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"Personne ne peut porter longtemps le masque" [ Logan ]

 :: Autour du monde :: Europe :: — France
Ven 17 Juil 2020 - 20:28
20 Mars 2016, Sud de la France.


« Pour leurrer le monde, ressemble au monde ; ressemble à l'innocente fleur, mais sois le serpent qu'elle cache. » William Shakespeare, MacBeth.






Tic, tac. Tic, tac.

Lorsqu’elle se leva ce jour-là, sa tête bourdonnait. Incessante fébrilité, entêtante instabilité. Ses pieds touchèrent le plancher de sa chambre. Une inspiration profonde, tête baissée. Cinq jours avaient passé depuis l’anniversaire, ce moment tant redouté. Une seule petite crise. Le monstre, à peine sorti, était retourné dans la trappe. Ce n’était pas assez. Elle le savait. Elle comptait les jours, les heures, les minutes. Elle arrivait. La prochaine. La vraie. Elle était même retournée dans son ancienne maison, avait parcouru les ombres du passé, avait tenté de la déclencher. Sans succès. La rage ne venait pas mais elle laissait la douleur planter ses dents dans son corps.
S’isoler. Serrer les dents.

Se lever. Mettre son uniforme. Petit-déjeuner. Inspiration. Expiration. Transplaner. Travailler. Mille et unes inspirations, expirations.

Tic, tac. Tic, tac.


Et cette phrase qui revenait…

« Kimura, ça va ? »

La ferme. La ferme, bon sang !
Grand sourire. Tout va bien. Tout va bien, vous voyez ? Non ? Vous ne voyez rien. Bien sûr que vous ne voyez rien. Mon costume m’étouffe. Mon masque pénètre ma chair à mesure que je l’y plonge de force. Inspiration, expiration. Elle se contenait. Elle pouvait tenir. Elle l’avait déjà fait. Une journée. Une journée à tenir. Rien que ça. Pas grand-chose. Pourquoi est-ce que mon coeur s’emballe ? Pourquoi est-ce que ma peau frémit ? J’entends mon pouls dans mes oreilles. J’entends l’orage gronder. Vous ne m’entendez pas hurler ? Tout en moi s’époumone. Vous êtes sourds. Aveugles. Tant mieux. Et tant pis. Et allez tous au diable !

Tic, tac. Tic, tac.

Ne pas s’arrêter. Ne pas s’arrêter. Ses mains s’activaient, sans relâche. De patient en patient, de naufrage en naufrage. Emporte moi la mer, je coule déjà.

Elle n’en pouvait plus de sourire. Quand serait-ce terminé ? Mâchoire serrée. Coeur étranglé. Elle devait tenir. Elle devait tenir. Respire. Respire. Oui, voilà, respire. Ne ne te laisse pas submerger. Fais le vide. Le néant.

Oh, oui ce néant ! Plonge. Tête baissée.

Non. Stop. Inspiration. Expiration.

Tic, tac. Tic, tac.

Une pause dans la journée. On respire. On se pose. Evade-toi.

Et sa tête qui bourdonnait de plus en plus…
Et son ventre qui était si noué qu’elle ne pouvait rien avaler. Elle avait la nausée. Oh, comme elle aurait aimé vomir tout ce qu’elle ressentait.

Masa. Masa...reviens. Je veux tes bras autour de moi, ta voix près de mon oreille. Je veux que tu contiennes l’orage comme tu le faisais si bien. Je veux mon ancienne vie. Je veux t’entendre, te parler. Pourquoi n’es-tu plus là ? Pourquoi tu m’as laissée ? Je suis perdue sans toi. Je me noie. Je me noie. Je me noie. Reviens. Je t’en supplie. Ton absence me tue. La douleur me terrifie. Et ma rage m’emporte, loin, loin, loin de toi et des autres. Je veux notre maison. Je veux toutes tes histoires, à nouveau, répétées comme les comptines du soir. Ton odeur. Ton amour. Ton regard bienveillant. Je tuerai n’importe qui pour les avoir rien qu’une dernière fois. Je boufferai le monde juste pour te revoir. Je me couperai les oreilles, les jambes et les doigts. J’enfoncerai dans mes yeux des couteaux pleins de sang. Je boirai du poison, je brûlerai des maisons. Reviens-moi.

Où était la Justice ?
Qui donnait un père si aimant pour le reprendre ensuite ?

Tic, tac. Tic, tac.

Fin de journée. Le soulagement. Éphémère. Dangereux. Ce n’était pas terminé. Elle transplana chez elle, jeta son sac, enleva son uniforme comme s’il lui brûlait la peau. Tout lui brûlait la peau aujourd’hui. Tout était insupportable. Chaque sourire qu’elle faisait, chaque brin de douceur dans sa voix...autant de lames insérées en son sein par sa propre main. Comme si elle enroulait des boulets à ses pieds, comme si elle entravait ses bras et ses jambes, cousait sa bouche pour que rien n’en sorte...elle se faisait mal. Elle se tuait. Parce qu’il fallait contenir tout ce qui menaçait d’échapper.

Elle entra dans sa salle de bain, posa ses deux mains sur le lavabo...ferma les yeux. Ses épaules roulèrent, son dos s’étira. Sa bouche entrouverte soufflait doucement : un, deux, un, deux, un, deux. On respire. On se calme. Un dernier effort. Elle n’y était pas allée hier, elle le devait aujourd’hui. Un autre patient. Rien qu’un dernier patient.

La sorcière se dirigea vers la baignoire. Ses mouvements étaient lents, coûteux. Une jambe, puis l’autre. Allez, quelques derniers efforts. Son regard était vague. Il fixait sa main qui actionnait le robinet. L’eau s’écoula, glacée sur sa peau. Mais elle ne sentait rien. Elle reconnaissait cette sensation. C’était l’avant. Le calme avant la tempête.

Tic, tac. Tic, tac.

Elle ferma les yeux. Ses mains s’activaient mais elle n’éprouvait rien, comme anesthésiée. Hors de la baignoire. Et ce bourdonnement qui n’en finissait pas ! Elle se sécha mécaniquement. Etait-elle encore dans son corps ? Elle ne savait plus. Sa peau était encore froide de l’eau glacée qui l’avait lavée. Il fallait bien geler le monstre en elle. Le ralentir.

Elle enfila une robe blanche qui enserrait sa taille comme un corset, boutonna les boutons du devant, laissant ses bras nus. Le costume parfait, n’est-ce pas ? Toute de blanche vêtue. Un petit ange. Une lune innocente. Qui pouvait douter ? Qui pouvait voir en cela une ironie cruelle ?

Qui ?

Ah, oui. Lui.
Son regard se durcit dans le miroir. Ses cheveux noirs, longs, lisses retombaient sur ses épaules et contrastaient avec le tissu immaculé de sa robe. Une inspiration, longue, profonde. Il lui fallait remettre le masque. Reprendre son rôle. Retrouver son contrôle. Juste une dernière fois aujourd’hui.  Au placard, le démon. Couche-toi, fais le mort. Car il est temps d’aller voir, l’ennemi de l’Espoir.

Elle prit son sac, ouvrit le frigo et transféra ce qu’elle avait préparé. Il ne mangerait peut-être pas. Mais tant pis. Il fallait bien essayer. La sorcière enfila son manteau gris.

Une inspiration, une expiration. En scène.

Un large sourire étira ses lèvres. Faux. Mécanique. Truqué.

Elle regarda sa montre.

Tic, tac. Tic, tac.

Et transplana.

CRAC.

La nuit était en train de tomber mais on voyait encore à l’horizon, là où la mer rencontrait le ciel, le soleil qui se couchait dans son halo orangé. Le salon familier se dessina autour d’elle.

« Bonsoir Logan. » dit-elle avec douceur.

Elle ne lui jeta pas un regard tout de suite, s’orienta vers la table sur laquelle elle posa, comme d’habitude, son sac et en déversa la nourriture qu’elle apportait toujours.

« Je t’ai apporté des scones. Je n’ai pas eu le temps de passer hier soir : je me suis retrouvée coincée dans une chambre froide. Manque de bol hein. Et aujourd’hui à l’hôpital, j’ai passé mon après-midi à tenter d’enlever un couteau de cuisine de la tête d’un gars qui avait énervé sa femme. Cette histoire a soulagé pas mal de mes collègues célibataires. » A mesure qu’elle parlait, elle enlevait sa veste, la posait sur une chaise, bien pliée. « Oh, et Alec progresse bien, au cas où tu te demanderai.  »

Le flot de paroles n’était pas tant pour lui que pour elle...Sa voix prenait des intonations joyeuses, amusées, mais un peu trop pressées.

Tic, tac. Tic, tac.

« Je ne peux pas rester longtemps. Je suis fatiguée. Tu as besoin de quelque chose ? »

Elle se retourna vite, sans arrêter son regard sur lui, analysant la pièce pour déceler des traces d’une nouvelle colère, mais rien. Bien. Parfait. Toujours pas de regard en sa direction. Elle l’évitait. De même que son esprit s’était fermé à l’instant où elle était apparue. Pas aujourd’hui. Oh, non, ce n’était pas le jour.

Sanae se dirigea vers la baie vitrée qu’elle ouvrit. La brise du soir vint soulever ses cheveux. Elle inspira. L’air de la mer. Voilà. On respire. Elle demeura là, la main posée sur la vitre fraîche tandis qu’elle s’était tournée vers l’horizon.

Tic, tac. Tic, tac.

Sur ses lèvres, trônait un léger sourire factice d’une gaieté falsifiée. Son doigt battait discrètement la mesure de son coeur contre la vitre.

Un regard vers sa montre.
Lèvres pincées.

« C’est dommage que tu ne profites pas pour sortir un peu...regarde cette vue, c’est magnifique. »


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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Sam 18 Juil 2020 - 10:25
Il est des combats qu’on ne se sent pas de mener, et des combats qui s’imposent sans qu’on puisse agir autrement que d’y céder. Logan connaissait aussi bien les uns que les autres, souffrant depuis l’enfance, de ces armes qui entaillaient depuis si longtemps ses poignets qu’elles semblaient ne faire qu’un avec ses os. Celles qui menaçaient de le briser lui aussi à chaque fois qu’il assenait certains coups, ceux d’une rare violence. Et pourtant, tout guerrier qu’il ait pu se sentir à certains moments de son existence, Logan savait qu’il y avait des batailles qu’il refusait actuellement de mener. Des affrontements dont il se cachait, couard et faible, pourtant enragé, déjà, d’avoir été laissé de côté. Avait-il réellement cessé de se battre, faisant une croix sur la guerre qui faisait rage et dans laquelle il s’était projeté, mu par le besoin d’obtenir vengeance, respect, pouvoir et une certaine dose de sang, il fallait l’avouer. Avait-il déposé les armes, s’enfermant dans les ombres, y abandonnant le monstre en lui ? Non. Il restait là, grondant en lui, réclamant encore en silence sa dose. Il s’insurgeait des injustice, brûlait de vivre de nouveau, vibrant de plaisir chaque fois qu’on le sollicitait ne serait-ce qu’un peu. Et c’était sans doute lui qui l’empêchait de mener une ultime bataille. De la perdre. De poser les armes pour une fois, sans chercher à se défendre, se justifier ou se protéger. S’exposer, enfin, et laisser les coups pleuvoir sans les parer. Il avait passé des mois ainsi, le corps et l’âme maltraités sans cesse, ça n’était pas pire non ? De tirer un trait sur l’une des choses qui lui avait permis de survivre.
Pourtant si elle venait actuellement, il savait qu’ils sombreraient tous deux de nouveau, qu’il ne pouvait faire ce pas. Logan savait ce que ça donnerait, simplement parce qu’ils étaient déjà passés par là tellement de fois. Parce que le monstre de rage grondait toujours. Parce qu’il allumait en lui la flamme de la résistance dès lors qu’il sentait un peu de répondant dans ses opposants. Il était là, ce besoin de destruction, cette envie furieuse de faire mal, de réveiller les démons des autres, d’être accompagné dans les ténèbres ne serais-ce qu’un peu. S’il faisait ça une ultime fois, il la détruirait parfaitement. Et après tout ce temps, après toutes ces plaies, il s’y refusait. Alors quelques fois, il avait choisi les ombres de sa propre conscience pour l’en protéger. La protéger de lui. Pas besoin pourtant, de posséder son don pour voir qu’aucune de ses décisions n’était vraiment salutaire pour la jeune femme. Mais il muselait encore le monstre qui dans l’ombre frissonnait de fureur, crocs sortis, prêts à réclamer sa dîme.

Logan restait là, immobile comme à son habitude, un verre de pur feu posé sur l’accoudoir, seulement contenu de ses doigts relâchés. Le regard braqué sur le ciel gris là dehors, qui posait sur les vagues les lueurs pâles de la fin de journée. Une sale journée.

Il n’avait pas réagit lorsque la jeune femme était apparue, ne posant pas son regard sur elle, ses doigts pourtant se crispant dans un réflexe lourd de sens. Combien de temps faudrait-il avait que ce craquement ne sonne son glas ? Avant qu’il ne s’agisse d’un ennemi ? Combien de temps avant la prochaine bataille ?

Par réflexe aussi, il avait remballé son esprit dès son apparition, comme un animal qui se cache, une force qu’il mettait en fait sous clé sans même réellement y penser. Animal sauvage depuis longtemps dompté. Pas besoin de ça d’ailleurs pour entendre ce que le timbre de la nouvelle arrivante cachait. Banalités, politesses acharnées. Elles passaient sur lui comme des griffes qui effleurent une peau bien trop réactive. Et là, en dessous, le monstre frissonnait.

« Je t’ai apporté des scones. Je n’ai pas eu le temps de passer hier soir : je me suis retrouvée coincée dans une chambre froide. Manque de bol hein. Et aujourd’hui à l’hôpital, j’ai passé mon après-midi à tenter d’enlever un couteau de cuisine de la tête d’un gars qui avait énervé sa femme. Cette histoire a soulagé pas mal de mes collègues célibataires. » A mesure qu’elle parlait, elle enlevait sa veste, la posait sur une chaise, bien pliée. « Oh, et Alec progresse bien, au cas où tu te demanderai.  »

Plate prose. Joyeuse mais pressée, elle lui faisait l’impression d’un petit animal virevoltant de toute part. De loin, on aurait pu penser à de la joie. De près, on y distinguait surtout de la peur. Alors, posant enfin son regard sur elle, Logan l’observait en silence se battre avec elle-même, se noyer dans sa joie feinte.

« Je ne peux pas rester longtemps. Je suis fatiguée. Tu as besoin de quelque chose ? »

Jamais son regard ne se posait sur lui, elle qui jusque là  en encaissait l’intensité le fuyait sans cesse. Pas besoin d’étendre son esprit pour comprendre que le sien était déjà sous clés, fermé depuis des heures sans doute. Réflexe immonde, auto censure. L’angoisse tordait parfois les tripes à l’idée de lâcher le contrôle quand la tempête sévissait. Oui, elle était fatiguée. Mais pas de cette triste banalité qu’elle s’acharnait à vouloir feindre.

J’aurais bien des cordes à te céder. De celles qui sauvent, de celles qui pendent. De celles qui martèlent la chaire et la décorent d’immondes flétrissures.
J’aimerai te voir à l’œuvre, lâcher les fauves, déclencher la tempête, cesser rien qu’une seconde d’être cette servante parfaite de la bienpensance et du savoir vivre.

« C’est dommage que tu ne profites pas pour sortir un peu...regarde cette vue, c’est magnifique. »
« C’est drôle, c’est exactement ce que je me disais. »

Dommage que tu n’en profites pas pour sortir un peu….

Il la voyait fébrile là où tous la pensaient calme. Au bord de la rupture, là où d’autres ne voyaient que les eaux miroitantes d’un lac tranquille. Mais elle n’était que le feu, la tempête acharnée qui battait sans cesse, déjà prête à voir sa peine, sa colère déferler sur le monde.

« Et toi Sanae.. tu as besoin de quelque chose ? »

D’un père.

Il savait, comprenait, se souvenait des joies et des peines qui entaillaient son esprit. Logan les avait fait siennes bien trop violemment pour les oublier si vite. Et, surtout, aujourd’hui d’autant plus, il comprenait la douleur de l’absence.

Combien voyaient derrière sa perfection ? Combien pouvaient sentir le monstre gronder, l’appeler là, sous la surface ?

Laisse moi vivre, laisse moi exister, laisse moi respirer quand aujourd’hui j’étouffe de ne pouvoir ressentir. Vois-tu les liens, la chape de plomb qui me maintien sous clé ? Quelle violence peut-on s’imposer pour étouffer le feu d’une vie endiguée ?
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Sam 18 Juil 2020 - 17:22
 Essayez donc de retenir un tsunami avec vos bras. Essayez donc d’empêcher l’eau de s’infiltrer. Essayez d’éviter tout ce qu’elle charriait sur son passage. Tout ce qu’elle ramenait était tranchant, heurtant sur le rivage tous les passants. Il y a des combats qu’on ne peut pas gagner. Des défaites impossibles à déjouer. Et pourtant, on se bat. On se tient debout face à l’orage et on lutte contre la pluie, le vent et le naufrage qui, devant nos yeux, s’annonce lentement.


Voilà qu’elle étouffait.  Tout était torture, tout était douleur. De sa robe serrée à son sourire forcé, tout la comprimait, la ratatinait. Mais quelle souffre, cette monstruosité qui tout à coup voulait pointer le bout de son nez. Disparaissez violence, rage et férocité. Vers la tombe, vers les asticots voraces prêts à vous dévorer. Allez, allez vers le cercueil et laissez la respirer.
Sa tête pointait encore à la surface, ses mains se débattaient. Bouche grande ouverte, yeux écarquillés. De l’air, de l’air, bon sang. Pourquoi fallait-il qu’il fasse si chaud ? Pourquoi fallait-il que son ventre se noue violemment ? Elle les sentait arriver, ces frissons, ces tremblements. Sur sa peau déjà, se dessinaient les échos de sa rage : elle grognait, grondait, s’élevait à mesure que les secondes défilaient, pressantes menaces qui tout bas susurraient.

Tic, tac. Tic, tac.

Elle le sentait, le poids de son regard. Incisif. Il savait. Il voyait. Comme elle aurait voulu lui crever les yeux là tout de suite...le faire taire, l’étouffer. Pourquoi était-elle venue ? Par principe, habitude. Entêtement absurde qui la menait tout droit dans la gueule du loup.

« C’est drôle, c’est exactement ce que je me disais. »

A quoi joues-tu Logan ?!

Mais la bête, déjà, ronronnait. Ses épaules roulaient, ses muscles s’étiraient...la trappe tremblotait, faisait grincer ses rouages rouillés. L’ébullition, sous couvercle, montait en intensité.
Son visage, à peine, lentement, se tourna à demi vers le sorcier. Un coup d’oeil en biais, un éclat menaçant. Son doigt sur la vitre arrêta son mouvement. Immobile, une statue de pierre, de marbre blanc. Et pourtant, son autre main vint agripper son ventre, serrer le tissu qu’elle tirait dans sa prise ; poigne tremblante, phalanges blanchies. Un souffle sortit de sa bouche entrouverte, il s’était échappé du sourire tissé douloureusement. Souffle empoisonné. Le sourire se fana.

Oui, sors. Sors, amuse-toi. Déploie tes ailes attachées dans ton dos. Sors ces griffes de ta peau. Transforme-toi, il n’attend que ça. Plante-lui dans les os la fureur qu’il instille. Il la veut ? Il l’aura  tout à lui.

Une inspiration.

« Et toi Sanae.. tu as besoin de quelque chose ? »


Tu le sais!

J'ai besoin de respirer. D’exulter. De me libérer.
Je suis fatiguée. Fatiguée de me battre.


Dans le fond des prunelles qui se dardaient soudainement sur lui, la pointe de la tempête scintillait, aveuglante. Sa mâchoire se serra, ses dents mordaient furieusement l’intérieur de ses joues.
La sorcière se détourna, fixa l’horizon. Elle fit rouler sa tête, craquer son cou. Sa main sur son ventre ne se desserrait pas. Contiens les vagues qui déferlent, contiens l’orage, contiens la tempête. Et pourtant, dans ta tête, résonnait le tonnerre. De plus en plus fort. De plus en plus souverain.

Le soleil se couchait sur la raison. Et la nuit réveillait les démons.

Tic...

Le bourdonnement revenait, à ses oreilles sourdes, et son crâne se fendait alors de mille cassures. La douleur la transperçait, la fatigue l’assommait. Assommait ses défenses, défonçait les barrières.

Sur la vitre où sa main reposait, ses ongles griffèrent la surface glissante. La vitre alors se mit à vibrer...du même feu qui sillonnait ses veines, qui faisaient frémir sa peau. Là, là...le vent se levait. Le ciel rugissait.

Tac…

C’était déjà trop tard.

« J’ai besoin…de me reposer. » Sa voix, hésitante, n’était qu’un souffle faiblard.

Un dernier mensonge. Ridicule tentative de préserver le personnage.

Elle ferma un instant les paupières.

La course qu’elle menait, elle l’avait déjà perdue. Les aiguilles agitées s’étaient toutes arrêtées. Temps suspendu. Pendule morte. La scène sous ses pieds s’écroulait dans un grondement sourd, le rideau se déchirait en lambeaux, le public quittait la salle en hurlant. Et elle, au milieu du tourment, voyait l'énorme vague arriver. Impétueuse mer profondément agitée.

Sa respiration se faisait frénétique. Non. Non. Pitié. Pas ça. Pas devant lui. Pas maintenant. Je dois partir. Je dois partir. Je n’en peux plus. Ma force me quitte. Ma volonté s’effrite. Je me gonfle, je me noie.
Tant de choses réprimées, enfoncées en elle-même qui voulaient s’exprimer. Vengeresse bête qui trop longtemps avait été dissimulée, elle reprenait son pouvoir. Et brutalement, agrippait ses mollets, la tirait vers la trappe pour l’y enfermer. A son tour ! A son tour de pleurer enchaînée !

Un pas en arrière, chancelant. Sa main quitta la vitre et rejoignit l’autre sur son ventre, fermement. Ses ongles s’enfoncèrent dans sa chair sans merci mais elle ne sentait plus la douleur. Ou alors, elle n’était que douleur et plus rien n’existait. Le vide de l’absence se remplissait d’une lave brûlante.  Elle la sentait s’infiltrer en elle, se déverser, brisant le barrage.

Les lumières de la pièce vacillèrent, clignotèrent. Le théâtre allait s’écrouler tout entier.

« Je crois que...je n’aurais pas du...venir. »

Ses lèvres tremblotaient. Des frissons sur sa peau dressaient tous ses poils.

Un autre pas en arrière. Des coups à l’estomac la faisaient reculer. Sa poitrine enserrée, se soulevait douloureusement, haletante, rugissante. Son coeur allait exploser, s’échapper. La panique. La voilà. Elle venait l’engloutir comme à chaque fois. La peur. La terreur. L’angoisse. Dans la vitre juste en face, son reflet monstrueux. Celui de l’impuissance, celui de l’échec...elle ne pourrait jamais se contrôler. Elle ne pourrait jamais être normal. Tous ses efforts, réduits à néant. Tous les entraînements, les méditations…remparts vains.

Sa main agrippa le coin de la table et tout sur celle-ci se mit à trembler à son tour. Tout ce qu’elle touchait, tout ce qui l’entourait semblait absorber sa rage. Les scones dans la petite assiette sursautaient. Bruit de vaisselle sur le point de se casser.

Une grimace de douleur, de chagrin, de fureur transforma ses traits. Les dents serrées, elle secouait la tête, refusant de céder. Non. NON !

« Il faut que...je parte. »

Il le fallait, oui. Il fallait qu’en prenne la fuite. Le regret la mordait violemment. Elle pensait qu’elle aurait eu plus de temps. Plus de temps pour combattre. Plus d’énergie. Elle ne pouvait plus tenir le masque, plus donner son spectacle. Le seul spectateur demeurait là, à attendre...qu’enfin elle termine son acte. Et de toutes ses forces, elle tentait de contrer les attaques. Sa respiration se coupa et son corps se pencha. Allez, cesse tes caprices monstre que tu es. Ne sors pas. N’écoute pas le doux son de sa voix. Il est poison et toi aussi...de concert vous parlez, alliés contre mon gré.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Sam 18 Juil 2020 - 19:27
La surface craquelle, se fend. Combien de temps avant de céder ? Combien de suppliques devra-t-elle subir encore avant d’entendre sa complainte, combien de cris muets de la bête aux aguets ? Oui, Logan l’observait en silence, nul besoin d’étendre son âme pour toucher la sienne, il savait la lave qui gisait sous la surface et qui, enfin, s’y mettait en mouvement, incapable de supporter plus encore le sort étriqué que sa geôlière lui imposait. Il s’y connaissait en cage, y avait passé bien des semaines, des mois, des années même. Il s’y était enfermé très jeune pour correspondre comme elle le faisait, comme le faisaient tous les jeunes atteints de ce monstre en sommeil. Elle s’imposait un carcan d’une perfection qu’il jugeait immonde, oppressante.  Légitime mais si peu respectueuse. Le genre de vernis dont il aimait érafler la pureté juste pour découvrir ce qu’il y avait en dessous. Mais il savait cette fois. Il y avait eu accès avant même d’en comprendre les faux-semblants.

