaient rapprochées. Voilà comment il s’était éloigné, arrêté à l’instant même où sa volonté menaçait de vriller, trop épuisé des nombreuses nuits sans sommeil, lui-même plié de douleurs, d’injonctions, conscient que s’il ne faisait pas ce qu’on attendait de lui, ce serait sa sœur qui tomberait.

Retrouve le contrôle bordel… Il luttait, luttait contre l’esprit de son enseignante qui cognait partout dans son esprit.

__

Sovahnn se tenait là, tout contre lui, coincée contre le mur, entourée de ses bras, son front quasiment sur le sien, sourire aux lèvres, un petit rire étouffé et voilà qu’elle plongeait ses grands yeux clairs dans les siens, sa crinière en broussailles comme toujours.
« Tu crois qu’il m’a vue ? »
« Je pense qu’il n’a vu que moi avec une nana là tu sais. »
« Oh ben ça va, rien de choquant jusque là… »
« Ouh, que de sous-entendus blessants ça demoiselle ! Je suis outré ! »
« C’est ça j’te crois tient ! Il est loin ? »
« Attend encore… pourquoi tu veux lui échapper au juste ? »
« Tu parles, tu veux que j’attende pour me garder là ouais. »
« Peut-être… »

Un léger silence s’était instauré entre eux, tendu de sourires de connivence, un éclat d’amusement non dissimulé dans les prunelles de la jeune femme. Il n’avait pas attendu bien plus longtemps avant de l’embrasser, la blonde lui répondant quelques instants avant de prendre du recul, une main sur son torse. « J’t’ai dit qu’on arrêtait ça. »
« Ouais, pour te faire Enzo, j’ai pigé. »
« Ouh le retour de l’attaque en fourbe. Tu sais que j’vais vraiment croire que t’es jaloux à ce rythme là ? »
« Du bon samaritain ? Ça m’ferait mal ! »

L’était-il ? Etait-ce l’émotion qui primait ? Oui, en un sens. Pas du sexe évidemment, mais uniquement de la complicité qu’il y avait entre ces deux-là et qu’il n’égalerait jamais, il le savait parfaitement.

Le décor basculait de nouveau.

Sovahnn, toujours. Alec se trouvait dans les couloirs du château, lâchant un juron en s’arrêtant face à une fenêtre qu’il avait dépassée dans un prime abord. La jeune femme escaladait les façades de l’école en plein milieu de la nuit que la lune ronde éclairait trop pour qu’il ignore cette silhouette qu’il ne connaissait que trop bien. « Mais qu’est-ce qu’elle fout ?! »
Les hurlements des loups là dehors ne faisaient aucun doute. Les lycans étaient de sortie et ça ne se passait pas bien. « Bordel la conne… ! »

Et le voilà qui se tapait le sprint de sa vie, atteignant la cour extérieur au moment où elle la parcourait en courant comme une dératée. C’était d’un bras qu’il bloquait sa course, l’interceptant littéralement, la stoppant net.
« Qu’est-ce que tu fous putain ?! »
« C’est Enzo qui.. »
« Et tu comptes faire quoi, tu maîtrises même pas un broc de magie ! »
« J’trouverais. »
« Hors de question, tu fais demi tour tout de suite ! »
« Alec tu sais parfaitement que.. » Oh oui il savait. Elle se ferait tuer.
« J’y vais ok ? J’m’en occupe. Mais uniquement si tu retournes là-haut. »
« J.. »
« Tu m’expliques ce que tu ferais que je ne peux pas faire ? Retourne là-bas. »

Et elle acceptait tandis que lui reprenait sa course, s’assurant d’œillades au dessus de son épaule que la jeune femme retournait bien en sécurité tandis que lui, s’enfonçait dans la forêt interdite pour aider un type qu’il ne supportait même pas.

Réagit merde Alec, tu vas tomber dans toutes les amitiés, toutes les personnes que tu veux protéger, tu ne veux pas faire ça. Bloque les souvenirs !

__

« J’en sais rien, plein de gens en vrai… Parmi ceux que tu as côtoyés… Tu crois vraiment que je laisserais crever Sovahnn ? Ou Jordane ? »

Est-ce qu’il serait réellement capable de rester caché si Jayden était mise sur le billot ? Est-ce qu’il se pensait réellement ainsi ? Ses interrogations envahissaient son esprit alors que les contours de sa chambre apparaissaient, la conversation avec Warren se déroulant par brides, jamais tout à fait dans le bon ordre, son esprit s’acharnant clairement à la mettre sous silence.

« Est-ce que c’est forcément à moi de porter le coup fatal ? »

L’impression de pouvoir vomir cette phrase, d’étouffer à cette seule évocation, de vouloir baisser les arbres, mettre les genoux à terre, cesser d’exister pour peu qu’il puisse cesser de devoir prendre des décisions impossibles.
De tous ceux que tu aimes… quel camp choisis-tu de suivre afin de garder en vie le plus grand nombre ? Aurais-tu seulement le cran de mettre fin à ta propre existence pour les mettre en sécurité ? Non.

« Azalea compte te rechercher toi et Logan, et elle ne semble pas plaisanter. Je suis déjà un peu dans son collimateur alors que je n’ai ni fui, ni « trahi », ni caché… Je peux te dire qu’elle semblait  vouloir s’amuser grandement avec toi. »

Et l’angoisse reprend le dessus, conquérante, elle retrouve ses droits. Une sensation similaire à celle qui distillait dans son esprit un peu plus tôt, alors qu’il marchait à côté des Supérieurs.

L’instant suivant, il était toujours avec Warren, mais les lieux avaient changé, l’indice de temps aussi, la lumière déclinant là dehors.

« …je serai isolé et je finirai par abdiquer, totalement probablement... Et je ne sais pas comment je vais pouvoir dire ça à Kezabel.»
« C’est certain qu’à dire ça à Kezabel… bah tu risques de te prendre un coup dans les parties. Et dans l’éventualité où elle ne serait pas capable de le faire actuellement, c’est moi qui m’en chargerai. Elle est pas bien et je pense qu’elle voit du danger partout. Alors si de base tu pars perdant…. Tu peux juste pas lui faire ça. »

Pas une volonté de la protéger à tout prix, même si, dans le fond, c’était ce qu’il ressentait après l’avoir vue au plus bas. Simplement… pourquoi frapper pour faire mal quand ça n’était même pas nécessaire ? Pourquoi lui faire ça ? Lui avouer ce qu’il lui disait là ? Qu’il était déjà foutu, que les idées des Supérieurs seraient les siennes d’ici peu ? Qu’est-ce que ça signifiait concernant leur avenir, à tous les trois ? Qu’ils ne cesseraient de s’affronter ? Que Warren et Kezabel étaient voués à s’entretuer malgré tout l’amour qu’ils pouvaient avoir l’un pour l’autre ? Qu’il ferait tampon là au milieu ?

La conversation défile, Alec arrive à s’y arracher plusieurs fois, empêchant l’accès au souvenir à Sanae qui y revient pourtant à chaque fois, Alec parfaitement incapable de la rejeter plus de quelques secondes.

« Pourquoi est-ce que tu n’irais pas avec la Garde ? Tu pourrais faire des choses intéressantes là-bas… et avoir un œil sur Kezabel.»

Elle est de retour, l’impression de crever, de se prendre des responsabilités qu’il n’était pas prêt à assumer, de se voir forcer de s’avancer droit sur un champ de bataille, conscient que des deux côtés, les armes ne cessent d’être braquées sur lui.

« Je sais que tu veux rester loin de tout ça, mais pense aussi à ce que j’ai dit, tu peux peut-être encore sauver les meubles en intégrant volontairement les Supérieurs, alors c’est risqué, par ce qu’ils ont les moyens de te faire parler, de connaître tes intentions… mais si tu réussis tu aurais le champ libre que je n’ai pas… enfin disons probablement un peu plus.»

Et si tu te plantes, sur le champ de mines… qui explose ? Toi … Ou tes proches ?

La peur était là, dévorante, étouffante, l’impression de n’avoir que deux choix viables : dans le premier il perdait la mémoire et Kezabel en faisait de même, seul moyen pour la protéger de manière fiable. Mais dans ce cas, il en crevait. Celui qu’il était actuellement en crevait… et risquait de s’avérer dangereux pour elle et d’autres par la suite. Dans l’autre, il se décidait à jouer un rôle qui pourrait le faire basculer, un rôle de triple jeu impossible.

Et cette peur de l’abandon qui le submergeait sans cesse : ne m’oublies pas.

Cette peur, elle le bouffait soudainement, comme une onde l’envahissant totalement et, avec elle, pulsaient les souvenirs de leur amitié, des brides de leur existence commune, toute affection ne pouvant être feinte ni cachée. Les rires, les confidences, les regards entendus.
Il se revoyait l’espace d’une seconde, au sol, le corps en vrac, Kezabel assise auprès de lui, l’œil furieux.
« Il finira par me faire tuer. » Il ? Logan. Merde, il ne pouvait que se donner raison sur ce coup-là.
La seconde suivante, c’était lui qui l’entourait, le regard braqué dans le sien, la voix douce, cherchant à apaiser ses maux, lui fabriquant une toupie de métal, un dernier rempart contre les démons de son esprit tourmenté.

Et puis le dernier souvenir. Chez lui, ses mains sur ses bras, la chienne qui se collait à sa jambe droite. Un baiser sur le front de la jeune femme. « Je t’aime, pour info. »

Et je sais que je te perdrais.
C’est quoi déjà ? Allez, inventons : je suis le sentiment d’abandon inconsidéré de Jack.

« Allez file, on a encore du temps. » Un clin d’œil. « Trois mois on a dit. Pari tenu. »

__

Kezabel est sans doute la personne que Sanae voudrait le plus que tu protèges, et c’est pourtant à son propos que tu merdes en premier. Ça fait quoi de toi Alec ? Ça raconte quoi ?
La culpabilité l’emplissait totalement, battant à ses tempes alors que son souffle se faisait plus aléatoire.

« Pause.. »

Cette voix rocailleuse, c’était la sienne ?

« Pause. »

Avant que je lâche le reste.
On a compris : j’ai foiré.
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Ven 7 Aoû 2020 - 15:43
 Sa présence s’était faite plus vigoureuse, plus intense. Vagues éparses se jetant dans le brouillard de tous côtés, creusant le sol, se nouant à la brume pour la faire sienne, l’emportant avec elle dans le flot puissant qui voulait tout engloutir.
Elle l’avait incité à renforcer ses défenses, à demeurer calme face à l’intrusion qui accélérait le tempo, qui se faisait davantage orchestre que seul son de piano dans le néant. De la concentration, de la maîtrise, ne pas céder à la panique, ne pas plier sous le poids de la peur.



Une jeune femme blonde se tenait devant un Alec plus adolescent, ses larmes déversant leur tristesse sur son visage fin. Sanae se prenait, comme un coup porté à l’estomac, ce sentiment d’abandon qui rongeait Alec, celui qui lui enserrait les tripes. Oh, comme elle connaissait cette sensation...

« J’suis désolée Alec, je peux juste plus je… »
« Je sais, magne toi, on a déjà eu cette conversation. Ça sert à rien de te faire prendre. »

Elle s’en allait, et lui restait derrière, seul. Leurs mains se lièrent et un rapide baiser accompagna une parole qui se voulait rassurante. Vaine tentative de lui donner du courage. Le jeune adolescent qu’il était l’incitait à partir, assurant de gérer les conséquences de son départ. Combien de choses déjà avait-il du gérer, traverser ?

« Merci… J’te revaudrais ça. »
« T’as intérêt frangine. »

Frangine. Bien sûr.
Ils étaient dans le dernier cercle...celui où se cachait les relations les plus importantes, les souvenirs les plus douloureux comme les plus précieux. C’était la première apparition de Janie dans les souvenirs qu’elle avait parcouru depuis le début de leurs séances. Et voilà qu’elle s’en allait en franchissant la porte de la demeure familiale alors qu’Alec lui jetait un dernier regard.
Une façon de dire à un invité potentiel : elle est sortie de ma vie ce jour-là, et c’est tout.
Bien. Il fallait en rester là.
Les autres souvenirs ne devaient pas être accessibles.



Les conséquences du départ de Janie défilaient déjà dans la mémoire du sorcier. Sanae s’engouffra dans le souvenir à vive allure. Mais ce n’était rien comparée à la violence des coups portés sur ce corps d’enfant, sur leur propre fils qu’ils assénaient de paroles mordantes, méprisantes. Les questions, les accusations, les insultes fusaient : ils voulaient retrouver la trace de leur fille et ils savaient qu’Alec devait détenir des informations. Pourtant, pas un seul mot, pas une seule trace de soumission : le gamin ne flanchait pas, subissait sans craquer. Elle le reconnaissait parfaitement dans ce souvenir. La suite ne tarda pas à s’enchaîner.
Au bas du manoir, Alec et son père venaient à la rencontre de l’oncle et de son fils...Logan, plus jeune, faisait son apparition. Aucune parole échangée entre les cousins. Les adultes parlaient et les deux jeunes hommes demeuraient silencieux. Elle sentait la peur d’Alec grimper, l’envahir alors qu’il tentait de ne pas l’exprimer. La volonté d’Alec résistait, motivée par la responsabilité qu’il se donnait de ne pas trahir sa sœur, de tenir bon. Mais déjà l’angoisse reprenait des forces alors qu’il se retrouvait confronté à son oncle. Il avait suivi avec la peur au ventre et la furieuse envie de disparaître, de s’enfuir ; l’instinct se manifestait violemment mais était balayé par cette force de caractère qui faisait de lui un survivant.

« Logan. C’est à toi. Prouve donc que tu sers à quelque chose dans cette famille. »
« C’est drôle de la part d’un type dont le frère est en train de renverser le pouvoir. »

La verve de Logan, déjà là. Elle en aurait souri si le coup n’avait pas surgi brutalement, cisaillant la joue du jeune sorcier qui, pourtant, ne se départait pas de son insolence. Ses lèvres à lui s’étirèrent. L’audace. Et les regards s’affrontaient, la tension grimpait alors qu’il lâchait un « Intéressant. » qui laissa Alec perplexe. Des choses se tramaient dans les esprits…
L’ordre fut donné et Logan dut s’y plier. Messire. Pas de limite à l’effronterie. Elle était nécessaire après tout : c’était un mécanisme de défense, une arme, une façon de survivre comme une autre. De prouver quelque chose aussi. Prouver qu’il savait des choses, qu’il pouvait les utiliser, qu’il était puissant, qu’il ne se laisserait pas abattre par eux. Les souvenirs d’Alec complétaient ceux qu’elle avait vu dans l’esprit de Logan, faisant apparaître des morceaux d’un tableau bien complexe.

Et le cousin s’était tourné vers Alec, son regard perçant lui attrapant l’âme et la première intrusion s’était faite dans une douleur vive. Tranchante. L’esprit de Logan aspirait celui du jeune sorcier sans merci, extirpant tout, ne laissant rien de secret, rien de côté. Les larmes d’Alec ne purent s’empêcher de couler face à la violence du geste mental. Il s’était écroulé, le nez en sang, l’esprit meurtri.

Puis, cette phrase prononcée avec fermeté, le regard de Logan posé sur son cousin : « Il ne sait rien. »

Logan venait de le protéger pour la toute première fois sans pourtant l’épargner.
La douceur n’était pas toujours la meilleure protection, n’est-ce pas ?
Elle se souvenait des mots qu’elle avait lancé à Logan quelques semaines plus tôt « C’est de ton aide dont il a besoin. Mais toi tu choisis de lui faire du mal...».Il n’avait pas répondu.

Elle comprenait maintenant.



Le souvenir s’effaçait alors qu’elle continuait son chemin, emportée par les pensées d’Alec.
La salle commune de Poudlard se dessina à nouveau. Une cheminée crépitante et le sorcier qui se laissait aller aux côtés d’une amie. Le sentiment de soulagement la frappa immédiatement alors que les larmes d’Alec commençaient à couler sur des joues qui n’avaient pas l’habitude d’en ressentir le sel, pas comme ça...pas devant quelqu’un. Une jeune femme brune avait pris place à ses côtés, et sa main rejoignit la sienne. Un moment de relâchement après une accumulation trop grande, un moment qui se passait de mots. Le silence convenait parfois bien plus.

Alec repoussa le souvenir brutalement mais ne put contrer celui qui suivit naturellement, comme une porte communicante qui s’ouvrait d’elle-même. Pas le temps de la refermer, Sanae s’y engouffrait rapidement.

« Putain, déconne pas mec j’ai pas dormi depuis trois jours. »
« Et ? Ne va pas dire que le grand Rivers n’est pas capable de tenir le coup. Allez, on en attend encore de toi si tu veux vraiment qu’on te rende ce petit service concernant ta soeur. »

Quel service ? La sorcière fronça légèrement les sourcils, suivant le souvenir comme elle regardait un film étrange dans lequel elle jouait sans en faire partie, sans en connaître véritablement l’intrigue : elle faisait des déductions, connectait les différentes scènes sans pourtant avoir accès au scénario. Elle se mangeait les émotions, les douleurs du personnage principal sans pouvoir s’en protéger, mais elle demeurait calme, sensible pourtant aux changements et aux ambiances qui s’enchaînaient.

Et en un éclair, la scène dériva vers autre chose : Alec tombait à genoux face au même homme, le sort interdit le frappant de plein fouet.

Juste une demi-seconde et déjà le souvenir disparaissait aussitôt, remplacé par un autre.
Bien Alec, regagne du contrôle, emmène-moi là où tu veux.

Poudlard à nouveau. Un gamin levait des yeux pleins d’espoir et pourtant remplis de larmes tandis que son sort se décidait en quelques mots... « Tuez-le ». La voix d’Alec résonna, claqua, transperça l’espoir du petit. Les mots avaient ce pouvoir étrange...comme des lames de rasoirs, comme des balles perçants les corps avec brutalité. On pouvait tuer avec des mots, on pouvait anéantir un esprit, on pouvait redonner la foi, déclencher des guerres, instaurer la paix. Deux mots et le destin de l’élève était scellé. La décision était prise. Le Supérieur étira ses lèvres d’un grand sourire satisfait, victorieux.
[color=darkslateblue«Eh ben voilà on va pouvoir en faire quelque chose de celui-là. »[/color]
« Si tu crois que j’ai vraiment besoin d’un connard comme toi pour être quelqu’un, t’as été bercé sacrément près du mur, sache-le. »

Être quelqu’un. Quelqu’un parmi les Supérieurs. Quelqu’un parmi leurs ennemis. Parmi ceux qui détenaient le pouvoir sur lui, sur cette école plongée dans la dictature. Les mots à nouveau claquaient dans l’air par leur insolence, leur insoumission. Je m’exécute mais je vous fais un doigt. Elle reconnaissait quelqu’un d’autre, dans un autre souvenir.

