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Do Not Bow - Sanae

 :: Autour du monde :: Europe :: — France
Dim 24 Mai 2020 - 19:33
3 Mars fin de journée

Encaisse et avance.

La journée était longue. La semaine aussi d’ailleurs. A vrai dire, le mois complet n’avait pas été simple. L’annonce de Warren, les questions que ça soulevait le concernant, l’attaque de Lex et l’état dans lequel il s’était lui-même retrouvé en le sortant de là. Les soins qui avaient suivi, la difficile conversation qu’il avait eu avec Kezabel, prenant le rôle de son ami pour s’assurer qu’elle n’irait pas risquer sa vie pour le sortir de là puis le besoin de s’assurer que Sovahnn était bien en sécurité et qu’elle ne ferait pas de bêtises concernant Warren. Mec, tu fous la merde. Caleb, ensuite, sur qui il était tombé parfaitement par hasard le matin même et avec qui il avait eu une altercation. Puis l’apparition de ce gosse, ce fantôme quelques temps plus tôt, le ramenant plus encore quelques années en arrière.
S’il en déconnait avec Warren, s’il riait volontiers de ce qu’il avait vécu et de ce qui l’attendait de nouveau d’ici peu, ses traits s’étaient rapidement faits plus sombres dès lors qu’il l’avait quitté. Pas de Mack, de Jayden, de Lex ou de Jordane à qui mentir. Personne face à qui porter un masque, il s’était contenté de rejoindre calmement le portoloin qui lui permettrait de rejoindre le sud de la France. Vérifications en tout genre, plusieurs fausses pistes, son chemin n’était jamais le même et il s’assurait systématiquement de n’être ni suivi, ni espionné. Lorsqu’il arrivait sur les lieux, c’était directement dans le salon de la petite maison au bord de la place et jamais sans avoir passé tous ces check point qu’il avait mis en place au fur et à mesure du temps.

A grandir dans une famille de sang pur particulièrement étouffante, il avait au moins l’avantage de connaître leur façon de penser, les pièges à éviter. Et depuis son adolescence sulfureuse, il avait à la fois bien appris et gagné en maturité. Enfin du moins un peu, car à l’heure actuelle, Alec se sentait dans ce même état de dépassement qu’il pouvait l’être plus jeune.

Il encaissait. Depuis sa sortie à vrai dire, il ne cessait de prendre les coups, les restituait et avançait. Il résolvait les emmerdes les unes après les autres, mettait simplement un pas devant l’autre, construisait une existence en laquelle il ne croyait pas une seule seconde et avait l’intelligence de profiter des bons moments qui s’offraient parfois à lui ces derniers temps. Le piège se refermait, il le savait parfaitement. La chute de Warren n’en était qu’un des signes les plus probants. Ça ne tarderait pas à être son tour, il le savait parfaitement. Mais en attendant, le jeune homme avançait, mettait de son côté en place ses pions pour éviter d’y passer dans les semaines à venir. Il gardait son calme, ne paniquait pas, acceptait les échecs le menant doucement à sa perte.

Trop de présences le ramenaient en arrière. Les visages des victimes passaient devant lui alors qu’il parcourait les ruelles d’un village français dont le nom lui échappait encore une fois. Le chemin escarpé se dérobait par moments sous ses pieds alors qu’il avançait, mains dans les poches, se battant contre ses propres souvenirs, ses propres choix. S’il avait agit, ça avait été contraint. Pas que ses opinions soient toujours de celles qui faisaient l’unanimité parmi ses proches mais le fait était qu’il aurait préféré avoir à faire autrement. Mais voilà, la vie n’est pas faite de cette manière et parfois, pour s’en sortir, il faut être prêt à avancer dans la fange. C’était ce qu’il avait fait et ce qu’il ferait de nouveau s’il y avait besoin. Mais en attendant, il lui semblait un instant être revenu au point initial. Pas de nouvelles de Janie, une liste de morts qui s’allongeait, un empilement de choix douloureux à porter. Oui, il serait prêt à porter de nouveau ce rôle s’il le devait. Et oui, si Johan ne se trouvait plus dans la course, sans doute aurait-il déjà fait le choix d’avancer en plein ministère de la magie, conscient de ce qui l’attendait.
Mais s’il ne connaissait pas le leader des Supérieurs, il savait que cet homme n’était pas stable et qu’il vouait une haine sans limite à Logan depuis qu’il les avait tous trahis en abatant l’aîné Walters. Et il n’était pas prêt à mourir pour quelque cause que ce soit.

Quartier sorcier, totalement paumé. Il allait finir par connaître tous les coins improbables de ce foutu pays lui. Et voilà qu’Alec disparaissait dans un craquement, atterrissant dans le salon des hastings, son regard se posant sur les lieux. Propres. Merde alors. Logan était là, posé sur un fauteuil, le regard braqué vers la mer, à traves la baie vitrée, un verre à la main. Le liquide ambré semblait indiquer du pur feu, rien d’étonnant. Sans doute ce qu’il avalait le plus dans ce qu’il pouvait ramener.

Alec passait tous les jours au début. A présent il se contentait de plusieurs fois par semaine. Ménage, repas, blabla inutile face au mur que Logan était devenu, tentatives en tout genre. Rien de neuf sous le soleil. Mais ça n’était pas Logan qu’il avait vu en premier mais bien la silhouette pourtant habituelle de Sanae. Sans doute la moins invasive des quelques médicomages qui s’étaient acharnés à venir ici depuis qu’ils l’avaient ramené dans le monde des vivants.

Ou qu’ils avaient fait semblant. La question restait encore ouverte.

Pas de danger. Il rangeait sa baguette, n’accordant finalement pas de réel regard à son cousin, ses prunelles sombres posées sur la silhouette fine de la jeune femme.

« Alors, il boude toujours ? »

Ouais, préambule tout à fait civilisé, prononcé avec un petit sourire en coin parfaitement cynique.

« Le rangement, c’est toi ou j’me met à débouler ici en pleine nuit sans m’en rendre compte ? »
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Lun 25 Mai 2020 - 14:47
Jeudi 3 Mars, fin de journée. Sud de la France
.



Sanae poussa un profond soupire.
Son regard se posa sur le dos de Logan. Il ne disait toujours rien. Pas un seul mot. Pas une seule syllabe. Elle venait le voir tous les deux jours depuis février et il ne lui avait toujours pas adressé une seule parole. Assis face à la fenêtre, un verre de whisky dans une main, il était immobile. Il fallait se réjouir qu’il soit sorti du coma et qu’il soit hors de son lit, mais les progrès étaient minimes. Toujours enfermé dans son esprit chaotique, le sorcier ne semblait en sortir que pour s’introduire dans le sien. Et elle le laissait faire. Peut-être était-ce une manière de se réfugier ailleurs que dans ses pensées, une manière de quitter le flot de souvenirs qui étaient les siens. Mais il aurait été trop optimiste de penser que cela le soulageait vraiment. Ce serait long, très long pour lui de trouver quelque chose qui l’apaiserait véritablement. Elle était arrivée de nombreuses fois en constatant que les lieux avaient été ravagé, du sang par terre, du sang sur lui, tout autour brisé dans un excès de rage. C’était toujours moins pire qu’au tout début, lorsqu’il s’en prenait aux autres. Elle avait subi sa colère auparavant, impuissante face à la souffrance de son patient secret. Elle n’aimait pas ce sentiment. Cela n’avait pas été facile de le voir ainsi. Pas parce qu’il partageait un lien quelconque, mais parce que c’était comme se voir en miroir. Les crises qu’avaient Logan ressemblaient à celles qu’elle avait subi toute sa vie. Elle se retrouvait de l’autre côté de la ligne, à regarder le chaos se déchaîner plutôt que de l’être elle-même. Et le reflet que cela lui renvoyait était déroutant. Mais Logan semblait avoir moins de crises...il bougeait, semblait se nourrir – un peu – et la maison n’était pas toujours dévastée. Au début, elle avait toujours l’impression d’atterrir dans un champ de bataille après une guerre. Alec et elle avaient pris l’habitude de nettoyer derrière lui mais ces derniers temps, le sorcier semblait capable de le faire lui-même. Pas toujours. Des fois. Cela dépendait de son humeur. Mais son humeur était toujours noire...dure...instable. Son regard passa de son dos à sa nuque, jusqu’à sa tête. Qu’y avait-il dans cette tête ? Comment était son esprit ? C’était une question qu’elle s’était souvent posée. Sanae ne savait pas vraiment si elle voulait le découvrir, n’avait jamais osé entrer dans cet esprit-là, de peur de déclencher sa colère, d’anéantir tout le travail qu’elle avait fait pour se faire accepter par lui. Encore que rien n’était gagné. Elle ne pouvait toujours pas l’approcher pour le soigner. Ses doigts allaient mieux, ça cicatrisait bien. Mais de temps en temps, elle constatait de nouvelles plaies sur ses bras. Des plaies qu’il avait parfois la présence d’esprit de soigner lui-même, et d’autres fois...où elle devait le lui rappeler, sans jamais avoir de réponse. Le silence. Toujours le silence.
Elle ferma ses yeux un instant. Elle avait entrouvert une des fenêtres, pour aérer la pièce, et la fine brise qui venait de dehors lui caressa le visage. Le Sud de la France. Ce que cela pouvait lui manquer. En venant, elle s’était arrêtée en premier dans son ancienne maison, son vrai chez elle. Les lieux désertés semblaient morts, vides. Sans Masa, cette maison n’avait plus aucun intérêt. Elle avait vite transplané dans la maison d’enfance de Kezabel. Elle connaissait bien cet endroit, pour y être souvent allée. Elle avait joué dans cette pièce, couru avec Kezabel jusqu’à la plage des milliers de fois. Des lieux remplis de nostalgie, celle d’un temps heureux … inaccessible.
La sorcière vidait l’intérieur de son sac. Elle posa sur la table plusieurs fioles d’essence de dictame. Il fallait refaire quelques stocks. C’était pratique pour refermer les plaies avec quelques gouttes. Elle avait ramené aussi à manger, parce qu’elle comptait rester quelques heures, et déposa des fruits et un plat qu’elle avait cuisiné la veille. Elle espérait toujours que Logan veuille bien manger avec elle, mais il n’était pas réceptif. Dans un coin, traînaient encore un jeu de cartes et un jeu d’échecs. Elle avait essayé…Inutilement. Tout ce qu’elle avait entrepris avait échoué. Et pourtant, elle refusait de penser à abandonner. Refusait de le laisser. Il s’était battu pour ces gamins de Poudlard, il avait souffert pour eux...un tel courage ne pouvait pas être oublié, ne devait pas l’être.
Un CRAC la sortit de ses pensées, elle en sursauta presque, prête à sortir sa baguette par réflexe. Le soulagement ne tarda pas à calmer ses nerfs. C’était Alec. Lui aussi souffrait, au fond. Elle lui sourit avec douceur. Ce n’était pas vers son cousin qu’il s’était dirigé mais vers elle. La sorcière le comprenait...Alec faisait tout ce qu’il pouvait pour s’occuper de son cousin, sans succès. C’était éreintant. Pas de salutations. Ils avaient l’habitude l’un de l’autre à présent.

« Alors, il boude toujours ? »


Sanae soupira à nouveau.

« Toujours, oui. Si ce n’était pas le cas, tu aurais entendu des feux d’artifices jusqu’en Angleterre. » fit-elle, amusée.

« Le rangement, c’est toi ou j’me met à débouler ici en pleine nuit sans m’en rendre compte ? »

Cette fois, Sanae eut un petit rire. Elle continuait à vider son sac et sortit un thermos avec du thé bien chaud. Elle adorait ces inventions moldues.

« Si jamais ça t’arrive, pitié, viens me voir en consultation, railla-t-elle. Mais non ce n’est pas moi...c’est Lui.  C’est une forme de progrès.»

Elle fit un signe de tête vers Logan, et son regard se remplit d’inquiétude. Elle en fit une petite moue en coin, et reporta ses prunelles sur Alec. Elle le détailla rapidement. Il l’inquiétait, lui aussi. L’idée d’entrer dans son esprit la titillait mais elle n’avait pas l’habitude de le faire sans raison.

« Tout va bien Alec ? »
dit-elle d’une voix douce.

Elle savait que non, mais elle voulait lui offrir l’occasion de l’exprimer. Parce que la famille d’un patient souffrait toujours en silence, elle aussi. Elle savait aussi ce qui lui ferait du bien : que son cousin lui parle enfin. Logan, parle-lui bon sang. Il t’aime, il s’occupe de toi. Il le mérite plus que n’importe qui.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Lun 25 Mai 2020 - 17:12
« Toujours, oui. Si ce n’était pas le cas, tu aurais entendu des feux d’artifices jusqu’en Angleterre. »
« Et c’est pas le cas, à part le ministère, rien n’a encore sauté donc tout va bien. »

Cynique ? Pensez-vous.
L’humour était parfois la seule arme qu’il restait face à certaines situations. Et il fallait avouer que ce type de situation avait tendance à s’enchaîner ces derniers temps. Il n’était jamais visé, du moins mis à part les quelques apparitions de son père le mois dernier. Alec n’était qu’un spectateur de la détresse des autres, une souffrance qu’il se prenait de plein fouet car s’il n’en était pas le principal acteur, il n’était simplement jamais très loin derrière.

« Si jamais ça t’arrive, pitié, viens me voir en consultation, railla-t-elle. Mais non ce n’est pas moi...c’est Lui.  C’est une forme de progrès.»
Un petit rire. « On fait ça. » Certainement pas, mais admettons.