Que dirait la bête si elle pouvait enfin s’exprimer ? Est-ce qu’il serait seulement revenu à la surface s’il n’en avait pas goûté l’amertume ? Si la violence de cet être tellement viscéral ne réveillait pas en lui des envies aussi cruelles qu’acides ? Pourquoi ces grondements sourds suffisaient à l’éveiller, faisant vibrer en lui la corde de la discorde, celle de la joie froide qu’un affrontement pouvait déclencher. Celle d’un animal qui rencontre enfin son égal.

Etait-ce  pour ça qu’il appréciait la compagnie du vampire ? Qu’il proposait son aide à Enzo et Jakob des années auparavant ? Que l’acharnement de la lutte face à Azalea la grisait tant alors enfant ?

Parce que les bêtes se reconnaissent et s’enivrent l’une l’autre ?

Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.

Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.

Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront :
« Il est l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous ; enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. »
Baudelaire

De vertu elle s’était drapée, ça ne faisait aucun doute, ivre également, de cette perfection inatteignable qu’elle revêtait sans cesse. Mais de quoi le monstre avait-il besoin pour s’assagir ? Comment le tenir sous clé si vous le retenez en otage ?

Logan avait pris cette place… il ne pouvait que savoir comme l’envie de hurler, de détruire pouvait vous racler les veines lorsqu’enfin la liberté se présentait.
Alors il ne pouvait contenir un sourire lorsque le sien était venu écailler la surface, se faisant cruel sur ces lèvres toujours si bienveillantes car éclairé de ces prunelles de flammes. Enfin la voilà, l’horreur qui couve sous la surface, celle qui gronde et se débat.
Pourtant elle la contient sans cesse, se bat jusqu’à l’insoutenable, l’isole, la couve sans trêve. Mais chaque geste est une défaite, tant ces doigts qui griffent la vitre que cette tête qui roule, lâchant un craquement sinistre comme le bois lâchant sous les coups de son agresseur. Sors de la boite, abomination, vient trouver le soleil dont tu t’es si longtemps caché.

« J’ai besoin…de me reposer. »

C’est faux. Mais il n’avait pas besoin de relever le mensonge pour que celui-ci résonne dans le silence comme une ultime négation. Veine affirmation.
Sans doute aurait-il dû faire quelque chose, parler doucement, la rassurer, lui dire que tout irait bien. C’était d’ailleurs ce que toute personne normalement constituée ferait.

Mais que voulez-vous, comme elle, ils avaient foiré la conception.

« Je crois que...je n’aurais pas du...venir. »
« Sans doute pas non. »

Calmement, Logan se levait, observant comme un spectateur attentif la surface se craqueler tout à fait, les lumières de la pièce vaciller, la vitre vibrer alors qu’elle semblait plier sous la puissance de cette tempête qu’elle gardait sous clé. La détresse se peignait sous ses traits, semblant le laisser plus curieux qu’indifférent, posant calmement son verre sur la table qu’elle agrippait comme un noyé s’accrochait à sa bouée. Il vint rejoindre la vaisselle éprouvée, tintant avec le reste alors que Logan la rejoignait à pas mesurés.

« Il faut que...je parte. »

Dents serrés, visage noué, corps percluse d’une douleur indue. Pourquoi fallait-ils qu’ils s’imposent cela ?

« Ce qui est drôle, c’est que tu es souple et subtile dans ta pratique de la légimencie, et affreusement rigide et implacable dans l’occlumencie… ce que je conçois. » Un sourire un peu narquois. Elle le savait, tout comme il la comprenait mieux que quiconque. « Mais tu ne peux pas te torturer comme ça à vie. Tu es une entité complète, nier une partie de toi n’a pas de sens. »

Elle n’avait pas eu le temps de transplaner qu’il accrochait ses bras, imprimant sur sa chair assez de force pour lui indiquer qu’où qu’elle aille, il suivrait, ne pouvait se détacher de ce qu’elle craignait le plus : un regard extérieur braqué sur elle dans la crise. Le bateau ploie sous les vagues, menace de sombrer.
Alors il l’avait redressée, lui refusant ce choix, plantant en elle ses prunelles sombres aux reflets d’acier.

« Partir ne t’avancera à rien, te fuir le tourmente. Il faut que tu lâches Sanae, pas que tu t’endigues. Sans apprendre tes propres limites et celles des autres comment veux-tu te connaître assez pour te maîtriser ? » Quand l’enseignante devient élève, que le professeur retrouve son rôle plus naturellement qu’il ne l’aurait pensé, cessant soudainement d’être l’homme brisé, affrontant la tempête sans ciller.« Tu penses vraiment pouvoir me détruire ? Essayes seulement de m’abattre, trop ont déjà tenté le coup. Personne ne peut se contenir à jamais. »

Cette fois, il s’adressait directement à la lave qui déferlait en elle. Celle qu’elle contenait depuis si longtemps, celle dont elle craignait l’impact. Tu voulais un adversaire à ta mesure ? Un homme que tu ne briserais pas ? Il est là. Et enfin son cœur s’acharne, se réveille au son du danger. La joie cruelle en lui sommeil de nouveau lutter.
Et quoi ? Si jamais je me trompe, je glisserai seulement enfin dans les ténèbres et cesserait de porter des armes qui me sont étrangères.

« Déferle, brise les digues, déchaines-toi. S’il y a quelqu’un qui peut y survivre c’est moi. »

Tu as mon autorisation, arrête de jouer les poupées de cire parfaites et lisses.

Allume la mèche, brise le silence, déchaîne la foudre.
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Dim 19 Juil 2020 - 10:38
Morne esprit, autrefois amoureux de la lutte,
L'Espoir, dont l'éperon attisait ton ardeur,
Ne veut plus t'enfourcher ! Couche-toi sans pudeur,
Vieux cheval dont le pied à chaque obstacle butte.

Résigne-toi, mon cœur ; dors ton sommeil de brute.

Esprit vaincu, fourbu ! Pour toi, vieux maraudeur,
L'amour n'a plus de goût, non plus que la dispute ;
Adieu donc, chants du cuivre et soupirs de la flûte !
Plaisirs, ne tentez plus un coeur sombre et boudeur !

Le Printemps adorable a perdu son odeur !

Et le Temps m'engloutit minute par minute,
Comme la neige immense un corps pris de roideur ;
Je contemple d'en haut le globe en sa rondeur
Et je n'y cherche plus l'abri d'une cahute.

Avalanche, veux-tu m'emporter dans ta chute ?

Le goût du néant, Charles Baudelaire.








Un vent s’engouffra dans la pièce, fraîcheur du dehors qui venait mordre ses bras nus, son visage crispé. Mais le froid, impuissant, n’avait plus de pouvoir. Elle était lave, elle était flamme. Elle brûlait, crépitait, se consumait à mesure que le monstre avançait. Lui ? Elle ? Elle ne savait plus quel monstre elle craignait. N’étaient-ils pas les mêmes ? N’était-ce pas son reflet ?
Il s’était rapproché, mais elle le voyait trouble. Tout en elle résistait. Ce n’était qu’une silhouette, une forme imprécise dont elle sentait, plus que jamais, la chaleur l’incendier. Tout près d’elle, il aurait pu la brûler. Mais n’était-elle pas elle-même le feu ? Deux brasiers ne pouvaient pas s’étouffer ; ils se rejoignaient, s’engluaient l’un dans l’autre, se muaient. Etait-ce cela dont elle avait peur ? Ou était-ce l’aveu, insupportable, odieux, qu’elle n’avait plus de contrôle ? Il le savait pourtant. Il savait tout. Il avait tout vu de son être, tout compris de sa tête. Aucun secret, aucun recoin étroit ne lui avait échappé. Et pourtant, têtue, bornée, la sorcière continuait à vouloir entretenir l’illusion, à vouloir le persuader. Vaine tentative, vain mensonge. On ne mentait pas à un homme comme lui. On ne mentait pas à son reflet. Le miroir, intraitable, n’était pas corruptible.

« Ce qui est drôle, c’est que tu es souple et subtile dans ta pratique de la légimencie, et affreusement rigide et implacable dans l’occlumencie… ce que je conçois. »

Il souriait, narquois. Chut, tais-toi.
Sa main quitta la table, et d’un même geste avec l’autre, elles vinrent s’enrouler sur elle-même. Deux bras croisés sur sa poitrine, agrippant ses propres épaules. Dernier barrage pour la Bête. Dernier entêtement. Son visage se détourna, rideau de cheveux qui dissimulait l’effroi, la douleur, et tapis sous la surface, le monstre souriant. Elle ferma les yeux. Tout pour se couper de lui. Résister. Oui, elle s’était barricadée, avait fermé toutes les portes, les fenêtres, les volets. Et dans cette maison plongée dans l’obscurité, elle hurlait, hurlait. Elle se cognait contre les murs, s’arrachait les cheveux. Et voilà que soudain, la clé dans la serrure...tournait...tournait...dans un cliquetis effrayant. Un grincement. La porte s’ouvrait. On venait la chercher.

« Mais tu ne peux pas te torturer comme ça à vie. Tu es une entité complète, nier une partie de toi n’a pas de sens. »

Complète. L’avait-elle seulement déjà été ? Petite, peut-être, avant tout ça, avant de se conformer aux usages, aux conventions. Il avait raison. Elle se torturait, littéralement. Elle refusait d’accepter cette autre part d’elle-même, ne voulait pas en entendre parler. Nier, occulter, jusqu’à l’irrépressible moment où tout en elle libérait ses démons, et la laissait, brisée, écoeurée, épuisée, sur le sol froid et dur, dans une marre de son sang que les barreaux, trop profondément enfoncés, avaient brutalement fait coulé. Ça n’avait pas de sens ? Si, si ça en avait ! Parce qu’elle ne voulait pas ça. Elle ne voulait pas de cette chose qui en elle grondait. N’était-ce pourtant pas sa force, sa puissance, son ardeur ? Etait-ce ce qui l’avait fait tenir dans le mal ? Ou son origine ? Si elle n’avait pas été ainsi, peut-être aurait-elle été adoptée bien plus tôt, peut-être n’aurait-elle pas été pointée du doigt, détestée, isolée ? Elle n’aurait pas rencontré Masa, n’aurait jamais connu un lien si fort, un amour si fiable. Mais alors, elle n’aurait pas non plus connu la chute, douloureuse, de sa mort. Qui blâmer ? Etait-ce sa force ou sa faiblesse ? Comment décider ?
Le choix, néanmoins, avait déjà été fait. Le mauvais. Elle avait choisi de se réprimer, de s’entailler pour cacher l’autre partie de son visage. Voilà qu’à présent, la décision insufflait son venin dans ses veines : la conséquence, implacable, dessinait son destin. Une vie entière comme ça ? Impossible. Elle ne tiendrait pas. Elle se foutrait en l’air, s’arracherait l’âme. Avait-il raison alors ? Devait-elle l’écouter ? Mais comment désormais, libérer tout ce qu’elle gardait sous clé ? Et si les vannes, trop longtemps fermées, habituées à ne déverser qu’un de leur force, petite crise par petite crise, déversaient cette fois-ci les immondices de son être tout entier?

Il s’approcha davantage. Elle serra les dents plus encore. Crispée, tremblante, les ongles s’enfonçant dans sa peau nue, faisant couler les premières gouttes du liquide chaud mais acide qui coulait dans ses veines.

Penchée en avant, elle sentit deux mains l’agripper. Un contact, brûlant contre sa chaire. Oh, la Bête rugit. Le piège se refermait. Il la redressa fermement. La sorcière tourna vivement la tête vers lui, d’un seul coup, le foudroyant de l’orage qui allait déferler. Et son regard à lui, fait d’acier, fixait au plus profond d’elle ce qui était de plus laid. C’était fini, elle le savait. Elle ne pouvait plus fuir.

« Partir ne t’avancera à rien, te fuir le tourmente. Il faut que tu lâches Sanae, pas que tu t’endigues. Sans apprendre tes propres limites et celles des autres comment veux-tu te connaître assez pour te maîtriser ? »

Voulait-elle seulement se connaître ? Voulait-elle seulement se regarder, bien en face, sans rien occulter ?

« J’ai peur... » lâcha-t-elle dans un gémissement de douleur, lèvres tremblantes.

Ses traits se tirèrent plus douloureusement encore, comme une supplique, comme une prière silencieuse. Ne fais pas ça, s’il te plait.

« Tu penses vraiment pouvoir me détruire ? Essayes seulement de m’abattre, trop ont déjà tenté le coup. Personne ne peut se contenir à jamais. »


Ah oui ?
Vraiment ?


Le monstre en elle s’étirait. C’était fini. Elle avait perdu. Pour la première fois depuis toujours, on s’adressait à lui. Pour la première fois, on l’encourageait. On le saluait. La terreur dans les yeux de Sanae vacilla un instant, l’éclat de ses prunelles s’intensifiant. Tout autour d’elle s’affolait : chaises renversées, miroir fissuré, tout craquelait et dansait...une bourrasque venait faire frémir les murs. Ses paupières se fermèrent, toutes plissées, forcées de couper ce lien qui les unissait.

NON !
Tu vas le blesser
.

Pourtant, il ne cille pas. Il n’a pas peur. Pas de terreur, pas d’horreur dans ce regard si dur. Regarde comme il est vrai. Regarde comme il s’assume. Tu m’étouffes avec tes discours, avec ton optimisme pur. Poupée de mensonges, le charme n’opère plus. Je n’en peux plus de la camisole, je n’en peux plus de la cage ! Tu nous fatigues, tu nous affaiblis ! Tu nous prives de tout notre pouvoir ! Dis à ta bienséance, à ta morale de se soumettre. Et laisse-moi le rejoindre, laisse-moi lui montrer. Nous verrons bien s’il tient. Il est le seul qui peut faire ça. Il est le seul ici bas. Cesse ta dictature, je vais te montrer l’horreur de ma révolution.


« Déferle, brise les digues, déchaines-toi. S’il y a quelqu’un qui peut y survivre c’est moi. »

Entrainée dans la trappe, elle hurlait en tentant de se raccrocher à tout autour d’elle, chaque souvenir heureux, chaque pensée rassurante. En vain. Le monstre la balança dans la cage. Et plus rien.

Tout s’arrêta. D’un seul coup, plus de vibrations, plus de secousses. Le calme plat. L’extinction des lumières. Un souffle dans la pénombre, le sien, soulevait les quelques mèches qui barraient son visage.

Et puis...et puis...tout aussi brusquement, un long hurlement terrible s’éleva. Le dernier rempart venait de lâcher. Sa bouche grande ouverte vomissait par un cri la douleur. Elle lui cisailla le corps, lui fendit le crâne.

Tout se ralluma, flamboyante lumière.

Ses muscles se tendirent, mais pas de contrainte. Ils se préparaient. Et d’un geste vif, ses mains vinrent encercler les poignets du sorcier d’une poigne cruelle. Oh, oui, elle la sentait la prendre toute entière, cette envie, cette force, ce feu puissamment libéré.

ENFIN !

Elle planta ses ongles dans sa chaire et ses paupières s’ouvrirent : rougeoyantes pupilles enragées qui venaient transpercer sans remord celles du sorcier. Elles semblaient vouloir pénétrer son âme violemment, flammes dansantes qui festoyaient dans le noir.

Je suis là ! Tu m’as appelé ! Me voilà.

Un odieux sourire étira ses lèvres. Goguenard. Moqueur. Malin.

« Oh, Logan...l’ignoble erreur... » ricana-t-elle.

Un gémissement de rage.

« Tu veux jouer ? Jouons ! »

Et toute la force de son être tenta de fissurer la Muraille. Cet esprit si puissant qui lui refusait l’entrée, ce mur, narquois, qui l’avait tant tenté. Elle voulait tout casser, briser les murs de son âme. Ses mains lâchèrent ses poignets pour s’enfoncer dans les épaules de Logan, elle le maintenait dans sa prise : le duel commençait. Je vais te faire saigner ! Elle enfonçait plus profondément ses ongles, faisait déferler toute la puissance de son esprit sur lui comme des vagues monstrueuses, des éclairs éblouissants qui venaient frapper les barrières, s’abattant, s’abattant, encore et encore dans une rage folle ; et d’un même mouvement, comme pour le faire ployer, son corps avançait à contre courant, pour le faire reculer. Ses jambes, ses bras, tendus de toute sa force, sa fureur et sa rage mêlées. Trois têtes immondes du monstre libéré. Et dans ses yeux, le message était clair : regarde ma force, regarde comme je l’aime...je veux tout, je veux fracasser. Mutiler. Disloquer. A moi le pouvoir ! C’est mon heure, c’est mon droit.

Des objets s’envolèrent autour d’eux dans un tourbillon furieux, les heurtant au passage. Elle s’en fichait d’avoir mal, elle n’était déjà que douleur. Elle voulait exulter. Elle voulait se consumer. Et l’entraîner, avec elle, puisqu’il le voulait tant, puisqu’il l’avait invoquée. Ou était-ce le contraire ? Avalanche, veux-tu m’emporter dans ta chute ?

« Tu vas regretter la petite poupée, celle qui se soumettait devant toi, qui te berçait de douceur et de foi.  Je me suis retenue trop longtemps. Tu as soufflé sur les braises alors me voilà. Tu m’as trop tentée. »
cracha-t-elle d’une voix qui fit trembler les murs. Dans son ton, tout suintait le plaisir de la cruauté, la satisfaction de se sentir libre, de ne plus se cacher. « Regarde comme elle m’affuble, toute de blanc vêtue ! Une sainte du mensonge.» cria-t-elle. Elle arracha alors ses ongles à sa peau, ensanglantés, et traça des lignes de sang sur sa robe blanche. « Là, c’est mieux, n’est-ce pas ? » Un rictus mauvais. « C’est ça que tu voulais ? Tu te sentais seul ? ». Elle parlait, mais ce n’était pas pour rien. Elle voulait le distraire parce que sans scrupules, continuaient à affluer les attaques, incessantes. Et pourtant, pas une seule fois elle ne mentait. La libération du mensonge. Le soulagement, atroce et excitant. « J’ai passé trop longtemps dans le noir Logan, je grignote des minutes de liberté comme on mendie du pain ! Cela fait longtemps que j’ai faim mais tout ce qu’elle me donne c’est de l’espoir ET JE LE VOMIS! Elle me tyrannise et moi je veux qu’on me laisse exister. Mais elle a honte, elle me trouve laide une fois libérée. »

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Dim 19 Juil 2020 - 13:03
Combien de tempêtes étouffées, combien de liens enserrés dans ses chaires pour ses retenir sans cesse, ne cessant de compression l’horreur chaque jour un peu plus fort pour qu’enfin elle se taise ? Il l’y avait trouvée bien sûr, l’avait observée alors même qu’il ne n’était plus lui-même que force brute. Enragée, délaissée. Des mois passés en détention, à retenir les coups, attendant le moment pour libérer ses démons, attendant la faille, monstre tapis dans l’ombre, il n’avait pu lâcher les fauves, libéré avant de déferler sur le monde. Serait-il mort là-bas sans mener son ultime combat ? Si la Garde n’était pas arrivée ? Ou auraient-ils fini par faire une erreur, le pensant trop épuisé, brisé, achevé ? Auraient-ils fini par se prendre la vague, arrachés jusqu’à l’os sous le coup de sa tempête ? Se serait-il tenu seul dans un chaos infini, la peau trempé du sang d’étrangers ? Ça changerait de ses balafres, des semaines passées à sentir le sien goutter au sol. La vengeance, sourde et muette, grondait toujours en lui.
Pourtant, il pensait avoir posé une chape sur ces braises. Il pensait être à terre, anéantis, épuisé de toute volonté de lutte. Mais il avait suffit de l’entrevoir, ce monstre miroir, cette horreur qu’elle masquait avec tant de forces. Et déjà, les muscles du sien roulaient sous sa peau, frissonnant de désir.

« J’ai peur... »
« L’inconnu fait peur. »

Sans lâcher les vannes, sans te connaître, sans savoir ce dont tu es capable, comment faire pour t’affronter toi-même ? Comment connaître la pression à exercer, savoir en jouer au cours du temps, ni trop brute, ni trop souple ? Allez, laisse sortir la lave Sanae, ce monstre est resté en cage trop longtemps, il a besoin d’air car toi aussi tu étouffes.

Etait-ce pour l’aider ou la blesser qu’il agissait ainsi ? En toute honnêteté, il n’aurait su le dire. Peut-être juste pour se détruire. Peut-être cherchait-il le suicide, qu’elle le dévaste, détruise chaque bride de son esprit, étouffe sa raison et ses émotions, annihile enfin toute parcelle de son être. Etait-ce un ultime sursaut d’autodestruction plus encore qu’une envie de lutter de nouveau ?

Il aurait pu désigner l’instant exact où la dernière digue s’était effondrée, une fraction avant que tout ne cesse autour de lui. En un souffle, le chaos s’était tu, comme l’œil du cyclone, le calme avant la catastrophe, vous laissant cette impression étrange de danger lorsque plus un bruit, plus un animal ne s’exprime. Trop calme. Cerveau reptilien. La proie aurait dû avoir peur ; pour autant, il exultait, un petit sourire mauvais se dessinant doucement au coin de ses lèvres. Et là, elle hurlait, brusquement, rageusement, tandis qu’il ne la lâchait pas, ne cillant pas, le regard toujours braqué sur elle, calme face au cataclysme. Et soudainement, tout autour d’eux se rallumait. Et là, brutale, elle se mettait enfin en mouvement, ses prunelles rougeoyantes dans les siennes, ses bras vifs qui repoussaient l’enserrement de ses doigts, cognaient contre ses os pour venir refermer les siens sur ses poignets comme les serres d’un aigle, plantant dans sa chaire les griffes de la victoire.

Et ce sourire qui apparaissait en miroir au sien, plus puissant pourtant, victorieux, heureux d’être enfin libéré.

« Oh, Logan...l’ignoble erreur... »

Un petit rire amusé. « Présent. » C’est moi.

On n’avait cessé de le lui dire, il s’était construit autour de cette identité, l’assumait parfaitement, conscient qu’il n’était pas le seul ici à avoir grandit ainsi, son regard amusé le pointant du doigt sans même lui faire l’affront de le souligner.

Et elle gémissait comme un animal prêt à frapper. Et il en frémissait de joie.

« Tu veux jouer ? Jouons ! »

Choc brutal, immonde, exaltant, faisant à peine vibrer la muraille de son esprit, son regard ne la quittait pas. Roc sourd aux attaques, indomptable, infranchissable. Encore Sanae, plus fort si tu veux réussir. Il la voyait tout à la fois alors que ses attaques se brisaient contre ses digues comme les vagues en pleine tempête. Elle lâchait ses poignets, délaissait ses os pour enfoncer ses doigts dans ses épaules sans qu’il ne réagisse, la laissant faire, se délectant de l’affreuse douleur plantée en lui tant sur sa chaire que dans son âme, les coups ne cessant de pleuvoir. Et cette joie sauvage qui l’emplissait brutalement, emportant tout sur son passage à mesure qu’elle grandissait de la voir ainsi. Adieu le désespoir, au revoir l’apathie, il s’allumait enfin.

Enivrez-vous, oui mais de rage, de douleur et de destruction. Baudelaire n’aurait sans doute pas voulu s’exprimer ainsi n’est-ce pas ?

Sourire affreux, immonde, jouissif alors qu’autour d’eux la tempête faisait rage, les frappant au passage alors qu’il reculait, un sourire amusé bloqué sur le visage. Se laisser faire ? Plus ou moins. Il la laissait l’imprégner de sa violence, s’en délectant. Souffle de vie amer dont il s’étonnait d’être affamé.

« Tu vas regretter la petite poupée, celle qui se soumettait devant toi, qui te berçait de douceur et de foi.  Je me suis retenue trop longtemps. Tu as soufflé sur les braises alors me voilà. Tu m’as trop tentée. »
« La douceur et la foi ne m’ont jamais tenté. Je doute de les regretter. »

Encore, frappe plus fort enfin ! Voilà qui sentait vibrer les barricades de son esprit. Voilà qu’il les sentait gémir. Ah, voilà, on y est. Déverse-toi, elles ne sont pas encore prêtes à céder.