Le corps du gamin était tombé lourdement par terre alors qu’Alec ne lui adressait pas un regard. Ce dernier était tout axé sur le combat intense qu’il livrait à celui du Supérieur. Une lutte. Une guerre. Contre les autres, contre soi-même. Survivre. Coûte que coûte. Protéger ceux qu’on aimait.
Il y avait toujours un prix à payer pour cela.

Sanae prit une autre direction, força l’entrée, se fit plus rude, plus vindicative. Elle tentait de percer les défenses, de remonter dans les directions opposées à celles où il voulait l’emmener.

Le choc d’un corps contre un mur. Emily. Un visage qu’elle connaissait. Oh.
Les sorts fusaient, la peau de la sorcière se zébrait des coups de son agresseur. Alec gardait sa baguette levée vers elle, ne lui laissant pas de repos. Malgré cela, il y avait une retenue dans ses gestes, comme s’il tentait d’amoindrir l’impact. Mais rien de tout ça n’était évident aux yeux d’Emily : seule la haine qu’elle vouait au sorcier enflammait ses prunelles.

Le prix à payer, n’est-ce pas ?
Encore et toujours…

L’image de Jordane revint comme un morceau de puzzle reprenant sa place. Le poignet cassé, la dispute, la rage. C’était pour ça que le coup était parti. Pour ça qu’il se prenait la colère de la jeune femme de plein fouet.

Elles ne comprenaient pas. Pourquoi auraient-elles compris ?
Lui aussi essayait de survivre, lui aussi essayait de sauver la peau de ceux auxquels il tenait...et d’une seule personne en particulier.
Un petit service pour la sœur. Le chantage surplombait les décisions prises défilant sous ses yeux. Il fallait courber l’échine pour obtenir ce qu’il voulait plus que tout au monde. Sentiment d’enfermement, de pression interminable, de poids sur les épaules. Un piège qui n’en finissait pas d’entailler sa peau.

Elle le sentait lutter contre les vagues de son esprit mais les souvenirs eux-mêmes apposaient leur lourdeur, leur douleur, s’enchaînaient en lui reprenant le contrôle des mains.

Allez, lutte Alec.

Un autre souvenir fit son apparition.
Alec et une jeune femme blonde, aux cheveux hirsutes, étaient coincés tous deux l’un contre l’autre comme deux amants se cachant des curieux. « Tu crois qu’il m’a vue ? ». Ils se cachaient oui. Quelques paroles échangées avec amusement, des piques pleins d’amitié, de taquinerie. Elle ne savait pas qui est ce « il » dont ils parlaient et peu importait.

« Tu parles, tu veux que j’attende pour me garder là ouais. »
« Peut-être… »

Le baiser avait succédé à un éclat amusé, des sourires complices. Quelques secondes seulement d’un contact de leurs lèvres et déjà la jeune femme se reculait.
« J’t’ai dit qu’on arrêtait ça. »
« Ouais, pour te faire Enzo, j’ai pigé. »

Elle sentait la pointe acerbe de la jalousie, celle qui rend souvent injuste, déraisonnable. Et elle revêtait bien des visages, bien des aspects…

Le décor laissait place à un autre, pourtant la jeune femme était toujours présente. Alec l’avait dans son champ de vision : elle grimpait la façade de l’école alors qu’au loin grondaient les cris des loups dans la forêt. Il n’avait pas attendu avant de partir en courant pour la ceinturer d’un bras dans sa course, l’arrêtant net alors qu’elle s’apprêtait à partir en direction des hurlements nocturnes. Dans le ciel, la lune ronde baignait dans son halo blanchâtre. Astre plein et souverain, maître des lycans.

En quelques répliques, il prenait sa place pour la protéger et elle acceptait, retournant vers l’école en renonçant à son plan fou. Mais lui, lui, s’avançait dans la forêt. Pour elle. L’amour qu’il lui portait était évident.

Attention Alec...tu me laisses voir trop de choses. Tu te laisses aller. J’aperçois ton coeur et ce qu’il renferme de visages auxquels il tient ardemment. Barricade-le.

Le souvenir s’évaporait pour qu’un autre prenne sa place à nouveau.
Une chambre. Alec était face à Warren et leurs mines graves annonçaient bien des choses. L’angoisse revenait. Pourtant le souvenir était comme brouillé par moments, arrivant par bribes désordonnées. Un grésillement discret dans son esprit.
La conversation était pleine d’interrogations, de planifications. Le visage concentré d’Alec, la tension de ses muscles, de sa mâchoire. Le sentiment d’impuissance qui se dégageait dans l’atmosphère : celui de se sentir piéger mais de tout faire pour débloquer une faille, une porte, quelque chose. Ils cherchaient un moyen.

Et cette phrase qui claqua dans l’air douloureusement…

« Est-ce que c’est forcément à moi de porter le coup fatal ? »

De quel coup parles-tu Alec ? De qui s’agit-il ?
Son instinct lui soufflait la réponse mais elle l’aimait trop peu pour l’écouter.
Mais la suite ne fut pas aussi clémente pour ses oreilles.

« Azalea compte te rechercher toi et Logan, et elle ne semble pas plaisanter. Je suis déjà un peu dans son collimateur alors que je n’ai ni fui, ni « trahi », ni caché… Je peux te dire qu’elle semblait  vouloir s’amuser grandement avec toi. »

L’angoisse dévastait tout. Autant chez lui que chez elle. Elle la partageait étrangement en cet instant. Plus qu’elle ne l’aurait imaginé. Parce que le tableau s’éclaircissait à mesure qu’Alec braquait la lumière de ses pensées sur la toile aux lignes enchevêtrées.

Sanae serra les dents. On garde sa concentration. Elle repoussa ses propres pensées, ses propres souvenirs qui venaient compléter le tableau. Pas maintenant. Après.

Et la terreur prenait le dessus sur Alec….

Un autre souvenir dissipa le précédent. Mêmes acteurs, même gravité. L’obscurité qui annonçait le déclin de quelque chose, la chute qu’on ne pouvait arrêter.

« …je serai isolé et je finirai par abdiquer, totalement probablement... Et je ne sais pas comment je vais pouvoir dire ça à Kezabel.».

Un sursaut dans le fond de son estomac à elle. Dès lors que le prénom de Kezabel est évoqué, Sanae s’accrocha au souvenir sans merci. Elle ne lâcherait pas, se faisant plus perçante, plus tenace.

« C’est certain qu’à dire ça à Kezabel… bah tu risques de te prendre un coup dans les parties. Et dans l’éventualité où elle ne serait pas capable de le faire actuellement, c’est moi qui m’en chargerai. Elle est pas bien et je pense qu’elle voit du danger partout. Alors si de base tu pars perdant…. Tu peux juste pas lui faire ça. »

Une vague de rage menaça de l’envahir. La rancoeur qu’elle éprouvait à l’égard de Warren qui avait lâchement abandonné Kezabel n’était pas un secret. Elle haïssait cette manière de faire : disparaître sans donner de réelles explications, abandonner sans assumer face à face la fin d’une relation qu’il avait partagé avec la sorcière. Elle savait pourquoi il avait fait ce choix, sa chute était inévitable et il avait choisi son camp par la force des choses. Bien sûr que cela aurait été dur de dire la vérité mais Kezabel méritait cet effort. Elle méritait un homme qui prenait son courage à deux mains, assumait ses choix et leurs conséquences. Pas quelqu’un qui fuyait...Elle méritait, du reste, une personne qui était à la hauteur de ses opinions. Bien sûr, il n’y avait rien d’objectif là-dedans. Rien de véritablement censé. Elle manquait de recul sûrement. Parce qu’on touchait-là à un sujet qui la faisait flamber immédiatement.

« Pourquoi est-ce que tu n’irais pas avec la Garde ? Tu pourrais faire des choses intéressantes là-bas… et avoir un œil sur Kezabel.»

Ce qui la frappait avec autant d’intensité était également la façon dont Alec était près à s’opposer à son ami pour le bien de Kezabel. Pourtant, elle n’avait pas le temps d’être rassurée, pas le temps d’être reconnaissante. Non. Parce qu’elle était tout occupée à forcer les souvenirs, à garder le cap qu’elle s’était fixée, à s’accrocher malgré les efforts d’Alec de la repousser hors de cette scène, loin de cette conversation. Non. J’y suis, j’y reste.

« Je sais que tu veux rester loin de tout ça, mais pense aussi à ce que j’ai dit, tu peux peut-être encore sauver les meubles en intégrant volontairement les Supérieurs, alors c’est risqué, par ce qu’ils ont les moyens de te faire parler, de connaître tes intentions… mais si tu réussis tu aurais le champ libre que je n’ai pas… enfin disons probablement un peu plus.»

Rendre les armes. En partie. Se jeter dans la gueule du loup pour sauver sa peau, sauver celle des personnes à qui il tenait le plus. Mais là, dans l’ombre de cette terrible possibilité, demeurait l’odeur nauséabonde de la trahison.

Le prix à payer.
Abominable.
Douloureux.


Une trahison, vraiment ? Aux yeux d’Alec, oui. Mais tout ça n’était pas un hasard. Tout ça n’était pas une surprise. Pas pour Lui. C’était ce qu’il voulait, n’est-ce pas ? Ce qu’il avait prévu, ce qu’il encourageait. Toujours une longueur d’avance…dans sa forteresse, le Roi tissait ses plans, affirmait ses choix imbibés de souffrance, établissait les stratagèmes, guidait les esprits jusqu’à ce qu’ils jouent la partition.

Pas maintenant Sanae. Après. N’y pense pas.

Alec était à un carrefour. Quel chemin prendre ? Quelle décision ? Quels risques ? Quelles conséquences ? Qui sacrifier ? Lui-même, assurément, d’une certaine manière. Mais résister, résister toujours et encore. Le poids sur ses épaules s’alourdissait avec les années. La peur charriait son lot de terrifiantes images. Elle tiraillait tout, griffait l’intérieur tout comme l’extérieur. Cette peur, elle la reconnaissait sans mal : celle de perdre quelqu’un. On se sentait facilement sur le précipice lorsque devant nous s’étalait la vision de la perte d’un être aimé.
Et cet être n’était autre que Kezabel en cet instant.

Alors il se laissait gouverner par cette angoisse qui lui crispait les muscles, qui lui reprenait des mains le contrôle auquel il tentait de se raccrocher désespérément.

Et Sanae ne se faisait pas tendre, elle aussi s’accrochait.

Kezabel était partout l’espace de quelques secondes. Leur amitié, les sourires qu’ils échangeaient, la complicité qui englobait tout autour d’eux. Alec, au sol, le corps endoloris alors que la sorcière  était à ses côtés, furieuse. « Il finira par me faire tuer. ». Un pincement au coeur vif. Oui. Oui, sans doute.
Glissement de souvenir. Alec entourant Kezabel pour la réconforter, la douceur de sa voix cherchant à l’apaiser. La toupie. Volonté de passer du baume sur des blessures apparentes. Autre glissement, emboîtement d’images. Un baiser sur le front de sa Kezabel. Un moment de tendresse, d’aveu. « Je t’aime, pour info. ». Des mots qu’il n’avait sûrement pas l’habitude de prononcer et qui pesait alors plus lourd encore. Et derrière ces quelques syllabes, la menace sinistre et lourde d’un prochain au revoir. « Trois mois on a dit. Pari tenu. ».

S’était-elle attendue à ce qu’Alec ressente autant d’affection pour celle qu’elle considérait comme sa petite sœur ? Non. Elle n’en avait jamais pris conscience d’une telle manière, pas du côté d’Alec.  Elle savait l’affection que lui portait Kezabel mais aujourd’hui, c’était tout l’amour qu’il lui portait qui la frappait en plein coeur.
Et cet amour se transformait en angoisse.
Une angoisse qui lui avait perdre le contrôle nécessaire à cacher ces souvenirs.
Souvenirs qu’elle aurait préféré qu’il entasse quelque part de bien plus profond.

La respiration du sorcier se faisait irrégulière, son corps était trop tendu, son esprit s’essoufflait.
Émotions trop fortes. Une vague de culpabilité qui la prit de court.
« Pause.. »

Sa voix paraissait presque étrangère, rauque, comme si elle sortait des tréfonds de lui-même.

« Pause. »

Elle s’extirpa immédiatement.
Son regard quitta le sien pour le laisser reprendre ses esprits, pour lui donner un peu d’espace. Elle se leva lentement. Son coeur à elle aussi battait sauvagement contre sa cage thoracique.
D’un mouvement de main, elle ouvrit la fenêtre qui donnait sur le jardin et sur la mer. La brise vint caresser la peau de son visage. Un peu d’air, ça ne ferait pas de mal.
En silence, elle faisait coïncider toutes les pièces du puzzle qu’elle avait amassé.
Les mots de Logan, prononcés avec douleur, soufflaient un vent acide dans son esprit.
« Il a simplement besoin de se soustraire de mon influence. »
Il avait tout prévu. Tout prévu pour préparer Alec : les entraînements, les leçons d’occlumancie qui reprenaient, s’intensifiaient. Il posait les pavés d’un chemin tout tracé. Déjà, Alec y faisait ses premiers pas tremblants. « Je veux juste qu’il survivre à tout ça. ». Un aveu qui prenait un autre sens. Une nouvelle couche s’ajoutait sur le tableau. Éclaboussure d’une peinture rouge sang.

Faire en sorte qu’Alec se détache de lui, tienne debout tout seul. Faire en sorte que la décision se prenne d’elle-même, soit le moins douloureuse possible. Sacrifier un lien puissant pour la survie du jeune sorcier. Il fallait qu’il survive. Il fallait qu’il s’en aille, qu’il passe de l’autre côté. Mais pas sans armes. Pas sans protection. Pas sans but. « C’est d’armes dont il a besoin plus que d’espoir. ». Les mots lui saignent le coeur, la cisaille. C’était donc ce qu’elle faisait en tandem avec Logan ? C’était ce à quoi elle participait sans vraiment le savoir ? Bien sûr qu’elle le préparait pour si jamais il se faisait attraper, mais elle n’avait jamais pensé au fait qu’il puisse les rejoindre volontairement.

Elle faisait partie du dessein d’un esprit calculateur et le plan se dévoilait enfin à ses yeux. Elle préparait le départ d’Alec, c’était ça hein ? Elle fourbissait ses armes pour améliorer ses chances de survie et celles de ceux qu’il aimait.
Sauf Logan.
Qu’adviendrait-il de lui ?

Le moment de la grande décision approchait à grands pas. Voilà pourquoi Alec avait voulu que les leçons s’intensifient. Voilà pourquoi il s’acharnait si violemment à apprendre. Il n’y avait plus d’espoir depuis longtemps. L’issue était irrémédiable.

« Viens. » lui dit-elle d’un seul coup, dardant son regard sur lui.

C’était un ordre. Mais si la fermeté dans sa voix ne laissait pas d’autre choix que de la suivre, elle n’était pas agressive. La douceur était toujours là, dans son regard légèrement assombri. Elle se glissait à l’extérieur et fit face à la mer avant de jeter un œil par-dessus son épaule pour observer si Alec la rejoignait.

« Ne culpabilise pas Alec. » lui souffla-t-elle. « On savait tous les deux que le dernier cercle serait difficile. Échouer avec moi n’a aucune importance si cela t’aide à gagner face à eux. »

Un instant de silence, une inspiration.

« Tu échoueras encore. Et peut-être encore une fois. On s’en fout. A chaque échec, tu comprendras davantage comment faire. C’est ce qui t’a fait progresser tout du long. Tomber, se relever. A chaque fois. Oui, c’est épuisant. Oui, c’est frustrant. Mais au bout d’un moment tu resteras debout même si tu es ballotté par les vagues. ». Une pause. « Tu en es capable. Et merde non ce n’est pas un compliment, alors pas la peine d’être mal à l’aise, c’est tout simplement un truc que tu dois t’ancrer dans le crâne parce que si toi tu n’y crois pas, alors tout ça ne sert à rien. »

Elle fronçait les sourcils et sa douceur se perdait. La rage de vaincre faisait soudainement surface pour la première fois depuis qu’elle lui donnait cours. Elle fit quelques pas dans l’herbe et se retourna vers lui, pointant son doigt sur le sol. C’était l’emplacement exact où elle avait appris à se maîtriser, où son père s’essayait en tailleur avec elle pour l’entraîner, pour façonner son esprit. Les silhouettes s’étaient effacées mais elle pouvait encore sentir se dégager de la terre molle la violence de son combat, celle qui l’avait poussée à apprendre, encore et encore, à tenir, à réussir. Pourtant, elle était bien plus jeune qu’Alec à ce moment-là, bien plus incontrôlable, bien plus sauvage. Sauf que la possibilité de mourir et d’emporter les siens avec elle n’avait jamais été une motivation : Alec avait un but bien plus fort, bien plus solide.

« J’ai appris l’occlumancie juste ici, bien plus jeune que toi. Avec bien moins de patience, bien moins de raisons de m’en sortir, de combattre que toi. Alors tu y arriveras. Ce n’est pas une question, ce n’est pas une possibilité, c’est un fait. » La dureté bienveillante. Etrange sentiment qui la prenait. « La peur que tu éprouves, je sais qu’elle est tenace mais elle est ta pire ennemie. » Elle le savait bien plus qu’il ne l’imaginait. « Tu dois l’étrangler, la faire taire, prendre le contrôle une bonne fois pour toute parce que tu sais exactement quoi faire et comment faire pour cacher ce qu’il faut cacher, mais tu te laisses dominer par elle. Peu importe ce qu’il y a au fond de ton esprit, peu importe à quel point c’est laid et terrifiant. Si tu cèdes à tes angoisses, tu perds la maîtrise de ton esprit. »

Elle soupira, se pinça les lèvres, essayant de retrouver un peu de calme. La sorcière s’approcha de lui, s’adoucissant. « Oui je sais : facile à dire, n’est-ce pas ? … Mais pas facile à faire. » Un léger sourire. « Pas impossible non plus. ».

Une lueur malicieuse au fond des prunelles fit son apparition.