Naturellement, tout en discutant, il s’était servi un verre de pur feu, gardant un œil sur Logan, cherchant à capter le moindre changement de comportement chez lui. Une forme de progrès. Bon. Ça allait faire trois mois au total. Trois mois qu’il était dehors et ne cessait d’être un véritable mur. L’avantage, c’était qu’il avait manifestement été ainsi face aux Supérieurs et que rien n’avait filtré. Bien entendu, la Garde avait sans doute mis des choses en place lorsqu’ils avaient su que Poudlard était tombé, mais si les Supérieurs avaient eu des infos, ils l’auraient tous su non ? Sans doute.

« Une forme de progrès hein ? » Pas un mouvement de la part de Logan. « C’est probant. »

Comme n’importe quel proche d’une personne en souffrance, Alec avait ses moments. Il était venu tous les jours pendant très longtemps, était resté muet, calme, avait encaissé sans bronché, avait nettoyé, s’était tapé le culot de forcer quelques soins, avait fait le repas. Il y avait passé des hures, dans cette baraque, à attendre en silence que quelque chose se passe, à déblatérer seul des conneries sans vraiment de filtres, attendant juste que son cousin réagisse à quelque chose. Il avait encaissé le mutisme, la violence, l’indifférence. La majorité du temps, il se montrait presque joyeux, comme s’il avait besoin de compenser le manque de vie de son cousin.

Pas aujourd’hui.

Revenant vers Sanae avec son verre, il s’était assis sur le canapé, les deux pieds posés sur le bord de la table, les jambes légèrement pliées, le regard vers le dos de Logan, les muscles de ses mâchoires jouant doucement sous sa peau.
S’il avait bien remarqué qu’elle l’observait, il n’en faisait pas étalage.

« Tout va bien Alec ? »

Qu’est-ce qui te fais sous entendre que ça n’irait pas ? Le fait que je passe moins souvent ? Que j’ai loupé une semaine complète le mois dernier et que je sois réapparu la gueule en vrac ? Que j’ai vu Kezabel hier et qu’elle en ait peut-être parlé ? Que je tire la gueule parce que putain, aujourd’hui j’en ai présentement raz le cul des emmerdes ?

Un petit sourire caustique.

« Au top ! Je pète le feu. »

Quelques gorgées en silence. Alec rongeait son frein, agissant au mieux pour tout le monde actuellement. Et oui, la mauvaise tête et le mutisme, c’était de famille.

« Bon j’en ai marre. »

T’as tenu trois minutes le cul sur le canapé, j’te félicite, c’est de voir Sovahnn  qui te rend pile électrique toi aussi ?

Alec s’était redressé soudainement, claquant le verre sur la table basse tout en se relevant, une attitude qui n’était pas sans rappeler celle qu’il avait eu avec Warren quand celui-ci lui annonçait ses mauvaises nouvelles et lui sous-entendait que, franchement, se sacrifier pour la patrie en rejoignant les Supérieurs pour sauver leurs proches, ça serait cool. Super plan, mec.

Le regard noir, le jeune homme contournait les meubles du salon pour rejoindre Logan dans son fauteuil, l’encadrant rapidement de ses mains, chacune posée sur un accoudoir, le foudroyant du regard.

« Bon maintenant tu vas arrêter tes conneries. C’est bon, ça y est, t’as fait ta crise existentielle ?! T’es content ça fait du bien ? Alors maintenant tu vas arrêter de te comporter comme un gosse et assumer trois secondes qui tu es ! C’est tes choix putain, alors encaisse-les parce que moi j’ai rien demandé de cette merde. Et toi et moi on sait très bien comment ça se passe dans la famille donc va pas me dire que t’es pas foutu d’accuser le… »

Coup.

Alec n’avait pas eu le temps de finir tant l’intrusion s’était faite brutale, puissante, envoyant voler toutes les maigres défenses qui s’étaient dressées en lui par un pauvre réflexe inutile. En une fraction de seconde, les ténèbres du regard de Logan étaient entrées en lui, lame glacée, fulgurante, qui explosait dans son esprit, lui coupant le souffle. Ses mains s’étaient crispées dans un cri avorté alors qu’il tombait à genou, le crâne lacéré d’une douleur vibrante, insupportable alors que Logan violait chaque parcelle de sa mémoire, s’emparant par flash de chaque souvenir récent, de chaque émotion, chaque intention.

L’instant suivant, il n’était plus là, laissant en lui les traces de son passage, comme une impression d’instabilité, comme si la morsure de sa présence laissait un magma en fusion en lui.

Genoux au sol, lèvres entrouvertes, mains tremblantes, l’une au sol, l’autre abandonnée sur la cuisse de Logan, Alec reprenait son souffle, brutalement de nouveau conscient du monde autour de lui, comme si la folie de son cousin l’avait happé un instant.

« Tu as raison, tu devrais lui demander de l’aide Alec. Tu perds tous les bénéfices de notre entraînement. »

Référence à sa volonté de demander à Sanae si elle était occlumen, s’il s’agissait de la raison pour laquelle elle était là et qu’elle tenait le coup face à Logan.  

Sérieux ?
Après tout ce temps, c’est tout ? T’es conscient de tout et tu ne trouves rien d’autre à dire ? Rien d’autre à faire ?
Estomaqué, blessé, frustré, humilié même, Alec se redressait d’un bloc, ignorant la migraine affreuse qui sciait déjà son crâne malmené.

« Putain mais vas te faire foutre Logan. »

Son poing s’était abattu sur la pommette droite de Logan qui n’avait pas semblé ciller.
Mâchoires serrées, rictus mauvais sur les lèvres, Alec n’avait fait que jeter un regard vers Sanae... « T’as raison, ya du progrès. » … avant de sortir par la porte fenêtre entrouverte.

Souffle court, il fulminait.

C’était typique. Il n’aurait pas dû s’attendre à autre chose d’ailleurs. Mais le fait était que Logan avait parfaitement conscience de ce qui se déroulait autour de lui. Il était là, sans doute depuis le début d’ailleurs. Et il s’en foutait. L’impression d’être à la fois trahis et abandonné pulsait en lui alors qu’il essuyait la goutte de sang qui coulait doucement sur la lèvre supérieure. Un vieux rappel de ses séances à Poudlard. Logan était violent, implacable, exigent, ça n’était pas nouveau et Alec ne s’était jamais plaint de la brutalité dont il faisait preuve, trop habitué à celle que son père ou son précepteur usaient contre lui des années durant. Mais là il s’agissait d’autre chose. Cet air glacial, ce manque de considération, cette manière de se foutre de tout ce qu’il faisait, disait, malgré l’acharnement avec lequel il avait tenté de le sortir de là...
Le fait qu’il n’ait parlé qu’avec Dorofei était déjà blessant, mais cette attitude détaché…. Dénotait simplement d’un manque d’égard total. Il aurait pu être là, il ne l’avait pas été par choix.

« Va chier sérieux. »

Tandis qu’Alec, à l’abri des regards, gratifiait le mur des Hastings de quelques coups de poing, Logan à l’intérieur de la pièce n’avait pas bougé, se contentant de faire craquer son cou en redressant le visage.

« Ce gosse a besoin d’aide. S’ils l’attrapent, il doit réellement protéger ses souvenirs. Je t’en serais reconnaissant si tu t’en chargeais. »

Il n’avait pas daigné poser son regard sur la médicomage. Pourtant, c’était bien à elle qu’il s’adressait.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Mar 26 Mai 2020 - 10:51




Plus elle passait de temps avec les Rivers, plus Sanae se disait qu’ils étaient semblables en bien des points. Ils n’étaient pas cousins pour rien. L’esprit vif, fougueux, impétueux, borné, impulsif sur bien des aspects. Durs. Voilà comment elle les voyaient. Et si Alec avait cet humour qu’il usait comme défense, ce n’était qu’une autre façon de se barricader, tout comme Logan le faisait dans son mutisme. Durs. Oui, parce qu’ils avaient souffert, souffraient...toujours et encore, se débattant avec leurs esprits et les Autres. Traumatismes non digérés, rancœur, colère, envie de s’échapper, désir de retrouver un contrôle sur des vies gâchées par le chaos qui les entourait. Douleurs, passées, présentes. Faces tous deux à un futur maudit. Tout balancer, frapper le monde qui les avait frapper en premier. Combattre, à sa manière, les turbulences de la vie, ou les laisser les aspirer tout entier. Il aurait été facile d’avoir le tournis en leur présence. Des tourbillons, des tempêtes – l’une en mouvement, l’autre statique. Une tornade qui montait en puissance, un volcan qui sommeillait, capable de se réveiller à tout moment. Et les deux qui gravitaient l’un autour de l’autre. Le tournis, oui. Et elle, spectatrice impuissante. Parce qu’avoir du pouvoir l’aurait directement placé à l’intérieur du tourbillon, au risque de le devenir elle aussi. Deux, c’était suffisant.
Elle ne réagit pas à l’humour cynique d’Alec, se contenta de l’observer se débattre intérieurement. Extérieurement, aussi. Cela crevait les yeux qu’il était au bord du gouffre. « C’est probant ». Elle faillait répliquer cette fois-ci, que Logan ne sortirait pas de son silence tant qu’il ne l’avait pas décidé, tant que cela ne venait pas de lui. C’était bien ça le problème. Le fait qu’il ne veuille pas le faire. Et la colère d’Alec qui semblait monter de minute en minute…
L’ambiance était pesante. Sanae fixait Alec des yeux. Traits tirés. Tension des muscles. Esprit en ébullition. N’entre pas, se dit-elle, même discrètement. Il était épuisé. A tous les niveaux.

« Au top ! Je pète le feu. » lui dit-il.

Elle soupira, posa ses mains sur la table. Au fond, elle avait l’impression d’attendre de voir la tempête se déchaîner. Le sorcier s’était assis dans le fauteuil, buvant un verre d’alcool qu’il aurait mieux fait d’éviter. Les nerfs allaient lâcher. Elle le savait, elle le sentait. Il aurait fallu être aveugle pour l’ignorer. Elle vit le moment où il prit soudainement sa décision. Et dans le même temps, elle se redressa, fit un pas en avant.

« Alec…. »

Il était déjà debout. Il en avait marre ? Tout le monde en avait marre. Trop tard, il se dirigeait vers le fauteuil où reposait Logan, toujours muet. Il s’était approché, posant une main de chaque côté de son cousin. Mauvaise idée. Très mauvaise idée.

« Ne fais pas ça Alec. »

Mais sa décision était déjà prise.

« Bon maintenant tu vas arrêter tes conneries. C’est bon, ça y est, t’as fait ta crise existentielle ?! T’es content ça fait du bien ? Alors maintenant tu vas arrêter de te comporter comme un gosse et assumer trois secondes qui tu es ! C’est tes choix putain, alors encaisse-les parce que moi j’ai rien demandé de cette merde. Et toi et moi on sait très bien comment ça se passe dans la famille donc va pas me dire que t’es pas foutu d’accuser le… »

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Alec se crispa violemment, tombant au sol et Sanae n’eut pas même le temps de se précipiter à ses côtés. Logan était entré dans son esprit avec la brutalité qui lui était propre. Le volcan s’était réveillé. Et il brûlait tout ce qui se trouvait autour de lui. La sorcière avait atteint l’arrière du fauteuil lorsque Logan se délogea de l’esprit de son cousin et que ce dernier reprenait un peu le contrôle de lui-même. Ça n’avait duré que quelques secondes. Rapide intrusion aux lourds dégâts. La seconde suivante, elle était aux côtés d’Alec et avant même qu’elle n’ait pu l’aider à se relever...

« Tu as raison, tu devrais lui demander de l’aide Alec. Tu perds tous les bénéfices de notre entraînement. »

La sorcière arrêta son geste. Son visage se tourna vers celui, implacable, inexpressif, de Logan. Elle le regardait comme un fantôme. Parce que c’était la première fois qu’elle entendait sa voix, parce qu’elle avait l’impression que la dite voix était sortie d’un rêve, irréelle. Une seconde à sonder le visage de Logan. Mais il ne la regardait pas. Regardait-il vraiment quelque part de toute manière ? Une seconde encore pour que ses paroles prennent un sens. Confus. De l’aide ? A elle ? L’entraînement ? Elle comprit. Occlumencie ? Elle ne voyait que cela.
Sanae ne pouvait s’en empêcher. Elle continua de fixer Logan, ahurie. Il avait parlé. Il comprenait très bien ce qu’il se passait autour de lui, et ça, même en le soupçonnant, elle n’en avait confirmation que maintenant.
Alec se releva et ce fut immédiat. L’insulte précéda le geste. Rapide. Efficace. Logan n’avait pas bronché pourtant. Il semblait comme hors du temps, hors de son corps, hors du monde. Sanae releva les yeux vers Alec, debout, essoufflé, tremblant, alors qu’il lui renvoyait toute sa rage et sa rancœur dans un seul regard avant de lui balancer une dernière parole cynique et de sortir.
Sur le sol, aux pieds du fauteuil où demeurait Logan, Sanae regarda Alec partir. Elle ferma un instant les yeux, parce que voir souffrir des gens ne lui plaisait pas, malgré son métier, elle ne s’y habituerait jamais. Logan fit craquer son cou et redressa la tête. Elle avait envie de lui hurler dessus, de le secouer, de s’introduire dans son esprit pour le punir, mais elle n’en fit rien. Elle était meilleure que ça, meilleure que lui.

« Ce gosse a besoin d’aide. S’ils l’attrapent, il doit réellement protéger ses souvenirs. Je t’en serais reconnaissant si tu t’en chargeais. »

Elle se releva et lui fit face, le fixant en essayant de capter son regard. La sorcière avait toujours été douce, avait toujours parlé d’une voix calme, lui avait souri, lui avait fait de grands monologues pour lui parler de la situation au-dehors, avait tout tenté pour l’apaiser. Mais là...là, elle lui renvoya un regard aussi dur que la roche, barricadant son esprit comme une porte qu’on claque au nez de quelqu’un. Il n’avait pas intérêt à oser entrer dans son esprit. Elle le repousserait avec toute la force qu’elle avait. Le mur, c’était lui qui se le prendrait.