« Regarde comme elle m’affuble, toute de blanc vêtue ! Une sainte du mensonge.»

Une dernière tentative ridicule pour se persuader d’être ce qu’elle n’était pas. Alors il souriait de cet avis commun, de cette ressemblance immonde qui les unissait. Elle arrachait brutalement ses ongles de sa chaire, dessinant de son sang les griffures de la cruauté, le refus de cette pureté immonde qu’elle s’imposait sans cesse. Il l’avait sentie contre sa peau, ces brides de pouvoir déchainées qui déchiquetaient son épiderme alors qu’elle appuyait. Ingérable. Comme l’était Sovahnn à son réveil. Rien de bien étonnant la connaissant.

« Là, c’est mieux, n’est-ce pas ? » Un rictus mauvais. « C’est ça que tu voulais ? Tu te sentais seul ? ».
« Pas parfait mais mieux. L’hypocrisie ne te va pas Sana, pas besoin de t’en draper, la fureur te va mieux. »

Elle est puissante, indomptable, violente. Bien plus plaisante que l’ennuyante pudeur d’une âme masquée.

« J’ai passé trop longtemps dans le noir Logan, je grignote des minutes de liberté comme on mendie du pain ! Cela fait longtemps que j’ai faim mais tout ce qu’elle me donne c’est de l’espoir ET JE LE VOMIS! Elle me tyrannise et moi je veux qu’on me laisse exister. Mais elle a honte, elle me trouve laide une fois libérée. »
« Elle te laissera exister pourtant, elle en a besoin autant que toi. Ça la brisera de l’être que cette pauvre chose plate et lisse, victime de tous les maux. Mais pour ça il vous faudra apprendre à cohabiter. »

Le rictus, ils le partageaient. Pourtant il ne l’encourageait pas à détruire l’autre, simplement à s’accepter.

« Pas besoin d’espoir ni de chaînes face à moi. »

Tu veux me sentir plier, briser mes os, dominer mes pensées. Tu veux t’insinuer, tout dévaster. Fait.

Pourtant, dans une onde destructrice, il repoussait soudainement une attaque, la prenant de court, lui souriant comme un loup enragé, démontrant qu’il lui fallait pousser plus loin pour espérer effriter la surface.
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M. Logan Rivers
Lun 20 Juil 2020 - 0:59

Je suis comme le roi d'un pays pluvieux,
Riche, mais impuissant, jeune et pourtant très vieux,
Qui, de ses précepteurs méprisant les courbettes,
S'ennuie avec ses chiens comme avec d'autres bêtes.
Rien ne peut l'égayer, ni gibier, ni faucon,
Ni son peuple mourant en face du balcon.
Du bouffon favori la grotesque ballade
Ne distrait plus le front de ce cruel malade ;
Son lit fleurdelisé se transforme en tombeau,
Et les dames d'atour, pour qui tout prince est beau,
Ne savent plus trouver d'impudique toilette
Pour tirer un souris de ce jeune squelette.
Le savant qui lui fait de l'or n'a jamais pu
De son être extirper l'élément corrompu,
Et dans ces bains de sang qui des Romains nous viennent,
Et dont sur leurs vieux jours les puissants se souviennent,
Il n'a su réchauffer ce cadavre hébété
Où coule au lieu de sang l'eau verte du Léthé.

Charles Baudelaire, Les fleurs du mal.




Il s’éveillait. Comme un dragon trop longtemps endormi, son souffle meurtri ne donnait plus de feu. Il se mourrait, las, de tout ce qu’on lui avait fait. Il avait pris sur son dos des charges bien lourdes, des troupeaux, des hordes, qui tombées de si haut, n’avaient pu s’en sortir. Déchargé de ce poids, mais les ailes flétries, il avait fermé ses yeux, perdu son envie. Le renoncement, l’aphasie. Mais voilà que d’un sommeil profond, s’éveillait en sursaut le dragon. Dans ses yeux résonnaient des batailles passées, perdues, abandonnées. Et quand dans le ciel s’annonçait, dans un grognement sourd, le passage d’un autre, d’un dragon de retour...il s’étendait, ailes déployées, tendait sa longue nuque, ouvrait sa grande gueule béante, et d’un rugissement reprenait son envol. Un frisson. Un grésillement. Les deux dragons se mouvaient à l’unisson. Ils s’étaient reconnus et d’un seul mouvement, éperdus, plongeaient l’un dans l’autre sans retenue. Voyez leurs ailes battre, voyez le ciel s’assombrir. Leur rencontre, brutale, sonnait un son de cloche grave : allaient-ils se tuer, s’abattre ? Ou alors les dragons, sous le même blason, brûleraient d’un même souffle, d’un même feu, tout ce qui s’étendait par-dessous leurs silhouettes, menaçantes, inquiétantes, et sur les toits des maisons, leurs ombres jumelles danseraient toutes les deux ?

Le savait-il dès lors qu’ils s’étaient rencontrés ? Le savait-elle ? Qui des deux avait réveillé l’émoi ? Qui des deux appréciaient tant l’effroi ? Lui, elle. Tout se mélangeait ; elle ne savait plus qui avait commencé. Un dragon libéré, un dragon réveillé. Lequel était lequel ? N’était-il pas en train de se libérer lui aussi ? N’était-ce pas pour cela qu’il avait fait sonné son appel ?

Il l’avait encouragé à briser ses chaînes, à libérer ses ailes tremblantes.

« L’inconnu fait peur. »


Oui, l’inconnu. Elle. C’était elle cette inconnue. Cette part d’elle-même qu’elle avait tant morcelée, enfermée, noyée dans les tréfonds de son être. Elle l’avait piégée dans les sous-terrains de sa maison, dix étages plus bas que le sol, dans la trappe aujourd’hui grande ouverte. Son esprit, tout entier, avait créé l’illusion : une belle maison, au jardin bariolé, entouré de verdure sur laquelle festoyaient tous ses souvenirs heureux, toutes ses émotions lisses, imperturbable fête dont on s’enivrait à loisir. Ses hobbies, son travail, tous les plateaux dorés sur lesquels s’étendaient des mets délicieux ; les vacances à la plage, les vagues tranquilles. Mais dans la maison, mille et une portes renfermaient toute une vie : on montait par réflexe, visiter les étages. Artificielles pages d’un esprit plus complexe. Il aurait fallu descendre, descendre bien plus bas...la cave, fermée à double tour, présentait tout l’ouvrage : la solitude, tristement scellée, d’une enfant abandonnée. Il fallait chuter pour approcher le coeur. D’escalier en escalier, mouvants, branlants, trompeurs...on s’engluait dans l’obscurité, se laissait distraire par le songe mais voilà qu’à mesure que le pas se faisait pressant, le trappe approchait.

De l’extérieur pourtant, qui aurait pu se douter ? Que sous le plancher si brillant, se cachait un labyrinthe déchaîné.

Lui, avait parcouru tous les étages, descendu les paliers. Blasé de la fête, sans appétit pour les mets, il avait franchi la porte d’un seul coup, avait tout défoncé.

« Présent. »

Son rire amusé régalait ses oreilles. Ils se souriaient, reconnaissaient en l’autre le même plaisir assumé. Oui, l’ignoble erreur. Deux ignobles erreurs. Des monstres. Des bêtes détestées. Tout lui revenait en mémoire : cet orphelinat triste, ces enfants apeurés. Elle les avait fait pleuré, plus d’une fois, malgré elle. Et les adultes, intransigeants, impuissants face à elle, avaient jeté toute leur haine cruelle : les regards, les mots, les gestes brutaux résonnaient encore sur sa peau. Adoptée et rejetée sans arrêt. L’abandon interminable avait brisé son coeur, insufflé toute la rage qui en cet instant se jetait brutalement sur Logan.

Forteresse imprenable, aux murs si épais, érigés en des murailles si hautes qu’elles en touchaient le ciel, s’engouffraient dans la Terre. Immense édifice, où caches-tu ton hôte ? Que trouver en ton sein ? Un être recroquevillé au fin fond du néant ?
Elle le voyait, cet amusement malsain dans ses prunelles, ce désir pernicieux. Il la défiait de réussir, de fendre la muraille. Alors, déferlant sur la pierre incassable, la sorcière lançait ses attaques. Dans son regard, elle ne distinguait plus la lassitude vorace, l’éternel abandon de la lutte, l’endiguement de la force. Il n’y avait que le plaisir indéniable de la voir se déchaîner, se déployer devant lui. Dans un rugissement bestial, le monstre lui parlait, déliant une langue qui n’avait cessé de vouloir s’exprimer.

« La douceur et la foi ne m’ont jamais tenté. Je doute de les regretter. »


Et il lui répondait. Satisfait, enfin, de lui faire face. Leurs sourires se liaient, échos de pulsions trop longtemps retenues. Le plaisir de l’affrontement, la suavité de la violence...un poison dans leurs veines faisait tout flamber. Elle sentait son corps s’enivrer, se gorger du même éclat d’ivresse, sentait ses sens larguer leur paresse. Oh, comme c’est bon de se sentir vivre ! Il m’en faut plus encore !

« Pas parfait mais mieux. L’hypocrisie ne te va pas Sana, pas besoin de t’en draper, la fureur te va mieux. »
Son sourire s’élargit, elle en frissonnait de plaisir.
« Tout comme l’abandon te sied mal. Où est donc passé ton esprit combatif ? Où est ton envie rugissante de survivre ? Tu as déposé les armes trop longtemps Logan...sais-tu seulement encore t’en servir ? Ne veux-tu pas te venger de tout ce qu’on t’a fait ? »

Il ne luttait pas contre sa poigne, ne bronchait pas quand ses ongles s’enfonçaient dans sa peau. Son corps avait reculé face à elle. Mais il la regardait sans ciller, affrontait la tempête, chantait de concert avec le monstre mais il ne faisait rien pour l’abattre. Alors quoi, on ne se bat pas ? On reste là, à regarder quelqu’un d’autre le faire ? Attaque ! Ne fais pas que te défendre !

Les attaques mentales continuaient, incessantes. Elle redoublait de force, projetait sur sa forteresse des vagues puissantes.

« Elle te laissera exister pourtant, elle en a besoin autant que toi. Ça la brisera de l’être que cette pauvre chose plate et lisse, victime de tous les maux. Mais pour ça il vous faudra apprendre à cohabiter. »
Un rire amer franchit ses lèvres.
« Oh, elle va résister. Elle va se terrer dans sa honte, refermer ma cage. Il faudra la convaincre. Elle est terrifiée. Elle ne veut pas utiliser sa vraie force parce qu’au fond, elle a trop peur de blesser. La pauvre veut qu’on l’aime mais elle ne se laisse pas toucher. Alors elle se contente de peu, elle se restreint mais moi...j’ai faim.»

Faim de tout. Je veux bouffer le monde Logan ! Je veux tout avoir, tout ce qu’on m’a pris, tout ce qu’on m’a interdit.
Oui au fond, c’était ça. Cette peur viscérale d’être à nouveau rejetée. Par les siens, par ses proches...par Kezabel qui l’aimait tant, et qu’elle aimait plus que tout dans le monde des vivants. Comment se faire accepter, tout entière ? Comment lui dire qui elle était vraiment ? Tout ce qu’elle cachait ? Détournerait-elle le regard devant elle ? Un au revoir, un abandon de plus et tout s’écroulerait pour de bon. Même si elle s’acceptait, même si ces deux visages cohabitaient, la reconnaîtrait-elle encore comme sa sœur ?

« Pas besoin d’espoir ni de chaînes face à moi. »

Un gémissement de rage, d’exultation à ces mots. Oh, comme elle en aimait le son !

D’un seul coup, comme une onde puissante, le dragon souffla son feu dévastateur sur elle et elle s’enflamma. Les langues de feu venaient caresser sa peau alors qu’elle affrontait le sourire du démon. Un animal enragé, sa force venait contrer la sienne, se mêler. Oui, viens à moi ! Viens te battre !

Ses bras le repoussèrent brutalement en arrière jusqu’à vouloir le heurter contre la vitre tandis que d’une nouvelle salve endiablée, son esprit attaquait comme une explosion de fureur qui voulait tout dévaster, faire trembler la muraille, l’ouvrir en deux, percer l’épaisseur monstrueuse. Onde de choc, terrible. Et puis, une autre, une autre, une autre. Sans répit. Sans faiblir. Elle attaquait, encore et encore, et encore. Ses mains quittèrent ses épaules pour se placer de chaque côté de son crâne, l’enserrant dans ses griffes sans scrupules.

Ploie ! Laisse-moi entrer !

Ses prunelles lui renvoyaient toute la violence enflammée, toute la rage glorifiée qui était sienne, qui était leur. Ils la partageaient en cet instant, elle leur était vitale. Plus fort, plus fort, elle martelait la pierre d’un seul coup de marteau

« Regarde-toi Logan ! Toi aussi tu t’éveilles, tu brises tes chaînes. Ta place n’est pas dans ce fauteuil mais sur un champ de bataille ! Tu as assez dormi ! »

Rejoins-moi. Nous serons les meilleurs soldats, les meilleures armes contre nos ennemis. Ils pleureront du sang, cracheront leur désespoir.
Elle plongeait toute entière dans son regard, venait prendre son âme, enserrait son corps de ses ailes fébriles de tout le désir, l’envie, l’exaltation infecte qui la tiraillait de toute part. Son souffle erratique franchissait ses lèvres avides, souriantes et malignes.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mar 21 Juil 2020 - 16:23
Et le sourire s’étire enfin sur le monstre endormi. Un frisson sauvage grisait ses chaires meurtries. Le glas de l’affrontement résonnait, éveillant chaque fibre de son être. Le monstre endormi s’éveille, l’horreur gronde de nouveau, elle aime la rage, le bruit, les tintements des glaives qui de leur danse macabre s’entrechoquent, s’entraînent, se valent. Ô qu’il aime plonger le regard dans celui d’un égal, sentir de nouveau la violence battre en son sein, brûler ses veines, inonder ses sens, bercer en lui le doux son du linceul qu’on tire déjà loin du champ de bataille. Qu’il aimait cette sensation furieuse de demeurer seul sur le champ de bataille, arme au poing, ennemi en front, le sol dévasté de la joie sauvage d’enfin se rencontrer. Qu’il exultait à l’idée de brûler chaque parcelle, de détruire le monde, de se déployer, enfin, de sentir les autres ployer, les os se briser, les chaires se déchirer. Douce agonie que de ne plus être homme pour se sentir de nouveau démon, conquérant, salvatrice damnation.

C’est ça Logan, déploie tes ailes, brises tes chaînes. Tu vomis cette immobilité dans le fond n’est-ce pas ? Tu voudrais t’abattre sur eux, conchier la douleur, incarner la peur. Tu l’as vue d’ailleurs, inonder les prunelles de tes bourreaux. Excès de chaînes, de sorts, de murs. C’est ça, contenez l’abomination, la plaie qui n’attend d’une faille pour s’échapper, s’abattre. Pourquoi crois-tu qu’il s’agitent là-bas, de te savoir en vie ? Car en vie tu l’es, maintenant, enfin, plus que jamais. L’acide coule dans tes veines, ronronne de colère et de plaisir à mesure que les coups s’acharnaient sur les murs d’acier de la forteresse de son esprit. Combien s’y étaient attelés au fil des ans ? Son père en premier, et puis tant de sangs purs, de l’enfance à l’âge adulte, enchaînant défaite sur défaite, laissant le bâtard victorieux, puissant, gonflé d’orgueil, le regard animal braqué sur leurs prunelles déconfites. Jamais plus d’un genou à terre, jamais l’étincelle parfaitement éteinte. Et quelle joie de la sentir devenir brasier de nouveau, de refuser de demeurer à terre, de rugir de nouveau.

« Tout comme l’abandon te sied mal. Où est donc passé ton esprit combatif ? Où est ton envie rugissante de survivre ? Tu as déposé les armes trop longtemps Logan...sais-tu seulement encore t’en servir ? Ne veux-tu pas te venger de tout ce qu’on t’a fait ? »

Doux son à ses oreilles, la fibre guerrière se mugissait, toute heureuse de se sentir enfin entendue. Que diraient les autres de voir cette flamme consumer son être ? Fuiraient-ils ? Sans doute. Mais elle ne faisait qu’approcher, cogner, violenter les parois de son esprit, l’emplissant sans cesse de la joie sauvage d’être enfin compris.

En physique il y a un principe bien connu des architectes, affreusement meurtrier tant qu’il demeure inconnu, notamment lors de la construction des ponts. Tout corps possède une fréquence et vibre en rythme. Il suffit de lui imposer cette fréquence, même minime pour qu’il entre en effet de résonnance, se mettant à osciller dangereusement, perdant tout contrôle, basculant en des mouvements amples et destructeurs. Un phénomène pouvant être engendré par la marche militaire ou le souffle féroce du vent. Et la structure s’agite, réponds en cœur, se tord, se déforme, explose, meurtrière, emportant tout sur son passage.

«  Ils ne sont pas loin finalement... »

Il suffira d’une étincelle comme dirait l’autre.

Juste un effet de résonnance et le dragon s’anime de nouveau, la tempête se réveille, le monstre s’éveille. Et les ombres s’enflamment.

Elle redoublait de force contre lui et il souriait oh comme il souriait face à ces attaques incessantes, face au grondement qui faisait vibrer son âme, aux craquements jouissifs qui percutaient son esprit. Pas une faille, pas une fracture. Plus fort Sana, j’attends que ça craquelle. Allez, donne-toi.

« Oh, elle va résister. Elle va se terrer dans sa honte, refermer ma cage. Il faudra la convaincre. Elle est terrifiée. Elle ne veut pas utiliser sa vraie force parce qu’au fond, elle a trop peur de blesser. La pauvre veut qu’on l’aime mais elle ne se laisse pas toucher. Alors elle se contente de peu, elle se restreint mais moi...j’ai faim.»
« Elle apprendra. On se résiste rarement longtemps. Apprends lui a arrêter de se restreindre. C’est pas bon pour tes nerfs.. »

Est-ce qu’il séparait réellement les deux entités ? Non, il se jouait juste de cette dichotomie qui palpitait en elle. Bouffe le monde, détruit les digues, il t’appartient ! Refuses ce carcan de perfection qui te va si mal au teint, déferle, existe, merde, tu ne peux survivre enfermé dans les ténèbres. Crois-moi j’ai essayé.

Effet de résonnance. Toujours. Les esprits se complètent, se comprennent, mugissent de concert, parlent le même langage.

Un dernier avertissement : ne retient pas tes coups, et il la sentait frissonner de plaisir, exulter sous le poids de cette libération. Explose, rue-toi, je t’interdis d’apposer encore sur ton âme la moindre chaîne. Je t’interdis de te maîtriser. Crois-tu pouvoir me détruire pauvre âme soumise ? Seuls ta part animale le peut. Seul un dragon peut en blesser un autre.

Fire cannot kill a dragon

Et soudain, la flamme, le déferlement brusque, éphémère d’un souffle ardent qui explosait, onde de choc déferlant contre son esprit, la repoussant, l’embrasant surtout dans un désir belliqueux. Jeu de lutte et de pouvoir. Sois la fronde, je serais violence, force inflexible. Je serais la tempête qui se reflète dans ton vainc désir de vaincre, d’exister, de hurler dans les flots.

Lâchant un grognement animal, il se faisait repousser en arrière, cognant la baie vitrée, riant violemment face aux attaques répétées qui venaient faire trembler les murs de son âme. La frustration d’avoir été investie sans pouvoir répliquer, sa bienséance malsaine venant l’empêcher de se défendre prenait enfin toute la mesure. Combien de fois s’était elle contrainte, combien de chaînes, combien de cris silencieux dans les ombres de son esprit ? Quelle douleur que de se déformer ainsi pour correspondre au moule, s’amputant, se mutilant sans cesse pour cesser de gronder. Mais gronde, attaque, existe ! Et il riait, heureux, satisfait de sa violence, de la fureur de ses assauts.

Ses griffes sur son crâne, un souffle viscéral posé sur elle, joie malsaine, vibration sourde. Il la repoussait, se délectant de la douleur des assauts répétés, de la sensation de son âme crissant sur la sienne, de la décharge vive, acérée qui lacérait leurs esprits.

Résistes-moi !

« Regarde-toi Logan ! Toi aussi tu t’éveilles, tu brises tes chaînes. Ta place n’est pas dans ce fauteuil mais sur un champ de bataille ! Tu as assez dormi ! »

Il embrassait ses assauts, leurs esprits dans une bataille acharnée, deux feuilles mortes emportées dans le tourbillon de la tempête. Mortes ? Vraiment ?  Non, elle avait raison. Il vibrait de nouveau, enfin vivant, sa rage exultant d’une joie sans faille. Oh oui, je suis en vie, plus fort, plus puissant sous tes assauts répétés. Fils du conflit. Ennemi de l’espoir.

Pas besoin de paroles, son esprit venait englober le sien, ses ailes percutant les siennes, vol sourds de deux êtres endiablés. Il répondait par des sentiments bruts, viscéraux, enragés.

Me croyais-tu vraiment perdu ? Pensais-tu mon corps décharné, ma combattivité détruite ? Pensais-tu possible de me détruire jusqu’à l’agonie de ma rage ? Pensais-tu réellement que je ne parcourrais plus ces terres arides, brûlant de mon acide les miettes de vos faiblesses ? J’exulte, j’enrage, j’existe, je refuse de choir parmi les couards.

Tu as raison j’ai bien trop dormi.

D’un mouvement violent, il se détachait de la baie vitrée qui vibrait derrière lui, impulsée de la foudre qui s’échappait des deux monstres, l’y plaquait à son tour, son visage proche du sien, les flammes de son regard plantées dans le sien, refusant de le lâcher, jouissant de cette puissance qu’elle dégageait, de cette rage qu’elle déployait sur lui, pourtant toujours incapable d’entrer à l’intérieur des murailles qui geignaient pourtant sous le poids des impacts. Comme les murs d’une maison grincent dans la tempête. Sublime puissance de feu. Alors il se faisait déferlant aussi, brutal, implacable, son âme l’investissant, grondant dans sa tête, brisant, dévastant, impactant chaque parcelle de son être.

« Alors qu’est-ce que tu veux y voir Sana ? »

Homme sûr de sa puissance. Bête infâme, insensible aux plaies infligées, se délectant de ce qu’elle pouvait arracher au passage. Il s’emplissait d’elle, des émotions qu’elle projetait, se nourrissant de la violence tant que du désir.

« Le déshonneur ? »

Sans prévenir, il lâchait une barrière, la laissait entrer, déferler en lui, destructrice, lâchant un mugissement rauque d’une plaisante douleur, parfaitement conscient de ses propres limites, l’invitant dans un labyrinthe où elle pourrait bien se perdre s’il n’en fermait pas certains accès, l’empêchant de couler, elle, l’eau, la tempête qui ruissèle en lui. Tellement sûr de sa propre puissance qu’il pouvait l’inviter en lui, contrairement à d’autres, le gouffre de son âme portait bien des palissades. Pourrait-il l’y enfermer ? Dans cet abyme immonde, ce dédale d’où il pouvait jouer de ses souvenirs, cachant les uns, lui donnant accès aux autres dans une parfaite maîtrise de ce qu’il était. Car il s’acceptait, laissant à chaque parcelle de son être une place indue.

Et là surgissait une bride d’enfance, la trachée écrasée, les frères lui entaillant la chaire, le souffle coupé, l’os qui menace de lâcher, le cerveau embourbé d’un manque d’oxygène flagrant. Et cette insulte, si simple, si légère, tellement facile et mièvre. Bâtard. Il s’agissait de son point de rupture. Le moment où, sentant la mort arriver, acceptant que ses frères, son l’impulsion parentale, risquaient réellement de l’enfermer dans le chaos, il s’était soudainement relevé, une vague déferlant sur eux, les envoyant au loin. Onze ans, les autres l’imaginaient crackmol et il lâchait la puissance soudainement, celle qu’il cachait jusque là, qui leur coupait le souffle, les projetait au sol alors qu’il se redressait, bête furieuse, l’esprit projeté jusqu’à eux, les lacérant, prenant le contrôle, glissant dans chaque interstice, brûlant chaque souvenir pour les faire siens. Ployez pauvres idiots, je vous tiens désormais en laisse vous et vos idées imprudentes. Je vomis vos caprices, vous ferait plier les genoux, baisser la nuque car dorénavant je connais chaque absurde erreur. Le pouvoir, c’est le savoir. Que dire du pouvoir d’un bâtard, alors, qui, soudainement s’étend.
Vous voulez me réduire au silence, vous voulez m’abattre ? Vous obtiendrez le déluge.


Et là, la haine, le mépris, l’avanie de parents dépassés.
Qu’il n’avait pas tardé à faire taire aussi. Chantage immonde, secrets dévoilés.