« Et puis c’est tout dans mon intérêt que tu réussisses. Pour le bien de Kezabel. Parce que sinon je serai obligée de t’effacer la mémoire ou de te tuer, et si je te tue, Logan me tue, donc Keza essayera bêtement de le tuer, échouera..enfin l’enchaînement merdique quoi. Évitons ça hein. »

Une plaisanterie un peu noire, mais il en était friand.  
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Sam 8 Aoû 2020 - 2:59
Son cœur battait brutalement dans sa poitrine, vrillant ses nerfs. A l’instant même où Sanae s’était extraite de son esprit, il s’était redressé, agacé, poussée de colère tandis qu’il se relevait, posait quelques pas au loin, détournant son regard de Sanae, ultime protection contre son emprise. Alec avait eu beau batailler, poser un plan établi, trouver des détours, des contre attaques, des défenses, l’angoisse, celle qui le bouffait depuis des semaines, avait fini par reprendre le dessus, amenant en bordure de sa conscience des réalités qu’il cherchait pourtant à enfouir bien profondément. Comment pourrait-il faire pour masquer tout ça, pour les protéger, pour survivre, si dès la première vague un peu puissance il se laissait submerger sans plus aucun contrôle ? Bien entendu, ça n’était pas vrai, plusieurs fois, il avait réussi à redresser la barre, à empêcher bien des souvenirs de venir effleurer la conscience de la jeune femme. C’était ceux qui le hantaient le plus actuellement qui ressurgissaient le plus facilement, ça n’avait rien d’étonnant. Pourtant, très égoïstement et instinctivement, il y avait d’autres choses qu’il cherchait à lui cacher et qui l’étaient resté. Mais il se doutait que les deux françaises étaient proches, alors oui, naturellement les sillons de son esprit se creusaient sur tout ce qui la concernant.

Sur ce qui ferait bientôt de sa vie un linceul également.

Alors oui, pause. Pause parce que je sais que je merde, pause parce que je n’ai pas le temps de merder, tout simplement, et que les saloperies de tic tac de cette horloge de merde commencent à me taper sur le système. Pause parce qu’on a compris, j’suis pas à la hauteur.

Pourtant il n’était pas du genre à demander grâce. Jusque là, ça n’était jamais arrivé, montrant sans doute la difficulté pour lui de faire face à sa propre intimité alors qu’il était face à une parfaite inconnue.
Elle aussi se levait, lui tournait le dos, faisant quelques pas en silence tandis qu’il respirait posément, s’éloignant par réflexe, fermant les paupières une seconde pour abaisser la pression. Elle lui laissait quelques instants pour se reprendre, ce dont il la remerciait sans mot dire, bouffé par la pression que ces souvenirs faisaient ressurgir en lui. A quand l’issu finale de cette saloperie de guerre froide ? Quand tomberait-il ? Et Logan ? Qui entraineraient-ils dans leur chute ? Le mieux pour les autres ne serait-il pas de disparaitre de ce monde ? Option inenvisageable. Statut de Rivers, de Serpentard également, il ne se sacrifierait pas purement et simplement en espérant que ça simplifierait les choses pour les autres. Rien ne le prouvait de toute manière. Clairement, Alec n’en était pas là. Et pourtant… pourtant en cet instant, plongé dans les méandres de sa propre mémoire, il lui semblait que sa vie n’était qu’un empilement d’échecs et de situations inextricables. Pouvait-il seulement gagner ; dans de telles conditions ?

« Viens. »

Arraché à ses pensées, il se retournait, lui faisait de nouveau face, pouces dans les poches, épaules basses, regard direct. Endolori par la situation sans être au sol pour autant. Réflexe immuable du gamin qui avait développé l’impertinence comme seul moyen de défense. Comment me mettre au sol, me museler, m’achever si rien n’a d’impact ?
Pourtant, dans le fond de son regard subsistait angoisse et désespoir.

Un instant, il n’avait pas bougé, n’obéissant jamais tout à fait immédiatement. Sale habitude. Son regard posé sur elle, la décryptant sans trop savoir ce qu’elle en pensait, ce qu’elle en dirait. Quel avis vis-à-vis de Kezabel notamment ? Elle pouvait raisonnablement mourir d’angoisse à présent, la lui faire payer. Sans un mot, il s’était mis en mouvement, la suivant à l’extérieur, silencieux.
Et bordel, pour le faire taire, c’était qu’il n’avait pas envie de jouer.

« Ne culpabilise pas Alec. »

Les yeux posés sur elle, les lèvres qui se pincent un instant. Facile à dire…

« On savait tous les deux que le dernier cercle serait difficile. Échouer avec moi n’a aucune importance si cela t’aide à gagner face à eux. »

Regard baissé l’espace d’une fraction de seconde avant de se braquer de nouveau sur elle, les lèvres toujours closes. Elle avait raison, bien sûr, et il l’entendait. Pour autant, ça n’était pas une réalité facile à intégrer, à accepter, surtout pour lui. Alec s’était pourtant déjà planté tant de fois… tant d’échecs dans la vie personnelle comme face à son précepteur. Cependant il était rarement ainsi en position d’infériorité face à une presque inconnue, encore moins sang mêlée. Con comme réflexion, mais voilà, Alec était en terrain inconnu par définition. Certains réflexes possédaient la vie dure. Le silence, l’impertinence. L’enfant de cinq ans, puis de douze. Dans le fond, certaines choses étaient immuables.

« Tu échoueras encore. Et peut-être encore une fois. On s’en fout. A chaque échec, tu comprendras davantage comment faire. C’est ce qui t’a fait progresser tout du long. Tomber, se relever. A chaque fois. Oui, c’est épuisant. Oui, c’est frustrant. Mais au bout d’un moment tu resteras debout même si tu es ballotté par les vagues. ». Une pause. « Tu en es capable. Et merde non ce n’est pas un compliment, alors pas la peine d’être mal à l’aise, c’est tout simplement un truc que tu dois t’ancrer dans le crâne parce que si toi tu n’y crois pas, alors tout ça ne sert à rien. »

Mâchoires serrées, il acquiesçait. Encore une fois, elle avait raison. Et encore une fois, elle ne s’attardait pas sur ce qu’elle avait vu en lui. Délicatesse ou dédain ? Il n’avait pas encore décidé.
Oui, ça faisait mal. Se planter dans de telles conditions revenait à s’interroger sur son propre avenir, sur la mesure dans laquelle il était capable de s’exprimer afin de jouer sur leurs jours futurs. Oui, il doutait, c’était vrai. Tout comme elle avait raison de lui rappeler que s’il partait perdant, il ne pouvait simplement pas s’en sortir.
Et elle avait également trop à perdre s’il merdait.
Inspiration, expiration muette, souffle plus profond.

La rage de vaincre, il la voyait briller dans son regard. Sans doute venait-elle de véritablement comprendre ce qui se jouait ici. Le pourquoi il lui avait demandé ça. Sans doute se trouvait elle à percuter de plein fouet ce qui faisait son quotidien depuis plusieurs semaines. Plusieurs mois et années même. L’étau se resserrait, mais comme il le disait à Kezabel plus de deux ans plus tôt… Logan l’avait enfermé dans un piège dont il ne savait comment se dépêtrer et il en crèverait sans doute. Alors non, il ne  se faisait pas beaucoup d’illusions sur la question. Peut-être devrait-il. Peut-être manquait-il de verve, de rage, d’optimisme ?
Sincèrement ? Il préférait cette flamme en elle, ce tranchant soudain. Il résonnait plus facilement en lui, le rassurait sur ses motivations aussi. A présent, elle ne pouvait plus reculer. Il fallait qu’il y arrive, que son esprit soit imprenable aux moins agiles. Pas à la hauteur de ses deux enseignants, bien sûr, il n’irait pas penser le contraire… mais il lui fallait essayer de tendre vers cette idée.

Elle pointait le sol du doigt, ne tardant pas à s’expliquer face à son regard interrogatif.

« J’ai appris l’occlumancie juste ici, bien plus jeune que toi. Avec bien moins de patience, bien moins de raisons de m’en sortir, de combattre que toi. Alors tu y arriveras. Ce n’est pas une question, ce n’est pas une possibilité, c’est un fait. »

Troisième fois qu’elle insistait. Comme quoi, la légimen avait parfaitement compris qu’il était compliqué pour lui d’entendre ce genre de chose. Etre capable. Savoir faire. Etre à la hauteur, même si on a nos moments de doutes et de faiblesses. Oui, il y arriverait. De toute manière, il n’avait simplement pas le choix. Elle lui rappelait qu’il avait les capacités pour ça, qu’il les avait montré jusque là, qu’il était également appliqué, patient, acharné même.

« La peur que tu éprouves, je sais qu’elle est tenace mais elle est ta pire ennemie. »

C’est celle qui fait qu’il bascule. Celle qui le rend faible. Celle sur laquelle on jouera pour le déstabiliser, pour le faire plier.
T’as dit quoi déjà ? Si on menace certaines personnes, tu le sais, tu ploies immédiatement. C’est bien ça le problème.
Cette fois, il détachait son regard d’elle, passait une main dans ses cheveux, déglutissait difficilement, chassant les démons qu’elle réveillait en lui. La peur. Celle qui déclenchait la colère, son moteur principal.

« Tu dois l’étrangler, la faire taire, prendre le contrôle une bonne fois pour toute parce que tu sais exactement quoi faire et comment faire pour cacher ce qu’il faut cacher, mais tu te laisses dominer par elle. Peu importe ce qu’il y a au fond de ton esprit, peu importe à quel point c’est laid et terrifiant. Si tu cèdes à tes angoisses, tu perds la maîtrise de ton esprit. »

Un petit rire agacé perçait sa gorge. C’est bien Alec, tu sais faire, tu mets plein de choses en place, tu anticipe même certaines de ses demandes, déjà bien entraîné par un maître de l’entraînement viscéral… pour autant tu fais mal. Parce que oui, tu n’es qu’un gosse apeuré dans les ténèbres.

Tu sais qui tu es ? Le gosse sous l’escalier, celui qui serre son crâne à l’en faire exploser pour peu qu’il arrive à oublier ce qui se passe derrière cette putain de porte. T’es qu’un gosse terrorisé, terrifié du lendemain, paralysé par un passé non digéré. Mais à présent, si cette peur t’enserre, elle cessera d’être égoiste et de prendre qu’une victime entre ses griffes. Qui tombera ? Jayden ? Keza ? Sova ? Jo ? Caitlyn ? Mack ? Le sang de qui sauras-tu assumer pour n’avoir pas assez lutté ? Tu n’as pas le droit de céder. Pas le droit de les laisser entrer, de laisser filtrer certaines données. Pas le droit de leur offrir ces leviers là pour faire de toi un chien à leur botte. Tu dois garder le contrôle, ne pas céder. C’est quoi déjà l’idée ?

Ah oui : le prix à payer.
Encore, tu disais Sanae. Oui, encore.

« Oui je sais : facile à dire, n’est-ce pas ? … Mais pas facile à faire. »

Elle s’approchait, plus adoucie. Sa rudesse ne le perturbait pas le moins du monde, plus apte à gérer le franc parler et la douloureuse réalité que l’enrobage diplomate.

« Pas impossible non plus. »

Une ébauche de demi-sourire, bien pâle. Pas impossible, Alec. Tu en es capable.

« Et puis c’est tout dans mon intérêt que tu réussisses. Pour le bien de Kezabel. Parce que sinon je serai obligée de t’effacer la mémoire ou de te tuer, et si je te tue, Logan me tue, donc Keza essayera bêtement de le tuer, échouera..enfin l’enchaînement merdique quoi. Évitons ça hein. »

Il n’avait pas rit. Il l’aurait fait en temps normal, mais pas cette fois. Pas avec ce qui bourdonnait dans son crâne à lui en donner le tournis, à en brouiller les sons.

Ouais l’enchainement merdique oui. Evitons.

Il aurait pu le prononcer à haute voix mais ne l’avait pas fait, détournant le regard, le posant sur les dunes, les joncs agités au gré du vent, les salicaires au goût d’iode. Le calme ici, régnait en tout lieu, comme un pied de nez à l’ouragan qui se déchainait sous sa caboche.

« Et j’fais comment pour arrêter d’avoir peur ? »

Le regard se pose de nouveau sur elle, plus perçant que jamais. Les yeux des Rivers. Prunelles sombres ou iris clairs, ils n’étaient qu’acier, que brume l’espace de quelques instants. La question était rhétorique pourtant. Il doutait qu’il y ait la moindre réponse adaptée. Mais à défaut de réponse, il y avait un plan. Un putain de plan monstrueux, parce qu’il n’avait que ça ces derniers temps.

« Et si… » De nouveau, le timbre était rocailleux, éraillé. Comme si sa voix même se dressait en obstacle contre l’idée qu’il voulait évoquer. Rude. Guttural. Viscéral, tu vois Logan, j’y viens.
Il se mordait l’intérieur de la lèvre sans y prêter attention, faisait rouler les muscles sous la peau de ses joues, serrant les mâchoires encore une seconde, posant son regard ailleurs, incapable de le soutenir alors que ses traits se paraient d’une souffrance immonde. Le voilà le monstre que tu entendais gronder là-dedans. Voilà qu’il ricane, qu’on appelle à la surface.

Ça te rappelle quelqu’un ?

Parce que le sien n’a rien à voir avec le tien.

« Et si j’utilisais justement ce truc-là… laids et terrifiant. Cette horreur qui me bute et que je sais pas gérer…. Si j’affichais le pire comme un écran de fumée pour cacher le meilleur ? »

Tu as vu ses dernières larmes d’enfants, dix ans plus tôt. Et puis les seules de l’adulte, des larmes de joie, deux ans plus tôt. Mais là c’est autre chose. Le masque se fendille. La voilà la peur, dans son état le plus naturel, encore rattrapée, étouffée, mais elle explose pourtant, lui tire les traits, les déforment, les parent d’une honnêteté courageuse.

Quand la sincérité tue… peut-être est-elle l’unique solution viable ? Immonde. Mais viable.

« Ça n’implique personne. Que Janie et moi. Kezabel a compris, Mackensie aussi. Mais c’est gérable je suppose. »

Non, ce que tu proposes n’est pas gérable. Mais c’est un putain de bon plan.

Pourtant les entrailles se tordent d’avance, le souffle se fait superficiel, comme s’il le protégeait, comme si en cessant de respirer, il n’aurait pas à faire ce pour quoi il s’engageait.

Sur toutes les options Alec, il y en a une où vous survivez.
J’ai jamais dit que ce serait indolore.
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Mer 12 Aoû 2020 - 16:32
 Elle le voyait se débattre dans cette tête si pleine, le voyait lutter contre le découragement, s’y perdre ; la douleur et la colère creusant ses traits. Ce n’était pas pour rien si elle le martelait d’encouragements, ils n’étaient pas vains, ils n’étaient pas désuets, ils n’étaient pas trop tendres. Ils étaient nécessaires. Parce que de tout ce qu’elle avait vu de lui, de tout ce qu’elle savait qui se rattachait à son univers, qui donc lui avait dit qu’il était fort, courageux, intelligent ? Il fallait rappeler à ce gosse en lui, celui qui souffrait, et à l’adulte, là, qui se cachait et se battait, qu’il était tout à fait capable non seulement de se battre et de survivre, mais surtout de gagner la bataille qui était la sienne.
Parce que malgré tout, malgré ce que Logan disait, malgré ce qui en elle-même en vomissait de rage, l’espoir était une arme. Une arme puissante, bien que souvent illusoire, fugace, éphémère. C’était une arme néanmoins, parce qu’elle pouvait convaincre, motiver, mobiliser les capacités qui restaient endormies. Elle était puissante car pleine de promesses. Mais c’était une arme à double tranchant : voilà pourquoi on l’aimait autant qu’on la haïssait. Si victoire il y avait, alors l’espoir était couronné de gloire, c’était l’arme qui nous avait servi pour vaincre, pour tenir ; si défaite il y avait, alors c’était la faux qui nous mettait au cercueil, c’était l’entrée dans le désespoir, et on riait au nez de ce en quoi nous avions cru si fort. Alors elle oscillait souvent, elle aussi, entre croire ou ne pas croire ; espérer ou ne pas espérer. N’était-ce pas lorsque nous étions au pied du mur, là, entouré d’ennemis, que nous trouvions alors la force de puiser en nous et d’en extraire la seule solution viable, le seul chemin, aussi étroit fut-il, pour s’en sortir ? Mais alors il fallait vaincre la terreur, repousser au loin cette envie de sombrer dans l’acceptation de la défaite. L’abandon de la bataille guettait le moindre moment de faiblesse.
Et elle ne voulait pas qu’Alec y cède.
Elle ne voulait pas qu’il perde de temps à douter, surtout pas de lui. C’était un temps qu’ils n’avaient pas. Tous les deux. Parce qu’elle venait de prendre conscience d’à quel point ces leçons étaient importantes, plus que jamais. Pour protéger Kezabel, pour qu’elle ne devienne pas un dommage collatéral, qu’elle ne souffre pas des mains de leurs ennemis si Alec les rejoignait. Et il les rejoindrait….elle le savait désormais. Elle en était persuadée. Le plan de Logan suivrait son cours, il était déjà bien amorcé. Et aussi sûrement parce qu’elle ne voulait pas qu’Alec perde. Elle ne voulait pas non plus qu’il devienne un Supérieur, mais la réalité était là : c’était la meilleure solution probablement.

A l’instant où elle s’était extraite de lui, éloignée pour lui laisser de l’espace, ne gardant qu’une attention indirecte sur lui, en biais, il s’était levé et avait fait quelques pas. La frustration de ne pas y arriver, de ne pas réussir du premier coup, elle connaissait. La souffrance de revoir certains souvenirs, de ne pas garder le contrôle, d’avoir l’impression de ne pas être Maître de son esprit...et pour lui, la réalisation terrifiante que s’il n’y arrivait pas rapidement, il perdrait tout, s’approcherait davantage de la promesse funeste qu’on lui réservait.
Avait-il été surprise qu’il lui demande de s’arrêter ? Oui, et … non. Il ne l’avait jamais fait jusque-là, s’était toujours acharné à subir sans ciller, sans broncher : aller jusqu’au bout, souffrir en silence, avancer, avancer, serrer les dents, lutter encore et encore sans même penser à demander clémence. C’était sa façon de faire. Alors bien sûr que cela la surprenait qu’il le fasse, qu’il mette fin à l’intrusion. Mais...n’étaient-ils pas dans le dernier cercle ? Le fait de ne pas savoir ce qu’il s’y trouvait de pire l’avait faite s’attendre à des réactions plus fortes. Alors, non, elle comprenait parfaitement qu’aujourd’hui, les choses étaient différentes, et sa façon de réagir aussi, indéniablement.