Le visage de Sanae resta impassible. Un instant de silence. Reconnaissant ? Elle avait envie de rire. Il ne serait reconnaissant de rien.

« C’est de ton aide dont il a besoin. Mais toi tu choisis de lui faire du mal...» dit-elle simplement.

Elle se détourna de lui et sortit. Alec frappait le mur et elle lui saisit les bras pour qu’il arrête, se plaçant entre lui et le mur avec rapidité.

« Alec, arrête. Ça ne sert à rien. Calme-toi. » lui dit-elle.

Son ton était ferme mais doux. Ses muscles, tendus, étaient prêts à arrêter de nouveaux gestes de sa part, pour l’empêcher de se faire du mal. Et dans le même temps, elle comprenait si bien cette envie de se libérer de sa colère. Cela lui fendait presque le coeur de voir ces deux cousins ainsi. Si seulement Logan avait décidé d’être aux côtés d’Alec...si seulement il avait témoigné un peu de soutien envers lui, les choses auraient sans doute été un peu différentes.

« Je vais t’apprendre. » souffla Sanae.

Parce que ça ne servait à rien de le cacher désormais, encore qu’elle ne savait pas s’il savait également qu’elle était légimens. Si cela pouvait aider la Garde à garder ses secrets, si seulement pour éviter à Alec de donner des informations…elle le ferait. Sans hésitation.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mer 27 Mai 2020 - 18:33
Il y a des gens dans la vie qui sont censés nous tirer vers le haut. Des gens qui sont, par défaut, par habitude ou par évidence, la figure de l’autorité, du modèle. Ceux que l’on copie, en qui on a confiance. Ceux qui s’élèvent, ceux qu’on écoute, ceux dont les failles font mal car il est si simple de penser qu’ils possèdent en eux la force de trouver toutes les solitudes. Parents, amis, mentors, ces figures marquent nos vies, rythment nos existences. Un regard, un mot, un silence, un sourire. Parfois il en faut peu pour nous permettre d’avancer. Chaque coup qu’elles nous assènent, en revanche font l’effet d’une bombe. Chaque abandon, celle d’une trahison.

Comment fait-on pour se construire lorsque les adultes se font forts de regarder ailleurs pour ne sembler remarquer ni les larmes, ni les traces, ni le regard sombre, ni le sourire froid qui se développe d’années en années ? Comment on fait pour se construire lorsque chaque geste devient déplacé et est accepté par l’ensemble de la communauté ? Comment fait-on pour se construire quand la sensation d’une lame sous sa peau est infiniment moins douloureuse qu’un regard déçu d’un parent amer ?

Comment fait-on lors que ses seuls modèles n’agissent finalement pas mieux que ceux qui auraient dû l’être ? Comment accepter la traitrise de l’indifférence ? La violence de l’agression, il la connaissait, la gérait. Ils fonctionnaient comme ça dans la famille, Alec le savait, l’avait admis, accepté car il n’avait connu que ça. Mais de la part de Logan, il n’y avait aucun moment où cette brutalité avait été parfaitement gratuite. Cruelle même. S’il n’avait jamais été tendre, s’il l’avait mis au sol plus d’une fois, celle-ci l’avait fendu en deux, lui avait coupé le souffle. Il lui semblait qu’il avait pulvériser le peu de barrières qu’il avait su mettre en place par réflexe lorsqu’il était entré, laminant ses efforts, brisant le peu de confiance qu’il avait en ses capacités. Oui, Logan l’entraînait depuis deux ans et chaque fois qu’Alec avait l’impression qu’il faisait des progrès, son cousin lui montrait qu’il se baladait dans les méandres de ses souvenirs. A chaque fois qu’il lui semblait tenir quelque chose, il le réduisait à néant, ne cessant de lui montrer les failles, implacable dans son enseignement.
Alors s’il avait fait ça dans d’autres circonstances, Alec ne lui en aurait même pas tenu rigueur, malgré la souffrance, malgré l’intolérable intrusion surprise, malgré la nausée, les céphalées, l’impression qu’en une seconde, il était submergé, étranger en lui-même. Malgré le manque de contrôle qu’on lui imposait alors qu’il en avait désespérément besoin à l’heure actuelle. Il n’y avait rien de correct dans cette agression, et pourtant, ça n’était pas ça qui le choquait le plus.

Là où Alec était blessé, là où il lui en voulait terriblement, c’était concernant cette certitude affreuse, destructrice, qu’il était là, parfaitement en contrôle de ses gestes, de ses actes. Ça faisait plus d’un mois que le jeune homme se démenait, qu’il affrontait la réalité, qu’il balançait des informations, qu’il était persuadé que Logan en savait bien plus que les brides qu’il révélait régulièrement, tout simplement parce que ça avait toujours été ainsi… ça faisait des semaines qu’il restait stoïque dans la tempête, qu’il gérait ce qui devait l’être, qu’il se battait jours après jours. Ça faisait des semaines, putain ! Et il n’avait même pas daigné lui adresser un mot. Rien qu’un espoir ! Juste un regard !
Non, rien. Des semaines qu’il se taisait, qu’il ne lui accordait rien de si dérisoire que l’illusion qu’il pouvait être là, encore.

Quand on perd un proche, quand son esprit se met à dériver, on se rend souvent compte au dernier moment qu’en réalité, cette personne est perdue depuis longtemps. Qu’on a gâché tout le temps qu’on avait avec elle. Qu’il est déjà trop tard.
Qu’on est seuls, et qu’il faudra s’y faire. Avancer à présent dans l’inconnu sans personne derrière soi pour assurer ses arrières. Avancer, simplement, sans pourtant savoir comment faire.
A chaque deuil c’est la même histoire. Il faut faire avec. Se trouver des trésors de force, être capable de mettre un putain de pied devant l’autre, prendre des décisions que l’on n’a jamais eu à prendre, se retrouver projeté dans un rôle qui n’est pas le notre simplement parce que c’était le sien et que cette personne en moins, il faut bien que quelqu’un prenne sa place.

Il l’avait laissé faire tout ça. Il l’avait laissé encaisser son départ, se manger son absence. Il l’avait laissé souffrir, laissé errer, laissé déraper, seul. Alors qu’il était là, sans doute depuis le début.

Ça n’était pas une intrusion hasardeuse, hagarde, due aux dérives d’un esprit agressé. Non, Logan avait fait le choix de forcer ses défenses, à ce moment précis, dans ces circonstances exactes. Il avait choisi de se concentrer sur ses échecs sans rien souligner du reste. Comme s’il n’était rien d’autre que son enseignant, oubliant manifestement toute l’affection qu’ils pouvaient se porter. Peut-être n’était-ce qu’à sens unique d’ailleurs.
Après tout, Alec l’avait toujours pensé. Même s’ils mettaient la main sur lui, Johan pourrait bien lui faire ce qu’il voulait, Logan ne se pointerait pas. Une réalité qu’il se prenait encore une fois en pleine gueule. Non, il ne ferait rien.

D’ailleurs c’était exactement ce qu’il se passait actuellement. Warren tombait, lui ne tarderait pas à suivre. Et Logan ne bougeait pas le petit doigt.

Sa voix avait résonné dans le salon, glaciale, pragmatique. Il n’y avait pas d’interprétations possibles, pas de doutes à avoir. C’était lui. Du grand Logan, dans toute sa splendeur. L’homme n’avait même pas cilié au coup qu’Alec lui avait asséné, faible répartie au coup de poignard dans le dos que son cousin venait de lui mettre. Le regard noir de colère, le jeune homme se contenait encore, rattrapant la violence de la décharge électrique qui secouait tout son être, l’amenant vers un seul besoin : celui de lui faire payer. Celui de lui faire payer cet affront. Pour autant, sans savoir s’il s’agissait d’amour, de peur ou de respect, Alec s’était détourné, fuyant tant la confrontation que la rage et la déception qui le dévoraient en cet instant.
Elles passeraient sur le crépi du mur arrière de la maison, alors que le sang battait si fort à ses tempes qu’il cessait même d’entendre le roulis apaisant des vagues derrière lui. Seule restait la brulure furieuse de la désillusion. Impétueuse, destructrice, traitresse.

Il n’avait pas entendu Sanae s’approcher. N’avait pas intégré le danger que son comportement pouvait entraîner. Non, il n’était plus qu’un gosse blessé, frustré, piqué au vif. Son père n’arrivait plus à provoquer ça chez lui depuis bien longtemps, preuve que tout espoir, tout respect s’était assagit depuis bien longtemps le concernant. Mais pour Logan, les choses étaient différentes… et d’autant plus blessantes.
Il n’avait intégré la présence de la jeune femme qu’en sentant le contact de sa peau sur la sienne, cherchant à bloquer les coups tandis qu’elle se glissait entre lui et le mur. Le coup avait failli partir, rattrapé au dernier moment dans un flash de lucidité.

« Alec, arrête. Ça ne sert à rien. Calme-toi. »

Bras levé, poing brandis, son regard s’était posé sur elle, la transperçant tant de sa rage que de cette souffrance qui palpitait en lui, destructrice. Non, il ne pouvait pas se calmer, pas comme ça, pas si brutalement. Alors le dernier était parti, impactant le mur à côté du visage de la jeune femme. Etrangement, le jeune homme voyait dans sa posture, dans son attitude les mêmes indices qu’il pouvait déceler chez Jordane maintenant qu’il la connaissait un peu mieux. Si elle l’avait voulu, elle aurait sans doute pu le bloquer beaucoup plus efficacement. Mais elle ne l’avait pas fait, sans doute consciente que cette violence, elle avait besoin de sortir. Elle le méritait.

Pourtant, cet impact avait été le dernier. Mâchoires serrées, la flamme de la détresse brûlant dans ses prunelles sombres, il inspirait, cherchant à retrouver un minimum de contenance.
Il entendrait presque son père se riser de son attitude immature et impétueuse.

« Je vais t’apprendre. »

Son poing n’avait pas bougé, planté dans le mur, pas plus que son regard perçant n’avait quitté celui de la jeune femme, inspirant, chassant ce tourbillon de pensées qui faisait bouillir chaque fibre de son organisme.

« J’avais donc bien deviné. »

Occlumen. C’était bien là la raison non seulement de sa présence, mais sans doute également un peu de son obstination. Elle résistait face aux agressions de Logan, qu’elles soient physiques, mentales ou juste sourdes, elle ne lâchait pas l’affaire, une attitude qu’il respectait et qu’il admirait. Peut-être était-elle-même plus acharnée qu’il l’était, notamment ces dernières semaines lors desquelles son absence dénotait une émergence plus soutenue des problèmes qu’il affrontait en silence.
L’esprit en fusion, le corps en ébullition, Alec ne bougeait pas, contenant la rage qu’il maîtrisait difficilement, l’apaisant au fur et à mesure du temps. Quelques années auparavant, il n’aurait pas été aussi ‘calme’ mais il fallait croire que le contact avec d’autres courants de pensées, d’autres personnes, d’autres attitudes que le poison intransigeant familial, avaient fini par l’apaiser en partie. Son souffle, vibrant, se calmait doucement, laissant le temps faire son office, refusant de frapper à l’aveugle.
Son corps, calme, à quelques centimètres du sien, tendu, brouillant de rage, irradiait la maîtrise, un contrôle difficilement acquis. Une impression confuse dont il s’imprégnait.

« Merci. »

Faisait-elle partie de la Garde ou était-elle simplement reliée à celle-ci sans le savoir, par un réseau de relations qui l’avait amenée à cet endroit donné, en cet instant précis ? Etait-ce seulement le lien qui l’unissait à Kezabel qui avait fait d’elle, par un heureux hasard, la personne la mieux désignée pour veiller sur Logan actuellement ? Savait-elle tout ce qui se tramait dans l’ombre ?
Ces questions, s’il se les posait, il ne les énoncerait pas à voix haute, refuserait d’en entendre les réponses. Il n’était pas Logan. Il ne tiendrait pas sous les assauts, il le savait parfaitement. Et justement, de savoirs, il en possédait déjà trop. Logan en avait manifestement tout autant conscience que lui.
Lui qui l’avait mis dans cette position intenable et qui n’avait même pas la décence de s’en excuser.

« Il a parfaitement conscience de tout et depuis longtemps. »

Si son visage portait le masque des Rivers, inculqué depuis des années, ses prunelles, elles, ne perdaient pas leurs flammes. Il s’agissait pourtant d’un constat, pas d’une complainte.