-' Quel monstre as-tu invité chez nous !? '

The monster you made.

Seulement ton fils, cher père. Ta traitrise, ta faiblesse. Seulement votre déshonneur, chers parents !  Le poids de votre existence, la preuve de vos infamies.

Et le souvenir lui était arraché, la repoussant au loin, ouvrant un autre barrage, la forçant à y glisser, guidant le ruissellement de son âme dans la sienne.

« Toi qui préfères l’espoir… »

Et les pensées s’imposaient encore, son patronus fuyant à travers les murailles de Poudlard, fuyant, battant la campagne, s’écoulant finalement dans les chaumières, les bâtisses, se présentant face aux uns et aux autres, répandant un champ d’espoir dont il n’était pas instigateur, juste dépositaire. Et de proche en proche, les patronus se rependaient, rivière d’argent sur la toile sombre de la nuit. Là, dehors, la Garde attendait, réagissait, répondait. Là, dehors, la colère grondait, la force de la résistance murmurait dans la nuit, scandant sa fièvre.

« Ou le désespoir alors… »

Il passait, sans cesse, dans les regards des uns et des autres, des gamins perdus, des proches épuisés, des victimes dont la vie fuyait enfin dans leurs yeux.
‘Ouvre les portes Logan et il sera épargné.’ ‘Non.’ Un simple mot, une syllabe qui claquait dans les ombres, emplissait les interstices, arrêtait en synchrone les cœurs de tous ceux qui observaient la scène, les lèvres entrouvertes. Elèves, enseignants, gardiens, tous dans l’attente de l’horreur. Et le gosse tombait, espoir déchu, protection trahie.
S’il n’y avait eu qu’eux. Il revoyait Aileen, le regard fou, les larmes aux yeux, le sang maculant ses membres, la puissance du coup qu’elle lui assenait alors, quand enfin il sortait dans la cour, arrêtant les attaques incessantes d’un lycan dont les assauts lui étaient destinés. La déchéance, aussi, lors qu’elle subissait ses attaques mentales alors même que son corps blessé s’éveillait après sa première détention. La rage d’un amour trahis. Autre déshonneur. Les murs de ces cases n’étaient jamais bien nets.

« La lutte te sied peut-être plus ? »

La lame sous sa peau, le feu du serpent qui coulait dans ses chaires, les dévastant, emplissant tout son univers d’une douleur immonde, le déchirant de toute part.  Oui mais voilà, salutaire, elle lui permettait de garder un pied dans la réalité, de s’y rattacher, de faire brûler en lui la flamme, s’en nourrissant, préparant en silence le monstre en sommeil, celui qui rugissait à présent, celui qui emplissait ses sens et attendait, grognant de plaisir qu’enfin se présente la faille. Oh oui la faille.

Le regard de son père puis de sa ‘mère’ quand ils comprenaient qu’ils ne pourraient l’éloigner, le museler, le figer. Celui des sangs purs quand il avançait tête haute, dans leur cercle, celui où aucun pauvre mêlé ne pouvait s’aventurer, celui où il les faisait ployer les uns après les autres. Si tu ne me laisse exister, je prendrais tout de force. Je n’ai ni besoin de ton assentiment ni de ton consentement pour brûler ce monde, pour le mettre à genoux. Je vous broierai.

Et le regard d’Anthony alors si jeune, le sourire, la rage qui bat de concert, les esprits qui s’accordent, s’acceptent. Celui de son frère qui pensait trouver une âme jumelle, un ami.

Et le regard de l’aîné lorsqu’il comprenait, des années plus tard que l’ultime trahison aurait raison de lui, sa vie fuyant son corps qui tombait inanimé au sol dans le bureau du directeur de Poudlard.

Et ce putain de frisson qui l’emplissait à cette vue. Celui qui s’embrasait plus encore quand un éclat vert illuminait son visage, se retournant prêt à en découdre pour trouver Alec, le visage dur, les mâchoires serrées. Et derrière lui, un Supérieur. Le gosse avait choisi son camp, s’enterrant avec lui dans la fange, lui sauvant la vie, se positionnant sans un mot à ses côtés.

« Ou quoi ? Ah oui, la plus belle monstruosité de toutes, les faiblesses. »

‘Rentre, tu vas te faire tuer !’ ‘J’peux pas faire ça !’ Alec dans la forêt interdire, leurs pas qui foulaient l’humus, grimpant par-dessus les branches, les amenant toujours plus loin. La chasse au loup-garou. ‘Je m’en occupe, rentres !’ Sa voix avait grondé sous le couvert des arbres et, percuté par sa violence, Alec s’était arrêté, serrant les dents, acceptant de faire demi-tour dans un assentiment muet. Et là-bas, au loin, un combat de lycans, le plus jeune, sombre et massif n’avait posé son regard jaune sur lui que quelques secondes. L’homme qui marchait parmi les monstres.

Et son regard à elle, ses iris clairs limpides où transparaissaient les sentiments affreux, immondes, amoraux. Jeux d’amour et de haine. Puissance infâme de l’autodestruction d’un chaos assumé.

Et à chaque case qu’il la laissait emplir, il la voyait se délecter de toutes les émotions qui avaient été siennes au fil des ans, qui se dressaient toujours en lui. Ambigüité complète, toujours écartelé entre ce que les sots nommeraient bien et mal. Rien de si manichéen pourtant.

Et à l’instant même où il la sentait creuser, s’infiltrer dans une fêlure, la voilà soudainement rejetée en dehors, pauvre chose récalcitrante, il l’empêchait de lutter et la voilà hors du dédale, s’emplissant de toute la frustration de l’échec.

« Alors, tu cherches quoi ? Ce qu’ils veulent, eux ? Qui je suis, moi ? Pour ça il faudra entrer par toi-même. Il en reste tant des secrets à m’arracher. »

Un grondement. « Allez Sana, un petit effort, entre par toi-même maintenant… »

Ah comme c’est bon. Ne filtraient que ce qu’il acceptait, l’empêchant d’emplir les profondeurs de son être, ne laissant couler à la surface que ce qu’il choisissait de lui montrer, faisant de ce dédale les lieux d’une bataille que seul lui maîtrisait.

Pas de noms, pas de visages autres que ceux qu’il consentait à révéler, pas de danger pour ceux qui comptaient, il gardait le contrôle malgré l’intrusion qu’il provoquait lui-même, ayant fait depuis longtemps de son esprit un véritable champ de bataille où il était aisé se dériver jusqu’à se perdre tout à fait. Chaque sillon, chaque recoin protégé des mêmes murailles qui en bordaient les ouvertures. Tu voudrais peut-être savoir comment on en arrive là. Trouver les ressemblances, comprendre l’organisation de ce gouffre, laisser le monstre en griffer les bordures.

Allez, tu en as aperçu les parois maintenant, tu as des armes, tu sais ce qu’Alec a construit. Force, insinue toi, explose, sois plus puissante que le fauve. Allez, montre-moi comme tu as faim d’exister.
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Ven 24 Juil 2020 - 2:10
Oh, comme il s’éveillait dans un souffle terrible ! Comme ses chaînes se brisaient, déchirantes et claquantes, dans une terrible explosion de rage et d’envie. La faim de vivre, de se battre, de sentir chaque parcelle de son corps habitée de ce feu si ardent, cette sensation que tout se réveillait enfin, membres engourdis depuis trop longtemps, esprit enfermé dans les méandres du désespoir...elle le sentait revenir d’entre les morts plus violemment que jamais. Etait-ce pour l’emporter elle aussi dans le néant ou pour clamer sa place parmi les vivants ? Elle n’aurait su le dire, et peut-être finalement que ces deux idées lui plaisaient tout autant. Emporte-moi, ou élève toi avec moi. Je veux vivre enveloppée de rage, je veux sentir le sang dans ma bouche, le sel de leurs larmes. A eux, à tous, je veux voler leurs âmes. Les détruire, tout enflammer comme on s’enflamme nous.

Elle ne s’était jamais sentie aussi vivante. Son corps vibrait à l’unisson du sien, désir dévastateur qui voulait les faire succomber à la violence de l’instant. Et ils plongeaient, tête baissée, ou plutôt tête contre tête dans un duel acharné. Leurs regards étaient comme deux lames d’épées qui s’affrontaient, leurs mains tremblantes sur le pommeau, mais tremblantes de plaisir, leurs sourires se répondant dans une exaltation ignoble. Oui, il était là...le guerrier, l’esprit vengeur, la main qui s’abattait sans remords. Logan était revenu. Et il lui faisait face, le silence écrasé sous ses pieds. L’immobilité balancée contre un mur. Il ne se mouvait pas, il exultait. Il ne pensait pas, il enrageait. De libérer le démon, de voir pulser en elle comme un écho, la soif de la destruction. Et elle, rugissait d’un plaisir libéré, assumé. Enfin !

«  Ils ne sont pas loin finalement... »

Oui, Logan, reprends tes armes. Dresse-les bien haut. Retrouve ta hargne, sors de la torpeur, de l’entre-deux, du puits sans fond. Ne me laisse pas faire ça seule. Entends comme nos monstres s’appellent, se répondent, s’entremêlent.
Trop longtemps, le sien avait hurlé dans la nuit sans trouver de réponse. Muselé, attaché, enfermé dans l’oubli ; aucune parole, aucun geste pour satisfaire ses envies. Elle l’avait si bien écrasé au lieu de le dompter pour s’en servir qu’à présent il reprenait ses droits, se libérait de la laisse qui avait enserré son cou, n’en était que plus violent, que plus animal. Cette force en elle qui s’exprimait enfin, trouvait dans le miroir un sourire endiablé. Les visages, tous deux, se déformaient des pulsions qui les gouvernaient brutalement.

« Elle apprendra. On se résiste rarement longtemps. Apprends lui a arrêter de se restreindre. C’est pas bon pour tes nerfs.. » Un sourire malin.
« Ce ne sera pas bon pour les autres... »

Ne plus se restreindre, lâcher prise, abattre le contrôle incessant, déconstruire les habitudes, les réflexes, les leçons. Cette façon qu’elle avait de se maîtriser à tout instant, elle avait du l’apprendre douloureusement. Non Sanae, on n’entre pas dans l’esprit des autres sans raison. Non Sanae, on n’use pas de violence pour son propre plaisir. Non Sanae, on ne se réjouit pas des erreurs des autres, on ne souligne par leur malheur. Non Sanae, l’esprit appartient tout entier à son hôte, tu ne peux pas  le leur voler. Il faut se contrôler, parler aux autres, voir en eux le meilleur, les aider, les soutenir, les encourager, les aimer, leur faire confiance. Il faut travailler la maîtrise, contrôler ses émotions, contenir ses désirs, les étouffer parfois pour le bien des autres. On se tient droite, on sourit, on fait preuve de douceur. On oublie les méfiances, les ardeurs. Tout doit être lisse, imperturbable, tendre. La fermeté seulement est autorisée. Mais l’émoi, la pulsion, les émotions fortes sont autant de dangers à mettre en prison.
Y avait-il des étouffements sains ? Finalement, tout ce qu’on lui avait appris, tout ce que cet homme érigé en idole, avait fait d’elle ...n’était-ce pas de la couper d’elle-même ? Étrange et douloureuse réalisation que celle-ci. Découvrir les défauts d’un père qu’elle aimait tant. Il l’avait pourtant fait pour son bien, le sien et celui des autres. Il avait vu sa détresse, avait cru que la maîtrise de son don, de son caractère, lui permettrait de la faire disparaître. Il n’avait fait que créer une surface, épaisse, sous laquelle elle continuait à hurler. Si bien occultée, niée, désavouée, la violence qui avait toujours fait partie d’elle avait perdu la bataille mais pointait le bout de son nez, comme un rappel, une promesse, que ça ne suffirait pas, que ça la tuerait, et que tout finirait par revenir, d’un seul coup, d’une seule terrible bourrasque. S’il avait fallu lui enseigner quelque chose, cela aurait du être de ne plus avoir peur d’elle-même. Ne plus paniquer lorsque le flot d’émotions menaçait de l’inonder. La Peur, voilà l’horreur qui la remplissait, qui provoquait ses crises. La panique, l’angoisse, de ne plus se dominer, de ne plus avoir le pouvoir sur elle-même, de montrer ses défauts, ses pires traits.

Mais la peur avait été mise au placard. Logan, d’un geste brusque, l’y avait enfermée. Parce que lui n’avait pas peur, ne craignait pas ses attaques, sa force, sa violence, son besoin de dominer, sa soif de le faire ployer. Il était assez fort, trop fort pour redouter la douleur, l’impétuosité de son adversaire. Il en riait, repoussé par ses bras contre la baie vitrée, cognant contre la vitre qui vibrait plus fort. Il riait violemment de son souffle puissant. Il le voulait ce combat, tout autant qu’elle en avait besoin. Et toujours, amusé, repoussait ses attaques. Même lorsqu’elle les faisait plus fortes, plus redoutables, les murailles ne flanchaient pas, ne vacillaient pas. Seulement un fracas assourdissant de la tempête contre les murs de son esprit. Elle le voyait cet éclat furieux qui l’encourageait à frapper avec plus de force, se délectait de pouvoir libérer tout ce qu’elle avait retenu autrefois. Tant de temps passé à retenir ses coups, à engluer sa vraie violence ; tant d’années à se faire petite, douce, légère … et voilà qu’aujourd’hui, elle déchaînait toute sa frustration sur lui, sans peur de l’achever. Il lui prouvait chaque seconde de ce combat à quel point ses murailles étaient impénétrables, à quel point il était impossible de le briser.
Combien d’attaques avait-il repoussé pendant toute sa captivité ? Combien d’heures son esprit s’était barricadé sous les assauts de ses ennemis ? Comment avait-il tenu ? Elle voulait savoir, elle voulait tout découvrir. Ses secrets, finalement, importaient peu ; ils ne l’intéressaient pas vraiment. Seul le désir de l’envahir, de l’emplir au plus profond de son être motivait son ardeur ; elle voulait savoir ce qu’il y avait au coeur de ce champ de bataille perpétuel, elle voulait goûter au souffle du dragon, atteindre le centre où le feu se créait, savourer la chaleur insupportable de son être, celle qui se mêlait à la sienne.

Mais pour s’approcher de si près...il fallait se jeter dans le feu. Et le feu, en cet instant, l’enveloppait tout entière. L’esprit du sorcier envahit le sien et elle le sentit partout en elle. Une sensation qu’elle connaissait, qu’elle subissait depuis de longues semaines depuis le jour où elle était arrivée devant lui pour la toute première fois. Pourtant, c’était avec une nouvelle vivacité qu’il entrait dans sa tête. Alors Logan, tu te sens vibrer ? Tu te sens enfin en vie ?

Les deux dragons battaient des ailes frénétiquement. L’un pourtant, le plus fort, malgré les battements répétés, brutaux, incessants de l’autre, ne cessait de refermer ses ailes tout autour, sa poitrine se gorgeant d’une rage nouvelle. Le désir vengeur de reprendre le contrôle, de lui montrer comme il était orgueilleux de penser qu’elle aurait pu lui faire du mal, comme il pouvait enrager et user de son pouvoir sans crainte, libre d’un sommeil dans lequel il avait sombré. Oui, je suis réveillé ! Voilà ce que criaient ses entrailles.

Le dragon, de son trou, sortait en rugissant et tout le village tremblait : fallait-il le craindre ou se réjouir de son réveil ? Etait-il leur mort ou leur salut ?
Oh, Sana, qu’as-tu fait ?

D’un geste brutal et vif, il reprenait le dessus physiquement. La sorcière fut plaquée à son tour contre la vitre, tout occupée qu’elle était à ébranler la forteresse, elle n’avait pas stoppé son mouvement, n’avait pas réagi. Ce fut à son tour de sourire et leurs souffles, si proches, se mêlaient ; leurs regards fusionnaient. Ils jouissaient tous les deux dans la tempête féroce, leurs corps au milieu du chaos se tenaient encore droits, muscles tendus. Mais le vrai chaos se jouait, invisible, dans la collision de leurs esprits. Entrechoquements violents de deux volontés ravageuses. Ses mains sur son crâne n’avaient pas bougé, elles resserraient leur prise, maintenait sa tête à quelques pauvres centimètres, ne le laissait pas s’échapper. Il ne comptait aller nul part, du reste. Il aimait trop cette guerre qu’il se vouait dans le fracas de leurs puissances.

Et sa puissance à lui, se fit plus brutale encore. Aucun recoin de son âme ne fut épargné. Il recouvrait tout, défonçait les murs de sa maison dorée ; brisait les illusions, défonçait les pièces vides, les pièges, les trompes l’oeil. Il ne descendait même pas les escaliers, il fendait le sol jusqu’à tout perforer et atteindre le noyau son être. Tout en elle lui appartenait alors, il n’y avait plus rien de secret, plus rien de caché. Toutes les portes étaient ouvertes, sorties de leurs gongs. Et ses souvenirs fusaient, tentaient d’échapper vainement à sa présence absolue.

« Alors qu’est-ce que tu veux y voir Sana ? »

Le coeur du volcan. Voilà ce qu’elle voulait voir. De quoi est fait ton coeur Logan ? De lave ? De pierres coupantes ? Existe-t-il seulement ?
Une grimace animale, un grognement rauque lui échappa. Ses attaques ne cessaient toujours pas.

« Le déshonneur ? »

Soudainement, comme on ouvre une porte face à un tsunami déchaîné, il la laissa entrer et elle s’engouffra avec surprise. Un sursaut, un émoi explosa en elle au moment où elle franchit l’entrée. Un gémissement de plaisir résonna dans la pièce tandis qu’il lâchait un rugissement de douleur. Jouissive, la douleur.

Comme une vague puissante, Sanae déferla dans son esprit. Mais il aurait été trompeur d’y voir une quelconque victoire. Non, Logan contrôlait le courant, modulait la tempête qui l’assaillait brutalement, décuplée par l’excitation du moment, la jubilation d’être enfin en lui. Elle sentait autour d’elle sa présence qui la guidait, entraînait sa puissance sans lui laisser l’opportunité de dévier, d’explorer. D’une main de maître, il guidait l’intrusion. Le défilé de souvenirs parfaitement articulé commença.

Aussi vivement qu’elle était lui, elle voyait les visages, pénétrait les images imprégnées d’émotions. Des émotions acides, amères, pleines de poison. Les visages de ses frères qui voulaient l’abattre violemment, étranglant tout souffle de vie ; la rage et la haine dans leurs yeux alors que le jeune Logan approchait de la mort... « Bâtard ! ». La violence du mot la prit aux tripes. Mais animé de la même envie de vaincre, Logan reprenait le dessus, dévoilait son pouvoir. Le dragon crachait du feu pour la première fois et il soumettait ses victimes au baiser démoniaque de son esprit enragé. Le moins que rien qu’ils voulaient voir disparaître, qu’ils rabaissaient, se relevait enfin et leur montrait ô combien ils étaient faibles. La sorcière ressentait cette exaltation soudaine de voir son pouvoir s’étendre si violemment.
La haine des parents suivit, la crainte devant un fils qui s’affirmait en les faisant ployer.

« Quel monstre as-tu invité chez nous !? »

Quelle fureur ! Quelle haine elle ressentait alors. Elle ne savait plus ce qui appartenait à Logan et ce qui lui appartenait à elle. Quelles émotions étaient les siennes ? Elle se laissait envahir et l’envahissait à son tour, gonflé de tout ce qui était lui et qu’il voulait bien lui montrer. Elle se nourrissait de tout, avalait les sensations comme un assoiffé buvait de l’eau. Plus, j’en veux plus !

Le souvenir disparut et Logan l’entraînait autre part. Elle voulait s’échapper de sa poigne mais rien n’y faisait.

Un grondement de frustration.

« Toi qui préfères l’espoir… »

Alors il y en avait eu finalement, de l’espoir dans sa vie. Ou était-ce seulement l’espoir qu’il avait déclenché chez les autres… Elle voyait la course de son patronus, détalant pour atteindre les autres, donnant la nouvelle, alertant la résistance qui à son tour, faisait passer le mot.
Même pas le temps de profiter de l’instant, il l’y arrachait à nouveau.

« Ou le désespoir alors… »

Oh, comme la guerre peut être laide ! Comme un leader peut être à la fois tant aimé que détesté ! On lui avait donné cette place mais voilà déjà, qu’à la décision ignoble, son « Non » résonnait comme le glas. Le gamin tombait, inerte, tandis que tous les visages pleuraient, leurs regards éteints ou étincelants de haine. L’intraitable directeur avait déclenché l’horreur de tous. Ne savaient-ils pas que chaque décision a un prix ? Qu’on ne gagne jamais rien sans laisser des cadavres derrière soi ? Les conséquences défilaient rapidement dans sa tête. La chute d’un amour qui ployait sous la trahison, sous le poids de l’infamie. La douleur de la perte, de la déchéance.

De cette douleur, elle s’abreuvait à loisir.
Sans scrupules.

Plus !

« La lutte te sied peut-être plus ? »

Oui ! Un rugissement sonore s’échappa de ses lèvres entrouvertes. Ce n’était plus un sourire qui les étirait, mais un ébahissement savoureux, gourmand, jouissif. Trop jouissif.
Elle sentait comme s’il était sous sa peau le serpent de feu, enflammant ses chaires à travers celles de Logan. Ses muscles roulèrent, un frisson grisant la parcourut tout entière. Pour tout âme saine, cela n’aurait été que douleur, que souffrance, que malheur...mais oh, comme il était bon de sentir chaque pore de son être embrasé de la sorte. La douleur n’était qu’une sensation de plus, qu’une façon de se sentir en vie...plus que jamais.

L’ivresse, véritable, la prenait. Des sueurs, des frémissements, des tremblements. Son feu à elle grandissait dangereusement. Son regard se faisait si fiévreux qu’elle en voyait trouble, se perdait dans l’acier des prunelles du sorcier. Sa respiration s’affolait, chaotique.

Mais déjà il l’emmenait autre part, lui faisait voir d’autres visages. Ses parents à nouveau apparurent...les sangs-purs, courroucés de voir ce bâtard si puissant marcher comme tout lui appartenait. Et cette volonté sauvage de tout prendre, de broyer. Elle la reconnaissait, parfait écho de la sienne en cet instant. Le besoin d’exister.
Anthony à son tour traversait son esprit. La complicité, celle de deux êtres qui se comprennent, qui se ressemblent. L’amitié, balayée par la trahison mortelle. Le geste, rageur. La joie cruelle. Le point culminant de ce qui l’avait amené à être capturé, à se terrer. Et Alec, au milieu de tout ça, qui prenait place aux côtés de son cousin.

« Ou quoi ? Ah oui, la plus belle monstruosité de toutes, les faiblesses. »

Rah ! Cesse !
Il faisait ce qu’il voulait, la maniait avec une facilité déconcertante, implacable main qui l’emportait dans la direction de son choix. La frustration grimpait, intense, paradoxale. Parce qu’elle aimait tout autant sa puissance qu’elle la détestait en cet instant : elle voulait la surpasser, la déjouer. Et pourtant, ce plaisir indicible, de voir un esprit si colossal...un esprit qui lui permettait d’être elle-même.

Une forêt. Alec qui obéissait à son ordre. « Je m’en occupe, rentres ! ». Logan traversant les bois. Un combat de lycans. Des yeux luisants dans la nuit. Aileen à nouveau. L’autodestruction, les sentiments contraires. Un tourbillon infernal. Le conflit interne.

Encore ! Plus !
Elle tentait de bifurquer, de s’insérer dans chaque recoin, de lui échapper mais il était partout. A peine trouvait-elle une issue qu’elle était projetée plus loin, violemment ; encore et encore, propulsée comme un corps contre un mur. Elle se heurtait aux parois, trouvait brutalement la froideur de la pierre. Les vagues, aussi terribles qu’elles étaient, n’arrivaient pas à être victorieuses.

D’un seul coup, le sorcier l’expulsa du dédale. Un cri de rage.

Non !

« Alors, tu cherches quoi ? Ce qu’ils veulent, eux ? Qui je suis, moi ? Pour ça il faudra entrer par toi-même. Il en reste tant des secrets à m’arracher. »
Un feulement animal. Toutes étincelles allumées. « Je veux tout ! »

Il gronda à son tour.

« Allez Sana, un petit effort, entre par toi-même maintenant… »

La frustration n’était qu’un doux concept à présent. La sorcière en connaissait désormais des sphères toutes nouvelles, des degrés si élevés que tout en elle éruptait, crissait, hurlait. Elle ne savait pas s’il la provoquait ou s’il l’encourageait, peu importait.