Elle avait ouvert la porte fenêtre et lui avait dit de venir la rejoindre. Sans attendre de le voir faire, Sanae s’était glissée à l’extérieur, patiente. Un Rivers n’obéissait pas aussi facilement, alors elle ne l’avait pas regardé, avait fixé la mer avant de jeter un œil derrière elle pour le voir arriver.
Alors qu’ils se faisaient face, Sanae aurait pu voir ses pensées défiler sans avoir besoin de rentrer dans son esprit. Elle captait toute sa culpabilité, sa colère, sa douleur. Il n’avait rien dit pendant un long moment, l’écoutant parler, encaissant ses paroles. Tant mieux s’il entendait ce qu’elle voulait lui dire si ardemment : crois en toi merde, tu es largement capable de réussir. Tu sais quoi faire, tu as juste besoin qu’on t’y pousse un peu, qu’on te diriger vers la conclusion que tu feras toi-même en définitive.

Il acquiesçait, mâchoires serrées, visage fermé. Ses traits peignaient peu à peu la réalisation douloureuse et amère de ce qu’elle voulait lui faire toucher du doigt….de ce que Logan lui avait montré, et qu’elle avait toujours su au fond d’elle-même. La Peur les maintenait au sol et il était temps de se relever, débarrassé de son poids mort pour l’utiliser contre leurs ennemis. Ne plus se laisser gouverner, ne plus se laisser abattre. Etre Maître de son propre destin, de son propre esprit, de ses émotions, bien que terriblement effrayantes. Résister. Plus fort. Toujours plus fort. Allez Alec, tu le sais aussi bien que moi que c’est la seule solution.

Un rire agacé s’échappa de sa gorge et alors elle sut qu’il devait avoir compris.
Oui, Alec, je sais que tu sais.
N’est-ce pas ce que Logan avait prévu lui aussi ?


Un léger sourire alors qu’elle lui rappelait que ce n’était pas impossible. Rien n’était impossible, non ? Pas dans leur monde. Pas avec cette force de caractère qu’il avait en lui.
Elle aurait presque pu voir ses méninges aller bon train derrière son regard intense, qui se détournait parfois du sien. Il n’avait pas ri à sa dernière remarque, et c’était le signe qu’il n’évitait plus, qu’il ne fuyait pas par l’humour : il était là, présent, face à face avec lui-même.

« Et j’fais comment pour arrêter d’avoir peur ? »

Elle pencha légèrement la tête, un léger sourire en coin, avec un brin de tendresse.

Tu le sais.

On ne s’en débarrasse pas. On l’utilise. On dévie la trajectoire de son venin vers ses ennemis, pas vers soi-même. On l’étrangle pour la soumettre, on fait taire les mots acides qu’elle nous envoie, on les transforme, on les exploite.

Ses yeux la transpercèrent de cette manière dont les Rivers ont apparemment le secret. Elle avait affronté le regard de Logan, elle affrontait aujourd’hui le sien, aussi incisif, puissant en cet instant.

« Et si… »

Sa voix était devenue plus rauque, ses dents mordaient sa lèvre, son corps se préparait à affronter la réalisation orale de ce qui se tramait dans son esprit. Sa mâchoire se crispait, se contractait et il détournait le regard alors que celui de la sorcière observait la douleur et la peur s’emparer de ses traits fins. Oh, Alec… Elle déglutit alors qu’il ne regardait pas.

Ça ne lui faisait pas mal qu’à lui...Elle savait vers quoi elle l’entraînait, ce qu’elle encourageait silencieusement, là, en ce moment. Il allait devoir affronter ses pires angoisses et elle comprenait tant...elle ressentait sa douleur comme si elle était sienne. Et pourtant, pas un seul mot ne sortit de sa bouche. Elle demeurait droite, ne détournait pas les yeux de ce visage. Cela lui rappelait Kezabel...la façon dont elle s’était effondrée aux souvenirs douloureux qu’elle avait vu en elle, ceux qu’elle avait remué. Et tout à coup, cette étrange et amère pensée que ce don qu’elle avait...déclenchait chez les autres des choses qu’elle ne maîtrisait pas du tout, qu’elle voyait se jouer, qu’elle déterrait sans devoir en subir les conséquences. Elle avait beau être plus douce que Logan, le résultat était le même : tous deux déboulaient dans les esprits comme des boules de destruction, brisant les barrières établies, celles qui étaient nécessaires pour se protéger, et alors tout était dévasté, tout était à nu, à vif, et ils laissaient leurs hôtes se débrouiller avec les dégâts. Pas juste des voleurs, pas juste des cambrioleurs...des canons, des chirurgiens qui laissaient les cerveaux ouverts après opération. Soudainement, elle en éprouva du dégoût pour elle-même. De la colère aussi. Contre les Supérieurs, contre les sangs-purs en général. Contre Logan, aussi, un peu. Elle savait qu’il avait l’habitude de protéger son cousin par la douleur, usant de brutalité pour l’endurcir. Mais elle n’était pas Logan...et en cet instant, elle avait cette sensation écœurante de participer à une de ces leçons brutales. Et pourtant, pas de coups, pas d’insultes, pas d’acidité dans l’air. Non, elle se faisait douce, encourageante, bienveillante, mais ce n’était que pour passer un linge sur les plaies qu’elle ouvrait. Elle se sentait comme un instrument de torture. Un instrument qui malgré tout, reconnaissait son utilité…elle s’était résignée au fond.

Parce qu’elle savait que ce n’était pas elle qu’il fallait blâmer, que tout ça était nécessaire pour Alec, que c’était pour le prémunir d’autres intrusions, plus graves, plus vicieuses dans l’utilisation qui serait faite de ses souvenirs. Il ne fallait pas penser à ce qu’elle était, à ce qu’elle faisait. Non, il fallait garder l’esprit fixe sur le but qu’ils avaient tous les deux.

« Et si j’utilisais justement ce truc-là… laids et terrifiant. Cette horreur qui me bute et que je sais pas gérer…. Si j’affichais le pire comme un écran de fumée pour cacher le meilleur ? »

Oui, Alec.
C’est tout à fait ça.
C’est le meilleur plan possible.


C’était à son tour de serrer les dents, le regard perçant, la respiration maintenue calme malgré le flot d’émotions qui menaçaient de s’échapper. De la maîtrise Sanae, parce que ce qu’il vit présentement est plus important, plus grave, que toi. Tu es son enseignante, pas sa mère, pas sa sœur, pas son amie.

« Ça n’implique personne. Que Janie et moi. Kezabel a compris, Mackensie aussi. Mais c’est gérable je suppose. »

Elle acquiesça, joignant ses mains devant elle, le visage dur.

« J’aurais aimé qu’il y ait une autre solution mais c’est effectivement ta meilleure chance de réussite. » dit-elle, fermement. « Tu ne peux pas la faire disparaître cette peur, soyons clairs. Et ce serait inutile d’essayer : les effets n’en seraient que temporaire. Mais tout comme la colère, elle peut être maîtrisée assez pour être dirigée vers tes ennemis, pour être utilisée, mobilisée comme un moteur. » Une respiration, une pause. « Quand je me bats, ou quand je travaille, je ne pense pas à ma peur : je ne l’écoute pas me murmurer des choses. Je peux supprimer bien des émotions mais celle-là est la plus tenace, alors je tente d’en user selon mes besoins, sans céder à la panique. Parce que la peur, malgré tous ses effets néfastes, a bien un aspect bénéfique : elle permet de repousser nos limites, de faire naître cet instinct de survie qui est en nous. Si tu n’as pas peur, tu ne sens pas le danger, et tu ne peux pas te défendre. Il faut trouver ce putain d’équilibre où tu seras capable de l’utiliser comme une arme sans te la prendre dans la gueule. »

Elle croisa les bras, fit quelques pas, détournant le regard. Elle réfléchissait à voix haute.

« A force d’entraînements, à force d’affronter cette chose en toi qui te terrifie, je ne dis pas que ce sera moins douloureux, mais ce sera une douleur de plus en plus familière, une angoisse dont tu apprendras les mouvements, dont tu finiras par contrôler la voix. Et que ce soit gérable ou non, on apprendra à le gérer, tous les deux : on s’entraînera encore et encore, jusqu’à ce que ce plan fonctionne. Et il fonctionnera. » Elle s’arrêta dans ses pas, revint vers lui. « Ce n’est pas un hasard si tu viens à cette conclusion aujourd’hui Alec. Ce n’est pas juste parce qu’on approche de ce qui te terrifie le plus : bon nombre de gens recule à ce stade, décide d’entrer dans le déni, de fuir. Mais toi tu es là, tu ne te sens sûrement pas prêt, mais on ne l’est jamais vraiment. Et pourtant, tu restes et tu affrontes : je ne sais pas si c’est un trait des Rivers, mais tu as, avec ton cousin, cette rage de vaincre qui est tout à ton avantage. Alors, sers t’en. »

Elle fit un mouvement de tête décidé, plus déterminé que jamais, et s’approcha de la baie vitrée.
« Reviens quand tu le voudras, et nous passerons à la suite. Et à la fin de cette leçon, je crois qu’on pourra faire une entorse à mon stupide règlement et boire un whisky. »

La sorcière rentra en soufflant entre ses dents un "Ou mille...".

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mer 12 Aoû 2020 - 20:13
Bordel, que je crève de m’enfuir. Serait-ce de la lâcheté ou une simple solution moins douloureuse, plus fiable peut-être même ? Simplement disparaitre je ne sais où, les laisser à leurs emmerdes, cesser simplement d’y participer, d’y être une saloperie de cible, de simplement … ne plus participer à ça.
Mais tu sais parfaitement ce qui t’attend. C’est simple Alec, sur deux enfants, un seul pouvait se payer se luxe de la fuite, et ta sœur t’a arraché ce droit. Après tout, si elle était l’aîné, de ton côté c’est bien pire, tu es l’homme, alors ils ne te lâcheront pas. Après tout, peut-être l’ont-ils déjà retrouvée, elle aussi. Tu n’as pas de nouvelles, et tu sais parfaitement ce que ça signifie. T’as pas le choix Alec. Tôt ou tard, ils t’auront. Aussi intrusif et insupportable qu’elle soit, cette étape est l’option la plus viable que tu es.

Et pourtant t’en crèves, intégralement, viscéralement, de devoir y faire face. De devoir assumer, affronter ce combat-là alors que tu n’as eu de cesse que de lutter. Mais cette bataille là te tord les tripes, tu t’étouffes, tu te noies dans tes propres angoisses. Il n’est pas là pourtant Alec. Elle non plus. Il n’y a que toi face à ton passé. Et pourtant il gronde bien plus fort que la réalité. C’est toujours ainsi lorsqu’on affronte l’inconnu. Parce que dans le fond, si vifs que soient les souvenirs, tu les tords, les presses, à défaut de les exploiter, tu les noies sous des litres de whisky et des tonnes chaleur humaine. Alors finalement, est-ce que tu la connais vraiment, cette douleur sourde qui te vrille les côtes et brouille ton jugement ? Tu fuyais sans cesse Alec. Et depuis des années, tu fais quelques pas par moment vers cette horreur, tu laisses entrevoir le monstre, tu avoue de quelques mots cinglants. Tu l’as dit à Caitlyn. Toi-même. Sans contrainte. Elle n’a pas deviné, elle. Et tu sais pourquoi tu as fait ça ?

Parce que tu étais à terre. Parce que tu refusais de te battre. Parce que tu lâchais prise, tu te glissais toi aussi dans cette espèce d’apathie immonde qui te vrille le crâne quand tu la vois chez Logan. Parce que tu sais que c’est la fin. Parce qu’on aurait pu t’abattre ce jour-là que tu n’aurais sans doute rien dit.

Tu l’entends cette peur ? Sourde et froide, celle qui te râpe jusqu’aux os, te déchire l’âme, t’englue totalement empêchant l’air d’entrer tout à fait naturellement dans tes poumons ?
Cette peur, c’est la rage du guerrier qui ne ploiera pas.

« J’aurais aimé qu’il y ait une autre solution mais c’est effectivement ta meilleure chance de réussite. »

Un rire, acerbe. Il aurait pu vomir cette phrase qu’il l’aurait fait tant elle lui retournait l’estomac, déclenchait en lui la violence du rejet, de la colère. Celle d’un homme acculé, dans une situation insupportable qu’il n’acceptait pas tout à fait.

« Tu ne peux pas la faire disparaître cette peur, soyons clairs. Et ce serait inutile d’essayer : les effets n’en seraient que temporaire. Mais tout comme la colère, elle peut être maîtrisée assez pour être dirigée vers tes ennemis, pour être utilisée, mobilisée comme un moteur. »

Mâchoires bloquées, son regard déjà intense se faisait tempête, sombre, lourd. La colère. Ça tombe bien, elle est là, jamais bien loin. Son moteur en effet, depuis toujours. Le seul qui permette de dévisager un père, d’affronter une mère. La seule qui permette encore de se dresser en pleine réunion mondaine face à ses bourreaux et de les affronter en face. Mais la peur ? Pouvait-il réellement l’utiliser de la même manière comme elle le disait ? Son premier réflexe était d’avoir envie de lui tomber dessus, de frapper, de hurler. Mais c’était le monstre qui criait, celui qui refusait d’être révélé, celui qui ne souhaitait que se terrer encore un peu. Deux trois décennies seulement, rien d’infaisable. La peur. La peur engendre la violence, provoque des guerres, remues les peuples, resserre les liens. La peur, force vivre, puissante et ivre. Elle vous dévore.

« Quand je me bats, ou quand je travaille, je ne pense pas à ma peur : je ne l’écoute pas me murmurer des choses. Je peux supprimer bien des émotions mais celle-là est la plus tenace, alors je tente d’en user selon mes besoins, sans céder à la panique. Parce que la peur, malgré tous ses effets néfastes, a bien un aspect bénéfique : elle permet de repousser nos limites, de faire naître cet instinct de survie qui est en nous. Si tu n’as pas peur, tu ne sens pas le danger, et tu ne peux pas te défendre. Il faut trouver ce putain d’équilibre où tu seras capable de l’utiliser comme une arme sans te la prendre dans la gueule. »

Alors à ne pas céder à la violence, il n’avait qu’une envie : fuir. Poings serrés, mâchoire contractée à s’en fendre les os, il faisait quelques pas, ne cessant de la quitter des yeux. Si plus tôt elle le fixait avec une bienveillance mêlée d’une force étrange qui le déstabilisait tant, à présent, c’était lui qui la dévisageait. Ses prunelles auraient rougeoyé que ça ne l’aurait pas étonné. Envie de fuir, de hurler, de frapper, de courir, de se débattre en fait, simplement, physiquement, avec cette idée qui le bouffait, le pliait, le distordait. Quelques pas à son tour, histoire de bouger, de dépenser cette énergie qui s’accumulait, sourde à toute logique. Tu vois que la peur peut être un moteur. Simplement, au lieu de l’utiliser pour fuir, il faudra qu’elle te permette de l’affronter.

« A force d’entraînements, à force d’affronter cette chose en toi qui te terrifie, je ne dis pas que ce sera moins douloureux, mais ce sera une douleur de plus en plus familière, une angoisse dont tu apprendras les mouvements, dont tu finiras par contrôler la voix. Et que ce soit gérable ou non, on apprendra à le gérer, tous les deux : on s’entraînera encore et encore, jusqu’à ce que ce plan fonctionne. Et il fonctionnera. »

Le cœur qui tambourine entre ses cotes, l’envie de fuir lui tord les tripes, comme un aigle dont les serres se refermaient sur ses entrailles. Prométhée mon ami…
Il fonctionnera. Se le répéter. Pas le choix, pas d’autre option. Il ne pouvait en être autrement, c’était ainsi, ça devait marcher, voilà tout. Mais était-il réellement apte à s’infliger ça ? Est-ce qu’il n’était pas simplement à deux doigts de s’enfuir au loin à la simple idée de devoir aborder ce truc, le vivre encore et encore, malgré cette putain de sensation d’en crever à chaque fois. Ouais, Prométhée, toujours. Ironique qu’il ait filé un bout de son foie à celle qui avait réellement affronté le monstre…

S’il n’avait pas fuit ce regard, c’était sans doute par pure réflexe car à présent qu’elle se détournait, l’envie immonde de transplaner et d’abandonner tout ça l’enveloppait parfaitement. Refus. C’était lui, pourtant, qui avait abordé le sujet. Et sans doute la peur l’aurait- elle moins empoisonné si Sanae s’était contentée d’acquiescer en silence. Là elle rendait les choses si réelles, si terrifiantes. Mais elles se doivent d’être véritables Alec pour que tu puisses les affronter.

Elle te donne des armes, ne les refuse pas. Ecoute, ce ne sont pas des paroles en l’air, pas de l’espoir naïf, juste des faits. Ces paroles, tu dois les ancrer, et non les refuser, les intégrer, t’en servir, t’en draper même plutôt que de repousser sans cesse l’espoir. Espèce de Rivers..

Enfin, Sanae avait arrêté son manège, revenant vers lui, le regard de nouveau braqué dans le sien. Définitivement, il la préférait comme ça. Là ils se comprenaient. Là elle saisissait l’importance de ce qu’ils faisaient à présent.

Peut-être pouvons-nous cette fois nous le permettre…
D’entrer en guerre.

« Ce n’est pas un hasard si tu viens à cette conclusion aujourd’hui Alec. Ce n’est pas juste parce qu’on approche de ce qui te terrifie le plus : bon nombre de gens recule à ce stade, décide d’entrer dans le déni, de fuir. Mais toi tu es là, tu ne te sens sûrement pas prêt, mais on ne l’est jamais vraiment. Et pourtant, tu restes et tu affrontes : je ne sais pas si c’est un trait des Rivers, mais tu as, avec ton cousin, cette rage de vaincre qui est tout à ton avantage. Alors, sers t’en. »

Si tu savais comme je crève de m’enfuir pourtant.

T’en serais déçue ? Ca ne fait qu’appartenir à la normalité pourtant. Pas de courage sans peur, n’est-ce pas ? Et puis pourquoi posséder une quelconque rage de vaincre, s’il n’y avait pas de combat à mener après tout.