« Il m’entraîne depuis bientôt deux ans déjà. »

Ça aussi. Il aurait pu se plaindre, faire remarquer que ces traitements, il en avait l’habitude, que le sang qui avait coulé de nouveau sur sa lèvre n’était pas le premier. Il aurait même pu préciser qu’il n’en attendait pas moins d’elle. Mais Alec restait factuel, ses muscles frémissant se détendant doucement, rejetant la pulsation de la violence qui sommeillait en lui.
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Alec Kaleb Rivers
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Alec Kaleb Rivers
Jeu 28 Mai 2020 - 18:50
Le poing s’abattit une dernière fois contre le mur, près du visage de la sorcière mais elle ne bougea pas. Elle ne connaissait que trop bien cette envie de se débarrasser d’un sentiment de trahison non digéré. Il aurait été facile de retenir le geste, de l’arrêter dans l’impulsion violente qui s’exprimait en cet instant, retenir le coup, maitriser ce bras qui avait bougé rapidement, dans l’élan brutal que provoquait la rage. Mais elle n’en fit rien. Parce que cette rage...ce désir brûlant de destruction était tout à fait saine. Saine, parce qu’elle se déversait des gestes, des yeux, des paroles du sorcier. On ne pouvait passer sous silence une telle émotion : celle-ci avait une existence propre, n’écoutait pas la raison, ne reculait pas devant les conséquences, n’avait ni yeux ni oreilles, et ne pouvait être contenue sans risque de resurgir, plus forte, nourrie par la frustration et le silence. Elle le savait, et lui-même, devait le savoir. Alors elle le laissa exprimer toute la rancoeur qu’il éprouvait, attendant que le corps s’immobilise.
Le regard d’Alec était directement plongé dans le sien mais Sanae ne cillait toujours pas. Sans violence, sans dureté, seulement la détermination d’être là pour lui, de l’aider à calmer des nerfs à vifs. Une douceur dans les prunelles dont le sorcier semblait avoir besoin en cet instant, tout enflammé qu’il était. Son poing ne s’était pas délogé du mur derrière elle. Il ne bougeait plus, enrageait intérieurement, son souffle court, pesant. Ses yeux exprimaient toute la détresse que lui inspirait la situation, qu’avait fait naître ce mur d’indifférence qu’il venait de se prendre. Une indifférence qui différait du mutisme habituel de Logan, mais qui faisait d’autant plus mal qu’elle avait été exprimée avec autant de douceur qu’un éléphant lancé à toute allure sur un pauvre lionceau qui ne l’avait pas vu venir. Piétiné, écrasé, sous la violence de l’intrusion, sous la brutalité de la trahison qu’il devait ressentir. Du dégoût, de la tristesse, de la colère...Sanae était prise aux tripes par ce regard intense qu’il lui jetait et elle n’avait qu’une envie : faire disparaître ce poids qui venait de s’abattre sur lui alors même qu’il se trouvait déjà écrasé par les événements qui gravitaient autour de lui. Pourtant, aussi blessé et enragé qu’il était, Alec semblait tenter de se calmer, de retrouver un contrôle décent de sa respiration. Elle le voyait, elle l’entendait.

« J’avais donc bien deviné. »

Quelques mots échappés de ses lèvres et elle acquiesça d’un léger mouvement de tête. Oui, il l’avait deviné. Ce n’était pas une surprise bien que l’annonce avait dérouté la jeune femme. Elle ne s’était pas attendue à ce que Logan lui conseille de lui demander. Mais Alec n’était pas idiot, et il savait la grande difficulté à laquelle se heurtait tout ceux qui avaient voulu s’occuper de son cousin...Sanae n’était pas exception : Logan ne lui avait adressé la parole pour la première fois qu’aujourd’hui, et cela faisait bien des semaines qu’elle venait. Des semaines qu’elle tentait diverses approches pour se faire accepter, pour le faire réagir, en douceur, pour engager la conversation, pour faire naître en lui l’envie de continuer, de se lever, de reprendre des armes qu’il semblait avoir abandonnées. En vain. Mais elle était restée, malgré tout. Par devoir, par obstination, peut-être aussi par une sorte d’étrange admiration envers le sorcier qui avait tant fait pour des élèves impuissants face à la cruauté des Supérieurs, parce qu’il était comme un soldat revenu de la guerre et qui semblait avoir perdu tout espoir…Parce que la force et la détermination qu’il avait mises en œuvre pour combattre leurs ennemis méritaient bien autant de patience et d’indulgence qu’il en faudrait. Bien qu’aujourd’hui...aujourd’hui, la sorcière ressentait trop la détresse d’Alec pour défendre Logan, voyait en ce dernier un abandon non seulement du seul membre de sa famille qui l’aimait vraiment, mais également de ses amis, de ceux qui le considéraient toujours comme un modèle. Un abandon. Un refus de se remettre debout. Un choix, en cet instant, pleinement assumé et qu’il avait renvoyé à la tête d’Alec avec toute la force qu’on lui connaissait.
Face à elle, le sorcier reprenait un peu de contrôle, se forçait à calmer son esprit agité et son corps si rigide qu’il n’avait pas encore osé bouger à nouveau. Pourtant, à l’intérieur, il fulminait toujours et ses yeux trahissaient ce sentiment si tenace d’injustice. Injuste oui, parce qu’il avait été un de ceux qui s’étaient le plus occupé de son cousin. Et cette ingratitude qui se faisait jour…provoquait chez Sanae et sûrement chez Alec également, un dégoût enragé.

« Il a parfaitement conscience de tout et depuis longtemps. »

Elle le soupçonnait depuis quelques temps, mais elle n’avait jamais pu savoir à partir de quel moment son esprit s’était fait plus clair. Elle avait pensé qu’il oscillait entre des périodes de lucidité et d’autres, plus confuses, où tout se mélangeait. Le fait qu’il avait parlé avec Dorofei en Janvier dernier était un bon indicateur. Mais depuis quand exactement était-il conscient en permanence ?

« Je sais...je sais que tu as mal Alec. J’aimerais pouvoir te dire quelque chose de réconfortant mais la vérité est que tu as tous les droits d’être en colère, qu’il mériterait qu’on lui hurle dessus pendant des heures, qu’on le secoue en lui criant de sortir de ce foutu fauteuil mais à quoi cela servirait-il ? Tu sais mieux que moi que si Logan ne le décide pas lui-même, il ne bougera pas. » Sans détourner ses yeux de lui, sa main vint s’enrouler autour de son bras, lentement, avec douceur. « Mais si lui ne veut pas reprendre les armes, toi...toi, tu es toujours debout et tu es capable d’affronter le monde tel qu’il est. N’attends pas de ton cousin quelque chose que tu peux accomplir toi-même. Ce n’est pas en lui que tu dois puiser ta force, elle est déjà là. Là, répéta-t-elle en relevant les yeux vers ce poing qui ne bougeait pas du mur. Tu te sens dépassé ? Piégé ? Quoi de plus normal ? Et pourtant tu es devant moi, tu n’abandonnes pas, tu résistes et tu le fais très bien sans son aide. Je sais que tu voudrais un signe de sa part, mais en vérité, tu n’as pas besoin de son approbation. Tu crois que tu en as besoin mais c’est faux. L’approbation on se la donne à soi-même quand on sait qu’on fait tout ce que l’on peut pour agir selon ses principes, ses valeurs, lorsqu’on met tout en œuvre dans la mesure de ses moyens pour survivre. Cela doit te paraître mièvre, sûrement, mais ne laisse pas le découragement de Logan t’atteindre. »

Au fond, elle savait très bien ce dont il avait besoin. Il voulait juste retrouver son cousin, avoir l’assurance qu’il était toujours là, que son affection envers lui n’était morte, qu’il avait son soutien. Que ses efforts pour s’occuper de lui valaient quelque chose à ses yeux. Mais tout ce qu’il avait … c’était ce silence, et aujourd’hui...la violence du rejet.

« Il m’entraîne depuis bientôt deux ans déjà. »

Sanae ne savait pas dans quelle mesure cet entraînement s’était déroulé mais elle connaissait un peu la dureté du cousin pour grincer des dents à l’idée de le voir enseigner quoique ce soit. Et si Alec était en mal d’approbation, s’il voulait si fort l’affection et le respect de Logan, ce n’était pas un hasard...l’ascendant qu’il avait du exercer sur lui en tant que professeur était largement doublé par le fait qu’ils soient tous deux de la même famille. Un lien qui pouvait être aussi bénéfique que calamiteux. Elle avait appris avec son père, elle le savait mieux que personne. Le regard que posait l’enseignant, dans la mesure où il représentait également un modèle, une figure importante dans la vie de l’apprenant, était si puissant qu’il pouvait causer bien des dégâts. L’affection était finalement à la fois un frein et un moteur impressionnant pour la réussite d’un quelconque apprentissage. Enseigner par la douleur, par le mépris, par la violence, ce n’était pas dans les habitudes de la sorcière et elle haïssait ces pratiques. La confiance, la bienveillance, la douceur et la patience, voilà ce que son père avait utilisé avec elle. Et cela n’était pas contraire à l’exigence.

« Nous reprendrons depuis le début, assura-t-elle. Nous nous verrons autant de fois que nécessaire. Mais mes méthodes risquent de détoner de celles de ton cousin. »

Sa main était toujours sur le bras du sorcier, et elle alla attraper ce poing toujours enfoncé dans le mur pour l’en déloger, le saisissant fermement et l’abaissant lentement. Elle lâcha enfin le regard intense d’Alec pour le reporter sur la main qui saignait, abîmée par les coups durs contre la surface rude de la façace.

« Laisse-moi te soigner...je pourrais au moins dire que je me serai bien occupée d’au moins un Rivers, fit-elle d’un ton plus léger. »

Elle lui fit un sourire timide et lança un « Accio Essence de dictame ». Une fiole ne tarda pas à rappliquer et la sorcière s’en saisit, attendant la réponse du sorcier.

« Par curiosité, comment as-tu su que j’étais occlumen ? »
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Sam 30 Mai 2020 - 0:43
La tension accumulée durant les dernières semaines avait explosé dans la puissance du silence. Le brasier de son regard planté dans celui, calme mais tranchant de Sanae. Elle soutenait, encaissait la rage sourde qui émanait de l’intégralité de son organisme. Sans un mot, elle encaissait les palpitations d’un organisme blessé qui ne demande qu’à lâcher toute la violence des assauts répétés. Sans un mot, elle faisait face, force calme au centre de la tempête. Loin d’être sourde et aveugle, elle, se dressait là, le regard planté dans le sien, la peau sur la sienne, brûlante, frissonnant de colère au moindre contact. Elle acquiesce à ses paroles, le laisse fait son chemin sans se dérober, lui imposant sa présence sans en faire trop. Alec avait donc bien deviné. Que ce soit à la demande de Kezabel, de la Garde ou d’il ne savait qui, elle était bien là parce qu’elle était douée d’occlumencie. Le fait était qu’Alec lâchait prise concernant ceux qui circulaient ici, en contact avec son cousin. Certains appartenaient à la Garde, c’était certain. D’ailleurs il n’avait pas souvenir de tous les visages ou de tous les noms, signe sans doute d’usage d’oubliette. Il ne posait pas de questions, encaissait le manque de contrôle de cette situation, acceptait qu’il puisse finalement mettre Logan plus en danger qu’en sécurité en agissant comme ça. Mais s’il faisait autrement, il en apprendrait trop. Il était coincé, c’était aussi simple que ça. Alors il encaissait simplement en silence, ne voyant rien d’autre à faire.

« Je sais...je sais que tu as mal Alec. J’aimerais pouvoir te dire quelque chose de réconfortant mais la vérité est que tu as tous les droits d’être en colère, qu’il mériterait qu’on lui hurle dessus pendant des heures, qu’on le secoue en lui criant de sortir de ce foutu fauteuil mais à quoi cela servirait-il ? Tu sais mieux que moi que si Logan ne le décide pas lui-même, il ne bougera pas. »

Non, il ne bougerait pas et il le savait parfaitement. C’était bien pour ça qu’il n’avait jamais réellement pété les plombs face à son mutisme, qu’il avait laissé couler, faisant prendre d’une résilience dont il ne se pensait pas capable. Mais aujourd’hui il n’en pouvait plus. Il le prenait pour un con quand lui faisait face, quand il affrontait le bordel qu’il y avait là dehors alors que ce con restait à regarder les vagues.

Sa peau frissonnait au contact de celle de Sanae alors qu’elle s’enroulait autour de son bras et si ses muscles jouaient sous la peau de ses joues, Alec n’en disait rien.

« Mais si lui ne veut pas reprendre les armes, toi...toi, tu es toujours debout et tu es capable d’affronter le monde tel qu’il est. N’attends pas de ton cousin quelque chose que tu peux accomplir toi-même. Ce n’est pas en lui que tu dois puiser ta force, elle est déjà là. Là,

Un sourire mauvais. Là ? Dans la violence qui sourdait de tout son organisme. Dans la rage inculquée par les valeurs familiales au fil des années ? Laisse-moi rire.
Pourtant, c’était bien la colère qui lui avait permis d’avancer au cours des années et il le savait parfaitement. C’était son moteur, sa source d’énergie pour avancer, pour encaisser. Parce qu’on lui avait appris à haïr bien avant d’aimer. Et parce que la haine est une sacrée force.