Sans tarder, elle tenta à nouveau de défoncer l’entrée de la forteresse. Frappant, encore et encore, plus fort, plus fort. Bon sang, mais ouvre-toi ! Son regard consumait celui de Logan. Elle enrageait, dents serrées, bras tendus, respiration frénétique. Il lui semblait que peu importait sa force de frappe, rien ne bougeait, à peine un tremblement peut-être, mais elle était trop engluée dans sa rage pour y voir un progrès. Encore ! Allez ! Elle tentait de fracasser la muraille, sans reprendre son souffle, sans s’arrêter un instant.

Mais rien. Rien. Putain !
La colère la dominait trop, les pulsions se mélangeaient, s’entrechoquaient. Comment se faisait-il qu’elle arrivait à percer toutes les défenses sauf les siennes ? Par quelle magie faisait-il cela ? Comment briser sa forteresse ?

Un hurlement déchira sa gorge alors que sa prise sur sa tête se raffermissait. Ses traits peignaient la furie qui l’habitait. Une nouvelle bourrasque dans la pièce fit voler ses cheveux, le verre de whisky explosa près du fauteuil. L’atmosphère s’alourdissait davantage, de la buée s’étendait sur la vitre. L’orage, prêt à déchaîner de nouvelles forces bestiales, se chargeait de puissance. La frustration était  son carburant. La sorcière s’en engorgeait jusqu’à étouffement. Elle ne voulait plus lutter, elle voulait gagner.

Loin à l’horizon, au coeur de la tempête, on apercevait de loin le raz-de-marrée arriver. L’afflux viscéral se précipitait sur l’esprit de Logan, prenait de la vitesse, de l’élan pour mieux déferler, aller chercher loin en elle ce qui pouvait l’alimenter. On avait dit frustration ? Va pour la frustration ! Autant s’y plonger, s’y noyer ! La faire sienne, en user à sa guise ! En faire une force, une puissance de feu !

Toutes ces fois où elle avait dit oui quand son coeur disait non. Toutes ces fois où son âme mutilée s’était pliée aux besoins des autres. Toutes les peines, les rancoeurs qu’elle avait enterrées. Sa souffrance d’enfant piégée dans un orphelinat de l’horreur. Le visage du directeur, plein de haine, usant de son bâton sur son corps blessé. Ce putain de sentiment d’impuissance ! Famille après famille, espoir après espoir, abandonnée à tout jamais par tout le monde ; l’enfant en elle s’époumonait de désespoir. Sa solitude grandissante de ne pas être vue, entendue. VOYEZ MOI ! ENTIEREMENT ! J’EXISTE ! Ne brisez plus mes ailes ! Ne prenez plus mon feu ! Cessez cet étouffement par une bienveillance fausse ! Je veux du sang ! Je veux punir ceux qui m’ont pris tout ce que je possédais. Ce père, même imparfait, que tout en moi appelle. Ils me l’ont pris ! L’ont réduit au silence à jamais. Et voilà qu’à nouveau, on met un bâillon. Et pourtant mon désir de vengeance ne cesse de gronder. Qu’est-ce que vous me dites ?! Que je dois le réfréner ? MAIS PUTAIN POUR QUI VOUS VOUS PRENEZ ?! On m’a abattue et j’y ai participé. Je les ai laissé faire. Je les ai laissé oublier que je suis une guerrière !

L’écœurement le plus total lui donnait la nausée.

Et le raz-de-marée, lui, déferla enfin. Inconsidérable force voulant tout piétiner. Plus vigoureuse, véhémente, hallucinante explosion de tout ce qu’elle avait ressenti et jamais exprimé. C’était son volcan à elle qui en deux s’ouvrait : la lave giclait, s’écoulait, brûlait tout.

Mais une guerrière, Sanae, est aussi forte qu’elle est rusée.

Et si...et si ce n’était pas seulement par la force qu’elle pouvait forcer l’entrée ? Son esprit retraçait toutes les intrusions, toutes les fois où elle avait utilisé son don, tout ce que lui avait appris son père, parcourait son passé, à la recherche de la clé. Le monstre manquait de maîtrise, de ruse. Ce n’était pas les ressemblances qu’il fallait invoquer, mais les différences... Qu’est-ce qui la différenciait de Logan ? La subtilité, la douceur.

Mais ça c’était l’autre ! Ça c’était quand elle se contrôlait, se renfermait.

Pourquoi ne pas utiliser les deux ? Pourquoi ne pas joindre la force à la ruse ?
Il fallait qu’elle retrouve un contrôle sans se départir de sa puissance. Contrôler ses pensées, ses attaques, ne plus seulement rugir et foncer dans le tas.

Tandis que le raz-de-marrée s’acharnait sur Logan, Sanae actionnait en elle quelque chose de nouveau. La trappe s’entrouvrit, à peine, discrètement, silencieuse, invisible. Elle tentait de passer sous les radars, un souffle rampant s’échappant d’une fissure, s’évanouissant dans les recoins de son propre esprit qui était plongé dans le chaos et faisait bien trop de bruit. Ses souvenirs surgissaient en pagaille, tourbillon sans véritable trame. Toute sa fureur s’efforçait alors de distraire Logan, engloutissante force plus que jamais décuplée. Et dans l’acharnement, un souffle à peine perceptible   tentait de le prendre à revers, déviant de l’entrée sur laquelle elle poursuivait sa plus terrible attaque. Souffle non plus gorgé de douceur, mais incisif...une lame si fine, légère, délicate...et pourtant...empreinte d’une force égale à celle d’un immense rocher. Dans le déchainement de son attaque, Sanae tentait d’insérer cette lame concentrée dans une fente, un interstice, peu importait...il fallait qu’elle entre.


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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Jeu 30 Juil 2020 - 1:55
Il y a des fois où on se démène pour faire au mieux. Où on cherche à se conformer, on cherche à correspondre à ce qu’on nous demande ou à ce qui nous permettra de survivre, même si ça ne colle pas avec l’image qu’on revoit de nous. Il y a des fois où on s’acharne, on se bat à en perdre le souffle. Des fois où on s’achève en fait, à force de rage et d’ardeur. Et des fois où on chute.

Vous les connaissez celles-là ? Ces coups qui vous mettent à terre, pas toujours sur le coup, il faut parfois quelques temps avant de comprendre qu’on est à bout, qu’on a tout donné, qu’on va finir par toucher le sol. Alors ouais, on tombe. Enfin on tombe. Non. On s’écrase. On le percute avec toute la violence du monde. Ces fois où le genou touche le sol avec tellement de force qu’il vous vrille toute l’articulation, qu’il irradie, pulse, palpite partout dans l’organisme.

Tellement fort qu’on ne peut pas rester à terre. Tellement fort qu’on a envie de hurler, de se lever, de courir de frapper. Ouais, de frapper. De faire mal à en briser d’autres os, de crever des rétines, de lâcher toute cette putain de douleur qui vous tord les trippes.

Parce que bordel il n’est pas né celui qui me maintiendra au sol.

Il se faisait lave, se faisait tempête, brûlait du désir de vaincre, de la soif d’exister de nouveau, de se confronter aux autres, de vivre sans chaînes, sans être sans cesse maintenu, lui aussi. Ce monstre, cet être de pierre qui s’était craquelé pour montrer ses véritables traits, ceux du dragon assoiffé de liberté et de puissance ne faisait que fait battre la violence en lui. Celle qui irradiait ses veines, cognait dans ses muscles, hurlait dans sa cage thoracique.

« Ce ne sera pas bon pour les autres... »
« Laisse-les à leur inconfort, ces pauvres petits êtres délicats... »

On s’en fout. Rien qu’une fois. Toi comme moi on a assez écouté leurs palabres, assez saigné pour les gracier, on s’est assez tu pour éviter d’éreinter leurs tympans fragiles. Oui, toi comme moi, on les a assez épargnés. On est bien assez resté de côté, hors du monde, hors d’atteinte pour décider encore de se taire. Laisse toi hurler, laisse-moi vibrer. Laisse les faibles se complaire dans leur lente agonie, leur apaisante apathie. Laisse les disparaitre, moi je veux m’acharner, je veux t’engloutir, je veux brûler, me consumer, cesser de n’être que l’ombre de moi-même. Allume le brasier, écoule la lave de mon sang acide. Enfin il bat, ce cœur qui avait cessé de rugir. Enfin il lutte, enfin il crie.

Enferme la bienséance, muselle la peur, frappe merde, jusqu’à t’en briser les os, décharnes-toi de trop vivre, consume toi d’exister, enfin.

Alors elle avait cessé de s’enclaver, ne retenant plus ni ses coups ni les battements effrénés de cette rage de vivre qui se répondait enfin, s’enivrait de leur puissance, catalyseur de cette fureur d’exister qui les dévorait. Combien de temps avant de lâcher volontairement son esprit à l’assaut d’un autre sans s’en vouloir, sans se sentir coupable ? L’avait-il seulement fait une unique fois durant son existence ? Ses attaques pulsaient pourtant, incessantes, violentes, douloureuses. Oh douce douleur que de ressentir de nouveau. Alors il propulsait le sien également, à l’assaut des regards, son corps rejoignant le sien, reprenant le dessus, lui souriant de cette joie avide que d’enfin faire face à une semblable. Il l’engloutissait, se nourrissait d’elle, exultait de cette puissance qu’elle lui assenait, de ces doits accrochés à son crâne comme si elle pouvait y faire rentrer ses os, l’attirant vers lui avec force, cramponnée à son désir de vaincre.

Alors il se jouait de cette puissance qu’il maîtrisait encore si divinement bien, la laissait entrer, la manipulait, l’orientait, lui refusant toute échappatoire, la rendant incapable d’accéder à ce qu’il souhaitait garder sous clef. Implacable acier, elle ne pouvait le briser ni s’y couler, laissée à la merci de cet esprit tranchant qui n’avait cessé d’apprendre à se fermer. Combien de vies aurait-il pu détruire pour une simple faiblesse ? Combien d’existences mourrait-il à présent de pulvériser ? Mais en attendant, il n’y avait plus que cet affrontement, cette lutte, cette valse acharnée pour la liberté.

Comment se sentir vivant quand on n’a de cesse de se renier ? Comment se permettre d’exister si se dévoiler devient un tel affront qu’il semble embraser toute humanité ?

Elle se retrouvait éjectée, expulsée de son esprit et, alors, reprenait le siège, véritable déferlante sur les parois de sa conscience, les vagues dans la tempête, le cyclone contre les murailles. Et cette joie immense de demeurer au cœur de l’explosion. Quel jouissance que ces heurts, ces coups frénétiques qui ne demandaient qu’à le défaire, le briser, le soumettre. Et de rester là, les prunelles enflammées, la forteresse qui grince dans le cataclysme. Elle hurlait, de ce ravage qui n’avait presque plus rien d’humain et qui n’en était pourtant que la quintessence. Et les bourrasques se joignaient à la réalité, le verre explosant non loin d’eux sans que l’un ou l’autre ne s’en formalise, à peine conscients que la tempête d’acharnait là dehors également, trop centrés l’un sur l’autre, parcouru de la tornade de leurs attaques. C’était l’impuissance qu’elle consommait, la rage de l’enfant délaissée, l’abandon de la gosse laissée dans la tempête. La sienne ? A qui ? L’un ou l’autre, ça n’avait plus d’importance, le sentiment était partagé et brûlait d’avoir été trop décrié. Deux existences, des vies gâchées dès le départ, destins différents, les chemins se percutaient pourtant là, en cet instant, alors qu’il sentait toute son âme s’embraser de vouloir se battre, exister, être vue.

Je te vois. Toi dans ton intégralité, dans toutes ces fêlures que tu brises toi-même de te délaisser. Tu me brûles les rétines, m’envahis,  me ravage. Il n’y a plus que ça, que les dragons trop longtemps avachis, englués, endigués. Que ces ailes libérées qui ne demandent qu’à fonde sur le monde.

N’accepte plus aucun bâillon, refuse les chaînes, élève toi Sana, tu es restée trop longtemps sous terre quand tu n’aspires qu’à te brûler les ailes. Va faire de l’ombre au soleil. C’est nous qui servirons de brasier dans les ténèbres.

Et elle déferle, rivalise, rugit, s’acharne, elle se brise sans cesse contre les murailles, déborde, se jette, se rue. Et il la sent la fissure, celle qui s’est faite en arrière plan, celle qu’il bloque à l’instant même où la surface craquette. Là, la surface a ondulé, attaquée sans remous, pas même une onde si on n’y prête pas l’attention.

« Ah la voilà qui concède une forme d’acceptation de ses deux visages… »

La puissance brute qui s’allie à la finesse. Les deux faces de la pièce ne sont pas incompatibles.
Elle s’était glissée là, en dehors de la tempête, rien qu’un frisson, une ondulation, un souffle sur les parois, rien de détectable tant qu’on ne l’y attend pas. Et s’il l’y avait amenée sciemment ? Et s’il reprenait un rôle qui avait été le sien depuis tant d’années, comme un réflexe, une entité en lui qui ne cesse d’exister bien qu’il n’en porte plus le titre ?

« Rien de plus tranchant et résistant qu’un alliage, là où le matériau brut ne cesse de céder. »

Sois la lame de Damas.
Joie féroce de la voir progresser, conquérante et salvatrice.

Afin de faire de tes faiblesses une force. Ta brutalité sauvage, incontrôlable, un atout. Ta douceur risible une ruse.

Et l’onde se faisait dans ses doigts, glissant dans le dos de la jeune femme, froissant la fameuse petite robe blanche comme son âme avait pu le faire sur la sienne, se plantant soudainement dans sa chair comme elle l’avait fait dans son esprit, le pouce contre sa colonne vertébrale au creux de ses reins, les ongles contre sa hanche qu’il enserrait dans son étreinte brutale, le regard incisif ne la lâchant pas d’un cil, l’esprit toujours affuté, ne laissant aucune faille. Les souffles se mêlent, les esprits s’emmêlent, se résistent, brûlent et le désir cogne, vif, lorsque les hanches se rapprochent, brutales. Vivre, vibrer. Se consumer.

Quand à la collusion des esprits, les corps se rejoignent. Collision. Les sens explosent lorsqu’il vient prendre ses lèvres, l’agrippant à lui.
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Dim 2 Aoû 2020 - 23:04


Elle se souvenait de la première fois qu’elle était apparue devant lui. Barricadée, emmitouflée dans son masque et son costume d’actrice expérimentée. Un petit espoir, au fond, de ne pas complètement être dévoilée jusqu’aux recoins de son âme. Espoir vain. Désespérant. L’intrusion brutale l’avait alors mise à nue, complètement. Elle n’avait pas combattu, n’avait pas résisté. Peine perdue. Mais elle s’était prise de plein fouet la puissance de son esprit qui l’avait dévorée. Il avait tout vu, tout connu d’elle avant même qu’elle ne puisse lui parler, le convaincre. Pourtant, jour après jour, elle était revenue tout aussi maquillée. Et elle s’était heurtée à son silence, à son immobilité. Oh, comme ces jours lui paraissaient loin à présent. Comme ses tentatives lui semblaient risibles, dénuées de sens. Parce qu’il avait fallu cela pour le réveiller...qu’elle s’éveille elle-même devant lui, rugissante et déchirante.
Alors, il reprenait vie. Il s’était agrippé à elle comme à ses bras, ne laissant à toutes deux aucune échappatoire, aucune autre solution que d’exulter. Elle avait animé la flamme qui s’éteignait en lui au moment où elle avait arrêté de souffler sur la sienne pour l’éteindre. Il l’y avait poussé, l’appelant, suscitant chez elle cette envie irrépressible de se mouvoir enfin librement. Sans crainte d’être jugée, rejetée. Seule l’exaltation de trouver un égal, un semblable les gouvernait.

« Laisse-les à leur inconfort, ces pauvres petits êtres délicats... »

Elle avait fait de leur inconfort, le sien. Toujours eux en premier. Toujours plus importants, toujours plus précieux. Elle les avait préservé par sa gentillesse, sa douceur. Elle les avait bercé, soigné, aimé  dans leurs faiblesses, dans leurs malheurs, dans leurs peurs. Elle s’était oubliée pour eux. Elle s’était entaillée pour ne pas les froisser, les effrayer, les rendre vulnérables face à sa fureur. Elle s’était conformée. Mais trop, beaucoup trop pour exister pour de vrai. Ce n’était pas son costume que Logan avait vu en premier, c’était toutes ces entailles qu’elle s’infligeait elle-même pour contenir tout ce qu’elle était. Il avait vu la peau ensanglantée, la rage monstrueuse qui s’écoulait de ses veines ouvertes et il avait méprisé ces bandages qui aidaient à les recouvrir comme on met un drap sur un corps mort. Lui, ne craignait pas de voir un cadavre, ne craignait pas de voir les blessures. Il les préférait sûrement d’ailleurs, y reconnaissait les siennes. Il était apparu tout aussi blessé qu’elle et elle ne lui avait donné que de l’espoir comme remède ; mais l’espoir ne pouvait faire disparaître ces maux. Elle s’était trompée et ce n’était qu’en cet instant qu’elle s’en rendait compte, qu’en cet instant qu’elle comprenait.

A travers l’ouragan qui déferlait, sa main la guidait vers ses souvenirs et tout se mettait en place. Il donnait un peu de lui, choisissant habilement les moments de sa vie, pour faire grandir sa force, sa puissance. Il lui montrait le chemin, l’envoyait valser plus loin tandis que déjà elle revenait à la charge, plus véhémente encore. Résiste, donne tout ce que tu as, refuse la cage. Voilà ce qu’il lui disait vraiment. Voilà ce qu’elle voyait dans ce regard si intense qui l’enveloppait autant que son esprit le faisait.

Tu me vois ? Oui, tu me vois. Tu m’as toujours vue. J’ai tout fait pour y échapper mais maintenant je ne peux plus. Et voilà qu’aujourd’hui, c’est aussi toi que je vois.


Logan, je te vois.
Je te reconnais.
Je reconnais ta puissance, ta souffrance, ta solitude, ta rage exubérante.
Parce qu’elles sont aussi miennes.


Âmes jumelles. Destins croisés, emmêlés. Deux lignes se rejoignant dans un choc brutal.
De l’extérieur sûrement, l’on pouvait seulement croire à un affrontement sans état d’âmes mais personne n’aurait pu comprendre, personne n’aurait pu savoir ce qui se jouait vraiment. Ils se combattaient autant qu’ils se libéraient eux-mêmes de leurs enclaves, s’agrippant l’un à l’autre pour sortir de la terre dans laquelle ils étaient enterrés. Liant leurs mains, leurs bras, leurs esprits pour s’élever dans le souffle du vent, vers un ciel rougeoyant. La terre tremblait, se craquelait et ils sortaient enfin de leurs cercueils, de leurs linceuls.  

Et peu importait si la terre tremblait pour ceux qui les entouraient. Peu importait si le choc faisait naître la terreur chez les autres. Peu importait si on les regardait comme des monstres, comme des bêtes en cet instant.

Je leur ai tout donné et j’ai tout perdu. Aujourd’hui, je reprends mon dû.
Aujourd’hui, je m’élève enfin.
Mais je ne peux pas le faire seule. J’ai besoin de toi, de ta rage, de ta fièvre pour trouver la mienne, pour la laisser sortir. J’ai besoin de ta violence, de ta puissance pour répondre à la mienne. Seul être au monde qui puisse me tirer de terre, seul être au monde qui puisse me voir. Je ne suis pas sur ton chemin pour rien. Il me fallait une bataille pour renaître et tu es cette bataille.


Et pourtant, il n’était pas son ennemi. Il était son adversaire par la force des choses, par la violence de leur libération. Parce qu’il n’y avait que comme ça que leurs chaînes pouvaient se briser. Mais c’était un tout autre rôle qu’il revêtait.

Le raz-de-marrée s’était décuplé, s’était écrasé sur les murailles de la forteresse pour la faire ployer mais c’était au moment où la sorcière se fit entière, les deux faces de la lune ne faisaient qu’une, qu’elle avait senti la surface craqueler légèrement. Juste assez pour que l’ondulation la fasse exploser d’extase, de jubilation. Et puis le geste avait été arrêté, maîtrisé, interrompu par la force de Logan. L’ivresse de la victoire se lut dans ses yeux flamboyants, illuminés par l’intensité de cette sensation étourdissante. Une courte, toute petite victoire, mais une victoire néanmoins.

Elle se sentait entière. Entière. Un mot qui prenait soudainement tout son sens, tout son pouvoir. Elle en aurait hurlé de plaisir et de douleur tout à la fois tant c’était fort, incontrôlable, la surpassant complètement dans l’intensité des émotions.

« Ah la voilà qui concède une forme d’acceptation de ses deux visages… »
Elle la voyait cette joie du professeur qui regarde son élève atteindre un nouveau palier, comprendre, s’approprier elle-même les armes qu’il lui pointait du doigt. Cette lueur dans son regard s’était allumée instinctivement.
« Et le voilà qui concède à reprendre sa place... »

Celle dont il ne bénéficiait plus du titre, celle qui avait été la sienne auparavant...celle, sûrement, qu’il avait rejeté. Mais il y a certaines choses qui s’imposent d’elles-mêmes, certains pouvoirs, certaines habilités qui ne peuvent rester plus longtemps en sommeil, et qui sont destinées à refaire surface, par la force dévastatrice de l’instinct, de la nature même de tout être.

« Rien de plus tranchant et résistant qu’un alliage, là où le matériau brut ne cesse de céder. »

Elle ne cèderait plus.

Il s’élevait sous ses yeux et il l’emportait avec elle. Il l’engloutissait totalement et elle ne sentait plus que lui dans le tourbillon qu’ils étaient. Ou alors, était-ce lui et elle mélangés ? La tempête rugissait toujours mais elle se transformait, déchaînait des flots nouveaux, ravageait la conscience de tout ce qui était extérieur. Elles battaient en elles autant que contre lui, ces vagues brutales qui rendaient sa peau fébrile. Sa poitrine se soulevait par frénésie, haletante. L’orage ne se calmait pas, il prenait de l’ampleur. Il ne s’arrêtait pas, il se mouvait différemment, s’épaississait, grondait. Tout était électrique. Tout lui échappait. Ses doigts picotaient de tous les gestes qu’elle avait toujours réprimé. Son esprit se faisait instable, désordonné, torrentiel.

Alors, elle sentit la main de Logan glisser dans son dos, faire onduler le tissu blanc de sa robe qui l’emprisonnait toujours, son regard toujours planté dans le sien. Elle ne pouvait s’en détacher, s’en extraire. Elle ne le voulait pas. Elle en avait besoin de cet ancrage dans la tempête. Et il lui semblait qu’elle étouffait de sentir ce pouce contre sa colonne, au creux de ses reins, ses doigts se planter dans sa hanche. Son corps ondulait lui aussi à son passage, frissonnant. Ses mains à elle s’abaissèrent, glissèrent le long de son visage, jusque dans son cou. Sa peau lui brûlait les paumes. Elle le sentait pulser, ce désir impétueux. Et elle perdait tout contrôle alors que leurs souffles se mêlaient. Ce souffle...celui de la vie pour laquelle ils s’acharnaient.

L’étreinte de leurs corps répondait enfin à celle de leurs esprits et le choc se préparait.

Là, dans le fond de ses entrailles, la peur refaisait surface, un autre monstre à la tête ignoble. Fantôme envahissant. Fais-le disparaître Logan. Détruis-le. Empoigne-le et serre-le si fort entre tes mains jusqu’à ce qu’il ne soit plus, ne me prenne plus aux tripes. Libère-moi de lui. Libère-moi. Tout court. Je ne veux plus de mes entraves, je ne veux plus de mes barrières. Je ne veux plus de cette robe d’innocence et de lumière. Elle n’est que retenue, que chaîne, que douleur sur ma peau. Recouvre-moi plutôt de la tienne, chaude et vibrante, parfait écho de la mienne. Laisse-moi trembler entre tes bras, hurler non pas de peur, de rage, d’effroi, mais pour une fois, pour la première fois de mon existence, de ce plaisir qui m’était interdit. Je le veux tout entier, je veux qu’il m’embrase enfin d’avoir été trop dénigré, ignoré. Laisse-moi vivre pour la première fois, là, sous tes mains féroces, sous tes lèvres conquérantes. Je ne pense plus aux convenances, aux valeurs, aux excuses à donner. Je ne veux plus de ces boulets à mes pieds. Pour un instant, juste un instant, je veux exister. Purement. Simplement. Tu me vois et je te vois. Face à face, plus nus que jamais bien que toujours habillés, nos esprits déjà se sont mêlés et il ne reste plus que les corps pour quémander l’assouvissement de leurs désirs.


A l’instant où les lèvres de Logan vinrent s’emparer des siennes, son corps l’attirant brutalement à lui, l’enserrant dans ses ailes, contre son corps rempli de lave et d’acide, son esprit explosa, son corps s’enflamma. La collision lui vrilla les sens. Quand avait-elle été embrassée pour la dernière fois ? L’avait-elle déjà été avec une telle intensité ? Jamais. Jamais elle ne s’était sentie aussi vivante, vibrante. On aurait pu se sentir vulnérable, emprisonnée dans ces bras, mais elle ne ressentait que la puissance qui l’animait, la leur à tous les deux.