Alors non, Alec, ce n’est pas un mal d’avoir envie de fuir. Par contre ce qu’elle te dit, c’est que malgré tout, tu es là. Engrange-le.

En silence, il acquiesçait, réconforté, sans doute plus que galvanisé, par l’idée que, quelque part, il avait un petit quelque chose le rapprochant de son cousin, y puisant une force probablement absurde mais bien existence. La rage de vaincre. Le refus d’abandonner. Il se lit en effet dans ses prunelles, il affronte l’angoisse, se laisse emporter parfois, mais revient régulièrement.

Tu ne les laisseras pas faire Alec…

« Reviens quand tu le voudras, et nous passerons à la suite. Et à la fin de cette leçon, je crois qu’on pourra faire une entorse à mon stupide règlement et boire un whisky. »

Ce regard, il irradiait comme jamais il n’avait pu le voir dans ses pupilles.

Ouais, cette fois elle prend les armes. Cette fois elle comprend. Cette fois, il n’y a plus de marche arrière possible.
Cette fois, tu as surtout réellement une alliée.

Un simple signe de tête et il l’observait entrer de nouveau dans la maison. Pas un seul instant, il n’avait desserré les mâchoires. Pas une seconde, il avait esquissé ne serais-ce qu’un sourire. Mais il l’entendait. Elle n’était plus qu’une enseignante lui fournissant des clés pour accéder à certaines compétences sans réellement s’impliquer. Non, cette fois, elle donnerait tout pour le voir réussir. Cette fois, elle marcherait à ses côtés, réellement.

Mains dans les poches, il fixait l’intérieur une seconde.

Pourquoi ? Parce qu’elle ne le laisserait pas prendre le moindre risque pour Kezabel. Parce qu’elle ferait de son mieux pour lui fournir non plus les clefs mais de véritables armes, à l’acier tranchant, incisives, capables de le protéger autant que de lui fournir les capacités pour battre ses adversaires à leur propre jeu.

« Sale con. »

T’as tout prévu.

Il ne s’était pas détourné, n’avait pas marché le long des dunes, ne s’était pas éloigné, n’avait pas pris de temps pour lui. Non, il l’avait suivie. Sans doute l’avait-elle entendu prononcer ces seuls mots, destinés à un homme qui n’était pourtant pas là mais dont l’ombre ne cessait de les recouvrir.
Passant le seuil, il était retourné l’assoir sur le canapé, à la place exacte qu’il avait quitté, avalant quelques gorgées d’eau, finissant le fond de verre qu’il restait avant de le poser de nouveau. Poings sur les genoux, il inspirait à fond avant de poser de nouveau ses prunelles sombres sur elle. Incisives.

Plus il attendrait, plus il serait tenté de fuir.

Donc allons-y.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Mar 18 Aoû 2020 - 18:02
Elle le savait mieux que personne, il y avait des choses enfouies à l’intérieur des esprits qu’il ne valait mieux pas, parfois, déranger. Des choses anciennes, enfermées depuis longtemps, toujours empruntes d’un poison qui non seulement menaçait de se diffuser mais qui avait macéré avec le temps, était devenu plus vicieux encore, plus mortel. Et surtout, tout autour de ce poison, l’angoisse la plus terrifiante dressait ses murailles : il fallait percer un chemin jusqu’à atteindre le poison qui faisait si peur, et débloquer cette angoisse qui empêchait l’esprit d’être plus efficace, plus fort. User du pire pour le meilleur des résultats. Un vrai défi, mais ils n’avaient pas le choix.
Il fallait utiliser la peur d’Alec, la transformer en force, s’en servir pour tromper les Supérieurs. Elle ne savait pas, elle, ce qui terrifiait tant le sorcier, ce qu’il refoulait profondément en lui, gardait secret. Un événement traumatisant, à n’en pas douter, mais dont elle ignorait la nature. Elle aurait pu s’essayer à faire des théories, trouvant probablement des indices, des signes dans les souvenirs qu’elle avait vu de lui, mais elle ne le voulait pas : elle n’aurait pas, volontairement, voulu savoir de quoi il s’agissait...mais la situation était telle qu’elle était, et il n’y avait pas d’autre choix. Elle saurait. Et elle comprenait qu’Alec n’ait pas envie que cette inconnue qu’elle était à ses yeux en apprenne tant sur lui, sur son passé : étrange situation dans laquelle ils étaient. Elle en savait trop de lui et lui, pas assez d’elle. Pourtant, ils venaient de se joindre dans un combat commun : le but précis de leurs entraînements venait de prendre une tout autre ampleur. Il ne s’agissait plus seulement d’être prêt à ce qu’Alec soit retrouvé par leurs ennemis, mais plutôt d’être prêt à ce que lui, en toute connaissance de cause, les rejoigne pour sauver sa peau et celle de ceux qu’il aimait.
Tous. Sauf Lui.
Alors bien sûr qu’Alec n’avait aucune envie de jeter son cousin dans la fosse aux serpents, bien sûr qu’il ne voulait pas lui faire de tort, et au contraire, le protéger, bien sûr qu’il n’avait pas envie de tout ça, que l’envie du moment, là, devait probablement être de fuir, de s’effacer la mémoire, de tout recommencer, ailleurs, sous un autre nom, loin de ces choses terrifiantes et pleines d’acidité … oui, bien sûr que si le jeune sorcier avait eu un autre choix viable, une autre solution, il l’aurait saisie.

Mais y avait-il une autre solution ?
Un autre chemin ?
N’importe quoi, quelque chose…

Sanae aurait voulu trouver une réponse satisfaisante. Elle aurait voulu trouver de quoi dissiper cette angoisse en lui, éclaircir un peu sa route, faire en sorte qu’il n’ait pas à sacrifier quoi que ce soit pour sa liberté. Mais elle n’avait rien dans sa manche : pas un seul atout. Rien à proposer pour les sauver tous les deux. Parce que c’était ça au fond, ça qui la prenait aux tripes : la réalisation que pour survivre Alec devrait faire une croix sur son cousin, non seulement en abandonnant l’idée de le voir, mais surtout, en aidant les Supérieurs à le retrouver. Alors certainement qu’aucun n’en exprimerait tout à fait la douleur, pourtant elle l’avait aperçue dans les mots d’Alec, au cours de ses souvenirs, elle l’avait vue aussi, dans ceux de Logan, alors qu’il avouait qu’il voulait qu’il survive, alors qu’il lui disait que le jeune sorcier devait se détacher de lui. Pour certains peut-être, leur relation était dénuée d’amour, car trop violente, trop tendue, trop brutale….Sanae, elle, ne voyait que ce lien fort, puissant entre eux. Ça lui crevait les yeux.

Ce n’était pas pour rien que Logan tentait de pousser Alec à s’éloigner, à couper ce lien qui le retenait à lui, pour qu’enfin il puisse être libre de prendre son envol….vers une autre cage, celle qui l’appelait avec tant d’ardeur, celle qui le réclamait et qui n’arrêterait jamais de le faire. Une cage remplie d’esprits à l’affût du moindre détail qui pourrait les mettre sur la voie : trouver Logan, mettre la main sur Alec, voilà ce qu’ils voulaient.
Elle avait envie de hurler sur Logan, de lui dire que c’était un putain de bon plan, que c’était tout à fait louable de vouloir protéger et faire survivre Alec ainsi….mais merde, ce que ça lui coûtait de participer à tout ça, ce que ça lui coûtait de savoir qu’un jour, Alec et elle se retrouveraient sûrement le même champ de bataille, mais dans des camps opposés, ce que ça lui coûtait de savoir que non seulement Alec irait se jeter dans la gueule du loup, mais Logan n’y survivrait sans doute pas... Qu’au fond...elle s’était attachée aux Rivers, sans même s’en rendre compte, et qu’aujourd’hui, elle se prenait dans la gueule toute l’ampleur de cet avenir bien sombre qui les attendait tous les deux.

Ce sentiment-là, qui lui nouait le ventre, elle le repoussa bien loin. Elle savait que ce n’était pas le moment de l’exprimer – peut-être même ne le serait-il jamais -, pas le moment de se laisser distraire, de s’énerver contre des choses sur lesquelles elle n’avait aucun contrôle.

Qu’est-ce que vous me faites faire….. ?

Retour à la case action. Il était temps de se battre pour de vrai, temps de jouer la partition du plan de Logan, de mettre en pratique l’idée d’Alec qui s’était dégagée naturellement de la situation – aussi merdique soit-elle. Utiliser la peur, l’angoisse, la maîtrise, la faire tout à fait sienne pour la manier avec adresse, ne pas se laisser gouverner par elle. Oui, Alec, c’est la seule solution, c’est ta seule chance de survie. Et ça fait mal, ça te dévore sûrement les entrailles, là, tout de suite, et tu as envie de fuir, quoi de plus normal ? Qui fonçait tête baissée dans la souffrance ? Qui choisissait le plus tortueux des chemins alors qu’un autre, plus facile, était omniprésent ? Qui avait la force de passer par la pire torture de l’âme pour survivre, pour sauver, pour protéger alors que l’espoir même l’avait quitté ?

Alec.

Et le plus terrible tragédie, sans doute, dans tout ça, était que lui-même, n’était pas conscient de cette force, pas conscient de son courage.

Elle tentait, pourtant, de le lui montrer, de lui faire entendre, mais elle était persuadée que ces mots-là, ne résisteraient pas longtemps dans son esprit. Elle aurait aimé qu’ils s’ancrent en lui, qu’il y croit, qu’il comprenne, mais s’il fallait se méfier de quelque chose, c’était bien du désespoir, de la vision amère qu’il avait de lui-même. Mais elle était coincée dans un rôle qui l’empêchait de lui dire tout à fait ce qu’elle pensait : s’ils avaient été plus proches, s’il savait qui elle était, ce qu’elle était, peut-être se serait-elle permise d’insister davantage, mais ce n’était pas le cas. Alors, bien qu’elle s’essayait à lui donner un espoir utile, et non vain, à lui rappeler sa force, à souligner sa volonté sans faille, Sanae savait pertinemment que ça ne suffirait pas. Il fallait qu’il réussisse, parce que c’était bien le seul moyen de l’en persuader.

Peut-être pas aujourd’hui, peut-être pas demain, mais au terme de leurs séances, au fur et à mesure, de petites victoires en petites victoires pour atteindre celle qu’ils visaient tous deux.

Elle était rentrée dans la maison, lui avait laissé l’opportunité de souffler, loin de son regard, et en pénétrant dans le salon, elle avait entendu ces deux mots qui la firent sourire autant qu’il lui serrèrent le coeur : « Sale con ».

Oui, sale con.

La sorcière se rassit à l’endroit qu’elle avait occupé plus tôt, en tailleur, attendant le retour d’Alec. Il n’avait pas tardé, était rentré quelques secondes après elle. Bien. Mieux valait s’y mettre directement, ne pas attendre que la peur le paralyse. Il s’assit juste en face d’elle, finit son verre et posa ses mains sur ses genoux, son regard incisif trouvant le sien.

Elle fit un mouvement de tête et souffla « Ce n’est qu’un premier essai Alec. ».

Le premier essai de ce nouveau plan digne d’un crève-cœur.

Comme un rappel qu’il avait le droit d’échouer aujourd’hui, qu’il avait le droit de faillir, le droit de flancher. Comme un rappel qu’elle ne s’attendait pas à le voir réussir mais qu’elle savait qu’il ferait de son mieux. Ses prunelles sombres rencontrèrent les siennes.

« Respire Alec. Prends le contrôle. C’est ton esprit, ton territoire. » souffla-t-elle.

Et son esprit s’étendit jusqu’au sien, perçant les défenses.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mer 26 Aoû 2020 - 18:59


Stephen King once said- "Monsters are real. Ghosts are real, too. They live inside us and sometimes ; they win."





Les serres de la peur se refermaient sur ses épaules, il pouvait presque les sentir, ces griffes qui entaillaient sa chair, s’enfonçaient doucement alors que la Peur elle-même se penchait tout contre son cou et murmurait à ses oreilles.

Tu n’es pas assez fort. Tu n’es qu’une mouche qui bourdonne à mon oreille tandis que tu cherches à t’en sortir. Pauvre petit insecte misérable qui s’époumone, se tord dans tous les sens, s’acharne sans cesse. Mais je ricane, petite chose chétive. Pauvre hère, je n’aurai pas besoin de te briser de mes mains, car tu t’écroules déjà. Sens le coton dans tes jambes, les mouches devant tes pupilles, l’acide dans tes veines. Fuis, méprisable vermine, plutôt que de m’affronter. Tu baisses les yeux déjà, tu déglutis, tu trembles même. Ce n’est qu’un souvenir pourtant. Rien qu’un souvenir. Mais tu t’écroules, comme toujours, incapable de faire face, incapable de te dresser, toi l’arrogant et fier… pauvre lâche hypocrite. Attends que je grogne, attend que je hurle, tu verras l’acide se changer en glace, te tordre les entrailles, se figer les muscles. Fuis tant que tu le peux encore. Avant que tout le monde ne sache, avant que tout le monde ne vois. Fuis. C’est ta seule chance de salut.

« Ce n’est qu’un premier essai Alec. ».

Rien qu’un premier pas dans mon jardin d’Eden… Murmurait-elle, toujours. Bien lovée là, contre sa carotide.

« Respire Alec. Prends le contrôle. C’est ton esprit, ton territoire. »

Il inspirait, profondément, bloquait. Et faisait face.

- Tranche-là, ma carotide. Ou tais-toi.

L’instant suivant, les prunelles de Sanae semblaient emplir tout l’espace et voilà qu’elle était de nouveau là, perçant chaque défense. Cette fois, il ne combattait pas, laissait glisser, la laissait atteindre le cœur, les Brumes, s’y loger de nouveau, s’accrochant à la douleur de son intrusion car là, déjà, dans l’ombre, le monstre ronronnait. C’était son heure, et son infâme bourdonnement emplissait chaque fissure, chaque craquelure. Il là, puis ailleurs, comme s’il cherchait à l’empêcher d’en repérer l’origine des échos. Mieux il serait caché, plus tard la fatalité percerait la surface. Mais il était là, ronflement ardent qui envahissait l’espace, faisait vibrer son univers intérieur comme une musique montée trop haut venant vous vriller les os, le son sourd enrobant vos tympans, impossible à ignorer. Elle s’en rapprochait, il le savait, inondant ses sens alors qu’il l’en éloignait systématiquement, de cette horreur qui grondait au fond  de lui. Elle lui échappait, encore et encore, comme avec l’énergie du désespoir. L’en éloigner, la maintenir à distance. Plus elle s’enfonçait, plus elle l’effleurait, plus il sentait le souffle glacé de la peur lui caresser les reins à tel point qu’il était là, ce grincement sinistre à emplir toute sa conscience. Celui d’une porte qui grince et là, soudainement, tout se taisait. Le silence, affreux et morbide emplissait l’air, tout plein qu’il était de cette sensation d’anomalie, de déviance. Ce froid intense et glacial qui s’insinue en vous quand vous savez que le danger est là, qu’il vous guette, comme un prédateur dans les ombres, une réaction très instinctive de l’intégralité du corps. Cette sensation, elle emplissait chaque recoin de son être, en mordait les consciences et ricanait de sentir la peur s’insinuer dans la brume.

Contrairement à avant, les images n’étaient pas nettes, pas chronologiques ou complètes. Elles étaient hachées, comme s’il les arrachait systématiquement, les enfouissait, les mâchait presque pour qu’il n’en reste que des haillons de souvenirs. Rien que des drapeaux déchirés qui flottaient dans la brume, vestiges d’une enfance détruite.

Et ce putain de grincement qui n’en finissait pas. A lui s’ajoutait un souffle, infâme, qui glissait sur les nuques et semblait vous sourire comme un prédateur dans la nuit. Comment un souffle pourrait-il faire une chose pareille ? Il le faisait. Sans que ça n’ai le moindre sens, sans pouvoir l’expliquer.

Et les voilà, ces images, ces saloperies d’images qui reviennent des ombres. Et ce con qui crissait à ses oreilles, celle d’un souffle erratique, celui d’un enfant qui voudrait s’empêcher de respirer, s’empêcher d’exister, mais sa respiration est là, instable, saccadée, elle emplie tout son univers, le parasite tout à fait. Et tant mieux. Car derrière elle, les souffles qui percent parfois les siens sont tellement pires…

Les ongles de petit garçon qui s’enfoncent dans la chair à en faire percer le sang tandis qu’il se bouffe la joue.

Changement de décor, les images s’enchaînent, décousues.

Réunion de famille. Il ne détourne pas le regard, le plante dans celui de sa sœur qui le soutient, dur, droit, si lourd qu’il pourrait fendre l’air. SI intense qu’il pourrait sentir sa peau trembler, les poils se soulever. Non, il s’agit des siens alors que l’homme s’assoie à tes côtés. L’enfant voit même la mâchoire de sa sœur se contracter, mais elle ne bouge. Lui aussi reste figé, y puise tout ce qu’il peut. Parce qu’il sait. Comment pourrait-il l’ignorer. Comment pourrait-il ne pas comprendre ce que signifie le regard de sa sœur ainée ? Comment peut-on ignorer la détresse la peur et la rage ?

C’est ce qu’il voudrait hurler à ce moment-là, à tout le monde. Ce qu’il voudrait s’époumoner, le petit garçon, à en briser la convenance. Hurler à en perdre la voix, hurler sur chacune de ces merdes-là, qui siègent tous autour d’eux. Et qui rient, les abrutis ! C’est eux qui s’époumonent, créent le vacarme assourdissaient, créent les bourrasques de sociabilité et emportent tout dans leur ivresse. Dans leur folie. Ils rient. Ils rient tellement qu’ils ne voient ni le frère, ni la sœur.

Ni la main posée sur la cuisse du garçon.

Non  ! Pitié putain, non !.

Mais il n’en dira rien.

Quitte à en perdre la raison.

Cette main, il avait fallu qu’il en sente à peine de nouveau le contact, si chaud putain, comme si elle était en feu. Ou bien peut-être était-ce lui qui se faisait de glace ? Statue de marbre perdue dans la cohue d’une réunion mondaine. Tandis que lui n’avait que la flamme d’un désir immonde qui jouxtait son âme, le tiraillait, l’attaquait, le réduisait à néant d’un seul contact insupportable.