Tu te sens dépassé ? Piégé ? Quoi de plus normal ? Et pourtant tu es devant moi, tu n’abandonnes pas, tu résistes et tu le fais très bien sans son aide. Je sais que tu voudrais un signe de sa part, mais en vérité, tu n’as pas besoin de son approbation. Tu crois que tu en as besoin mais c’est faux. L’approbation on se la donne à soi-même quand on sait qu’on fait tout ce que l’on peut pour agir selon ses principes, ses valeurs, lorsqu’on met tout en œuvre dans la mesure de ses moyens pour survivre. Cela doit te paraître mièvre, sûrement, mais ne laisse pas le découragement de Logan t’atteindre. »

La rage ne s’atténuait pas, elle vibrait, brûlait au creux de ses rétines. L’approbation, elle avait raison, il la recherchait, comme un gosse face à un père. Une approbation qu’il n’avait jamais eu de qui que ce soit, une réalité qui faisait mal au môme qu’il restait, en manque d’acquiescement, de validation à la fois de ses actes et de ses forces. Tout ce qu’il avait obtenu au fil des années s’était résumé à un petit sourire en coin de son paternel. De la fierté ? Pas vraiment. Ou sans doute un peu. Il n’aurait su le deviner. Dans le fond, c’était quand il lui tenait tête, quand il brisait ses défenses, se battant contre chacune de ses décisions qu’Alec reprenait le contrôle, passait simplement au dessus de la dominance de ceux qui se présentaient comme ses parents. Une façon d’être, littéralement. Une manière d’exister. De dominer pour ne pas disparaitre dans l’indifférence. Mais avec Logan… il avait finalement trouvé un modèle, un homme qui l’aidait réellement à avancer et qui, parfois, avait manifesté une sorte de fierté, de validation de ses progrès. Alors oui, il était comme un gosse face à lui.
Le reste… le reste déclenchait chez lui un petit sourire amusé, insolent, réflexe. Comme un adolescent à qui on fait la morale, à qui on dit qu’il pourra s’en sortir dans la vie alors qu’il estime d’ors et déjà que son existence est vouée à l’échec. Et c’était bien ainsi qu’Alec voyait l’avenir. Il n’y avait jamais vu d’espoir, jamais vu une quelconque réalisation. Dès l’instant où Anthony était tombé, le jeun homme l’avait, une cible s’était posée sur son front. Ce choix, il ne l’avait pas fait. Mais dès l’instant où il avait compris la situation, il avait pris les armes contre les Supérieurs. Prenant la partie de son cousin, se mettant naturellement dans le clan de ceux qu’il protégeait. Ses amis, ses proches. Dans le fond, qu’importe ses valeurs, qu’importe ce en quoi il pouvait croire, qu’importe ses idées. Ce qui comptait, c’était eux. Alors il avait suivi, naturellement. Comme un gosse, encore. Parce que c’est tout ce qu’on est, tous. Des enfants face aux grosses épreuves de la vie. Des mômes, ballotés par la tempête qui tentons de garder de cap, de tenir nos responsabilités, d’avancer, simplement, sans toujours se sentir à la hauteur. Mais parce qu’il n’y a pas le choix, c’est ce qu’on fait. On garde le cap.

Il aurait pu se foutre d’elle, être amer, se confier. Mais elle n’était qu’une inconnue. Alors il se contenterait de ce regard, perçant, dur. Non, il n’irait pas polémiquer sur sa capacité ou non à porter les armes. Non, il n’irait pas s’énerver, dire qu’elle n’en savait rien, qu’elle ne le connaissait pas. Elle le connaîtrait. Elle saurait, qu’il n’avait rien d’un mec bien et que ses valeurs n’étaient sans doute pas tout à fait les siennes. Elle saurait. Parce qu’elle l’aiderait et que son esprit se trouvait pollué de ses erreurs passées, de ses coups durs, de ses choix, difficiles mais assumés. Elle saurait. Mais il n’était pas homme à se confier à une inconnue. Alors ça attendrait.
Il se contenterait de ce petit sourire moqueur, insolent, indulgent même, presque par certains de ses aspects. Comme s’il lui pardonnait de ne pas tout à fait comprendre qui il était. Ce qu’il pouvait faire. Et surtout ce qu’il ne pourrait pas.

Doucement, son bras s’était détendu, sans pour autant se déloger de là alors qu’il lui évoquait des notions plus concrètes. L’entraînement. Celui que Logan lui avait accordé durant deux ans. Celui qui lui donnait bien des bases déjà pour verrouiller son esprit. Mais il devait être bien loin de ce qu’un occlumen était. Pour être honnête, tout ça échappait encore un peu au jeune homme qui ne comprenait cette discipline que par ses trippes, marchant finalement à l’instinct face aux agressions, essayant de mettre en place ce que Logan lui expliquait sans vraiment réussir à tout à fait en saisir l’essence.

« Nous reprendrons depuis le début, assura-t-elle. Nous nous verrons autant de fois que nécessaire. Mais mes méthodes risquent de détoner de celles de ton cousin. »

Un petit rire de gorge bourré d’amertume avait franchi ses lèvres. Quoi ? Elle devinait qu’il était plutôt du genre dur dans ses méthodes ? C’est le sang sur sa gueule qui t’indique ça ?

Pour une seule intrusion. Une fois. Un seul rappel. Brutal, tranchant, implacable. Mais un seul. Et maîtrisé qui plus est.

« Pourquoi, il y a d’autres personnes à utiliser des méthodes similaires aux siennes ? En dehors des sangs purs bien sûr. »

Une petite pique à son mode d’éducation. Non, Alec n’avait pas été épargné, au même titre que les autres sangs purs. Ou du moins que ceux de sa famille. C’était comme ça que ça marchait, comme ça qu’il avait été élevé. S’il ne connaissait que ce mode de fonctionnement, il avait vu la différence en découvrant d’autres familles, notamment des moldues. Le choc des cultures était violent.

Ses mains s’étaient refermées sur son poing, le forçant à s’abaisser par la fermeté de la prise. Alors il le laissait descendre, râpant doucement la surface rugueuse du mur, sans vraiment lâcher la jeune femme du regard.

« Laisse-moi te soigner...je pourrais au moins dire que je me serai bien occupée d’au moins un Rivers. »

Nouveau sourire, soufflant un petit rire amusé. « T’avais pas plus simple comme patient ? »

Elle répondait par un sourire timide, attirant par magie une fiole jusqu’à elle alors qu’il déployait ses doigts, son geste toujours marqué par une tension toujours existante dans ses muscles. Il ne bouillonnait plus comme un peu plus tôt, mais la rage n’était pas parfaitement assoupie, loin de là. Il la garderait au chaud. Elle servirait. Elle servait toujours.

Un nouveau regard. Sérieusement ? Elle attendait réellement son assentiment ? Que de demande de consentement, ça frise le burlesque.

« Vas-y, éclates-toi. Mais je pense qu’il vaudrait sans doute mieux retourner le voir. Après tout il a parlé. C’est toi qui parlait de progrès. Ça doit en être un. »

Douloureux, violent, intrusif, amoral. Un progrès signé Logan, rien de nouveau sous le soleil. Alec pourrait envoyer un texto à Aileen tient. Elle serait ravie d’apprendre qu’il avait subi le même traitement qu’elle des années plus tôt. Elle exulterait sans doute d’apprendre ça.

« Par curiosité, comment as-tu su que j’étais occlumen ? »

Un petit sourire, la laissant agir à sa guise. « Simple déduction. Je suis assez persuadé que Logan est capable de détruire un esprit s’il perd complètement le contrôle. Je suppose que ceux qui restent dans le coin sont soit particulièrement bienveillants, soit étrangement acharnés. Soit un minimum aptes à se protéger. » A vrai dire, il comprenait sincèrement l’abandon généralisé des quelques soignants qui avaient apporté des soins à son cousin, l’avaient plongé dans le coma et l’avait réanimé ici. « Qu’on soit clairs, j’aime pas manquer d’infos sur la situation actuelle. Tu pourrais être n’importe qui. Mais j’ai pas vraiment le choix. Moins j’en sais, mieux c’est pour tout le monde. »

Il se devait de faire confiance aux maigres informations qu’il avait et à son instinct.

« Et puis j’suppose que si t’avais été un danger, soit Logan serait déjà mort, soit tu le serais. »

C’était une boutade. De l’humour sacrément noir car particulièrement d’actualité, mais rien qu’une boutade, pas une menace. Car étrangement, il lui faisait assez confiance. Il avait du moins fait ce choix.

La réalité n’était pas si simple. S’il ne parlait pas, s’il était une véritable forteresse sous geôles, s’approcher comme elle le faisait était une très bonne technique pour en apprendre plus. Un détail qu’il n’oubliait pas non plus, pourtant épuisé d’être toujours sur ses gardes, toujours suspicieux. La situation actuelle avait tout pour rendre parano le plus serein des hommes. Et il n’avait pas tardé à récolter de nouvelles mauvaises nouvelles. Sans compter les prochains évènements à venir. Les traitres ne font pas long feu, il s’en doutait.

« T’es encore debout. Et toujours là. J’en déduis que tu sais gérer ce genre d’agressions. »

Mieux que d’autres en tout cas, c’était certain. Le reste du cheminement de pensées n’était pas dur à faire. Etait-elle légimen également ? Ayant l’exemple de son cousin pour seul modèle, cette hypothèse lui semblait donc parfaitement plausible.
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Alec Kaleb Rivers
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Dim 31 Mai 2020 - 2:08
 On lui avait dit : prends soin des autres ; aime-les, protège-les, offre leur une chance ; ouvre-toi à eux ; partage ta vie avec ceux qui te sont bienveillants; apprends, observe, écoute ; n’aies pas peur de ce qui t’es étranger. Nous ne sommes rien sans les autres. Ces mots-là venaient de son père. Lui, qui n’avait jamais hésité à tendre la main envers qui que ce soit, malgré le passé, malgré les maux et les circonstances. Lui, qui avait toujours su quoi dire, quoi faire. Lui, centre de son monde qui l’aurait conseillée mieux que personne. Mais lui, absent, invisible, parti. Et Sanae se retrouvait alors  seule face à la vie, sans la sagesse d’un père qu’elle admirait. Elle faisait du mieux qu’elle pouvait, apprenait à gérer les problèmes à mesure qu’ils venaient, s’entassaient les uns sur les autres. Alors, si elle parlait de se sentir dépassée, ce n’était pas par hasard. Elle se sentait comme une enfant perdue parfois, endossant le rôle d’une adulte pleine d’une assurance qu’elle n’avait pourtant pas. Faire semblant, être maître de soi, prendre des décisions. La vérité, c’était qu’ils étaient tous pris dans les engrenages infernaux de cette guerre et que l’échappatoire la plus évidente était la Mort. Néant définitif de tout. Fin de l’espoir. Le point final d’une longue tirade parlant de victoires, d’échecs, de luttes, d’amours et de haines passionnées. Depuis qu’elle avait intégré la Garde, Sanae tâchait de garder en mémoire que l’échec en réalité ne pouvait être que de ne pas essayer, de ne pas tenter de se battre, de baisser les bras, de rester en position statique, d’abandonner tout espoir, de laisser les autres derrière. Céder au désespoir et accepter la défaite parce que la victoire semblait trop difficile, inaccessible. Ça, c’était l’échec. Mais essayer, maintes fois, d’accomplir une tâche sans pouvoir atteindre son objectif, Sanae ne le percevait pas comme un échec mais une preuve qu’on avait tout tenté pour réussir, qu’on avait combattu jusqu’à la fin. Et il n’y avait pas à rougir d’une telle détermination.
Alec, lui, se démenait pour survivre. Il était entouré bien sûr, mais parfois avoir des proches ne faisait qu’amplifier ce sentiment de pression, de tension, à l’idée de les perdre. La solitude, voilà un mal qui semblait affecter autant Alec que Logan. Pourtant, il aurait suffi que les deux sorciers s’allient face au reste du monde pour que certaines choses changent, pour qu’ils retrouvent tous deux une sensation d’équilibre. Mais ils étaient trop enfermés dans leurs propres douleurs, propres combats internes qui les dévoraient. Et au lieu de s’aider à tenir debout, ils résistaient chacun de leur côté. Ce n’était pas faute d’essayer du côté du plus jeune...mais tout ce qu’il récoltait était un mur de glace qui ne semblait s’abaisser que pour le heurter davantage.

Au fond des yeux d’Alec, la sorcière voyait toute la rage qui l’agitait. Déferlement de colère, de frustration, de rancoeur et d’amertume incontrôlable. Et pourtant, il essayait, il tentait de maîtriser les vagues qui menaçaient de l’engloutir. Son discours ne put réussir à l’apaiser ; elle ne s’était pas attendue à ce que l’effet soit miraculeux. L’éclat de la fureur était toujours là, au fond des prunelles, et il n’était pas de nature à disparaître aussi vite. Il faudrait faire preuve de patience, laisser le temps à Alec de digérer les choses. Et elle espérait qu’il soit plus rapide que son cousin, qu’il ne s’entête pas dans le tourbillon émotionnel qui le prenait aux tripes. Une porte de sortie, voilà ce qu’il leur fallait à tous les deux. Se concentrer sur un but, c’était l’option qui pouvait faire sortir Alec de sa rage – partiellement au moins.
Son bras s’était délogé du mur, doucement, rappant contre la façade alors qu’il arborait un sourire moqueur, insolent. Elle n’était pas idiote, elle savait ce qu’il devait penser. C’était stupide cette manière qu’elle avait d’espérer que la vie avait autre chose à leur offrir que de la souffrance. Et si elle avait été une enfant défaitiste, ayant acceptée d’être à jamais abandonnée, à jamais rejetée, à jamais en décalage avec les autres, elle avait connu un homme qui lui avait apporté cet Espoir si précieux qui la faisait avancer, cette force de caractère qui était la sienne et qu’il lui avait transmise,  cette détermination folle dont les autres pouvaient bien se moquer. Elle s’en fichait pas mal qu’on la traite de naïve : en vérité, elle ne l’était pas. Espérer, c’était un choix. Se battre, c’était un choix. Et s’il y avait quelque chose dont la sorcière était incapable, c’était d’abandonner. Même si les chances de réussite étaient moindres, même quand l’autre souhaitait tout laisser tomber...non. Elle leur insufflerait le même espoir que son père lui avait donné.

Et si les leçons d’occlumancie pouvaient servir à Alec, et à la Garde, alors elle s’y attellerait très sérieusement.

Alec eut un léger rire amer. Clairement, Logan avait été un professeur intransigeant aux méthodes qui trancheraient avec les siennes. Elle leva les yeux au ciel, amusée. Il était clair que les moyens employés se rapprochaient de ceux des sangs-purs et ce n’était pas une surprise : on n’était toujours le fruit de son éducation. Que ce fruit finisse par s’éloigner de l’arbre ou non. Par fidélité des traditions ou par opposition nette, on se construisait en fonction de ses parents.

« Non. Je crois que ton cousin est assez unique dans son genre. »

Son regard s’était posé sur sa main et Sana n’avait pas tardé à faire voler du dictame jusqu’à elle. Elle lui proposa de le soigner, souriant en lui disant qu’elle aurait au moins apporté son aide à un Rivers.