Alors elle prit ses lèvres avec autant de fougue, de violence qu’il le faisait lui-même. Elle le goûtait avec toute sa hargne. Ses mains agrippèrent ses épaules, son dos, cherchaient, se plantaient dans le tissu du vêtement, le froissaient, prises d’une frénésie délirante. La douceur de ses lèvres, la chaleur de son souffle, de son corps. Le désir palpitait en elle, tambourinait violemment contre chaque parcelle de sa peau. Ses doigts tirèrent le tissu qui l’empêchait de le sentir contre ses paumes. Elle le réclamait ardemment. Oui, elle le réclamait comme un ordre, comme un appel qui résonnait, tonitruant, contre les murs de la pièce. Fureur d’une envie qui voulait tout dominer, tout prendre.  Ses mains glissèrent par-dessous le vêtement, empoignant sa peau brûlante. Son corps se colla au sien comme si elle voulait se fondre en lui, disparaître et renaître à chaque geste, à chaque gémissement qui voulait s’échapper de sa gorge comme les secousses désespérées de son âme. Son bassin rencontrait le sien sans douceur, quémandant, suppliant alors qu’elle savourait sa bouche, se délectait de son goût, de son souffle. Mais ça ne suffisait pas. Sa bouche traça sa mâchoire, descendit dans ce cou où tout pulsait. Ses lèvres touchèrent la fournaise de cette peau. Elle la mordit instinctivement, parce qu’en cet instant, elle voulait le dévorer autant qu’elle voulait qu’il la dévore. Ce plaisir, elle voulait le prendre, il était sien. Et elle comptait s’en emplir tout entière.  
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Ven 7 Aoû 2020 - 2:25
Avant d’être sur cette terre,
Je sens que jadis j’ai plané ;
J’étais l’archange solitaire,
Et mon malheur, c’est d’être né.

Il n’avait pas prévu ça. Il l’aurait pu, bien entendu, en la découvrant pour la première fois, perçant ses défenses, soulevant le masque sans la moindre retenue, perçant à jour la poupée drapée de perfection. Là, sous la surface, se trouvait son alter égo. Avait-il jamais lâché parfaitement ne serais-ce qu’une seule fois les chiens fous de son propre esprit ? Plus depuis qu’il avait appris à en contrôler la meute, pas même quand il perdait le contrôle, une partie de lui-même restait là, à les maintenir en laisse par réflexe. Et quand ça n’était pas le cas ; il tuait.

Et je suis l’habitant tranquille
De la foudre et de l’ouragan.

Mais pour une fois, il n’avait pas l’impression de se trouver étranger. Pas besoin pour lui de faire tomber les digues quand seuls les regards suffisaient à se comprendre. Quelle sensation étrange que d’être entendu quand toute sa vie, il n’avait affronté qu’incompréhension et rejet. Même dans les yeux de la seule qui avait pu lui accorder confiance et amour, il savait qu’ils brûlaient encore, ces monstres d’angoisse.  Et les siens alors ? Ceux qui l’exilaient sans cesse loin des Hommes ? Ceux qui entravaient son être sans cesse ?

Tu compares, sans me connaître,
L’onde à l’homme, l’ombre au banni.

Lui qui s’était laissé glisser dans les ombres en perçait de nouveau la surface, rugissant à l’air libre à son tour, piqué au vif par la présence d’un semblable. Enfin, celui-ci prenait la place qui lui revenait de droit. Enfin il agissait de concert, enfin, il s’élevait à son tour. Il gronde, le monstre tapis dans l’ombre, ricane, ses muscles frémissent, sa poitrine se gorge de cette joie immonde d’être enfin reconnu. De sentir enfin l’acide dans ses veines, la violence dans sa gorge. Ô quelle extase que de sentir enfin un semblable apte à entendre, voir et sentir. C’est bien Sana, viens, brise les murailles, montre ta force toi aussi, bien trop assagie depuis des années. Exulte, existe ! Nourris-toi de violence, emplis-toi de véhémence. Comme cela changerait que tu saches pulvériser ces murs si longtemps érigés. Bordel, je veux vivre, je veux être, je veux cesser de m’enchaîner sans cesse au dos de leurs veines existences. Je rejette les abysses, refuse leurs méandres, juste un peu, juste en ton contact ; laisse enfin effleurer la surface d’un esprit destructeur qui enrage d’exister.

Cessez de nous nier. Cessez de nous étouffer sous vos misérables angoisses. Vous nous muselez, vous nous brisez par vos vaines angoisses. Qu’importe leur légitimité, nos sommes là, plus puissants que vous ne pourrez jamais l’être. Si je me permettais seulement, de briser vos esprits…

Ah ce monstre. Cette envie de mettre le feu et d’observer le monde brûler, un sourire aux lèvres. Besoin de destructions, besoin de domination, besoin de prendre le monde sans lui donner l’occasion de résister, de rendre les coups, de blesser à son tour.  

Pourtant il ne le faisait pas, pas même sur elle, ne cherchant pas à la détruire malgré la douleur qu’ils s’infligeaient l’un l’autre depuis le début. Finalement, bien au contraire, n’était-il pas en train d’y construire quelque chose ? Rien qu’une idée.

« Et le voilà qui concède à reprendre sa place... »

Un sourire sauvage se dessinait sur ses lèvres étirées. Sa place oui. Celle qu’il cédait, qu’il oubliait là, engoncé dans le fond d’une cellule glaciale durant des mois. Celle de l’enseignant qui ne cesse de reprendre son rôle même lorsqu’il ne l’a pas décidé. Sans doute cela faisait-il parti de lui. Comme l’incapacité de se laisser abattre tout à fait. Le refus de céder, la rage à jamais inassouvie.
L’orage aurait pu se calmer, bien sûr, dans l’allégresse de sa réussite. Rien qu’une entaille, une faille dans ses murailles, une victoire à laquelle aucun de ses bourreaux n’avait su accéder. Pourtant autour d’eux, en eux, le tumulte envahissait toujours l’espace, trop heureux d’y trouver enfin sa liberté. Trop heureux que l’autre le laisse enfin exister, leurs besoins se répondant l’un l’autre dans une forme de brutalité parfaitement acceptée. Oui, ils auraient pu se séparer à présent, calmer l’orage, apaiser l’ouragan. Pourtant il l’attirait bien au contraire un peu plus à lui, une main contre sa hanche, glissant sur sa peau, froissant sa robe, y détectant la chaleur de son corps dont il s’approchait encore. Ses mains à elle glissaient sur son visage, le long de ses joues, atteignant son cou. Deux gestes miroirs, l’une s’abaissant, l’autre grimpant. Deux gestes d’une simplicité parfaite, brisant pourtant le reste de distance qui subsistait entre eux, instaurée par la poigne cinglante d’une rigueur qu’ils s’imposaient tous deux dans leur vie quotidienne. Cette retenue, ces entraves, il les maudissait en cet instant, les rejetait au loin, les brûlait avec sa robe de lumière, les stigmates de sa perfection perverse.

Oui, mon malheur irréparable,
C’est de pendre aux deux éléments,
C’est d’avoir en moi, misérable,
De la fange et des firmaments !

Le soubresaut dans son esprit, l’onde d’envie, puissante, dévorante, l’avait percuté à l’instant même où il prenait possession de ses lèvres, l’agrippant à lui, son corps appelant le sien, ses sens explosant dans un organisme pourtant tellement meurtris. Combien de temps sans avoir été en contact avec un être humain sans qu’il ne s’agisse que de torture ? Combien de temps sans ressentir la chaleur ou l’envie ? Est-ce que le souvenir d’Aileen brûlait ses rétines un instant alors que le désir se mettait à cogner dans sa cage thoracique ? Bien entendu. Mais elle ne revenait pas, ils étaient finis tous les deux, il le savait parfaitement et ce, depuis des mois. Ça n’était qu’une confirmation. A vrai dire, ça n’avait jamais été voué qu’à de la souffrance et il le savait aussi bien qu’elle, n’avait cessé de lui clamer. Une fois de plus, il avait eu raison dans son cynisme. Alors l’image venait et repartait comme elle était venue. Pas le moment, pas le contexte, pas même vraiment d’importance à vrai dire. La concernant, sa décision était prise depuis longtemps, il manquait simplement de courage, repoussait bien des batailles… jusqu’à cet instant. De nouveau, enfin, il lui semblait que cet affrontement l’arrachait aux ombres de son propre esprit, le propulsait avec violence dans le monde des vivants, son corps entier vibrant d’envies et de désirs. Envie d’elle autant que de victoires. Besoin de ressentir quelque chose, qu’importe si ça passait par la violence. Il avait grandit et s’était construit à travers elle après tout. Qu’importe donc, puisqu’elle réclamait la même chose que lui, âme jumelle empêtrée dans les mêmes démons, brutalité solidaire. A son contact, son corps entier s’embrasait, déjà attisé par l’affrontement des esprits acharnés, le rapprochement de leurs peaux ne provoquant que la dernière étincelle dont le brasier avait besoin pour l’enflammer tout à fait. Malgré ces derniers mois, malgré le rejet systématique des autres, malgré tout, parce que le contexte faisait que tout ça se trouvait mis sous clé l’espace de quelques instants, comme repoussé par le cataclysme qui dévissait autour d’eux, happé par la normalité, là, dehors, loin.

Sensations oubliées qui lui vrillaient les sens.

Son ardeur l’embrasait, son envie percutait la sienne, accélérant les souffles, faisant frémir les muscles, frissonner la peau. La sensation du tissu de son t-shirt soulevé par ses gestes erratiques, hachés d’une envie qui prenait le pas sur elle le brûlait presque alors que ses mains rejoignaient sa peau, ses lèvres les siennes, puis s’en arrachant pour glisser contre l’os de sa mâchoire, ses mâchoires d’y refermant, morsure sublime d’une passion dévorante. Un souffle entre ses lèvres. En vie. C’est sans doute con comme sensation, aberrant même pour tous ceux qui ne s’étaient pas muselé durant des mois, des années, toute une vie. Aberrant, oui, mais pas pour celui qui s’est tu jusqu’à s’enterrer vivant.

Ses mais glissaient à présent contre ses hanches, remontaient le long de son corps, dessinaient la base de ses seins, les effleuraient d’un pouce pour y renoncer finalement, ses doigts imprimés dans sa chaire alors qu’ils redescendaient sur ce corps qu’il grifferait presque de passion. Le tissu ne suivait pas, bloqué par ses épaules bien sûr, mais s’y froissait, relâchait la pression par soubresauts, lâchant quelques ondes répercutées sur le corps bouillant de la jeune femme alors qu’il en explorait les hanches, accolant encore ce bassin qui l’appelait contre le sien, brûlant d’envie alors qu’il glissait ses mains sur ses cuisses si fines qu’il en faisait le tour de ses mains avides. Alors il remontait, attrapait une cuisse d’une main, la propulsant de l’autre, s’assurant qu’elle trouvait prise sur lui. Une main sous elle, l’autre venait percuter la glace qui, sous le trop plein de tension qui crépitait dans l’air, se fissurait soudainement. La sienne ? Sa magie ? Il en doutait. Celle de Sanae plus probablement. Explosive, fiévreuse, ingérable même par instant. Dieu qu’il en exultait.  Leurs corps comme imbriqués, n’attendant que de suivre le chemin de leurs esprits, se pressaient contre la baie vitrée alors qu’il venait prendre une nouvelle fois ses lèvres, vorace, en pinçant l’inférieur, quelques secondes d’une pression  de sa mâchoire affamée. Nouveau grincement de la vitre : la fissure s’agrandissait. Alors il la soulevait un peu plus, affirmant sa prise, la basculant jusqu’à la table où il la posait en venant gouter le sel de sa peau, la naissance de la gorge, les prémices de sa nuque, le lobe de son oreille fait prisonnier à son tour, de la même manière que sa lèvre quelques instants plus tôt.

Se nourrir d’elle, de sa fureur, de ses envies, de la liberté brûlante, inassouvie qui se dégageait de chaque pore de sa peau….

Enfin libre de ses mains, il les remontait le long de ses cuisses, repoussait un peu plus le tissu déjà remonté par la force des choses, en effleurait celui qui demeurait sous la surface, le calant contre son pouce quelques secondes pour le tendre et en relâcher la pression. Il le sentait claquer tout contre sa peau pâle alors qu’il se dégageait du tissu de la robe, passant de nouveau par-dessus pour courir sur son corps jusqu’à la fermeture qu’il abaissait déjà, plus par magie que par l’action de ses doigts blessés d’ailleurs. Mais il n’en avait plus tout à fait conscience.

D’ailleurs de ce qui recouvrait la table, tout avait volé, s’écrasant un peu plus loin. Ironique de penser qu’elle posait chaque jour ses pâtisseries ici même. Les convenances faites femme. Une excellence de pureté qui avait volé en éclat, la laissant enfin exulter comme elle le réclamait depuis toujours.

Arrête donc de te contenter de peu, de te restreindre. La peur n’a plus sa place, elle ne peut que s’écraser contre mes parois de glace. Exulte, Sana, respire, rien ici ne peut être véritablement détruit.

A part peut-être la baie vitrée.


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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Dim 9 Aoû 2020 - 16:11
 


Son âme est comme l'orage
Qui gronde dans le nuage
Et qui ne peut éclater,
Comme la vague captive
Qui bat et blanchit sa rive
Et ne peut la surmonter.

Elle s'use et se consume
Comme un aiglon dont la plume
N'aurait pas encor grandi,
Dont l'œil aspire à sa sphère,
Et qui rampe sur la terre
Comme un reptile engourdi.

Durant des années, l’orage était resté haut dans le ciel. Il s’était confondu aux nuages, s’était fait le plus silencieux, les grondements de sa rage résonnant comme de discrets avertissements. Pudique, il avait demeuré caché, trop soucieux de son propre déferlement. Là, présent quelque part, contenu dans les abysses d’un ciel qui se voulait ombragé tout là-haut mais qui donnait aux yeux qui se levaient vers lui, seulement un bien bel azur. Couche sur couche, l’orage se barricadait, attendait, soupirait de lassitude, de frustration de ne pouvoir éclater. Les vagues en contrebas étaient attentives à son ouvrage : elles guettaient l’impulsive rage qui, d’être restée trop longtemps enfermée, ne pouvait qu’un jour se déchaîner.

Un regard enfin se levait vers le ciel et perçait les défenses. Il souriait à l’orage, attendait la pluie, l’ouragan. Venez les vagues, gronde le tonnerre, assombri ce ciel, fait couler ta pluie battante qui veut geler les os, tremper la terre. Déverse-toi.

Alors, le vent se mettait à souffler, libéré.
Alors, les éclairs griffaient d’un seul coup foudroyant un ciel qui se noircissait.
Et les vagues répondaient au signal, agissaient de concert, déployaient leurs langues humides par-dessus la rive, par-dessus les rochers.

Elle avait entendu son cri et le sien s’était fait écho.

Quelque chose en moi soupire,
Aussi doux que le zéphyr
Que la nuit laisse exhaler,
Aussi sublime que l'onde,
Ou que la foudre qui gronde ;
Et mon cœur ne peut parler !

Peut-être finalement n’était-elle que l’océan qui répondait au ciel. Logan était l’orage qui éclatait enfin et elle, la tempête des eaux trop longtemps en sommeil. Ou était-ce le contraire ? Qui était qui ? Qui avait appelé qui ? Elle ne le savait plus. Ils se confondaient, se répondaient, criaient le nom de l’autre en un seul terme puissant « Monstre ! ». Montre-toi. Entend mon appel. Cri mon nom. Je te répondrai par ma rage, par ma passion. Furie contre furie, violence contre violence, mais de concert, toujours, alliant leurs forces, se combattant d’une même poigne ferme, exultant dans le même désir de se défaire de leurs chaînes. Deux puissances en miroir qui déchaînaient leurs foudres. Elle aimait trop la brûlure de ses éclairs et il se repaissait du sel de ses flots.

L’instant était trop beau, trop extatique pour que tout s’arrête, que tout s’apaise brutalement après qu’ils se soient reconnus. Non. Ils se rejoignaient, s’entremêlaient, hurlaient d’une seul voix. En harmonie dans le tourbillon de leurs êtres. Quelle sensation brutalement enivrante que de sentir cette corde entre eux faire apparaître sa tension soudaine, étirée entre leurs corps, les attirant soudainement si près qu’il ne restait que la fusion pour compléter le geste.

Avait-elle jamais senti cette chaleur l’enflammer ? Avait-elle jamais éprouvé cette sensation étourdissante du désir qui se faisait Roi, qui se faisait tempête, qui se faisait maître absolu de tout ce qui la constituait, de chaque parcelle de peau, de chaque soupir exalté, de chaque frisson et tremblement incontrôlés ? Il lui semblait qu’à son contact, les flots étaient montés si haut qu’ils s’écrasaient d’une violence inouïe sur tout ce qui les entourait. Elle était elle-même ballottée par l’explosion de ses sens, par cette envie fulgurante qui cognait contre sa poitrine, qui lui brûlait le ventre, les reins, les cuisses. C’était tout son corps en cet instant qui se réveillait, qui quémandait, qui suppliait qu’on le touche, qu’on le morde, qu’on le broie presque par des poignes enfiévrées. Ses lèvres avaient pris les siennes, étaient venues la goûter et il avait fait flamber son désir prêt à exploser ; tout alors n’était que grésillements dans ses oreilles, que frissons, que sueurs, que gestes pleins d’une passion qui ne s’était jamais exprimée.

Elle les avait toujours tenu à l’écart, ces mains, ces bras, ces langues qui l’avaient jadis voulu. Des baisers chastes, des regards langoureux, mais à chaque fois interrompus, réprimés, repoussés, enterrés dans les limbes d’un esprit qui redoutait trop sa propre nature pour lâcher la bride. Pour la première fois, elle pouvait dire : Je te veux. Et je t’aurai, là, sous ma bouche gourmande, sous mes doigts avides, contre la chaleur de mon corps. Je te veux et je ne me réprimerai pas. Je ne détournerai pas mon regard du tien, si fiévreux. Je ne retiendrai pas mes cris, mes gémissements. Je ne repousserai pas tes mains puisque je les cherche, je les réclame.

La seule chose qu’elle repoussait, c’était la peur. Tenace, vicieuse, sinueuse. Elle voulait reprendre son empire, retrouver son trône mais la porte demeurait close. Souffre de ta solitude, vaine émotion,  savante angoisse qui se nourrit de tout. Je m’emploie à te faire plier, à te gouverner et je t’envoie valser contre les murs de la forteresse de celui qui te fait fuir. La Peur qui a peur. Un contact, un regard, et elle s’en va. Une parole, une présence, et elle se tasse. Un nom, et elle sait qu’elle doit disparaître. Elle tentait, dans son acharnement, de revenir mais elle se brisait sans cesse sur la glace.

Regarde comme je suis puissante ce soir. Regarde comme il fait naître mes flammes d’un seul souffle. Regarde comme nous nous moquons de toi, nous rions aux éclats devant ton poison. Nous nous enivrons du pouvoir de l’autre et alors il n’y a plus de place pour toi. Je me libère de ton emprise.

Et je m’anime.


Tout lui échappait à vive allure. Etait-ce cela le désir, la passion ? Etait-ce ce cri du corps qui semblait tendre tout entier vers ce qu’il voulait ? Etait-ce seulement chez eux qu’il se nourrissait de violence, de rage ? Pourtant, ni lui ni elle ne reculait devant ces envies qui dévastaient la raison.
La chaleur de sa peau, celle de ses flancs, celle de son dos, lui brûlaient les doigts, les paumes. Mais elle s’accrochait, elle l’empoignait avec fougue, comme si elle aurait voulu mouler ses mains dans cette chaleur. Et dire que depuis qu’elle venait le voir, pas une seule fois elle n’avait pu s’approcher, le toucher, le soigner. Pas un seul contact physique. Il ne les supportait plus. Etrange sensation de ne pas toucher un être qui demeure là, immobile, silencieux pendant autant de temps : on se demande alors parfois s’il existe vraiment. Mais il existait, brutalement, comme tiré de la terre, tiré du néant, des limbes, des entraves d’un désespoir qui l’avait englué, et sous ses mains, elle le sentait vivre, palpiter, frémir. Et elle frémissait en retour lorsqu’elle sentit ses mains remonter sur ses hanches, jusqu’à la naissance de ses seins...Un soupire exalté lui échappa quand il les effleura. Oui ! Il y renonça pourtant et immédiatement se fit entendre un grognement insatisfait, râleur. Elle griffa ses épaules, passa ses bras par-dessus pour coller son corps complètement contre le sien, sa poitrine frotta son torse. Sa petite robe blanche, risible, se froissait sous l’ardeur des gestes, comme la surface de l’eau qui se ridait sous le souffle du vent et s’agitait, malmenée. Et bon sang ce qu’elle pouvait aimer ça...Quelle ignoble erreur de s’en être coupée toute sa vie. Quel manque atroce elle avait ressenti, quelle corde douloureuse que celle qui avait retenu son désir.

Elle mordillait son cou, en embrassait la peau qui vibrait, descendait sur l’épaule dont elle tirait le tissu pour la découvrir. Et lui, faisait glisser ses mains sur ses cuisses...Ses doigts sur la peau de ses cuisses la fit se tendre, les muscles de son dos roulèrent. C’était comme si Logan déverrouillait des parties de son corps qui prenaient vie sous ses caresses, contrées jusqu’alors jamais touchées par d’autres mains que les siennes….encore que...elle n’avait jamais vraiment osé. Parfois ses doigts, tremblants, hésitants, terrifiés, s’étaient glissés vers elle-même mais ils renonçaient toujours. Découvre-moi Logan.

Et comme elle voulait le découvrir aussi…

Sa main attrapa une de ses cuisses et la remonta, et déjà il l’aidait à se propulser sur lui, écartant les jambes pour s’enrouler autour de sa taille, agrippée à ses épaules. Les gestes se faisaient pressants. Aucune hésitation. Aucun moment de réticence. Hier, elle n’aurait jamais pu consentir à accueillir un corps entre ses cuisses, elle aurait nié le désir qui ravageait son bas ventre. Car de sentir ce bassin contre le sien, d’entourer ses hanches de ses jambes, elle sentait son coeur s’accélérer dangereusement.

Désir si ardent de se sentir vivre. Je t’ai longtemps rejeté, je t’ai longtemps ignoré. Et maintenant tu me dévores. Tu coupes ma respiration, me fait perdre l’équilibre. Tu enflammes tous les pores de ma peau, tu donnes des envies à ma bouche, à mes mains. Tu balayes tout sur ton passage et tu me laisses ivre. Ivre de lui, ivre de moi-même.
Et j’aime ça.


Son dos rencontra la baie vitrée alors qu’un sourire carnassier, gourmand, presque victorieux d’enfin obtenir ce qu’elle voulait, apparaissait sur ses lèvres. La main de Logan percuta la vitre et l’impact alluma une étincelle de plus dans le regard de la sorcière. La vitre, derrière eux, déjà malmenée par l’électricité qui régnait dans la pièce, se fissura en travers. Craquait-elle sous la poids de sa magie ? De la leur ?

Quelle importance quand il venait reprendre sa bouche… ?

Plus rien d’autre n’existait autour. Juste l’explosion de deux volcans mêlant leur lave.

Il coinça sa lèvre inférieure avec sa mâchoire et la sorcière ne retint pas son gémissement. Il était aussi affamé qu’elle et de voir cet appétit commun ne faisait que renforcer le sien, que l’encourager, le faire grandir. Voraces, ses lèvres ne laissaient pas de répit aux siennes. Oui, il avait faim lui aussi. Faim de tout. Il revenait d’un long jeûne solitaire, enfermé dans un esprit dévasté, et la faim lui brûlait maintenant le ventre, la gorge… Ne te retiens pas Logan.
Un autre craquement annonça l’agrandissement de la fissure.

La vitre se fend sous notre puissance. Comme une pauvre âme trop sensible, trop fragile. Est-ce que c’est ce sentiment de victoire, de dominance, qui te manque Logan ? Est-ce que tu regrettes enfin le champ de bataille ? Est-ce qu’après ce soir, tu continueras à te battre ?
Ce souffle de vie durera-t-il après son passage ?