Insupportable oui. Car il avait suffit. Rien qu’un souffle de ce souvenir et il basculait. Les brumes se faisaient orage et voilà Alec qui se noyait dans un grondement sourd, un cri de rage et de dégout qui sourdait de chaque pore de son être. L’impression de s’enfoncer dans un trou noir, de demander l’oubli, de réclamer grâce d’une telle force qu’ils avaient été expulsés, arrachés du monstre, arrachés de l’horreur, propulsés ailleurs par un réflexe tellement ancré qu’il s’y enchaînait, s’y réfugiait comme un gosse qui se planque sous son lit.  

Oui, parce que les monstres qui s’y trouvent ne sont que de pâles copies de ceux qu’on trouve réellement derrière les portes des chaumières. Derrière le regard chaleureux des membres d’une famille aveugle.

« Tu n’étais qu’un enfant Alec. Tu as été abandonné par ceux qui auraient dû te protéger. »

La voix de Keza. Pourtant ils n’en avaient vus ni le visage ni la situation car déjà, il s’enfonçait ailleurs. Noyau dur d’une défense confectionnée au cours des années. Une façon de retrouver le contrôle là où il n’en avait pas eu, de se confronter, de chercher refuge et chaleur.

« Ferme-là. »

Ses lèvres se refermaient sur celles de Tallulah, sa main sur sa nuque, sa jambe entre les siennes, les ouvrant dans un frisson de plaisir.

Puis Julian, sa chevelure de feu, son sourire qui perçait les âmes dont les jambes se refermaient autour de son bassin alors qu’il la portait jusqu’à un bureau de ce qui semblait être clairement un bureau d’un enseignant dans le fin fond de Poudlard. Les rires qui fusent, les tissus qui volent, les bouquins qui s’écrasent au sol. Le début d’une amitié qu’il n’avait pas manqué de perdre bien après ce jour.

Elles défilaient, les femmes. Lèvres, regards, les vestiges de peaux brûlantes qui s’accrochaient à la sienne.

Jayden, ses ongles s’enfonçant dans son dos dans un dernier gémissement passionné.

Et Mack, contre qui il se réfugiait une nuit où la lune était pleine, le visage enfouis dans ses cheveux d’or, une main dans la sienne, son souffle contre sa peau.

L’instant suivant, c’était comme un séisme qui brûlait sa conscience, propulsant l’intruse en dehors de son être dans une explosion qu’il n’arrivait même pas à saisir. Tout tremblait en lui, se confondait, images affreuses comme flashs de cette chaleur humaine qu’il n’avait cessé de chercher depuis la fuite de sa sœur, l’abandon de sa seule compagne dans l’adversité. Un instant de stupeur où il restait incapable de faire la différence entre les pulsations d’un esprit agressé et la réalité où la nausée, brutale, violente, transperçait son estomac tandis que sous ses côtes, son cœur cognait, pulsant à s’en rendre malade.

L’instant suivant, il se relevait, détournant le regard de son enseignante, tentait d’attraper le verre d’eau qui volait au sol et y explosait devant l’indifférence totale du Rivers qui sortait de nouveau par la porte fenêtre, marchant dans les dunes, les mains tremblant dans ses poches, la respiration sifflante, trébuchant par moment, le pas presque convulsif.

Respire.
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Alec Kaleb Rivers
Mer 2 Sep 2020 - 19:06
 Chacun avançait avec des boulets à ses pieds ou des fantômes à ses côtés. Les corps se mouvaient difficilement sans cesse entravés par le poids de leurs propres démons, se heurtant aux obstacles, parcourant des chemins risqués alors que déjà, respirer faisait mal, bouger était une torture. Mais ils continuaient. Forts. Tenaces. Aussi tenaces que les fantômes qui chuchotaient par-dessus leurs épaules, vicieux, malsains, les dirigeant trop souvent sur des pentes glissantes, les engluant dans la terreur, vase visqueuse qui voulait entraver tous leurs gestes. Et en terreur, la sorcière s’y connaissait. La sienne l’avait clouée au sol, enchaînée pendant de longues années et elle avait vécu sans son ombre sans savoir ou pouvoir s’en défaire. Il fallait un cataclysme pour enlever son essence, pour fragmenter sa force, pour la maîtriser, un tant soit peu.

Mais il y avait des terreurs, des démons, qui étaient tout puissants.

Alec, à quoi ressemble ta peur ?
Quels sont ses pouvoirs ?


Sanae entra dans sa tête et la réponse commença à prendre forme.
Elle se prit l’angoisse en pleine gueule, la vase déjà se répandait sur sa peau, la recouvrait, s’infiltrait dans son âme alors qu’elle touchait de son esprit, celle d’Alec. Elle perforait les défenses qui ne combattaient plus, alla jusque dans les brumes. Des brumes qui soudainement sembler la scruter, l’envelopper, et déjà, un bourdonnement dérangeant s’élevait de leur opacité. Un long frisson remonta le long de son dos mais son regard ne cillait pas, tout comme celui du sorcier. Alors elle se mettait en chasse, cherchait, fouillait, s’infiltrait plus loin alors qu’Alec tentait de la repousser de la source du bourdonnement. Il lui vrillait pourtant les oreilles. En d’autres circonstances, elle s’en serait détournée immédiatement, presque mugie par l’instinct de ne pas s’approcher de si près de la douleur, mais aujourd’hui, elle devait forcer. Forcer à travers la brume pour se rapprocher de plus en plus près, lever la barrière.
Ses dents se serrèrent alors qu’elle mettait le doigt sur la muraille, sur la porte qui s’ouvrait à elle. Elle aurait cru entendre sa trappe à elle s’ouvrir sinistrement, comme un écho. Mais c’était celle d’Alec qui libérait le démon qu’il dissimulait. Un autre frisson la parcourut, irrépressible. Elle ne savait pas ce qu’il y avait derrière cette porte, mais le bourdonnement cessa, et la glace s’instilla dans ses veines. L’angoisse d’Alec la prenait de court, lui tordait les entrailles.

Bon sang, mais que caches-tu dans ton esprit ?

Les souvenirs commencèrent à affluer. En cascade, dans le désordre, à vive allure car dès qu’ils apparaissaient, ils s’en allaient presque aussitôt, pris au vol par une main qui les écrasait, les envoyait valser. Alors elle s’accrochait, fermement, tentant de demeurer sur les images avec force. La peur donnait une force parfois surprenante et le sorcier le démontrait.
Pourtant, elle voyait défiler des miettes de souvenirs, des flashs, des couleurs parmi la noirceur, défilant rapidement devant ses yeux. Un souffle, là, venait glacer sa peau dans sa nuque...ou celle d’Alec, peu importait, son esprit était imbriqué dans le sien et elle ressentait cette froideur vous geler le sang, là, glisser sur son cou...Un souffle erratique. Hâché. Alec enfant. Envie de disparaître, de s’échapper, plus prenante que n’importe quelle autre envie. Elle sentait son rythme cardiaque accélérer, couvrant le bruit de l’autre souffle. Sensation de dégoût. Profond désespoir. Et le sang, en réponse, qui s’écoulait des ongles plantés dans la peau, la douleur d’une joue meurtrie entre des dents serrées comme des pinces meurtrières. L’horreur de n’avoir aucune échappatoire.
Tout était décousu mais un souvenir s’installa plus clairement.

Une tablée. Réunion de famille des Rivers. Un Alec d’à peine dix ans, peut-être moins, lui apparaît assis face à sa sœur, plus jeune. Son regard était planté dans le sien, d’une intensité à fracasser les murs, à tout dévaster. Le tension des muscles chez l’un et chez l’autre, l’éclat du regard...Sanae se perdit un instant dans cet échange mais comme une caresse givrée, macabre, elle sentit cette main sur la cuisse du petit Alec comme si c’était sa propre cuisse. Une envie de gerber. Une envie de hurler. La sienne, celle d’Alec. Tout se mélangeait si violemment. Et l’horreur de la scène s’amplifiait dans les éclats de rire des adultes, insouciants. Mais le frère et la sœur savaient et rugissaient silencieusement de rage, d’impuissance, de désir vengeur...mais surtout, oh oui surtout, de cette détresse enfantine de ne pas pouvoir se défendre, de ne pas pouvoir contrer cette main malsaine qui conservait tout son pouvoir. Cet enfant apeuré, piégé, abandonné dans les griffes de son pire cauchemar...Sanae l’entendait si bruyamment en cet instant que tout son corps se tendait. Ses sourcils se froncèrent, son regard se fit dur, si dur…pour faire disparaître l’envie de tout arrêter. Bloquer ses pensées à elle. Faire le vide. S’accrocher. Bon sang, ce que cela lui coûtait…

On pouvait le tourner dans tous les sens...Sanae était en train de torturer Alec.
Alors, comme un réflexe purement humain, l’esprit se détournait, arrachait le souvenir, le faisait ployer sous la douleur. Les brumes devenaient électriques, orageuses. La souffrance de l’enfant, si présente, palpable, puissante...elle demeurait là, au fond de lui, guidant ses choix. Elle n’était plus surprise de voir en lui cette chose enfantine qu’elle sentait encore là en le regardant : une blessure de l’enfance ne disparaissait pas. Elle attendait d’être rouverte, activée, pour s’endormir un peu et se réveiller plus tard. Encore et encore et encore. Sans échappatoire. Et les mots, les pleurs se coinçaient tandis que la vie embarquait l’enfant et le propulsait dans l’âge adulte. Ce même monde des adultes qui l’avait abandonné à son sort, n’avait jamais vu, jamais compris, jamais agi. Les rires résonnaient encore.

Et pour échapper à tout cela, Alec replongeait dans les méandres de son esprit, cherchant refuge quelque part. Sanae se laissa emporter par le courant. Elle n’avait pas la force de lutter, ou plutôt...pas l’envie.

La voix de Keza s’infiltra dans les oreilles de la sorcière, la prenant de court car aucune image n’était intervenue. Juste une bribe de conversation.

« Tu n’étais qu’un enfant Alec. Tu as été abandonné par ceux qui auraient dû te protéger. »

Oui, Keza. On l’avait abandonné.
Combien étaient-ils à être abandonnés par ceux qui auraient du les protéger ? Ces adultes qui n’écoutaient rien, qui ne voyaient rien. Aveugles. Stupides. Sans coeur ou naïfs. Responsables. Et pourtant, se revendiquant toujours supérieurs.

L’esprit d’Alec chercha quelques secondes une piste d’atterrissage, et il la trouva.

« Ferme-là. »

Les lèvres s’entrechoquaient. Besoin de chaleur. Besoin de contrôle. Les visages se succédaient. Corps après corps, femme après femme, moments d’intimité fugaces mais pourtant si importants...Alec tentait de faire disparaître le souvenir de ces caresses ignobles, de faire taire le bruit de ce souffle sur sa nuque. Loin, loin, les souvenirs. Il vous chasse, il vous remplace, il vous englue au fin fond des entrailles qui hurlent pourtant tout leur désespoir. Pars, démon. Visage tordu d’un plaisir immonde. Haleine à faire vomir par sa seule présence. Voleur d’enfance. Voleur d’innocence. Voleur de vie, d’identité. De tout. Infâme parmi les infâmes, aveuglant tout le monde, réduisant au silence les cris d’un enfant.

Oh, comme il lui venait ce besoin de hurler… elle ne savait plus si c’était vraiment le sien. Oui, oui, c’était le sien. Elle venait voler des souvenirs, elle aussi, et soudainement elle aurait voulu les vomir, les restituer, les oublier. Là, immédiatement. Fermer ses yeux et remplacer les images par d’autres.

Et d’un seul coup, toute la puissance de la douleur d’Alec l’expulsa de son esprit. Sanae esquissa un mouvement de recul, surprise, mais reconnaissante qu’il y soulagée fin. Ses yeux continuaient à fixer Alec, le souffle court, une main contre la moquette, s’y accrochant. Bouche légèrement ouverte, tentant de reprendre un rythme cardiaque normal, Sanae le vit paniquer, perdu au milieu d’un tourbillon impossible à éviter. Le verre tomba, s’écrasa au sol, et Alec se leva comme un animal sauvage...quittant la maison, fuyant comme si le diable le chassait. La sorcière ne bougea pas pendant quelques secondes et lorsqu’elle se retourna, elle le vit se diriger vers la plage. Sa silhouette était presque douloureuse à regarder.

Elle ferma un instant les paupières mais elle ne vit que les images qui lui appartenait. Un gémissement lui échappa alors qu’elle se relevait difficilement. Corps penché, mains sur les genoux, Sanae soufflait bruyamment. Besoin de violence. Là. Maintenant. Elle s’était trop contenue.

Dans le silence truqué sous un sortilège, des vases explosèrent, jetés contre les murs pour se débarrasser de mouvements qu’elle aurait voulu assouvir. Un cri perça sa gorge. Cri d’impuissance qui découlait directement de celle d’Alec, mais qui faisait écho à la sienne, même différente. Elle avait envie de tout détruire. De gerber. De briser des os, des nuques. De percer des yeux trop aveuglés. De couper des cordes vocales. Là, vous le sentez le silence ? Vous la sentez cette sensation de ne pouvoir s’exprimer, de ne pouvoir hurler tout ce que l’horreur du monde peut inspirer ? Tous ces visages rieurs, insouciants...elle voulait les plonger dans l’acide.

Il lui fallut quelques minutes pour redescendre, pour se calmer, pour retrouver un esprit à peu près clair. Ses mains tremblantes sortirent son téléphone de sa poche. Il n’y avait qu’une seule personne à appeler. « Keza..c’est moi. Viens à la maison sur la plage. La mienne. Je suis avec Alec. Il a besoin de toi. Maintenant. ».

Elle lui expliqua la situation, sans entrer dans les détails, mais Keza savait. Avant qu’elle n’arrive, Sanae avait réparé les dégâts de sa rage et avait remis de l’ordre. Elle attendit son arrivée, postée derrière la baie vitrée, alors que la silhouette d’Alec flottait au loin.

C’est pour l’aider.
C’est pour l’aider.
Je fais ce qu’il faut.
Il le faut, hein ? Il faut qu’il soit prêt...quand il partira. Il faut qu’il soit prêt à les affronter.


Et la réalisation soudaine... ignoble...terrifiante...que ce vers quoi elle l’entraînait, était son pire cauchemar.

Logan, trouve un autre plan.
Tout de suite.

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mer 2 Sep 2020 - 19:45


Stephen King once said- "Monsters are real. Ghosts are real, too. They live inside us and sometimes ; they win."





Son cœur cognait rageusement contre sa poitrine, comme s’il voulait s’en extraire, fuir cette cage d’ossements, fuir ce corps maltraité brisé, violenté de tant de façons qu’il n’aurait pu que s’écraser ou se dresser de glace. Mais il ne faisait plus ni l’un ni l’autre. Il tremblait. Il s’écroulait, cherchait à exploser, à fuir, à rugir. Il cherchait à se cacher, à disparaitre autant qu’à frapper, combattre, briser les os à son tour, tordre les esprits, les sentir ployer sous sa force. Mais il n’en faisait rien. Affolé, hagard, terrifié, il fuyant, perclus des images de l’enfance qui revenaient le noyer, le griffer, là dans cette chair nue.

Si faible.

Je pourrais te briser là, d’un souffle, d’un rire.

Et sa respiration se faisait sifflante de sentir de nouveau ce putain de souffle qui vous hérisse le poil, vous coupe la respiration. L’avait-il seulement repris un jour depuis cette époque. Oui, contre la chaleur d’un corps de femme. Besoin d’exister, besoin de dominer, besoin de se rassurer, besoin de voir le désir, de l’assouvir, de maîtriser la situation pour ne pas plonger dans les eaux glacées d’un drame familial. Mais cette famille pourtant, on lui demandait de la rejoindre de nouveau, de marcher là-bas, comme si de rien n’était, de porter ses chaînes de nouveau, d’avancer sous leurs regards, sous leurs rires l’écrasant de tout son long. On lui demandait de perdre la liberté si durement gagnée, de quitter tous ceux qui l’avaient enfin aidé, qui s’étaient tenus à ses côtés, qui lui avaient permis d’avancer, enfin, malgré la glace immonde de cette main sur sa cuisse. Alec la sentait, là, maintenant, plus de dix ans plus tard, posée là comme par hasard, outil de domination total, le réduisant au silence, lui l’enfant incapable, sans défense autre que celle que sa sœur constituait. Une sœur qui était partie. Une sœur qu’il avait délivrée. Une sœur qui avait fuit. Qu’il avait sauvée. Qui s’était construite, comme pour lui voler la possibilité d’une existence libre. Une sœur qui avait disparue à présent, dieu sait où.

Le laissait seul.

Car seul il l’était. Ou du moins il ne tarderait pas à l’être de nouveau. Là, à marcher dans ce putain de manoir vide d’amour, emplis de terreurs qu’il ne saurait expliquer. C’était là, ça percutait ses côtes, brûlait ses os, glaçait sa peau, vrillait ses nerfs saturés sans qu’il puisse expliquer un tiers de cette sensation immonde, ce poison qui explosait dans les veines d’un corps horrifié tant par son passé que son avenir.

Le hurlement qui était venu frapper les dunes, percer le silence, couvrir le grondement des vagues, il n’avait rien d’humain. Pourtant il l’était bien. Affreusement humain. Celui d’un enfant délaissé, brisé, violenté, celui d’un adulte qui a passé sa vie à fuir cet enfant-là sans avoir jamais appris à réellement gérer la terreur qui tranchait ses veines et griffait ses poumons quand ces souvenirs revenaient. Il les vomissait, tous, leurs regards, leurs rires et ces putains de mains qu’il voudrait trancher en cet instant, ces langues qu’il voudrait arracher. Leur putain de besoin de se sentir plus fort, plus grands que n’importe qui d’autre. Toujours si fiers d’être, incapables de voir, pourtant, l’horreur qui souriait dans les ombres.