« T’avais pas plus simple comme patient ? »

Un léger rire lui échappa.

« J’avais une vie bien trop facile, il fallait bien trouver de quoi la pimenter. » railla-t-elle avec sarcasme.

Une vie trop facile ? Vraiment ? Mais il n’avait pas besoin de le savoir, n’est-ce pas ? Elle lui sourit timidement, attendant son consentement et peut-être cela le surprit un peu. Il ne devait pas avoir l’habitude qu’on le lui demande.

« Vas-y, éclates-toi. Mais je pense qu’il vaudrait sans doute mieux retourner le voir. Après tout il a parlé. C’est toi qui parlait de progrès. Ça doit en être un. »

Elle se saisit de son poignet, attirant à elle la main endolorie, et ouvrit avec son pouce la fiole.

« Occupons-nous de toi d’abord, ça changera
, souffla-t-elle. Logan peut attendre quelques secondes. Je crois que ce n’est que justice. »

La justice...mieux valait ne pas trop s’arrêter sur ce mot-là. La sorcière fit couler quelques gouttes sur les phalanges ensanglantées d’Alec, et le liquide s’introduisit dans les plaies pour ressouder la peau, dégageant au passage une petite fumée verte – signe que l’opération avait fonctionné. Elle lâcha sa main après un rapide examen que rien n’était cassé, et la lâcha avec douceur. Elle reboucha la fiole. Elle lui avait demandé comment il avait deviné qu’elle était occlumen et sa réponse la fit sourire à nouveau. Un sourire un peu amer, un peu moqueur envers elle-même.

« Oui, acharné, bienveillant...borné, incapable d’admettre son impuissance totale face à un cas comme Logan...Bref, complètement barré, tu peux le dire. »

Elle ne rebondit pas sur sa dernière phrase. Elle acquiesça silencieusement en l’observant. Elle savait qu’il était dur d’accepter de lâcher prise, de ne pas tout contrôler, pour le bien des autres et y trouvait là une autre preuve de la force du sorcier. Du reste, il avait raison. Moins il en savait, moins il mettait en danger les gens qui gravitaient autour de lui. Et pourtant, il fallait protéger les quelques informations qu’il avait.

« Et puis j’suppose que si t’avais été un danger, soit Logan serait déjà mort, soit tu le serais. » plaisanta-t-il.

Cette fois-ci, ce fut un rire un peu plus franc qui franchit sa gorge. Elle haussa les épaules et fit un pas en arrière.

« Je serai déjà enterrée six pieds sous terre en effet. Si je suis en vie, c’est qu’il a estimé que je ne suis pas si terrible... Et si je suis toujours là, c’est peut-être qu’il ne l’est pas non plus.»

Trop d’espoir ? Sans doute. Mais elle était rarement objective sur ses patients. Surtout lorsqu’il s’agissait de Logan. Sanae se sentait investi d’une mission : aussi difficile était-elle, il fallait que le sorcier sorte de cet état insupportable d’entre-deux ...entre la vie et la mort, entre le silence et  le bruit assourdissant de la colère.

« T’es encore debout. Et toujours là. J’en déduis que tu sais gérer ce genre d’agressions. »

Le pouvait-elle ? Gérer ce genre d’agressions ? Elle le faisait pourtant, quotidiennement. Non seulement elle devait gérer le chaos qu’elle était elle-même, si bien cachée sous les sourires et l’espérance, mais elle devait également sauver la vie de ses patients, se battre pour ses valeurs au sein de la Garde, et tenter de sauver un Logan qui ne voulait pas l’être. Où trouvait-elle l’énergie ? A quel moment s’effondrerait-elle ? Jusqu’à quel point pouvait-elle résister ?
Elle se pinça les lèvres.

« Probablement. Et de toute façon, je n’ai jamais su abandonner. Je crois que vous allez m’avoir sur le dos pendant un moment malheureusement.Tu es bien meilleur patient que lui en tout cas. » fit-elle en reculant. « Je vais rentrer le voir...il est temps d’affronter la Bête. Souhaite moi bonne chance. »

Le dernier mot fut prononcé en levant les sourcils, ses traits plus détendus, amusés. Elle se détourna de lui et s’approcha de la baie vitrée ouverte, se glissant à l’intérieur. Son regard se posa sur Logan, et elle prit une inspiration. Toujours dans son fauteuil. La sorcière fit s’envoler un verre vers elle d’un coup de baguette et se servit un peu du whisky qui trainait sur la table. Sanae vint s’asseoir par terre, non loin de lui, lui faisant face, son verre dans les mains. Elle le fixait sans animosité, le regard tranquille, avec le calme olympien qu’elle avait retrouvé, mais dans le fond de ses yeux...une détermination inébranlable.

« Des semaines de silence et enfin le son de ta voix...je crois que je peux boire avec toi aujourd’hui. »

Elle leva son verre comme si elle buvait en son honneur et le porta à ses lèvres, sans détacher ses yeux du sorcier. Figure sombre de la magie, château de pierre infranchissable. Hautes murailles et meurtrières. Et il fallait à présent trouver un moyen de s’infiltrer par une porte close. Close ? Ou entrouverte ? Reparlerait-il ?

« Je vais lui apprendre. Et si je me souviens bien de tes mots...tu as dit que tu serais reconnaissant. Le seras-tu ? Je ne demanderai rien d’autre que de pouvoir faire mon travail...parce que ces marques sur ton bras...je les vois. Je ne suis pas aveugle. »

Elle avait parlé d’une voix douce, et pourtant, pas comme à un enfant. Son calme s’apparentait davantage au respect qu’elle lui portait qu’à une quelconque volonté de le diminuer. C’était toujours ainsi qu’elle s’était adressée à lui. Et de penser à tous ces monologues qu’elle lui avait fait alors qu’elle le pensait à moitié conscient…Elle avait longtemps oscillé entre de longs moments de silence, méditant à ses côtés alors qu’il demeurait mutique, et des moments où elle tentait de lui expliquer ce qu’il se passait, lui racontait les instants qu’elle avait passé dans cette maison, son père, l’orphelinat...c’était idiot pourtant, il avait déjà tout vu de sa vie, dans son esprit qu’elle ne lui fermait jamais, ne s’écroulant pourtant jamais sous ses assauts, endurcie par les entraînements.

« Et puis...si tu m’autorises ça, je t’épargnerai mes longs monologues quotidiens. Je trouve que c’est un bon compromis. » fit-elle.

Ses lèvres s’étaient étirées en un léger sourire amusé alors qu’elle portait à nouveau le verre à sa bouche.
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Dim 31 Mai 2020 - 18:12
Qu’est-ce qu’on pouvait trouver dans son esprit au juste ? De quelle façon pouvait-il être utilisé ? Qu’est-ce qu’il savait qui pouvait être préjudiciable ? Pendant un temps, Logan lui parlait de certaines choses, une habitude qui s’était atténué au fil du temps, à mesure que le danger se refermait de plus en plus sur eux deux. Une bonne chose, il le savait à présent même si ce rejet pernicieux de son cousin n’avait pas toujours été bien vécu. Il n’en savait que peu sur la Garde, de manière parfaitement volontaire, refusait d’en apprendre plus sur ceux qui venaient ici, notamment Sanae, celle qui s’acharnait le plus du groupe. Il pouvait réagir aux appels des autres. Il pouvait en attirer d’autres. S’il tombait, est-ce que quelqu’un viendrait ? En toute honnêteté, il en doutait. Si ce n’était Mackensie. Malheureusement, il le savait, elle était d’ors et déjà impliquée, il n’y avait plus rien qu’il puisse faire pour qu’elle ne soit pas un point de chute. Pour autant, son sang et leur alliance actuelle la protégeaient un tant soit peu de ses liens avec le meurtrier du leader des Supérieurs. Il devait contrôler ce qui pouvait être capté de ses pensées, Alec le savait parfaitement. Sans doute était-ce le fait d’avoir grandit auprès d’un légimen et occlumen qui n’aurait sans doute pas survécu aussi longtemps s’il n’avait pas su anticiper les actes et les pensées des autres, mais il pensait actuellement qu’il s’agissait sans doute de la seule chose qui puisse l’empêcher de sombrer tout à fait. A vrai dire, s’il s’était entraîné depuis, il pensait malheureusement en avoir perdu et cette réalité pourrait lui couter la vie. Si ça n’était que la sienne.

« Non. Je crois que ton cousin est assez unique dans son genre. »

Un petit rire amer.

« J’crois ouais. »

Le bâtard de la famille qui réussissait tout de même à tenir tête aux autres, à se trouver une place, pourtant à jamais rejeté dans tous les milieux. Le bâtard, le sang mêlé, le traitre. Qu’on respectait pourtant. Combien de fois avait-il vu des Supérieurs baisser le regard et trembler face à lui ? Une époque simple durant laquelle il jouissait lui-même d’une position bien agréable.

Il l’observait calmement alors qu’elle analysait l’état de sa main. Calme, oui, malgré la fureur qui bouillait en lui. Parce qu’elle n’était qu’une amie familière, un moteur, une ennemie aussi quelques fois. Mais sans doute pas aujourd’hui. Pas tout à fait du moins. Alors il faisait preuve d’humour, comme toujours, un moyen comme un autre de mettre de la distance, de se protéger.

« J’avais une vie bien trop facile, il fallait bien trouver de quoi la pimenter. »

Lâchant un rire de gorge, dans un souffle amusé. « Chouette décision. » Décision de merde. Clairement, il comprenait bien qu’il ne s’agissait que d’humour, le genre de sarcasme dont il était friand et auquel il répondait de même. Ce qui l’amenait ici l’intéressait, mais ça resterait en dehors de sa compréhension, Alec le savait parfaitement.

« Occupons-nous de toi d’abord, ça changera. Logan peut attendre quelques secondes. Je crois que ce n’est que justice. »

Un instant de trouble passait dans son regard. Pas l’habitude. Pas l’habitude qu’on le fasse passer avant qui que ce soit d’ailleurs, mais certainement pas devant Logan. Pour le coup, Maxence n’avait jamais réagit ainsi. Il fallait dire qu’en règle générale les urgences le concernant valaient leur pesant de… d’angoisse. Et Alec était souvent relégué au couloir.
Un demi-sourire.

« Je pense qu’il n’y a plus vraiment de justice depuis longtemps mais ok. » Parce que la justice, ça serait sans doute qu’il aille bien. La justice, ça serait qu’ils n’aient plus à gérer les problèmes de famille. La justice, ça aurait été que deux amis d’enfance n’aient pas à se déchirer comme ça avait été le cas. La justice, ça serait qu’ils n’aient pas eu l’enfance qu’ils avaient eut et qu’ils aient enfin la paix. Si Alec avait été violenté, il savait que Logan n’était pas en reste.  Etant lui-même passé sous les coups de son oncle, il savait que celui-ci était pire que son père. Mais pour Logan, c’était différent. Il était le bâtard, la honte de son père. Là où sa place protégeait Alec, celle de Logan l’enterrait et ce, depuis l’instant où il avait été conçu. Il s’était construit au centre d’un univers qui ne voulait pas de lieu alors qu’Alec grandissait dans un monde où tous les regards se braquaient sur lui pour une autre raison : lui, il était l’héritage. L’espoir. Le centre de toutes les attentes. Qu’il brisait une à une avec un acharnement déconcertant.

Oui, il était en colère contre Logan, d’une force rarement égalée. Mais il éprouvait surtout de la peine pour ce manque de justice justement, pour bien des aspects de son existence. Mais il n’irait pas développer cette pensée. Déjà parce qu’elle demandait un esprit clair, ce qu’il n’était clairement pas, et ensuite parce qu’il ne comptait pas partir dans des débats stériles face à quelqu’un qu’il ne connaissait pas, et certainement pas concernant Logan. Peut être certaines informations auraient pu l’aider à mieux le cerner, mais il ne les lui fournirait pas. Elle devrait faire avec ses armes actuelles, comme elle le faisait jusque là. Avec plus ou moins de succès.

« Oui, acharné, bienveillant...borné, incapable d’admettre son impuissance totale face à un cas comme Logan...Bref, complètement barré, tu peux le dire. »

Un petit rire sincèrement amusé. « Bien, on est donc sur une base de stabilité parfaite pour gérer un mec comme lui quoi. »

Il la fixait avec ce petit sourire en coin, un brin insolent, clairement moqueur sans qu’il n’y ait réellement de méchanceté là-dedans. Une pique, comme il n’avait pas tardé à lui en décocher une autre, mettant en cause à la fois sa survie et les raisons de sa présence. Elle aurait pu mal prendre cet humour noir teinté d’une vérité non dissimulée mais elle s’en amusait, parfaitement consciente de ses propres choix et des failles qu’ils comportaient. Elle assumait, une évidence qui lui plaisait, lui qui portait sans cesse le poids des décisions qu’il avait pu prendre et qu’il prendrait encore.

« Je serai déjà enterrée six pieds sous terre en effet. Si je suis en vie, c’est qu’il a estimé que je ne suis pas si terrible... Et si je suis toujours là, c’est peut-être qu’il ne l’est pas non plus.»
Un petit sourire : « Oui… Ou alors il te teste. »

Autre possibilité parfaitement plausible.
Ça n’était sans doute pas ce qu’elle voulait entendre, préférant supposer qu’il y avait dans son comportement un signe d’espoir, d’acceptation. Ou alors un pragmatisme froid.

Sans un mot, sans vraiment regarder son poing ni la remercier pour les soins, sa paume avait quitté sa main, s’enfonçant en silence dans sa poche alors qu’il lui signalait que si elle était toujours en vie, c’était sans doute qu’elle était capable de gérer les agressions dont Logan était capable.