Il la porta plus fermement et se tourna pour la déposer sur la table. L’ironie. Oh, comme cela te plaît n’est-ce pas ? De me voir exulter librement sur cette table où je m’évertuais à jouer les femmes parfaites…

Ses lèvres quittèrent les siennes et migrèrent, voyageuses insatiables, vers sa gorge. Elle rejeta légèrement la tête en arrière, sa longue chevelure touchant presque ses fesses, et ses paupières se fermèrent quelques secondes. Derrière ses yeux clos, il n’y avait que des lumières vives, des flamboiements. Oh, comme elle avait chaud. Trop chaud. Comme dans un sauna où la chaleur vient nous englober, s’infiltrer dans nos poumons, nous recouvrir entièrement comme si elle nous léchait le corps par son seul contact. Une caresse brûlante de l’air. Les lèvres de Logan étaient cette caresse. Et voilà qu’elles descendaient sur sa nuque et venaient enfermer le lobe de son oreille.
Elle se mordit la lèvre, haletante, alors qu’elle sentait ses mains remonter sur ses cuisses, repoussant davantage le tissu de sa robe. Bon sang, ce qu’elle voulait s’en débarrasser ! Chaque vêtement, chaque barrière était un obstacle qui faisait grimper son impatience et cela la démangeait de tout déchirer, de tout enlever d’un seul coup. Mais Logan prenait son temps, la faisait trembler à chaque geste de ses doigts, aussi infime soit-il.

Sans doute était-ce ce petit geste, minuscule, dérisoire, un léger mouvement du pouce calant le tissu de son sous-vêtement pour le tendre et le relâcher, qui réussit à la faire basculer davantage. Le tissu claqua contre sa peau qui frissonnait déjà mais qui sous l’impact vif, inattendu, se crispa délicieusement. Un sursaut de ses cuisses, son dos se tendit, s’arqua alors qu’il abandonnait ses hanches et faisait courir ses mains jusqu’à la fermeture qui s’abaissa.

Oui, libère-moi...

Le tissu était pourtant toujours tenace. Mais elle ne voulait plus patienter, elle ne voulait plus jouer. Elle voulait prendre, diriger, assouvir sa faim. Ses jambes s’enroulèrent plus fermement autour de lui, l’agrippant entre ses cuisses pour l’y enfermer, son bassin cognant contre le sien. Elle saisit sa nuque et reprit ses lèvres pour les capturer sauvagement, mordillant la sienne, le savourant sans honte, sans gêne. La sorcière ne voulait pas retenir son euphorie. Oui, son euphorie...c’était bien le seul mot qui pouvait définir ce qu’elle ressentait, là tout contre son corps. Une euphorie qui la faisait presque voir trouble, qui la faisait bouillir intensément : lèvres gonflées, les roues rougies, ses cheveux détachés libres de toute attache. Et ses yeux...luisants d’envie, de violence, de passion. Une révolution intérieure. Une révolution qui ne se contentera pas seulement de faire du bruit, de marquer un tournant, non, elle voulait tout dévaster. Tout prendre, tout goûter, tout vivre.

Et la baie vitrée se fendit plus encore.

Ses mains attrapèrent le t-shirt du sorcier et le souleva, le tira jusqu’à la faire passer par-dessus sa tête. Elle ne demandait pas une permission désuète, elle l’avait déjà. Elle n’attendait pas qu’il le fasse lui-même, elle ne voulait pas attendre. Capricieuse envie de poser sa bouche sur son torse. Et elle le fit, dès que le tissu fut jeté au loin. Elle se fichait des cicatrices, des marques, des vieilles entailles. Elle se fichait qu’il soit le déshonneur, qu’il soit craint, qu’il soit méprisé, qu’il soit rejeté, taxé d’abomination, taxé de sans coeur, taxé de monstre. On revêtait bien des visages face aux regards qui se posaient sur nous. Tout ce qu’elle voyait, c’était qu’il était comme il était, et qu’il ne s’en excusait pas. Tout comme elle n’avait plus envie de s’excuser, elle.

Là, tout de suite, plus rien n’a d’importance.
Juste toi.
Juste moi.
Sans honte.
Libres.


Ses doigts relevèrent légèrement son menton pour déposer ses lèvres sur sa gorge, les faire glisser, chaudes et gourmandes, jusqu’à sa clavicule. Ses mains, rudes exploratrices, touchaient, grimpaient, descendaient, semblaient vouloir se graver dans sa peau. Elle embrassait le haut de son torse alors qu’une main agrippait sa hanche et l’autre, vile tentatrice, mesquine vengeresse, faisait descendre ses doigts fins sur son ventre, suivant une ligne...lentement...lentement...s’arrêtant à la limite du pantalon, en traçant la ligne par pure provocation. S’y arrêtait-elle vraiment ? Non. Bien sûr que non. Son pouce passa entre la peau de son bas-ventre et le jean, en caressa une demi-seconde le tissu plus épais, avant de venir se glisser derrière un tissu plus fin, plus discret. Là, la peau plus chaude encore l’appelait. Mais son pouce, cruel, s’amusa quelques instants de caresses avant de disparaître en surface, et la main descendit sur le jean, évita délibérément cet endroit qui se tendait, qui pulsait, et passa sur l’intérieur de la cuisse, en empoigna la chair à travers le vêtement.

Et son visage se relève vers le sien, et reprend ses lèvres, amusée.






Extraits du poème Désir, d'Alphonse de Lamartine.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Ven 14 Aoû 2020 - 16:14
Oh non, ça ne s’arrêterait pas ainsi, pas si tôt, pas alors qu’enfin la lave brûlait ses veines. Le poison de la vie en jaillissait, sourdant dans son organisme, rugissant une force d’être, de prendre, de combattre qui l’avait délaissé depuis sa sortie. Le monstre surgissait de nouveau, la pupille lumineuse, la rage dévorait ses entrailles. Celle qui lui avait permis de tenir sans cesse, de sourire, encore, face au monde, face à ses bourreaux, alors même que la situation n’appelait qu’au désespoir. Mais le monstre s’était tapis dans l’ombre, épuisé de se battre, épuisé d’exister et de ne trouver en son chemin que de veines batailles. Pourtant à l’odeur du sang, à l’excitation de la bataille, il s’éveillait. Parce qu’un autre lui répondait. Un autre s’attelait, là, à rugir plus fort que lui. Mieux encore, ils se mouvaient en cœur, se répondant l’un l’autre, s’activant comme par réflexe, enfin compris dans une rage sublime. Alors non, ça ne s’arrêterait pas ainsi. Pas alors qu’ils vivaient de nouveau tous deux, enfin libérés de leurs chaînes, enfin libres et sans entraves. Pas alors que le désir sourdait de nouveau dans chaque fibre de son corps pourtant éteint depuis des mois. Plus encore même peut-être que le temps de sa détention. Bien plus sans doute. Non, il ne s’éveillait pas, il grondait tel un volcan trop longtemps endormi, la roche se crevassait, écartelée sous la violence de son essor. Il ne répondait pas à l’appel, il le provoquait. Elle ne demandait plus, elle prenait, enfin. Des années resté dans le silence, dans l’absence de réactions. Elle prohibait ses émotions, ses besoins, s’empêchait de vivre pour peu qu’elle puisse blesser les autres dans un élan de force trop brutal. Cesse la prohibition, cesse la paralysie. Les interdits ne font qu’appeler la violence, les frustrations la dérive. La peur s’enfuis, acculée par deux esprits enragés de liberté. Tu ne me détruiras pas, tu pourrais y mettre toute ta force et ta volonté, tu l’as vu, sans maîtrise tu n’y parviendras pas. Et ce que tu crains c’est le dérapage,  la montée en pression, l’insécurité d’émotions explosives. Et elles ne sauront pas m’abattre.

Non, ça ne s’arrêterait pas car, enfin, en lui rugissait cette force de vivre, de s’élever contre les autres qui n’avait cessé de lui permettre d’avancer. Gamin rejeté il avait fallu faire face. Adulte épuisé, il s’éveillait de nouveau, et en lui cette rage sourde prenait de nouveau place. Sa place, celle qui lui était due. Celle d’un affrontement immuable. Celle qui prenait naissance dans les prunelles d’un adversaire. Car un tel être n’est pas forcément un ennemi. Alors oui, il luttait contre Sana bien autant qu’il l’accompagnait, mue par une dynamique qui, bien que similaire à celles qu’il entretenait souvent, lui était parfaitement étrangère. Pour une fois, ils s’exprimaient ensemble de besoins égaux, d’envies exaltées, de rivales attentes. Jamais elle ne s’était autorisé un tel lâché prise, mais cette tyrannie, il la connaissait, elle marchait depuis tant d’années à ses côtés qu’il avait simplement cessé d’y prêter attention. Parfois, ils dansaient ensembles, parfois, ils accordaient leurs violons tandis que Sanae réfutait le simple fait de se donner une chance d’exister. Mais malgré ces quelques accords entre eux, il n’était rien de plus qu’elle. Rien de plus qu’esclave enlisé dans des promesses insatisfaisantes. Rien de plus, rien de moins non plus que celui qu’il se refusait d’être. Celui qui s’endormait, qu’il bâillonnait sans cesse.

Qu’importe les autres, qu’importe leurs attentes, qu’importe leurs douleurs, je m’en fous ! Je veux exister, rien qu’une fois, rien que pour moi. Sans leurs vils besoins, leurs chaînes infâmes, leurs besoins risibles. Ne plus les prendre en charge, ne plus me taire pour apaiser leurs pauvres âmes si fragiles. Ne te contient pas Sanae, juste cette fois, explose de toute ta rage et ta puissance. Juste cette fois, oublie ces chaînes qui se sont faites tiennes au fil des ans. Elles brûlent sous ta chair, mais laisse –moi les en arracher. On se fout de leur justice, on se fout de leurs croyances. Il n’est pas l’heure pour l’espérance, pas l’heure pour la mesure.

L’heure de pulser, l’heure de briser, l’heure d’exister, qu’importe le fer des barreaux de nos cellules, qu’importe la profondeur à laquelle ils ont enterré la frénésie de nos esprits.


Faim d’elle, faim de vivre, d’exister qu’importe les convenances. Faim de prendre, de posséder, de cesser la mièvre prudence. L’amenant sur la table où elle jouait jusqu’alors les humbles servantes d’une existence parfaite, il se moquait de ces caprices sociétaux, l’incitait à tirer un trait sur les masques qu’elle avait pu porter. Un jour, oui, il faudrait se calibrer, trouver un équilibre. Mais aujourd’hui, l’équilibre, il l’envoyait valser, donnant enfin la voix à un être qui n’avait cessé d’être muselé toute son existence. Un être qui mourrait de peur de hurler enfin à voix haute mais qui mourrait de se sentir enfin désiré. Car oui, il le voulait, il la voulait elle, ainsi, cette femme qu’on avait broyé sans cesse de toute son existence. Celle qu’on n’avait cessé de faire disparaitre, il la réclamait de toute son âme, tout son corps avec une puissance qui pulsait jusque dans chaque recoin d’un esprit qui s’était lui-même éteint durant plusieurs semaines. Et chaque geste l’embrasait, l’enflammait un peu plus quand sa peau trouvait la sienne, quand elle rejetait la tête en arrière, cherchant chaque contact, les désirant, les réclamant de chaque fibre de son être. Ce désir, elle ne le réfrénait plus, s’en mordait la lèvre, en tremblait, mais quitte à s’éveiller de nouveau,  s’il s’enflammait, il refusait de se consumer, prenant le temps de profiter de ce corps qu’il sentait se tordre à chaque caresse, chaque morsure. Ce corps qui n’en pouvait plus de désir. Car de corps, de chaleur, d’envie, il n’en avait plus ressenti depuis des mois et ce moment lui appartenait autant qu’à elle. Il voulait s’emplir d’elle, de ses soupirs, de ses grondements d’envie même, les graver en lui comme on pourrait le marquer au fer rouge.

Gravé d’envie.

Que cette sensation ne s’échappe plus à présent. Qu’elle reste inscrite dans ses veines et cogne sans cesse à jamais. Qu’elle l’enivre, le broie cette fois, oui, mais de cette violence absurde. Celle de vivre.

Il l’avait sentie basculer à l’instant même où le tissu avait claqué, embrasant définitivement ses sens, pulsant en elle de la violence du besoin, bien plus que de l’envie, le besoin impérieux, à son tour, de posséder, de cesser d’espérer mais de prendre, enfin, sans concession, sans demandes, sans gentillesses. Juste de s’assouvir.

Ses jambes s’enroulaient autour de son bassin, le sien venant heurter le sien, accélérant son souffle, vrillant ses sens.

Vient ! Prends, cesse d’être une pauvre petite chose docile !

Elle l’attirait à lui, l’emprisonnait même, venant prendre ses lèvres, les capturant sauvagement, les mordant, leurs souffles erratiques se mêlant, brûlants. Et un regard, bordel ces yeux… ils le consumaient intégralement quand, derrière eux, la vitre se fendait un peu plus. Cette lueur, cette flamme en elle dévorait tout, le noyait, l’assiégeait même. Mais elle n’était pas seule, sa jumelle calcinait ses prunelles sombres, trop éprise de liberté pour se contenir de quelque manière que ce soit. Cette acceptation totale, brutale, sans concession qui passait entre eux n’avait de sens qu’en réponse aux oppressions qu’ils s’imposaient, eux, depuis toujours.

Le tissu de son haut valsait au loin, et contrairement à ce qu’il aurait pu penser, les marques n’étaient plus là à ses yeux. Vieilles blessures et anciennes cicatrices s’étiraient juste sous les pulsations d’envies, taisaient leur mal-être, oubliaient la douleur, réfutaient les sévices.

Non, plus envie de s’excuser de ce qu’ils étaient, de leurs choix, de leurs chemins de vie parfois si tortueux. S’en était-il jamais excusé d’ailleurs ? Non. Pas de ses choix. Mais de ce qu’il était, oui, sans jamais le dire à haute voix, il traînait cette vieille culpabilité depuis toujours. Mais elle se trouvait à présent propulsée à l’échafaud, incinérée avec le reste. Cautérise la plaie, souille la damnation ; je refuse de m’excuser encore d’être ivre de vie.

Culpabilité. Honte. Dégout. Honte à vous, surtout, d’avoir érigé ces  préceptes à leur apogée. Honte de les avoir fait vivre dans des esprits qui n’avaient pas à se trouver damnés d’exister.

Toi, moi, galvanisés. Acceptés.

De ses doigts, elle repoussait son menton, coupant le contact visuel, les âmes qui vibrent ensembles, la sienne enfiévrée de vouloir trouver la même liberté que celle, enfin délivrée, de Sanae. Lèvres sur sa gorge, baisers gourmands, envies voraces. Il en frissonnait. Ses mains parcouraient son corps, fiévreuses, affamées et puis… soudainement, se faisaient lentes, joueuses, tentatrices. Et un sourire se dessinait sur ses lèvres amusées, avides. Ah voilà que tu joues à mon jeu, mes règles. Vile tentatrice, enfin maîtresse de ses propres envies, capable d’en jouer à présent, de prendre son temps, de prendre tout court d’ailleurs. Un grognement guttural lâché alors qu’elle s’éloignait, ses doigts fins abandonnant leur emprise fugace, retrouvant la liberté de l’extérieur, évitant ce que chaque fibre de son corps réclamait à corps et à cris, glissant à l’intérieur de sa cuisse, alors qu’elle venait le narguer de son regard réjouit d’enfin jouer à ces jeux qui trop longtemps lui étaient restés étrangers. Pas de peur cette fois-ci Sanae. Juste de l’amusement d’enfin pouvoir lâcher la bride à des démons trop longtemps muselés.

Il lui répondait d’un sourire exalté, le souffle court alors qu’elle venait reprendre ses lèvres, ses mains courant déjà de nouveau sur elle, profitant de l’espace enfin dégagé par le tissu lâche, glissant dans son dos, gouttant sa peau nue et l’absence de tissu venant enserrer ses côtes, sa poitrine, sa chair déjà bien trop meurtrie de pureté.



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Sanae M. Kimura
Mar 15 Sep 2020 - 22:33
Il la voyait, sa terreur. Terreur des autres et de soi. Peur inébranlable dans laquelle elle avait été enchaînée, noyée durant l’enfance puis construite à tors sur cet océan de douleurs. Barque instable sur des flots déchainés. Non, elle ne pouvait pas avancer sereinement ainsi. Elle était sans cesse bridée, malmenée, inhibée par elle-même tant que par les gens qui l’aimaient. Elle aurait pu être libre, pu être heureuse, là dans cette existence qu’on lui avait proposé. Elle aurait pu avoir tant si on ne l’avait pas couverte d’un voile, d’une chape de plomb informe qui la faisait taire, l’éloignait d’elle-même au profit de tout un chacun. Elle s’était effacée sans cesse, jusqu’à se nier elle-même pour en protéger d’autres qui n’avaient pas seulement conscience de sa condition. Non, elle se martelait sans cesse de s’effacer, de disparaitre, pour eux, qu’importe l’agonie infâme. Et il les avait vu s’enchaîner, tous ceux qui disaient l’aimer, la comprendre. Tous passaient à côté.

Sans doute transférait-il sa propre situation dans ces douleurs qu’elle se trainait, ce rejet social insupportable qu’on lui avait imposé autant qu’elle le laissait perdurer. Sans doute était-ce lui-même qu’il libérait autant qu’elle, l’arrachant à cette cage toute drapée d’amour que son père lui avait faite. Mais qui n’en demeurait pas moins une cage. Basique, froide, violente. Et il s’y connaissait en barreaux, autant qu’il s’y connaissait en bourreaux. Il était également le sien. Tout comme Sanae se bridait, il en avait fait de même durant toute sa vie. Comme elle il se taisait, restait loin, se contentait de peu, ne s’accordait de social que les miettes d’une existence en ruine. Il n’avait cessé de se débattre, encore et encore, contre la fureur du monde, s’y opposant en cataclysme, la faisant sienne. Mais laissant les autres derrière. Oui, comme elle, il avait noué des liens, mais sans jamais se dévoiler tout à fait, restant à l’écart, se préservant, les préservant sans cesse. Tant et tant qu’il la connaissait, cette sensation dévorante de n’être jamais tout à fait soi-même, de n’être jamais vu, jamais accepté, jamais compris. Parce qu’ils ne voyaient pas. Ils s’arrêtaient à la glace, atteignaient parfois le marbre, mais jamais ne creusaient jusqu’à la lave. Qu’il se damnerait pourtant pour un mot, un cri, une joie. Une existence réelle, assumée, puissante. Celui qui était mort à l’intérieur, l’adolescent qui avait pris les armes, délaissant l’enfant, ne réclamait qu’à rugir de nouveau. Que ne donnerait-il pas pour être vu, compris, entendu ? Là, loin des terres désolées de son esprit en flammes.

Pourtant elle était là, la fulgurance, l’évidence, le brasier dans son âme, celui qui léchait les portes de la sienne. Celui qui aurait pu menacer de l’emporter tout entier. Mais il s’y refusait, marbre contre qui la foudre s’acharnait sans cesse. Mais elle avait cessé de vouloir le briser car briser il ne se le permettrait pas. Non, il résisterait, le roc qu’il n’avait jamais cessé d’être. Parce qu’elle en avait besoin plus que tout en cet instant, plus que lui. Pourtant c’était bien à lui qu’elle s’accrochait. Aurait-ce pu en être un autre ? S’il avait été assez solide, lui aussi ? Ou était-il finalement bien désigné ? Miroir de ses craintes, fêlures et failles répondant aux siennes, puissant pourtant, dans sa solitude, dans sa rage, dans sa force de vivre. Puissant, simplement de se réveiller contre elle, en elle, près d’elle, dans un élan qu’il ne comprenait pas lui-même. Insensible au monde, insensible aux autres et pourtant tellement connecté à elle en cet instant. Il la laissait couler sur son âme, l’acceptait, brûlait de cette présence qui en aurait brisé un autre, le réduisant à un état de légume. Mais contre ses digues, elle pouvait s’épancher tout son saoul, perdre contrôle, perdre pied, car il serait là pour la soutenir, l’empêcher de se noyer. En cet instant, sans vraiment comprendre le sens de ses propres actions, il était simplement là pour elle, dans tout ce qu’une relation peut avoir de beau, d’humain. Il se tenait face aux ténèbres, endiguait l’orage, attisait pourtant la foudre. Et quelle joie sauvage de la voir s’abattre, de la voir régner, enfin, après tant d’errance ! Elle était là, conquérante, l’embrasant tout à fait, dominante, révélée. Et au creux de sa main, ce truc qui avait disparu de son vocabulaire, cette force brute qui dominait soudainement l’intégralité de son organisme mis à mort. Le plaisir. Celui qui se répandait par vagues, inconnu presque, dans un corps martelé, blessé, alangui de douleurs. Comme un vieil ami laissé trop longtemps de côté, le premier souffle clair de l’air après des semaines de chaleur infecte, l’orage, enfin, après la sécheresse. Il grisait ses sens, pulsait en lui, percutait ses cellules, bouffait ses nerfs. Il irradiait, triomphant sur les terres arides, déferlait contre sa peau tendue, dressait ses sens. La chaleur de l’existence, celle des râles de plaisir, les siens, les leurs, percutant violemment le vide, celui qui s’emplissait de chaos. Il s’en délectait, tant d’elle que de lui-même, chaque frisson, chaque mouvement, chaque gémissement, chaque souffle avide de lui le mettait en transe. Son bassin percutait ses doigts, sa main, redemandant avec plus de véhémence, plus de force les assauts acides d’un plaisir accepté, adoré, revendiqué. C’était une renaissance, un besoin, une confrontation avec elle-même. Et tout autour, le tumulte vibrait de rage et de fureur, celle de vivre, celle de jouir, celle d’aimer. Non pas lui mais elle-même. Toute puissante qu’elle était en cet instant.

La vitre crissait dans un craquement sonore, tout  comme le plaisir dans ses os, le désir brutal contre son âme.

Non, il ne s’arrêterait pas ainsi, il la voulait toute entière, tout à lui, lui à elle, se voulait en elle, autant que son âme pouvait l’englober en cet instant. Le corps et l’âme percutés, soudés. Il cherchait la fusion, l’extase, l’abandon. Le leur, sulfureux, destructeur. Non. Architect, générateur d’une nouvelle existence. Il s’emparait de sa libération, la faisait sienne, leur, la lui offrait, s’imprégnant de chaque frisson, chaque gémissement, son esprit rétracté un instant sur le sien comme son corps le faisait autour de lui. Angoisse, douleur autant que plaisir, pouvoir. Lentement, il lui laissait le temps, sans poser d’explications à ses gestes, entendant simplement ses besoins, s’y fondant, les recevant, faisant le choix conscient et franc de les respecter. Besoins, oui, mais pas de peur. Cette confiance, totale, elle le percutait autant que l’onde de plaisir qui irradiait en lui, irisant ses nerfs. Qui lui avait jamais fait confiance ainsi ? Qui s’était jamais confié à lui ainsi, entièrement, durablement, sauvagement. L’esprit, le corps, la violence abrupte des émotions franches qui cognaient contre les barrières de son esprit. Elle se livrait, entièrement, sans contrôle, assurée qu’il serait là, l’empêcherait de s’enfoncer, de se perdre, de glisser. Parce qu’elle ne se perdait pas, elle se trouvait, avec une violence inouïe, accrochée à son corps, l’entourant tout entier dans une connexion que rares pouvaient connaître. Mouvements lents contre son corps agrippé, ses gémissements lui vrillant les sens, son plaisir percutant son âme autant que son corps, elle lâchait prise, abandon complet, naturel, complice. Elle n’était que chaos, un chaos délectable dont il s’emplissait tout entier alors que surgissait, rampant, le plaisir sourd dans ses chairs. Puissant, il mordait ses muscles, tordait sa peau. Chaque frémissement, chaque contraction chez elle faisait pulser en lui les ondes dévorantes et à mesure qu’il accélérait, plus loin, plus fort en elle,  c’était l’abandon qui bouffait son âme. Ahurissant, puissant, les stries de la vitre qui se joignaient jusque sur sa peau, la craquelant de plaisir. La vie qui vrille ses sens, accélère son cœur qui cogne entre sa cage thoracique, comme cherchant lui aussi le besoin de liberté inassouvie. Folie fracassante que de se sentir exister, plus brutalement que jamais, le plaisir irradiant dans ses veines, les griffant de la joie sauvage d’être de nouveau. Autre chose que douleurs et remords. Etre simplement, sans oubli ni regrets, lui et ses stigmates, ses forces et ses choix. La vie puissamment ancré en lui qui rugissait, sourdait, hurlait sur son sort. D’une joie damnée.