Sa voix s’était brisée tant dans sa gorge que sur les rochers, éraillée jusqu’à s’éteindre tout à fait, les bras joints devant lui comme un réflexe. Celui d’un gosse qui cherche réconfort et protection tandis que ses poumons refusent l’air, refusent la vie, l’existence et se tordent à s’en détruire. Ongles sous la peau, il ne remarquait pas le sang, pas les tremblements furieux de ses muscles tétanisés. Fuir, lutter, les informations se mélangeaient, rongeaient son âme, brûlaient sa peau. Pourtant il marchait, comme pour s’éloigner de ce qu’elle savait, s’éloigner de lui –même, disparaitre au loin, derrière les dunes. Et le hurlement rauque, éraillait, se muait en une plainte immonde tandis que ses genoux percutaient le sable, l’air lui manquait comme si son corps lui-même refusait de simplement respirer encore en cet instant précis. Alors il  ramenait ses genoux contre lui, enfouissant son visage dans l’ombre de son corps tremblant, l’oxygène ne passant que par à-coups fébriles. Jamais il n’avait tant ressemblé au gosse sous l’escalier qui cherchait à effacer les bruits immondes qui passaient de cette porte.

Il aurait pu insonoriser la pièce. N’importe quel sorcier peut lancer un sort si basique. Mais il avait choisi de ne pas le faire. Jour après jour, il avait choisi de les torturer un peu plus.

Et au son aigre de cette respiration affolée, Alec repartait là-bas.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Sam 5 Sep 2020 - 13:57
Allongée dans le canapé, bouquin en main, la voix de Florence & The Machine comble les silences de l’appartement. Bruit de fond, présence invisible pour repousser d’éventuels démons imprévisibles, je me laisse plonger dans l’histoire du roman que j’ai chopé à la librairie sous les conseils de Jules. Ça faisait un moment que je ne m’étais pas accordée un moment comme celui-ci, de détente et plénitude. Seulement vêtue d’une chemise et en sous-vêtement, le programme de ce jour va être très simple : Bouquiner, bing-watcher devant Netflix une partie de l’après-midi et peut-être aller chercher Riley à la Fac pour qu’on aille boire un verre ou se faire un ciné, seulement si Mme Vargas-Jenkins n’est pas trop occupée.
J’ai d’ailleurs un enterrement de vie de jeune fille à préparer. Ce soir, peut-être.
Pour le moment, ma main glisse dans le pelage de Tess qui dort juste à côté de moi, tandis qu’Astrée est certainement entrain de faire la même chose sur mon lit. Veillant sur mon territoire et sur moi, par la même occasion.

Mon portable vibre sur la table basse et je mets bien cinq bonnes secondes avant de me sortir de l’histoire, cherchant à tâtons le téléphone sans décoller mes yeux des pages et, surtout, sans vérifier qui est entrain de m’appeler.

« Allo ?
- Keza… c’est moi. Sa voix me ramène aussitôt à la réalité. Je la reconnais entre mille, tout comme je reconnaitrais ce ton inquiet, annonciateur d’une mauvaise nouvelle.
- Sana ? Tout va bien ?
- Viens à la maison sur la plage. La mienne. Je suis avec Alec. Il a besoin de toi. Maintenant. » Voix tendue, urgence, je suis déjà redressée dans le canapé, le bouquin fermé sur la table. Je n’ai pas le temps de demander ce qu’il se passe, Sanae se charge d’elle-même de m’expliquer. Je l’écoute à mesure que j’enfile un pantalon, noue ma chemise sur mon ventre, téléphone bloqué entre mon oreille et mon épaule.
Mon sang se glace lorsqu’elle entre dans les détails. Assise sur mon lit, mon geste en suspend, c’est comme si une main invisible venait de me pousser dans le vide. Je saisis l’urgence autant que la gravité de la situation, mais il y a aussi ce nuage qui s’étend, orageux, dangereux. Un retour au passé, brutale et violent.

« J’arrive tout de suite. » Je raccroche, glisse mon portable dans la poche de mon pantalon et ne garde en main que mes clés après avoir fermer derrière moi. Je dévale les escaliers, converses aux pieds, le cœur battant jusqu’aux tempes. Au bord des lèvres. C’est d’un pas pressé que je me glisse derrière l’immeuble, emprunte une ruelle vide et transplane vers un portoloin qui lui, me mène directement près de la maison de Sanae, au bord de la plage. Je monte les petites marches qui me mène à l’arrière de la bâtisse qui m’inspire un tas de bons souvenirs, bien vite balayé par le visage inquiet et attristé de Sana que je croise là, derrière la baie vitrée. Un seul geste de la tête suffit pour m’indiquer le chemin que j’emprunte, dents serrées. La différence de température est presque agréable, là, avec le bruit de l’océan qui s’écrase sur le sable en fond. Un décor paradisiaque que j’affectionne particulièrement, qui me rappelle également qu’une éternité me sépare de la dernière fois où je venue passée du temps dans ma propre maison désormais occupée par Logan.
Le hurlement qui surgit de derrière les rochers me tétanise.
De terreur, de douleur.
Un cri si profond, venu du fond des tripes. Un écho venu du tréfond de cette grotte qui recèle le pire des cauchemars. Echo immonde à ce qui remplit le cœur et l’esprit d’Alec en cette minute même.
Mes pas foulent le sable mou, la brise venant glisser un léger frisson sur mes avant-bras et je le trouve là, prostré.
Brisé.

L’adulte n’est plus. Il s’est vautré dans les souvenirs obscènes, ignobles, de cette enfance consumée par la perversité répétée d’un adulte. Qui pourrait imaginer qu’un simple toucher pouvait briser une identité ? Un doigt sur le miroir, la fissure apparait et s’agrandit à chaque tentative d’en vouloir suivre les bords jusqu’à trouver la brèche et l’agrandir plus encore. Préférant assouvir ses envies immorales, de dépravés.
L’adulte n’est plus.
L’enfant, lui, surgit du placard quitte à exposer ses plaies, mettre à nue toute la terreur que les souvenirs lui inspirent. Ce monstre odieux toujours dans l’ombre de ses pas et il peut bien courir, fuir, qu’il le talonnera toujours de près pour lui rappeler dans ces rares moments de bonheur qu’il est là. Qu’il le sera toujours.

Je le sais, parce que mon propre monstre ne m’a jamais lâché. Et même si nous avons vécus ce traumatisme à une échelle différente, le résultat reste le même.
Notre identité nous a été volée.
Violée.

Alec est là, roulé en une boule de douleur et de tremblements. Beaucoup ne connaissent de lui que ce regard sûr, brûlant, souvent violent. J’ai appris avec le temps que derrière ses prunelles se dissimulaient une toute autre part de lui. Plus humaine que certains ne pourraient l’imaginer. Je m’approche mais reste à distance raisonnable parce que là, tout de suite, je sais que la pire erreur serait d’envahir cet espace vital qu’il a tant de mal à préserver. Sanae m’a énoncée les souvenirs exposés lors de l’entrainement et je sais qu’en cette seconde, ils agissent comme autant de liane venant comprimer son thorax et sa gorge.

« Alec. Je me manifeste en douceur, à un peu plus d’un mètre de lui alors que je me positionne à sa hauteur. Accroupis. C’est moi. Ça n’est que moi. » Il n’est pas là, ils ne le sont pas. Il y a juste toi et moi et cette mer qui s’anime dans mon dos, à l’image même de tes pensées.


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Sam 5 Sep 2020 - 15:10


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Les ombres s’affolent, grognent, l’emplissent, le griffent, l’emportent de leurs murmures immondes. Qu’importe le chaos des vagues, qu’importe le bruissement du vent, les sifflements des joncs, il ne reste plus que ce son immonde à ses oreilles. L’envie. Grisante parfois devient affreuse quand elle se plaque à vous, imposée, amorale, quand elle vous soumet, vous brise, vous façonne, vous détruit pour la petite joie égoïste d’un autre. Il repoussait les souvenirs depuis tant de temps… Avant l’aveu à Kezabel - … quoi ? Quatre ans plus tôt ? – ça n’était jamais revenu sur le tapis. Depuis, il avait été forcé par moments d’affronter le monstre de nouveau, avait même tenté d’en parler de lui-même, n’obtenant que du silence. Parce qu’après tout, comment peut-on réagir correctement à une horreur pareille ? Comment peut-on y survivre ?

Il le faisait tous les jours depuis, pourtant. Bien mieux depuis quelques années. Doucement, il avait avancé. Doucement, tremblant, il avait commencé à se reconstruire, brique après brique, ne niant plus, sans pour autant laisser cette horreur faire surface sans cesse. Elle était ensevelie, cachée, bâillonnée. Elle n’avait pas le droit d’exister et ce même s’il la savait là, non loin, toujours quelque part dans son sillage.

Alors comment peut-on accepter une telle torture ? Ne cesser de l’affronter ? La mettre en avant, la faire vivre alors même qu’on ne cesse de la brider depuis des années. Lui donner des forces, la dresser contre soi et se faire de nouveau grignoter petit à petit, plaie après plaie. Souvenirs après souvenirs.

Car ils revenaient à présent, par flots. Ces affres qui gênent, auxquelles on ne sait quoi répondre, qu’on met de côté sans cesse. Ces maux qui ne trouvent pas de soulagements, tous les fuyaient, s’en détournaient, les évitaient tout comme il le faisait. Mais lui vivait avec. Et lui… devrait les faire vibrer plus violemment encore sous sa peau blessée. Volontairement.

Qui fait ça ?

Bordel, QUI fait ça ?

La question résonnait, comme un bruit sourd dans sa poitrine alors même qu’il sentait encore la folie de ce souffle avide dans le creux de sa nuque. Et les tremblements de son corps alors que le toucher glissait sur lui.
Et ces sons. Putain les sons de sa sœur.

Nausée. Brutale, violente, totale.  Envie de s’arracher au monde, de refuser sa propre existence, de fuir, d’être lâche, de cesser d’exister, de cesser de se manger cette culpabilité qui le détruisait. Cette impression d’être immonde, de vouloir quitter son corps, de ne pas s’appartenir, d’avoir cédé, d’avoir été faible, d’avoir choisi la facilité, d’être coupable, d’être sale, d’être injuste, d’être incapable.

D’être fautif. Qu’importe ce que ça pouvait bien vouloir dire.

Et ce sourire le bouffait tant. Celui d’un conquérant, d’un dominateur, celui qui obtient toujours ce qu’il veut. Celui qui l’avait obtenu, elle, à défaut de l’avoir eu tout à fait, lui.

« Alec. Frissons. Immondes. Injustes.   C’est moi. Ça n’est que moi. »

Mâchoires serrées à s’en fendre les molaires, il cherchait à raccrocher. Une seconde, la voix lui avait semblé être celle de Janie. Rien qu’une, puisqu’il avait rapidement compris. Qui donc appeler ? Qui comprendrait ? Mack. Keza. Pas quarante choix puisque sa sœur était portée disparue. Donc, oui, Keza. Evidemment.

Redressant le visage, l’orage de son regard avait percuté ses yeux, calmes, inquiets mais sans jugements. Et pourtant… bordel ce qu’il aurait aimé que personne ne le voit ainsi. Vulnérable. Avait-il seulement jamais craqué ainsi ? Non. Alors pourquoi aujourd’hui ?

Lorsqu’il était gosse, il n’avait pas le choix, encaissait, faisait ce qu’on lui disait jusqu’à ce que la rage ne le rattrape et qu’il s’oppose à tout et tout le monde. Mais dans le fond, il n’avait cessé d’encaisser. Lorsqu’on est plongé dans une situation intenable, on ne se rend compte de son horreur qu’une fois sortis. Or là, on lui demandait de s’y replonger, volontairement. Et il avait signé, fou qu’il était.
Sauf qu’en cet instant, Alec n’était plus sûr ni d’en être capable, ni d’en avoir envie. Il ne voulait que chialer, hurler, disparaitre, s’enfuir loin, tout oublier, tout laisser, se nier lui-même si une telle chose pouvait faire taire l’horreur en lui. Si une telle chose pouvait couper le flux de poison qui inondait ses veines. Efface tout. Achève-moi. Détruis-moi. Que je ne ressente plus jamais ça.

J’ai pas la force.

Sans un mot, il retrouvait sa position initiale, happé dans ses propres ténèbres, fuyant le regard de son amie.

Et l’écho de cette voix immonde susurrait de nouveau à son oreille.

C’est ça que tu es Alec. Un lâche. Pleutre enfant caché, tu as beau te draper de toute l’assurance du monde, tu as beau emplir les salles de ta présence, rire et parler plus fort, tu as beau frapper, t’affirmer, dénigrer, cingler. Tu ne fais finalement que singer. Tu n’es qu’un gosse, un incapable qui laisse faire, se planque, s’oublie.

T’auras beau baiser. Tu resteras le gosse paralysé.

Qu’importe les corps en fusion contre le tien, qu’importe le besoin de chaleur. C’est par le vent glacé que tu resteras écorché.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Dim 6 Sep 2020 - 12:58
La vulnérabilité d’Alec est un mythe, parait-il. Un type comme lui, à cogner, rugir, cracher, mordre, envoyer la terre entière se faire foutre ? Jamais nous le verrons verser une larme. Ce sont plutôt les autres qui pleurent sur son passage lorsque Rivers décide de semer sa discorde, sa haine et son mépris. Archétype du mec détestable au possible, avec des opinions plus que discutables, faisant preuve d’un égoïsme certains.
Ca, c’est l’image si brute et solide qu’il répand autour de lui. Que les autres prennent, rejettent, sans jamais chercher à gratter plus loin que cette surface si épaisse. Pourquoi faire ? Pourquoi s’emmerder avec un type qui vous cracherait son rire méprisant à la gueule ? Pourquoi chercher une once d’humanité derrière un Rivers, derrière cet homme condescendant, fier, méprisable et méprisant. Quant bien même il s’avère être un partenaire de soirée presque agréable, il n’en reste pas moins cette mauvaise graine de sang-pur qui se répandra comme toute sa lignée, une gangrène aux idéaux suprêmes.

Un masque. Pas un mensonge, il y a une part de vérité, même moi je le sais. Mais je sais aussi que cette façade n’est rien d’autre qu’une muraille épaisse. Un mur de béton construit des mains de sa famille, façonné à l’image même de son sang. Sans compter celles plus perverses, venu façonner l’enfant à son image, arrivant sur ce terrain comme un conquérant, écrasant de ses pas lourds les quelques fleurs qui auraient pu offrir à Alec d’autres parcelles de bonheur. Il ne lui en a pas laissé la possibilité. Comme un vent radioactif, le monstre a rendu ses terres infertiles, sombres, ténébreuses. Insondables. Toutes personnes suffisamment folles ou courageuses pour s’y aventurer, s’y trouvent morts avant même d’y poser un pied.
Mais moi j’y suis, sur ses terres. Avec lui. Je sais qu’il n’est pas que ce type détestable, parce que j’ai pu voir sa part d’homme sous cette couche pourrie, gangréné. Alec n’est pas que « Rivers ». Il va bien au-delà d’un nom, d’un héritage. J’ai appris par moi-même à le saisir, le découvrir. Parfois dans ce silence partagé, parfois dans les discussions échangées.

Aujourd’hui, le mur s’est fissuré pour laisser à nue l’enfant, l’ado, l’adulte. Une exposition si violente qu’Alec ne sait plus comment se couvrir, se blinder. Comment réussir lorsque le monstre revient brûler tout sur son passage, revenant planter cette graine immonde en vous, ouvrant cette porte maudite à la volée. L’échappée des chiens, des démons qui envahissent votre être et votre esprit, détruisant vos certitudes.
Démolissant votre identité.

L’orage de son regard me saisit à la gorge, me propulse sur ses terres désolées et je m’y plonge sans ciller, sans l’ombre d’une hésitation. Je sais, il sait. Nous sommes liés malgré nous et c’est sans jugement, sans honte que je ne lâche son regard pourtant percutant, troublant. Je lis en lui sans voir l’utilité des mots.
Et Sana dans cette histoire ? Elle a vue et entendue cette violence perverse, sûrement senti ce souffle se répandant sur la peau, comme un liquide humide et poisseux qui vous donne la nausée, vous fait sentir si sale que même trois douches à vous frottez à sang ne suffiraient pas à défaire cette sensation de n’être qu’une pitoyable poupée brisée et souillée. J’imagine sans peine la claque, l’ampleur des émotions qui doivent la saisir en cette minute même. Les mêmes que celles qui ont ravagées mon esprit lorsqu’elle m’a ouvert ses propres portes.

Regardez-nous, enfants brisés que nous sommes. A devoir ramasser les morceaux à mains nues, à chaque fois. A répétition.

Je capte toute sa détresse, cette douleur présente depuis l’enfance, immuable. Moi aussi, j’aimerai tout effacer, tu sais ? Tout oublier, éliminer ces traces indélébiles qui me reviennent en pleine gueule lorsque je m’y attends le moins. Ne plus sentir la sensation de ses mains caleuses sur ma peau, son souffle écrasé sur ma peau, son corps comprimant le mien, dominant mon existence au profit de la sienne. Comme si j’étais le trophée à saisir, à conquérir, se foutant bien de savoir si j’étais d’accord ou non.
Moi aussi, j’aimerais effacer tes hurlements intérieurs, détruire ce qui te brise l’esprit, cette terreur qui frappe tes tempes, menace de faire exploser ta boite crânienne.

Position initiale, Alec s’efface mais sait que je suis là désormais.
Mes genoux trouvent le sable frais après m’être approcher de ce corps endoloris, toujours en douceur, sans le brusquer. Assise là, à ses côtés, je regarde un instant la mer qui, elle, ne se soucie pas de nous. Raisonne en moi la frustration de ne pouvoir faire comme elle, avaler les déchets et débris pour les rejeter plus loin, plus fort, les éloignant de nos rives. Et pour ne pas l’étouffer, je me contente de décrocher en douceur ses mains crispées où je vois perler le sang tant il y met sa rage et sa terreur.