« Probablement. Et de toute façon, je n’ai jamais su abandonner. Je crois que vous allez m’avoir sur le dos pendant un moment malheureusement.Tu es bien meilleur patient que lui en tout cas. »

Nouveau petit rire amusé. « Ça c’est parce que j’suis pas dans un mauvais jour. »

La question à se poser… si ça, ça n’en était pas un, qu’est-ce que c’était alors ; un mauvais jour ?
Ptit con va.

« Je vais rentrer le voir...il est temps d’affronter la Bête. Souhaite moi bonne chance. »
« Bonne chance. »

Discipliné le gosse.
Rien de plus, il ne l’avait pas suivie, n’était même pas resté ici pour écouter ce qui se disait. Pourtant Alec ne s’en foutait pas, loin de là même. Au contraire, il aurait aimé espionner chacun des mots qu’ils pourraient échanger. Mais rester ici n’encouragerait sans doute pas Logan à parler, et lui-même n’avait pas la patience de supporter ce nouvel échec, ce nouvel aveu de trahison. Alors il s’était éloigné, mains dans les poches, marchant dans les dunes, s’asseyant en silence face à la mer, l’amertume battant à ses tempes, retraçant en silence les évènements des derniers jours, présumant déjà de l’avenir qui lui serait réservé.
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Alec Kaleb Rivers
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Dim 31 Mai 2020 - 20:55
Le monde s’étire, fébrile, les heures s’allongent, les pensées passent, fugaces, s’attachent à chaque geste, chaque couleur, chaque mouvement. Les crises s’espaçaient doucement, Logan retrouvait prise sur son environnement sans pour autant toujours se décider à simplement exister. Participer de nouveau à la vie telle qu’on l’entendait. C’est étrange comme sensation : décider d’appartenir au monde des vivants ou accepter de rejoindre celui des morts. Pendant des mois, l’homme avait séparé, morcelé, brisé son esprit, le divisant en de nombreux éclats, chacun rangé dans son esprit, plus ou moins accessible. Une habitude qu’il avait pris dès l’enfance, bloquant certains de ses souvenirs, certains aspects de sa propre personnalité bien plus loin, enfoncé dans le gouffre que devenait cet esprit blessé, brisé d’avoir été pénétré sans cesse durant des années douloureuses de construction de l’enfant qu’il avait été. Son père avait cherché à lui faire payer chacune de ses dérives, lui apprenant par la force comment se cacher de lui. L’apprentissage avait été rude, brutal, violent. Mais finalement, il lui avait donné la force de se dissimuler à toute intrusion. Il y avait en lui bien des barrières infranchissables, comme un dédale, un abîme où bien des recoins pouvaient servir de refuge. Il était des tanières là dedans qu’il n’avait pas ouvertes depuis des années. Alors durant des mois, il s’y était réfugié, glissant en lui, apposant des brides de secrets par étages, dissimulant ses pensées toujours un peu plus profondément, ne laissant à l’entrée qu’une profonde rage, une violence déchaînée qui faisait reculer chaque intrus. Il en avait subi des assauts pourtant. Le seul qu’il attendait, le seul qui pouvait le percer, il le savait, n’était jamais apparu. Le vampire avait disparu quelque part dans la nuit, quittant ses anciens maîtres sans plus de cérémonies. Le laissant, lui, de la même manière.

Il aurait pu être un atout, il aurait pu être une arme. Il avait marché dans les ombres à ses côtés pourtant. Mais lui aussi avait disparu. Sans un mot, face à la baie vitrée ouverte, Logan listait les absents, notait les silences, comptait les morts. Sans un mot, il faisait défiler les visages de ceux qui étaient tombés, conscient que durant des mois, il avait été séparé de la réalité, éloigné, reclus. Combien d’autres avaient chu ? Combien chuteraient dans les jours, les semaines à venir ? Combien d’erreurs pourraient être évités ? Combien de gosses, d’idiots, d’ignares et d’incapables parleraient encore trop fort, agiraient sans retenu comme à Poudlard ? Combien à l’échelle d’une ville, d’un état, d‘un continent ? Qui avait-il protégé au juste au fil des jours et des mois, malgré les assauts répétés, malgré la fin, la douleur et la soif. Etait-ce utile ? Est-ce que ces sacrifices ignorés, enterrés, en valaient vraiment le coup ? Et quelle était sa place à présent ? Une victime terrée dans son trou, trop craintive pour sortir de sa grotte ? Une proie à faucher ? Une cible à abattre ? La rage se mêlait à la frustration. La colère à l’indignation. La fatigue à l’indifférence.

Lorsque Sanae était apparue, il n’avait pas réagit, n’avait pas posé un regard sur elle tout en gardant conscience de sa présence, de chacun de ses déplacements. Il ne captait pas de pensées, ne franchissait pas les barrières de son esprit ouvert. Ça lui était arrivé, parfois consciemment, parfois brutalement, sans le moindre contrôle que la volonté embrumée de ne pas détruire tout à fait la psychée de sa victime. Parfois, il avait juste cherché des réponses, comme un animal sauvage, acculé, menacé, désespéré. Mais la majorité du temps, il agissait comme il l’avait toujours fait. L’esprit des autres lui restant inaccessible par choix. Durant bien des années, il n’avait même pas cherché à connaître les pensées ou les émotions, gardant une distance salutaire, morale avec les autres. Sauf lorsqu’il en avait besoin. A présent, Logan s’en voulait d’avoir agit ainsi. Peut-être aurait-il pu anticiper certaines décisions, peut-être aurait-il pu être plus efficace. Peut-être cela aurait-il pu changer les choses ? Il ne le saurait jamais.

Tout comme pour Sanae, il n’avait pas réagit à l’arrivée d’Alec, bien en peine de pouvoir dire combien de temps séparaient ces deux intrusions. Car oui, ç’en était. Il souffrait à la fois de la solitude et de ce sentiment d’abandon qui le dévorait et de l’impression d’être sans cesse agressé par la présence d’autrui.

Et en parlant d’agression, Alec n’avait pas tardé à craquer. Depuis combien de temps est-ce que cela menaçait ? Depuis combien de temps la tempête bouillonnait en lui, menaçant de se déverser, dévastant tout sur son passage. Pour autant Alec restait mesuré dans ses propos. Il l’observait de là, voyant son cousin se fissurer au fil des jours. Dans ses prunelles sombres brillait la rage du désespoir, Logan le connaissait bien assez pour le savoir. Pourquoi ? Quelle différence entre ce jour et les précédents ? Qu’affrontait-il à chaque instant ? Que cachait-il qui soit trop douloureux à exprimer à l’aide de simples mots ? Que cachait cette peur, fulgurante, qui lui nouait les entrailles alors que ses mots, incisifs entraient dans son ainé, glissant sur la surface sans y pénétrer réellement.

Alors, à son tour, il avait attaqué. Mesuré pourtant, mais foudroyant. Pourtant, Logan n’explosait pas dans son esprit, n’était pas là pour blesser comme il savait pourtant si bien le faire. Juste pour le tester, avec sa brusquerie habituelle, sa cruauté presque. Il n’avait pas assez résisté, d’où la douleur. Merde, ce gosse n’était pas assez préparé. Il en avait perdu et était un danger pour eux tous. C’était de sa responsabilité pourtant, de se préparer en cas d’attaque et il le savait. Pourtant, comme d’autres, il restait désespérément faible. Désespérément en demande, en besoin. Alors oui, il s’agissait d’une punition autant que d’un test, d’une recherche d’informations autant que d’un besoin immonde de trouver un contact qu’il ne savait pas nouer autrement que par cette exigence tranchante qu’il lui imposait.

Pourtant ce qu’il y trouvait le touchant, résonnait avec ses propres souffrances. Alec se battait, d’arrache pied et chaque jour pour garder la tête hors de l’eau. Mais le piège se refermait, incessant, meurtrier. Il lui en voulait de l’avoir mis dans cette position.
Lui aussi.

Ce jeune ne résisterait pas, il le savait. Il tomberait s’il n’arrivait pas à s’endurcir plus encore.
L’attaque aurait dû le laisser pantelant, épuisé, brisé d’une migraine affreuse. Mais il se redressait, la rage dévorant son âme, venant le frapper au visage sans qu’il ne réagisse. Quelques mots et il partait déjà.

Bien. Développe ça Alec. C’est bien gamin. Ne te laisse pas mettre au sol. Soit plus fort que tout ça, plus fort que moi.

« C’est de ton aide dont il a besoin. Mais toi tu choisis de lui faire du mal...»

Oui. Mais les deux ne sont pas incompatibles.
Il s’assagissait au cours du temps. Trouvait en ses amis la force de changer, mais pas toujours pour le mieux. C’était dur, Logan le savait. Pour autant, Alec ne pouvait se permettre certaines faiblesses. A lui seul, il pouvait faire tomber bien trop de monde. Il n’avait simplement pas le droit de se fissurer à la moindre attaque. Il devait tenir le coup, apprendre à encaisser plus encore. Il lui fallait tenir le choc car bien des affrontements approchaient. Et il ne pourrait pas flancher. Un jour, sans doute, Logan devrait faire un choix entre le laisser, accepter la défaite, voir son corps sans vie toucher sol et le laisser mettre en danger d’autres sorciers. D’autres gosses.
Ça arriverait. Tout comme ça arriverait avec Aileen. Elle, bien plus que lui avait été tenue à l’écart. Trop faible. Trop vulnérable, elle plierait au moindre souffle. Lui… Alec présentait plus d’espoir. Peut-être pourrait-il survivre s’ils s’y prenaient bien. D’où cette demande qu’il avait prononcé, à la fois conscient de ses paroles et parfaitement détaché de cette requête.

Oui, Alec avait besoin d’aide. Mais pas nécessairement la sienne. Lui-même avait-il le droit de baisser les armes ? De laisser le monde dans son cataclysme ? De regarder ceux en qui il tenait tomber les uns après les autres ?

Avait-il le droit de laisser sa rage de côté, de laisser ses ennemis s’en sortir ?
Qu’y gagnait-il, à participer à cette guerre idiote ? Cette place, il ne l’avait jamais souhaitée, jamais revendiquée. Et pourtant, il s’était tenu plus d’une fois à la tête du château, en première ligne, prenant les décisions que personne ne prendrait, conscient du sang qui maculait à présent ses mains.

Cette place, elle lui avait été imposée par des idiots incapables de rester à leur place, incapable de réfléchir plus loin que leurs petites émotions fébriles, minables, ridicules. Ils étaient pour beaucoup la cause de leur propre chute et l’entraînait à leur suite, alors même qu’il n’avait cessé de chercher à les sauver, à les mettre en sécurité. Mais les faibles ne survivaient pas. C’était comme ça. Une question d’équilibre.

La question se posait maintenant : Alec appartenait-il à cette catégorie ?

« Des semaines de silence et enfin le son de ta voix...je crois que je peux boire avec toi aujourd’hui. »

Elle s’était assise, un verre à la main. Le sien. Son alcool. Si Logan l’avait vue revenir, il n’y avait pas prêté plus d’attention que ça, conscient simplement des risques qui pouvaient apparaître à tout moment, toujours prêt à agir… sans forcément en avoir la volonté.

« Je vais lui apprendre. Et si je me souviens bien de tes mots...tu as dit que tu serais reconnaissant. Le seras-tu ? Je ne demanderai rien d’autre que de pouvoir faire mon travail...parce que ces marques sur ton bras...je les vois. Je ne suis pas aveugle. »

Ces marques ? Lesquelles ? Celles qu’il s’infligeait ? Les cicatrices laissées par les entailles accumulées au fil des semaines ? Lui, les Supérieurs, des anciens camarades même, par moment. Oui, les plaies s’accumulaient sur lui. Certaines avaient été soignées, d’autre non, brûlant toujours un peu, le raccrochant au monde des vivants par leurs picotements réguliers. Mais il n’y avait pas que ça. Il restait les marques dans ses paumes, celles qui rendaient ses mains malhabiles. Les doigts en moins. Et puis les stigmates des sorts. Le serpent de feu, notamment, avait laissé des traces noirâtres comme un tatouage partout sur sa peau brûlée. Le charbon marquait son épiderme dans un tracé net, prolongé tout le long de son corps dans des arabesques toujours douloureuses par moment. C’était devenu une souffrance amie au cours du temps. Une façon de se repérer au fil des jours tandis que le serpent de flammes ondulait sur lui, mordait sa chair, le détruisait peu à peu, seul décideur de quelles parties de son corps il allait calciner dans l’instant suivant. Un jeu de hasard, une attente constante, un élancement intemporel.

« Et puis...si tu m’autorises ça, je t’épargnerai mes longs monologues quotidiens. Je trouve que c’est un bon compromis. » fit-elle.

Il n’avait pas réagit tout de suite, la laissant boire. Muet pendant un temps incertain encore, avant de planter soudainement son regard tranchant en elle. Pas besoin de légimencie pour sembler la transpercer de part en part.
Etrange. Il la connaissait sans lui avoir jamais adressé la parole avant ce jour. Etrange ce que la communion des esprits peut faire par moments.

Le verre porté à ses lèvres, sans un mot, l’étudiant du regard.

« Ce serait reposant je l’admets. »

Des paroles froides, sans but, badines même. Etait-ce la seule chose qu’il avait à dire après tant de mutisme ?

« Merci. »

Un mot, tranchant avec tout ce qu’il était. Sincère pourtant.
Parce que ses plaies n’avaient pas bien d’importance quant à la sécurité de celui qu’il considérait sans doute plus comme un fils ou un frère que comme un cousin.