Ses mains venaient la prendre, la couvrir, la sentir. Ses hanches, son dos, ses seins, sa nuque ses cuisses. Il l’agrippait, s’ancrait plus profondément en elle, plus violemment, la force du plaisir griffant son âme, pas toujours capable de distinguer ce qui était la sienne. Qu’importe après tout, ils ne faisaient qu’un en cet instant, dans une communion de renaissance parfaite, une brutalité sourde de plaisir commun. Ses ongles dans sa chair, sa peau à vif, ses nerfs électrisés. Cacophonie des sens, passion déferlante.  Elle avait cessé de fuir, embrassant parfaitement le chaos, acceptant la perte de contrôle, la faisant sienne, leur. Tout son corps s’arquait, se tendait, le cherchait. Ses muscles en communion avec lui, puissants, cherchant l’impact, la force. Elle ne faisait plus que le recevoir ce plaisir, elle le prenait, l’acceptait, le bouffait totalement, et lui avec. L’esprit sur son âme, déferlante jouissive de toutes ses émotions, toutes ses sensations dont il s’emplissait parfaitement, ne cillant pas sous les attaques, s’en grisant parfaitement avec la même exaltation que ses hanches percutant les siennes. L’intensité les gagnait, les consumait tout entiers.  Alors il l’avait sentie elle aussi, la panique. La peur viscérale liée à la perte de contrôle. Parce que de contrôle, elle n’en avait plus aucun. Ni sur le corps, ni sur l’esprit, ni même sur sa magie qui explosait partout autour d’eux, tempête sublime d’un organisme si puissant qu’il lui griffait les poumons, l’endiablait tout à fait. Elle était l’ouragan, le geyser, le volcan. Sans doute la plus belle sensation qu’il ait jamais ressentie de toute son existence. Peut-être n’étaient-ce que les circonstances, peut-être tout ça finirait en effet par le calciner tout entier. Mais il ne s’arrêtait pas, ne reculait pas face au cyclone de son organisme, lui attrapant une épaule d’une main, son regard se plantant dans le sien. Il s’y accrochait, l’ancrait, elle, sans trêve pourtant, captant son appel, la ramenant à lui, ses doigts dans ses cheveux, tension au plus proche de son esprit, grisant ses envies.

« Logan.. ! »
« Lâche prise, t’as pas besoin de contrôle. »

C’est moi le contrôle. C’est sur moi que tu te percuteras. Sur moi que ça déferlera. Moi qui résisterai. Moi qui n’ai rien à craindre. Et certainement pas toi. S’il faut une digue, ce sera moi, celle qui ne te contiendra pas, qui protègera juste le monde de ton avalanche. Celle qui ne te bridera pas mais qui saura encaisser sans ciller, se gorger de ta puissance, de ta violence, l’apprécier sans y succomber.

Il l’avait senti. Cet instant précis, ce déclic subtil où le dernier cadenas se brisait. Lâche la bride, lâche les chiens, tant pis pour le reste, tant pis pour les autres, profite simplement, abandonne toi, sans peur, sans craintes. Il n’y aura pas de blessés, je t’en fais la promesse. T’as assez morflé, tu t’es assez bridée. C’est ton tour, ta liberté, ton moment.

Mon extase.

Cataclysme des corps, climax, maelstrom que les sens vrillent, percutent, déchirent dans une tourmente jouissive. La vitre explosait littéralement là derrière et pourtant, le flux de magie, il l’avait retenu, empêché d’exploser là, au loin, partout, de détruire la pièce, de s’extraire jusqu’au monde. Car celui-ci restait dans un coin de son esprit. Comme toujours. Egoïste éternel, il empêchait pourtant la tempête de s’acharner, d’en noyer d’autres. L’onde l’avait percuté tout entier, puissance dévastatrice, jouissance sourde de son côté comme du sien. Plaisir vertigineux.

Et son chaos se crashait sur son âme, joie destructrice, existence cataclysmique.

Il en avait endigué le fléau, s’en était gorgé, l’avait embrasé de tout son être, l’empêchant de s’abattre ailleurs, de tout détruire sur son passage. Qu’importe le manque de maîtrise, il en avait été le  gardien. Digues ébranlées, loin d’être brisées, douleur fascinante qu’une âme qui s’écrase.

Autour de lui, contractions sublimes qui le grillait totalement. Un râle profond, attendu et la tempête s’apaisait, dévastée elle aussi, apaisée probablement aussi. Autour d’eux, en eux, le silence. Les souffles rapides qui se calment, les poitrines se souvenant en rythme. Ses lèvres qui se posaient sur son épaule, là, contre elle si bien accrochée, comme si son organisme autant que son esprit semblait la meilleure bouée qu’elle ait pu trouver. C’était sans doute le cas.

Une bouée, Logan. Ça flotte. Ne plonges plus dans les ténèbres.

Les ondes de plaisir se diffusaient encore en lui alors qu’il sentait les flammes de son esprit s’apaiser contre lui, son contact sur sa peau se faisant moins vif. Comme s’il avait cherché à la protéger d’elle-même autant qu’à s’attirer en elle dans un dernier geste avide. Une main glissait dans son dos, l’autre contre sa poitrine, ses côtes, ses hanches, se terminant sur sa cuisse. Il restait là, encore un moment, profitant de cette vie qu’il sentait pulser en lui autant qu’en elle, veines et artères palpitantes, propulsant en eux la lave d’un plaisir qui s’éternise.


Est-ce qu’il avait seulement imaginé partager ça avec elle ? Pas une seconde.
Mais dans un souffle, alors qu’il quittait de ses lèvres sa peau pour venir la sortir de sa langueur, Logan n’avait pas envie de casser ce lien étrange, imprévu, nouveau qui s’était créé entre eux. Corps unis, il ne se dégageait pas d’elle, venait simplement chercher son regard, prenant une nouvelle fois ses lèvres, le calme s’insufflant dans son âme.

Rien qu’une question, bien basique face à tout ce déferlement.

« Ça va ? »

Parce que dans le fond, c’était ce qui l’intéressait. Même s’il connaissait la réponse. Parce qu’il savait, surtout, qu’elle devait poser des mots, des sensations, ne pas laisser les liens se refermer, ne pas accepter la cage de nouveau, délaisser les chaines. Parce qu’un mot suffirait pour sceller le pacte avec elle-même. Ne plus jamais être la victime de ses propres démons, de ses propres exigences. Apprendre à s’accepter, à trouver un équilibre, à se laisser le temps, l’espace, la possibilité d’être elle-même. Car la femme qui lui faisait face alors n’était plus celle d’autant.

Et parce que face à elle, le soldat refusait de tomber de nouveau, et le dragon de se taire encore.
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Mer 16 Sep 2020 - 20:57
Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,
Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
Sur ses pieds adorés.

Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en silence ;
On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
Tes flots harmonieux.

Tout à coup des accents inconnus à la terre
Du rivage charmé frappèrent les échos ;
Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère
Laissa tomber ces mots :

Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
Suspendez votre cours :
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !


Le Lac, Lamartine.




Gardien de mes flots déchaînés, tu me laisses m’emporter sans me faire barrage. Tu me laisses couler, sillonner entre les roches. Mon cours n’est plus calme, n’est plus lent. Il s’acharne dans le vent. Il engloutit, s’affranchit de la rive qui le contenait, sage, et il veut tout faire ployer sur son passage. Sais-tu seulement ô combien ta garde me révèle, me protège, me libère ? Je ne suis plus le flux et le reflux calme sur une plage abandonnée, je ne suis plus ces berges délaissées. Ton âme coule dans mes flots, je la fais mienne et je l’emporte avec moi. Elle est mon repère, mon ancrage, ma bouée. Tu n’es pas seulement celui qui me fait renaître, tu es celui avec qui je veux vivre cette renaissance, car il n’y a personne en ce monde qui puisse mieux comprendre, mieux y survivre.

Oh, Logan..toi le Déshonneur, toi l’Infâme, le Puissant rejeté, le Soldat blessé, le Bâtard détesté...cette âme meurtrie en toi, que tu as jeté dans les cachots de ta forteresse de marbre, elle veut être libre, elle veut se gorger de plaisir, vibrer à l’unisson de celles des autres dont tu t’es éloigné. Cette vie que tu rejetais avec violence, cette vie qui t’a tant pris, qui t’a couvert de souffrances, elle te donne aujourd’hui une autre âme avec laquelle t’écouler, t’enflammer. Elle te donne une autre enfant délaissée, mourante en silence dans les confins de ses propres cachots, voyant le monde à travers d’épais barreaux. Tu la délivres de son sort et elle t’en jette un à son tour.

Sortilège salvateur, fais nous entendre ta sentence !

Vis. Aime. Bois. Mange. Hurle. Pleure. Prends. Jouis. Extasie-toi du feu dans tes veines, de la magie dans tes mains. Si tu dois bannir, bannis le silence, bannis l’immobilité. Si tu dois abandonner, abandonne toi dans les bras d’un autre être. Abandonne ta cage. Abandonne le carcan imposé. Abandonne la solitude du mal aimé. Et bon sang, si tu dois embrasser...embrasse non pas les regrets, la douleur, le passé amer des tristes jours écoulés, embrasse des lèvres qui te veulent. Embrasse le soleil que tu pourrais brûler de tes yeux. Embrasse la nuit qui t’entoure, te berce. Embrasse ta force, ta rudesse. Embrasse ce qui est toi, et seulement toi.

Toi. Juste toi. Délaisse-toi de ces poids sur tes épaules, les voilà bannis à leur tour. Délaisse-toi de ce fauteuil, de cette prison, les voilà réduits à néant. Délaisse-toi de tout ce qui te maintient dans la terre sèche qui t’étouffe, te rend statique, la pluie vient la rendre molle et t’en libère. Ces membres doivent se mouver, s’embraser. Ils sont faits autant pour détruire que pour aimer. Et cette âme, elle doit être vue, entendue, comprise, acceptée. Efface les stigmates des souffrances passées, ils te retiennent enfermés. Mais si tu dois les garder, alors montre les comme autant de victoires, de conquêtes sur ceux qui voulaient te soumettre. Oh, cette âme...comme elle est gigantesque ! Comme elle est belle ! L’immobilité ne lui sied pas. Elle doit prendre toute sa place, monter haut, vibrer plus fort.

Oui, cette âme…
La sienne, à lui.
La sienne, à elle.
Jumelles entrelacées.

Vous attendiez cela depuis longtemps, n’est-ce pas ? Si longtemps, que vous ne l’espériez plus...Idée avortée par le désespoir. Pourtant, elles ont aimé ces âmes. Elles ont aimé d’autres qui ne les voyaient pas. Cachées, bridées, elles ne se montraient jamais vraiment, sûres déjà d’être rejetées.  L’une, rejetant les autres avec violence. L’autre, se fondant en eux jusqu’à disparaître. Prison différentes, mais semblables. Et voilà que les barreaux disparaissaient, se brisaient parce qu’enfin, ces âmes-là se libéraient. Elles avaient aimé, mais elles ne s’étaient jamais aimées elles-mêmes.
L’acceptation, c’est tout ce qu’elles attendaient. L’acceptation la plus sublime, la plus pure, la plus humaine. Connexion ultime des esprits et des corps. En ta violence, ils se rencontrent vraiment, se reconnaissent, se comprennent. Et plus rien n’est comme avant. Leurs prisons n’ont plus de sens. Leurs chaînes n’ont plus d’utilité.

Ce qui s’entrelaçait en cet instant, ce n’était plus des laisses à leurs cous, des cordes à leurs bras. Ce qui s’entrelaçait, c’était leurs corps, leurs esprits. Entre ses bras, Sanae se découvrait pour la toute première fois. Elle ne se détournait plus d’elle-même, elle se faisait face par ce miroir qu’il représentait. Femme libérée, puissante, mordante, conquérante, dominante...voilà qu’elle respirait pour de vrai, qu’elle s’arquait contre ce corps qui la voulait ardemment, dans toute la brutalité du désir plein, entier. Brasier infini des sens. Voluptés essentielles de la vie auxquelles elle s’était toujours refusée. Aurait-elle fait ce pas dans ce gouffre de la vie s’il n’avait pas été là, s’il n’avait pas été lui ?  Je saute si tu sautes. Je vibre si tu vibres avec moi. Je vis, entièrement, si tu le fais aussi. Ensemble. Englués l’un dans l’autre, pièces d’un puzzle qui délivrait enfin son message, laissait voir la superbe de son image. Et quelle image ! Deux êtres qui renouaient avec eux-mêmes dans la plus extatique des délivrances.

Oui, délivre-moi. Touche-moi.
Embrasse ma peau contre laquelle cogne mon désir pour toi, pour la vie.
Mord, enserre, griffe ces membres déterrés, affranchis.
Je me consume avec toi.


Destin étrange. Qu’as-tu donc fait ? Quels sont tes plans ? Tout prendre et puis tout donner à des êtres qui se mouraient. Est-ce ta manière de te faire pardonner ? Ou ce moment t’échappe-t-il aussi, à toi ? Oui, ce moment, il s’échappait du temps, il arrêtait toutes pendules, toutes aiguilles. Il brisait tout sur son passage. Brisait le contrôle, la maîtrise. Brisait la distance. Brisait le silence. Ce silence, il n’existait plus. Il s’emplissait de soupirs, de râles, de gémissements, de cris. Les hurlements de douleur n’étaient plus. Cette voix n’était plus douce, plus retenue. Elle s’exclamait, rugissait, s’écriait, gémissait tout son plaisir. Sa victoire. Et la leur, surtout. Parce qu’elle ne criait pas seulement de se sentir si vivante, elle s’époumonait délicieusement de le sentir, lui, vivre entre ses bras, vibrer en elle. Cette collision incessante, emplissant son corps à chaque coup de rein, la rendait folle. Ivre. Complètement ivre. Son odeur, sa peau, sa bouche qui la capturait, faisait grandir le brasier de tout son être, ses bras qui la maintenaient contre lui, ses mains qui la caressaient, s’ancrant, s’imprimant sur elle...et ce regard, fièvre indescriptible de ces yeux d’acier qui la tourmentaient de bien être. Le plaisir s’acharnait, sans merci. Violence des corps qui se ruaient, se jetaient tout entier dans le délice le plus humain qui soit. Elle s’abandonnait contre lui, s’enivrait de cette fusion qui était la leur. Oh, cette fusion. Inouïe. Démesurée. Extraordinaire. Comment se pouvait-il que les sensations soient si puissantes, si dévastatrices ? Ses mains s’accrochaient, le faisaient prisonnier. Oui, là, maintenant, ta prison, c’est moi. Je t’y enferme un instant, je te garde près de moi. Toi qui m’offre tant, toi à qui je donne sans hésitation, sans peur, sans regret toute ma confiance, toute ma reconnaissance. Tiens, garde-les, elles sont tiennes. Elles sont tiennes même si tu les rejettes un jour. Elles sont tiennes sans condition. Je te les offre, je les plante dans ton esprit, je les place tout contre ton âme pour la réchauffer, pour qu’elle ne se sente plus seule. Peu m’importe tes choix, peu m’importe tes mots, acerbes, tranchants, dont tu uses pour te protéger, peu m’importe ta violence, peu m’importe ta rudesse. Ces choix, je les soutiendrai. Ces mots, je les supporterai, j’en aimerai l’honnêteté. Cette violence, elle répond à la mienne. Cette rudesse, je la trouve délicieuse parce qu’elle est tienne. Je t’accepte, tout entier. Toi et tes fêlures. Toi et tes échecs. Toi et ta force qui fait peur aux autres. Mais j’abhorre, je rejette ta solitude. Parce que je suis là maintenant. A tes côtés, plus de vide. A tes côtés, plus de silence. A tes côtés, moi. Ton âme jumelle. Ton alter égo. Mes armes sont tiennes. Et si tu veux marcher seul, je ne serai jamais loin. Là, derrière toi pour te soutenir, devant toi pour te guider.  Tout autant que tu me guides à cet instant. Tout autant que tu me protèges, de toi-même, de moi-même, de cette peur qui menace de revenir me voler à toi, à moi. Mais n’est-ce pas la même chose, là, tout de suite ?

Dans les affres d’un plaisir torrentiel, la sorcière s’était sentie s’échapper. Chaque mouvement en elle, plus profond, plus violent, faisaient s’accroître le plaisir sublime de cette fusion endiablée. La passion de ses gestes, la chaleur de son corps. Ô désir, ô pulsions battantes, rageuses, jusqu’où allez-vous ? A quelle intensité allez-vous vous arrêter ? Est-ce qu’un corps peut ressentir autant sans se mourir d’extase ? L’explosion était proche. Elle s’annonçait dans chaque parcelle de sa peau, dans chaque contraction de ses muscles. Son ventre ondulait à chaque assaut, ses cuisses tremblaient, se resserraient autour de lui, son souffle devenait frénétique, désorganisé, ses doigts revenaient le prendre, l’enserrer. Ma bouée. Je vais couler. J’ai peur de me noyer. J’ai peur de mon propre torrent. De ma foudre. De mon ouragan. Je le sens pulser partout autour de nous et il va tout emporter. Logan. Logan, aide-moi.

Son nom avait franchi ses lèvres comme un réflexe, un appel. Mais l’appel avait déjà été lancé. Là, dans cet esprit qui s’écrasait contre celui du sorcier, qui s’épuisait à déferler sans savoir où aller, sans trouver d’autre refuge que lui, que ses yeux clairs qui lui transperçaient toujours l’âme.
Et l’appel avait été entendu.
Sa main vint agripper son épaule, redressant sa tête alors que ses doigts s’enfonçaient dans sa chevelure brune et que son regard venait se planter dans le sien, avide et paniqué.

« Lâche prise, t’as pas besoin de contrôle. »

Non, puisque je t’ai toi.

Un long gémissement lui répondit, presque douloureux. Lèvres mordues. Paupières closes. Coeur qui explose. Elle rejeta la tête en arrière, bouche entrouverte, poitrine dressée, son bassin percutant le sien, encore, encore, encore...martelant tout son être d’un plaisir acharné. Là, elle lâchait prise. Elle s’abandonnait une bonne fois pour toutes. Je te laisse les clés de mon âme, de mon corps, de ma magie. Je te fais confiance comme jamais je n’aurais pu faire confiance. L’abandon, le plus total…entre ses mains. Quelques mots de lui, et c’était tout ce qu’il lui fallait, toute l’assurance dont elle avait besoin pour étouffer la peur, l’envoyer valser au loin. Elle s’en remettait à sa puissance, entièrement.

Elle avait toujours cru que c’était sa rage qui était la tempête. Elle avait tort.
C’était son plaisir. Celui qui avait cogné contre la trappe, forcené, hurlant de pouvoir exister. Et c’était son heure, son moment. Il enflait, grossissait, calcinait son corps. Elle serra les dents, tout se contractait sous les assauts de Logan, sous ses mains qui l’empoignaient avec ferveur. De son visage jusqu’à ses orteils, la sorcière se crispait délicieusement. Sa respiration se bloqua. Ses doigts se plantèrent dans la chair du sorcier, emprise ferme sur des muscles qui lui brûlaient les paumes.

Implacable sortilège, vas-y...donne nous ta sentence finale !

Jouissez.
Vous êtes vivants.


La vitre explosa, ploya, se brisa sous le déferlement magique des vagues qui s’écroulaient. Tsunami terrible et jouissif. Explosion de l’esprit qui hurlait, se déchaînait, s’étendait à n’en plus finir. Explosion des corps qui se tendaient, éructaient. Elle aurait pu tout détruire, faire s’écrouler cette maison sur toutes ses fondations. Mais il était là, le contrôle. C’était lui. Lui et personne d’autre. Le seul qui en était capable. Le seul qui le lui promettait. Il protégeait le monde de ce jaillissement soudain, brutal, d’une violence qu’elle avait toujours retenu et qui s’exprimait enfin.

Oui, c’est moi. C’est moi l’ouragan. C’est moi la tempête. Le maelstrom. Je suis le vent qui crisse. Je suis les éclairs qui s’abattent. Je suis la pluie torrentielle qui inonde. Je suis la houle, le torrent, les abysses. Je suis la force brute et naturelle qui se libère de ce corps en extase. Je déferle, je hurle, je détruis. Et j’aime ça, bon sang que j’aime ça. Plus jamais je n’y renoncerai. Plus jamais je ne m’en priverai. Je suis moi. Je suis. Tout court. Sans honte, sans peur, sans cage.

J’existe.


Ce râle qui s’échappait de lui, écho parfait de son cri profond, long, venant de profondeurs abyssales … il l’ébranlait toute entière. Il venait se mêler à l’écrasement de ses sens, à l’explosion de ses nerfs vrillés. Tout pulsait en elle comme si elle n’était qu’un coeur battant, erratique.

Le monstre venait de manger pour la première fois et il s’écroulait entre les bras de son gardien. Les vagues ne s’abattaient plus, elles retrouvaient un flux plus calme, des ondulations plus tempérées. Et pourtant les ondes ne cessaient de se répercuter dans leurs corps. Intensité partagée. Et d’un seul coup, s’écrasant sur elle, en elle, le soulagement. Le soulagement incroyable d’un corps qui vient de renaître et qui réalise seulement maintenant qu’il n’avait jamais vraiment vécu. J’étais donc morte ? J’étais donc inexistante ? Pourquoi me suis-je enterrée moi-même ? Pourquoi me suis-je plantée en mon propre sein des lames si meurtrières ?

Oh, comme le goût de la vie venait s’éterniser sur ses lèvres.
Son corps devenait lourd, s’enracinait dans une langueur si douce qu’elle ne voulait plus en sortir. Elle sentit sa bouche venir se poser sur son épaule et elle redressa la tête. Son esprit revenait à elle, retrouvait sa place, cessait de venir s’abattre sur celui de Logan. Et pourtant, il était toujours là, cet esprit qui le caressait, l’enveloppait avec une douceur étrange. Une tendresse inattendue.
Aucun d’eux ne bougeait. Ils ne le pouvaient pas. Ils ne le voulaient pas.

Oh, oui, Temps suspend ton vol.
Je ne suis pas prête à le laisser s’en aller. Pas encore. Pas maintenant. Laisse-le moi encore un peu. Juste un instant. Ce moment, je veux qu’il s’éternise.

Et lui aussi il le voulait. Sa main glissa dans son dos, venant la faire frissonner, et descendit sur sa poitrine, son flanc, sa cuisse, se posant là. Oui, juste un instant. Ne t’en va pas. Pas encore.
Son visage se releva vers le sien et ses lèvres vinrent reprendre les siennes. Un soupir. Un souffle partagé. Le calme après la tempête dont les flots s’apaisaient lentement. Les nerfs, le corps, toujours à vifs. Mais le désir rassasié. C’était autre chose qui venait caresser leurs âmes : un calme, une quiétude aussi intense que le déferlement. Elle retrouvait l’acier de ses prunelles. Refuge à présent familier. Phare du port auquel elle était toujours attachée. Elle ne défaisait pas sa prise sur lui, seulement ses doigts s’étaient faits moins violents, moins incisifs. Ils venaient se glisser sur la peau de ses épaules, de son dos. Cette chaleur qu’il dégageait, elle la sentait toujours sous ses mains.

« Ça va ? »
Un souffle. Un sourire étirant ses lèvres. Joie colossale qui venait irradier son visage alors que ses paupières se faisaient lourdes.
Et dans ce souffle, quelques mots, scellant le pacte. « Oui. Mieux que jamais.»

Qu’il prononce ces mots, qu’il demande cette question si simple mais qui ici, prenait tout son sens véritable...la sorcière ne pouvait exprimer ce que cela lui inspirait. La surprise d’un lien qui se créait, d’un lien si fort, si fusionnel que c’était un déchirement de s’en détacher.

Laisse-moi rester. Laisse-moi profiter encore un peu de cet instant.
Ne pars pas. Ne me demande pas de partir.
Sois encore un peu à moi.
Juste un peu.

Elle posa une seconde son front contre le sien. Un instant. Un instant, c’est tout. A partager encore l’entremêlement de leurs souffles, de leurs corps. « Dis-moi que toi, ça va... ». Un murmure entre ses lèvres. Un écho de ses pensées. Il fallait qu’elle soit sûre, qu’elle sache qu’il n’allait pas, lui non plus, retourner dans les abysses, dans sa torpeur, dans son silence. Reste en vie, Logan.
Un soupir lui échappa, la fatigue la prenait, l’enfonçait. Ses bras étaient tremblants. Elle ne voyait même plus la pièce, elle se fichait de la vitre qui laissait s’infiltrer la brise. Ses yeux se fermaient, s’ouvraient, luttaient. Et sa tête vint se poser sur son épaule.

« Merci. »

Des murmures. Des murmures d’une sincérité qui n’était qu’à eux, là, ce soir.
Le brasier s’éteignait, ne laissant qu’un feu crépitant au fond d’eux. Son sang s’écoulait lentement à présent. Ses nerfs se délaissaient de leur électricité grisante. L’apaisement, enfin. Et dans son esprit, des mots qu’elle n’arrivait pas à prononcer.

Je ne veux pas partir.


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Sanae M. Kimura
Jana au Sapon
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