« Regardes-moi. Une tendresse dans la voix, mais jamais je ne manifeste de la pitié. Je suis là, mais lui non. Il n’y a que nous deux, juste nous deux. Ma voix s’infiltre, comme un phare en pleine nuit, cherchant à le soutirer de ses souvenirs, le ramenant à cette réalité plus paisible qu’il ne pourrait l’imaginer. Puisqu’aujourd’hui, il n’est plus seul et il ne le sera jamais plus. Alec. Ton plus imposant et plus fort, pour se faire entendre. Le sortir à tout prix de ce tourbillon d’horreur, prêt à l’étouffer et l’étrangler. Le poussant d’un coup de pompe dans cette cave dont la porte menace de se refermer pour de bon. Mes mains accrochées aux siennes, de quoi se rattraper au vol. Ne le laisse pas gagner. Ne le laisse plus rien te prendre. Il n’en a pas le droit et il ne l’a jamais eu. Il ne mérite rien d’autre que ton mépris. »

Nous ne laisserons jamais gagner ceux qui nous ont volés, détruits.
Nous ne leur laisserons plus jamais un centimètre de terrain, quitte à répandre le sang derrière nos pas.
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Mer 9 Sep 2020 - 22:55


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L’orage gronde et s’abat, brûle sa peau, déchire ses muscles. Il brise les murailles et explose dans son âme, en griffe les parois, fait ressentir l’enfant blessé, l’enfant perdu, l’enfant inutile et incapable. Il est là ce gosse, il perce la surface, le bouffe, l’étouffe jusqu’à en brider l’adulte. Jusqu’à l’asphyxier de cette terreur qui était venue englober chaque pore de sa peau alors. Alors, quand les ombres se refermaient sans cesse sur lui. Quand elles s’approchaient un peu plus. Jusqu’où étaient elles allées ces ombres ? A quelle profondeur dans sa chair ? A quel point versaient-elles le venin dans ses veines ? Depuis combien de temps se battait-il contre elles, ne cessant de s’afficher comme l’homme sur de lui, le connard, le combattant, l’enflure. Celui sur qui passaient les coups, celui qui ne tolérait pas la faiblesse, celui qui avancerait, quoi qu’il en coûte. Mais combien savaient la lave qui le détruisait quand la surface se détruisait ? Combien distinguaient la peur, l’angoisse, l’incertitude derrière ces prunelles incisives ? Combien devinaient ?

Une avait été mise face à l’horreur.
Une l’avait vue l’emporter.
Une en avait été percutée sans semonce et c’était pourtant lui qui avait pris la balle de son silence.

Parce que… que peut-on dire ? Que peut-on penser ? Comment peut-on combattre ?

Une savait quoi dire, quoi penser. Une seule avait porté les armes.

Car dans ses prunelles, il voyait toujours la scène. Il revoyait le corps, la terreur, la rage, la sidération. Il sentait encore la foudre vriller ses muscles, foudroyer ses neurones alors qu’il l’arrachait d’elle pour le réduire en cendre. Il voyait la reconnaissance et le soulagement dans son regard, le genre de choses qu’on ne lui accordait pas si souvent. Et surtout, il trouvait la compréhension. Violente et dure, la réalité qui la percutait, qu’elle devinait. Parce qu’elle voyait la foudre. Elle avait décelé l’orage dans sa gorge, les ombres dans ses prunelles. Elle comprenait le mal-être et la rage parce qu’ils sillonnaient ses veines autant que les siennes.

Alors oui, de toutes et tous. De ceux qu’on aurait pu lui imposer en cet instant, s’il y en avait une qu’il pouvait accepter, s’il y en avait une qui pouvait éviter les coups, esquiver l’orage qui grondait, c’était celle qui se tenait avec lui au creux du cyclone.

Sa silhouette, il la devinait se mouvoir à ses côtés, présence tranquille, venant prendre sa main, la délier, l’arracher de ces vagues qui le ballotait, comme une ancre dans l’horreur, un point d’appuis, d’accroche. Les ongles délaissent les impacts des ombres du passé, emportant le sang avec eux, le déposant sur la peau de la jeune femme dont la voix perçait doucement le roulis des vagues, parvenant à lui comme étouffé, perdu dans le bourdonnement sourd du sang à ses oreilles.

Un appel. Un second. Toucher brûlant dans les ténèbres. Il s’était toujours raccroché à la chaleur humaine, ça n’était pas nouveau, mécanisme de défense profondément naturel. Rien qu’un contact, une main dans la sienne et la voilà son ancre, sa porte vers le monde réel, loin, si loin de lui. Seconde main dans la sienne et il redressait finalement le regard. Chacun sa toupie. S’il lui en avait offert une, elle était manifestement la sienne.
Il tremblait sous son contact, mais Alec était là de nouveau. Sous la foudre de son regard. Il est là l’orage. Mais pas le même. Celui qu’on fait sien, celui qu’on manie pour en extraire toute la fureur.

Celui qu’il était lorsque ses poings s’abattaient sur celui qui avait voulu la faire plonger de nouveau dans l’horreur.

Le tonnerre au cœur, la rage à l’âme.

«  Ne le laisse pas gagner. Ne le laisse plus rien te prendre. Il n’en a pas le droit et il ne l’a jamais eu. Il ne mérite rien d’autre que ton mépris. »

Voilà pourquoi il avait fallu que ce soit elle. Voilà pourquoi il ne pouvait en être autrement. Et voilà pourquoi elle était l’œil du cyclone. Parce que partout autour d’elle, ceux qui voudraient frapper se trouveraient emportés. Disloqués.

Voilà pourquoi s’ils se trouvaient un jour face à face, ennemis, elle l’emporterait sans doute. Une réalité qui le soulageait curieusement.

En silence, les yeux dans les siens, les mains jointes, c’était les âmes qui se mêlaient, leur rage, leurs plaies, ouvertes, à nues, là quelque part entre eux. Cet effet miroir immonde qui pourtant, signifie tant. Comme une reconnaissance dans la tempête, la sensation sincère, vibrante, délirante, de ne pas être seul face aux bourrasques, de se comprendre.

Et là, dans ce chaos réuni, le tonnerre qui gronde, la colère froide qui se rejoint, se fond alors qu’elle trouve sa jumelle, se rappelle de nouveau la raison pour laquelle elle existe. Elle est un moteur, froid et dur, elle est la lame, l’acier. Elle est ce qui tranchera leurs veines, brisera leurs os, les défera, les uns après les autres. Elle est ce qu’on brandit chaque jour de sa vie, la puissance froide qui force les soldats à se lever une nouvelle fois, frappent jusqu’à découvrir qu’il n’existe plus d’ennemis. Elle sera l’arme, le bourreau, le refuge, le rempart. Elle sera le messie quand dans leurs prunelles, la foudre se reflètera et fera naître, enfin ; la terreur.

La peur changera de camp. La peur le fait toujours, si tant est qu’on sache la dompter et la faire colère.

Isaac est tombé. Et pourtant Kezabel aura retenu ses coups, empêchant la foudre de s’abattre, le Rivers d’abroger un bourreau parmi d’autres.

Celle qui l’aide à cet instant à retrouver le rivage ne sera pas là, alors.  Pour l’empêcher de jeter les restes d’une terreur passée dans les flammes, et, avec elles, les gravats de celui qui fut le monstre.

Et les tremblements cessent. Les ombres demeurent, bien sûr, mais elles grondent de nouveau de rage.

S’il faut marcher seul dans leur meute, s’il faut accepter de s’y trouver briser de nouveau, du moins n’oubliera-t-il pas la puissance de ces moments volés.

« T’as raison. »

Tords le monstre. Brise le monstre. Sois le monstre.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Sam 12 Sep 2020 - 0:33
I should have known
I'd leave alone
Just goes to show
That the blood you bleed is just the blood you owe


Bateau insouciant, voiles dressées, poussé par le vent de l’innocence. Là, sur la proue, se trouve le capitaine juvénile, sourire de conquérant aux lèvres, les yeux submerger de rêves. Rien ne pourrait lui résister, à ce gamin. Rien. Le mal et le bien sont deux notions abstraites, si bien qu’il y a dans son cœur cette invincibilité solide. Inébranlable. Imprenable. La puissance de l’imaginaire le pousse vers des contrées excitantes et frissonnantes et c’est gorgé de courage et d’aventure qu’il brave les flots de son enfance.

Puis, vient l’orage.
Puis, vient le crash.

Dans la force de son insouciance, le gamin n’a pas vu les murs se dressés autour de lui, des Icebergs surgissant de toute leur hauteur. Chaque geste déplacé est autant de nouvelle façade épaisse et impitoyable où le navire s’écorche, s’écrase. La coque s’use et s’ébrèche, inondant tout d’abord la cale où se trouve tous les trésors de l’enfance, précieux souvenirs assombrit par les flots épais. Presque visqueux. Les chocs se poursuivent, les flots si dégagés et si prometteur de merveille s’amoncèlent d’iceberg chaque jours plus épais, inexorable obstacle où la coque se brise pour de bon. Le gamin patauge dans cette eau angoissante, regardant de ses yeux écarquillés et tétanisés sa sentence arriver. La terreur est telle qu’il n’est plus capable de fuir. Comment le pourrait-il alors que tout autour de lui n’est que solitude et océan déchainé ? Il va se noyer, il le sait au fond ce petit cœur fébrile, tremblant.
Il va se noyer. Étouffer. Mourir.
Déjà, l’eau lui monte à la taille, puis jusqu’au menton. Et lorsque le souffle du Géant, adulte assassin, glace sa nuque, l’enfant boit la tasse. Le liquide s’infiltre dans ses poumons.
S’en suivra cette agonie lente, douloureuse, qui n’en finit jamais. A vouloir souhaiter la mort, que l’on écrase votre corps pour de bon. La tête au bord de l’explosion, la terreur se répète, encore et encore sans jamais cesser.

Au fond des yeux d’Alec, l’enfant est pris au piège depuis des années.
Bateau insouciant, devenu épave.
Echoué sur les rives épineuses des souvenirs où à chacun de ses pas, le bourreau revient. Ombre immonde et gluante qui ne vous quitte plus. Et pour partir de cette berge putride, il lui faudra tout reconstruire, lutter contre les inlassables tempêtes.

I let it burn
You're no longer my concern, mmm
Faces from my past return
Another lesson yet to learn

Il n’y a jamais de bonnes paroles ou de bons gestes. Il y a juste nous, au milieu des gravas de nos vestiges passées, détruits à coup de hache jusqu’à taillader nos consciences. Personne ne pourrait nous reprocher nos blessures, personne ne pourrait exiger de nous une nouvelle lutte, de nous forcer à nous relever, à combattre encore contre ce démon commun. Il y a ceux qui préfèrent oublier, celles qui préfèrent se battre. Ceux qui n’en ont pas la force, ni le courage. D’autres qui iraient jusqu’à retrouver le bourreau et l’irradier de sa fureur.
Puis, il y a nous, Alec.
Debout. Vivant. La rage au ventre, la rage au cœur.
Ni toi, ni moi, ne voulons laisser gagner ces pourritures, à se laisser étouffer par leurs tentacules glacials. Ils ont sali nos êtres, nos mémoires. Il a détruit ton enfance, il a fracassé mon identité. Mais je ne peux pas continuer en le laissant être ce qu’il veut que je sois. Je ne peux pas poursuivre ma vie, sans ramasser ces morceaux de moi-même pour me remodeler pour quelqu’un de plus fort encore.
Et toi ?
Est-ce que tu laisseras cette charogne se repaitre du cadavre que tu as laissé derrière toi le jour où l’adulte est venu pour te détruire ?  

Entre mes mains chaudes et ferment, les tremblements cessent et le regard change, se module. Au fond de la clarté de ses yeux, j’y lis un brasier qui enfle dangereusement.

«  T’as raison. » Je ne dis rien, mon regard ne lâchant pas le sien. Il y a quelque chose dans ses prunelles qui m’interpelle, d’une puissance à couper les souffles. Celle du guerrier qui se relève après un trop lourd combat. Celle de l’homme enragé, refusant le genou à terre. Mais moi, je vois surtout l’enfant qui sort rageusement la tête hors de l’eau en poussant son hurlement furieux. Celui qui vient du fond des tripes, une vengeance sur l’existence. Et je comprends qu’il ne t’aura pas, puisqu’il ne peut en être ainsi.

« Chaque fois que tu auras l’impression de te faire submerger, je serais là. Tu ne te noieras plus. Mes mains s’accrochent plus fermement, mon regard ancré dans le sien, avant que mon visage ne s’adoucisse un peu. Se mettre dans ces états n’a rien d’une faiblesse, au contraire. Admettre et affronter ses peurs ne font que nous donner plus d’armes encore pour repousser la vague ennemie. Tu te sens capable de te remettre debout ? Prends ton temps. » Je ne laisserais pas Alec se faire happer par ces démons. Je connais ses forces, sa rage et la puissance de ses colères. Il a les armes pour avancer et se défendre, mais aussi pour détruire cet Iceberg imprenable.
Il faut simplement qu’il en ait conscience.


There's just no time to die

(c)Billie Eilish ▬ No time to die
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Mar 15 Sep 2020 - 19:24


Stephen King once said- "Monsters are real. Ghosts are real, too. They live inside us and sometimes ; they win."


Crisse, l'enfant ; brûle, l'enfant ; rugit, l'enfant.
Qui enfin, surgit.



_



Les turcs ont passé là. Tout est ruine et deuil.
Chio, l’île des vins, n’est plus qu’un sombre écueil,
Chio, qu’ombrageaient les charmilles,
Chio, qui dans les flots reflétait ses grands bois,
Ses coteaux, ses palais, et le soir quelquefois
Un chœur dansant de jeunes filles.

Tout est désert. Mais non ; seul près des murs noircis,
Un enfant aux yeux bleus, un enfant grec, assis,
Courbait sa tête humiliée ;
Il avait pour asile, il avait pour appui
Une blanche aubépine, une fleur, comme lui
Dans le grand ravage oubliée.

Ah ! pauvre enfant, pieds nus sur les rocs anguleux !
Hélas ! pour essuyer les pleurs de tes yeux bleus
Comme le ciel et comme l’onde,
Pour que dans leur azur, de larmes orageux,
Passe le vif éclair de la joie et des jeux,
Pour relever ta tête blonde,

Que veux-tu ? Bel enfant, que te faut-il donner
Pour rattacher gaîment et gaîment ramener
En boucles sur ta blanche épaule
Ces cheveux, qui du fer n’ont pas subi l’affront,
Et qui pleurent épars autour de ton beau front,
Comme les feuilles sur le saule ?

Qui pourrait dissiper tes chagrins nébuleux ?
Est-ce d’avoir ce lys, bleu comme tes yeux bleus,
Qui d’Iran borde le puits sombre ?
Ou le fruit du tuba, de cet arbre si grand,
Qu’un cheval au galop met, toujours en courant,
Cent ans à sortir de son ombre ?

Veux-tu, pour me sourire, un bel oiseau des bois,
Qui chante avec un chant plus doux que le hautbois,
Plus éclatant que les cymbales ?
Que veux-tu ? fleur, beau fruit, ou l’oiseau merveilleux ?

– Ami, dit l’enfant grec, dit l’enfant aux yeux bleus,
Je veux de la poudre et des balles.


Victor Hugo- L'enfant
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Alec Kaleb Rivers
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Sam 26 Sep 2020 - 17:23


Stephen King once said- "Monsters are real. Ghosts are real, too. They live inside us and sometimes ; they win."



Tu devrais lâcher prise. Tu devrais n’être qu’un enfant, un gosse qui souffre, qui fuis. Les dents ancrées dans le parquet, les ongles retournés sur les échardes de chêne. Combien de larmes refoulées, combien de cris ravalés Alec ? Où est ce môme ? Celui qui geint dans les ténèbres, celui qui toise mais reste coi, celui qui hurle à l’intérieur. Combien d’erreurs, de frayeurs, combien de fureur comptes-tu encaisser encore avant de rendre les coups ? T’ont-ils si bien enchaîné, endigué, pour que tu restes muet, toujours, face aux salves rugueuses de la lave qui déchire ton âme ? Jusqu’à quand tu les laisseras gagner ? Jusqu’où es-tu prêt à t’oublier, te nier, pour ne pas les affronter ? Le monstre restera là, tu le sais parfaitement. Il a prit possession de tout ton être dès le premier regard posé sur sa silhouette autant que sur la tienne. Le monstre mugit, griffe tes os, vrille tes tympans et s’il se terre, ce n’est que pour distiller le poison de la peur dans tes veines. Il restera là. Il est tien autant que tu en es l’esclave. Car elle le sait aussi bien que toi, s’il dévore ton âme depuis l’enfance, il est aussi la fureur de tes sombres heures, celle qui te pousse à avancer, qui te donne la force de te dresser face à l’horreur.

Car le monstre dans tes prunelles, elle le connait. La rage froide, celle qui détruirait ce monde, le perdrait dans tes flammes, elle l’a déjà vu, brûler là, dans l’acier de tes iris. Océan sous l’orage, tu ne pourras te défaire des vagues déchaînées. Alors autant participer au cyclone non ? Zones de hautes et basses pressions, à toi d’engranger le vent dévastateur.

Qui sait, peut-être pourrais-tu y survivre ?

Qui sait. Peut-être pourraient-ils y succomber.

Non, pas d’oubli. Ce n’est pas une question.

« Chaque fois que tu auras l’impression de te faire submerger, je serais là. Tu ne te noieras plus. »

Du moins pourrais-je l’imaginer.

Certaines personnes vous accompagnent à travers les flammes de la vie, la fureur de l’existence. Il ne suffit pas qu’elles soient là physiquement, il suffit que ce soit vrai, qu’importe leur absence, qu’importe la distance, qu’importe le camp dans lequel il faudra avancer. Qu’importe la solitude. Elle sera là, quelque part.
Je t’emporterai dans le fond d’une poche. C’est ça non ?
Garde la toupie va. J’ai mieux.

Les mains toujours dans les siennes, son regard dans le sien, il ne la lâchait pas. Elle n’était pas la bouée, pas le bois flotté, elle était la lame sur laquelle les doigts se referment en pleine bataille. Le contact rassurant d’une arme qu’on sait posséder, à laquelle on s’accroche juste avant d’engager la prochaine lutte.
Elle n’était pas la survie providentielle mais celle qu’on arrache avec une fureur de vivre qui vous crame les veines, celle qu’on fait sienne, qu’on prend de force.

Et même s’il échouait, ça serait en emportant cette force dans la tombe.
Encore faudrait-il que l’échec soit une option envisageable.

«  Tu te sens capable de te remettre debout ? Prends ton temps. »

Je me sens capable d’aller lui fumer sa gueule à se fumier.

La réflexion n’était pas sortie, sa gorge toujours nouée refusait la communication orale. Mais il n’en avait pas besoin, car toutes ses cellules le hurlaient. Doigts entremêlés dans les siens, il s’était redressé sans un mot sans pour autant la lâcher. Le cœur cognant contre ses côtes, rageur d’une existence volée, il percutait sa cage thoracique avec une virulence scandant à l’affrontement. Ça n’était qu’une fois la baie vitrée passée qu’il l’avait lâchée.

Pourtant, la chaleur de ce contact restait imprégnée dans son épiderme.
Jusqu’au confins de ses contrées arides.

There Is Only One Thing We Say to Death...

- Topic fini ? -
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