Une nouvelle gorgée, comme s'il n'y avait rien d'anormal dans cette situation.
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Mar 2 Juin 2020 - 10:42
 Il y avait des jours où il semblait à Sanae que le monde pesait un peu plus sur elle, qu’il abattait sur ses épaules un nouveau poids qui manquait de la faire tomber, de l’aplatir. Les déceptions, les absences, les paroles inexprimées à jamais enfermées dans la pudeur, les regrets, les peines et les souffrances, semblaient s’accumuler en un nuage de plus en plus noir au-dessus de leurs têtes. Et comme juste avant un orage, comme juste avant la pluie et le vent et le tonnerre et les éclairs, l’air plein d’humidité pesait, pesait tant qu’on sentait partout autour de soi cette impression de lourdeur. Elle en avait eu peur étant petite, de ces orages-là, mais elle avait appris à les affronter : aujourd’hui, elle était capable de se tenir sous ces nuages sombres, de regarder le ciel les yeux dans les yeux, d’écarter les bras et d’attendre que la pluie s’abatte sur elle, que les éclairs se déchaînent comme des filaments électriques. Une façon de dire « Vas-y, envoie tout ce que tu peux, j’encaisserai. ». Un pied de nez à ce qui les dépassait tous : l’Univers, le Destin, la Vie. Peu importait. La sorcière avait cette sensation d’être dehors sous la pluie, à attendre d’affronter le tonnerre ; à quelques mètres, Alec dans son désespoir hurlait à la pluie de cesser de lui tomber dessus...et plus loin, derrière cette vitre qui les séparait de Logan, éternelle statue dans son fauteuil, ce dernier combattait lui un orage intérieur, immobile, enfermé en lui-même pour se réfugier, ballotté par le vent du dehors et du dedans, jamais en paix, jamais tranquille, jamais vraiment là, jamais vraiment absent. Pourtant, il aurait simplement fallu que tous deux cessent de combattre l’inévitable, d’accepter d’être sous une pluie battante sous le joug des éclairs, pour comprendre. Lâcher prise, décider qu’on ne pouvait pas tout contrôler, pas tout décider, pas tout éviter ; accepter le passé, les erreurs, les promesses éclatées ; faire le deuil de qui on avait été, aurait voulu être, de ce qu’on avait eu et des choses que l’on voulait sans pouvoir les obtenir. On ne pouvait pas s’arrêter au milieu du chemin et décider que l’on avait assez marché, que c’était trop dur, que l’horizon était trop lointain, trop incertain, que les obstacles par delà lesquels nous avions avancé étaient des gages suffisant de sa volonté, et qu’alors, l’on avait le droit de baisser les bras ou le droit de stagner, parce qu’après tout, on avait mérité de s’arrêter un moment, mérité de s’arrêter tout court. Non. Il n’y avait qu’un seul moment où l’on pouvait faire cela : une fois arrivé, tout au bout du chemin, on pouvait se retourner et contempler le parcours, rire des fois où l’on était tombé, pleurer des choses qu’on avait laissées derrière, sourire de tout ce qui avait été accompli, et se dire qu’il aurait été bien dommage de s’arrêter au milieu, de ne jamais savoir où le chemin se terminerait.

Face à eux, Sanae se sentait désemparée. Elle leur faisait signe de la rejoindre sous la pluie, d’affronter avec elle et avec beaucoup d’autres ce qu’ils étaient, ce qui les attendait, mais...elle avait beau crier, hurler, leur faire de grands gestes...Ils ne l’entendaient pas vraiment, ne la voyaient pas. Invisible, impuissante face à leurs souffrances. Ils mettaient son esprit combatif et ses espérances à rude épreuve, chaque jour, à chaque parole ou silence. Et il n’y avait rien de plus important pour la sorcière à combattre que l’abandon. Peut-être était-ce parce qu’elle l’avait été, abandonné, et peut-être était-ce aussi car elle avait lutté toute sa vie pour ne jamais faire ce que ses parents biologiques avaient fait, ce que les familles qui l’avaient accueillie pour mieux la laisser de côté avaient fait à leur tour. Sans doute ne pouvait-elle rien faire au fond pour Logan, une pensée bien sombre contre laquelle elle se battait souvent, préférant l’ignorer ; mais pour Alec, pour lui Sanae pouvait encore agir. Et c’était bien ce qu’elle comptait faire, de quelque manière que ce soit. L’occlumancie, pour commencer, mais ce n’était jamais que ça… Si ses nombreux apprentissages lui avaient appris quelque chose, c’était bien que n’importe quelle discipline est riche de nombreuses autres, que l’on apprenait pas seulement un savoir unique, mais tout ce qui gravitait autour, s’entremêlait avec le reste. Alors, la sorcière avait accepté, tentant dans le même temps de calmer la fureur du plus jeune des Rivers. En vain. Elle ne lui en voulait pas, ce genre de colère prenait du temps pour se dissoudre , ne serait-ce qu’un peu, elle en savait quelque chose.

Sanae pinça les lèvres alors qu’Alec disait qu’il n’y avait plus de justice. Ça non plus elle ne pouvait pas lui en tenir rigueur. Elle-même se débattait contre cette idée : quelle justice y avait-il à perdre un père tel qu’elle avait eu ? Quelle justice à souffrir de crises qu’elle ne pouvait expliquer ? Quelle justice à perdre plus de gens chaque jour ? Où était-elle cette justice ? Nulle part, ou partout, mais invisible, silencieuse, patiente. Le karma viendrait rétablir un équilibre. Sans doute ses effets ne pourraient être compris, vus, entendus que plus tard et en attendant, l’espérance devait prendre la relève, les guider dans le noir.

« Il y en a, elle a juste un train de retard, murmura Sanae. »

Il n’y répondrait que par un humour cynique, sarcastique, elle le savait. Humour qu’il utilisait pour se protéger, c’était évident. Alors elle souriait, avec douceur, presque avec tendresse alors même qu’elle ne le connaissait pas. Mais elle le connaîtrait, bientôt, plus intimement que d’autres. Chose qu’elle n’appréciait pas forcément, préférant rester loin de l’esprit des autres autant que possible ; mais cela serait inévitable avec les leçons. Il saurait qu’elle est aussi légimen, et elle entrerait dans son esprit : une sorte d’équilibre ?
Elle rit de bon coeur alors qu’Alec soulignait l’absurdité de la situation : il fallait soi-même être fou pour occuper la place qu’avait Sanae probablement. Elle avait relevé les yeux pour voir son sourire en coin, moqueur, insolent, piquant et pourtant sans violence, sans méchanceté ni dans le regard ni dans la voix. C’était sa manière de communiquer et la sorcière l’acceptait sans le blâmer. Tout comme elle avait du accepter le silence de son cousin.

« Oui...Ou alors il te teste. »

Son regard s’ancra dans celui du sorcier. Un instant, juste quelques secondes, où elle réfléchit à ces paroles. Bien sûr qu’il la testait, elle le savait, mais elle s’était toujours dit que les tests étaient ces intrusions dans son esprit sans lui demander la permission, sans s’en excuser. Que testait-il au juste chez elle ? Sa volonté ? Sa force ? Sa détermination absurde ? La pureté de ses actions ? Sa loyauté envers la cause ?

« J’espère que je réussirai ce test alors. » souffla-t-elle avec un léger sourire.

Elle l’avait soigné et sa main avait retrouvé une apparence plus lisse, les plaies s’étant refermées grâce au dictame. Il l’avait laissée faire, sans ronchonner. C’était déjà ça. Lui faire remarquer qu’il était bien meilleur patient que son cousin ne déclencha qu’une remarque amusée, qui ne manqua pas de lui faire lever les yeux au ciel. Un bon jour, ça ? Elle se fit la réflexion que personne autour d’elle à part Kezabel ne l’avait vue dans un mauvais jour à elle...et il valait mieux. En comparaison, tout était un bon jour.
Sanae lui avait annoncé qu’elle rentrait voir Logan, il lui avait souhaité bonne chance. Oui, de la chance...parfois cela tenait vraiment à peu de choses. Le bon moment, les bons mots, l’humeur idéale. Rares étaient les fois où tout s’accordait.
Elle s’était alors détourné d’Alec pour se glisser à l’intérieur de la maison.

Le silence. Plombant.
Logan se tenait toujours immobile dans son fauteuil, regardant fixement un point sans doute imaginaire devant lui. Alors Sanae s’était servie un peu de son whisky, et s’était assise par terre, sur le tapis, juste face à lui. Vaine tentative d’obtenir de lui qu’elle puisse s’approcher pour le soigner. Mais il ne l’avait pas encore foudroyé du regard, n’était pas encore rentré dans sa tête pour la punir d’une telle audace. Elle s’estimait heureuse. Il était resté un moment sans répondre tandis que Sanae patientait en silence. Ce silence...Il semblait l’engloutir parfois lorsqu’elle venait ici. Elle n’entendait que lui. Brutal. Constante tension dans l’air. Ou peut-être était-ce Logan qui dégageait cela ? Sanae était aux pieds du volcan, à attendre, et soudain…

Un regard.

Il lui trancha l’âme, l’envahit. Deux lunes noires dans la tourmente. Bien rondes. Pleines. Pleines d’une froideur qui la glaçait autant qu’elle la brûlait.
Juste un regard. Direct.

Il n’était pas entré dans son esprit, mais c’était tout comme. Premier contact physique entre eux après tant de temps passé en la présence de l’autre. Bien étrange connexion oui, alors que leurs esprits se connaissaient, ou presque. Le sien, à lui, savait tout d’elle. Mais l’inverse n’était pas vrai. Elle reconnaissait sa présence dans sa tête, la trace de son passage, la force de son don ; pourtant, elle ignorait tout des recoins de son esprit à lui, ne voulait jamais s’y introduire, sentait qu’il n’y aurait rien de bon dans ce geste mental. Une intrusion qu’il ne lui aurait jamais pardonné. A sa merci, complètement, voilà comment elle se sentait. Mais il fallait l’accepter.

« Ce serait reposant je l’admets. »

Il porta son verre à ses lèvres et but sans détourner ses yeux d’elle. Le son de sa voix lui paraît toujours irréel, sortit des limbes. Sans doute était-ce le cas. Un sourire menaçait d’étirer la bouche de la sorcière, discret. Il avait donc entendu ses monologues dits à voix haute sans certitude qu’ils seraient entendus ; un appel de phare dans la nuit qui lui avait paru déserte, mais il avait été là, avait vu ses lumières, avait décidé de les ignorer.
Elle n’eut pas le temps de répondre qu’il ouvrait à nouveau la bouche et son coeur manqua un battement à voir ses lèvres bouger.

« Merci. »

Sanae resta impassible. Son visage était calme. Toujours. La douceur illuminant ses traits. Pourtant, en elle, la surprise charriait son flot de pensées. Avait-elle rêvé ? Lui avait-il dit merci ? Elle ne comptait pas souligner comme il était étrange et inédit d’entendre cela de lui. Il but une autre gorgée. La sorcière ne détournait toujours pas les yeux.

« Je t’en prie, souffla-t-elle. Je l’aiderai avec plaisir. Il a besoin de se protéger. »

Elle avait parlé d’une petite voix, encore sous le choc de l’entendre parler. Parce que le « merci » avait été prononcé avec sincérité. Elle prit une nouvelle inspiration, ses doigts enlaçant le verre qu’elle tenait.

« Sakata no Kintoki, dit-elle avec un fort accent japonais. Dans les légendes japonaises, c’est un guerrier très célèbre. Il s’appela d’abord Kintarō, le garçon « doré ». Il avait une force surhumaine, depuis tout petit. Sa mère l’a tantôt abandonné, tantôt élevé loin de son mari et de son oncle pour le protéger, et parfois, selon les légendes, il aurait été élevé par une sorcière ou conçu par un dragon rouge, ce qui lui aurait donné sa force. Il porte souvent une hache dans ses mains, signe du tonnerre. Autoritaire, audacieux, il n’aimait pas vraiment être entouré par d’autres enfants alors il vivait parmi les animaux à qui il apprit à parler. » Sanae sourit avec douceur. « Il était capable de briser des rochers avec ses mains, d’arracher les arbres, de combattre des démons, des monstres, et des ours. Respecté parce qu’il était un guerrier si doué que son nom ne pouvait qu’être sur toutes les lèvres. Il devint un glorieux samouraï et tous les enfants l’admirent depuis des générations. »

Elle pencha légèrement la tête. Pourquoi lui disait-elle cela ? Elle ne savait pas vraiment, ces histoires lui étaient revenues de vieux souvenirs où son père lui avait raconté les aventures des plus grands héros japonais. Son regard faillit vaciller mais elle ne flancha pas.

« Tu me fais penser à lui, Logan. »


Un silence. Elle reprenait son souffle. Son estomac se noua. Elle détourna légèrement le regard.


« Quand j’étais petite, mon père me racontait ces histoires. Je sais, ce sont des légendes idiotes. Mais il s’obstinait à me les conter tous les jours lorsqu’il m’a adoptée. Pendant des semaines, j’ai refusé de lui adresser la parole : j’étais persuadée qu’il allait m’abandonner alors, quelle importance ? Quel intérêt d’établir un contact avec quelqu’un qui se révélerait décevant, qui finirait par disparaître ? Je pensais qu’il serait comme toutes ces autres familles qui n’avaient pas voulues de moi, qui m’avaient ramenée, effrayées. Mais plus je me taisais, plus il continuait d’essayer. Parce qu’il savait que je ne faisais que j’attendais le moment fatidique où il abandonnerait et où je pourrais retourner à ma solitude. Pourtant, je n’avais pas envie d’être seule … mais je ne supportais pas qu’on m’approche, je n’aimais pas les autres enfants, je n’aimais pas les adultes - ils me battaient. Je voulais qu’on me laisse libre d’être en colère. J'étais enfermée dans mon monde et personne ne pouvait y rentrer....et pourtant, mon père a continué d'essayer, encore, encore, encore.»

Ses yeux se plantèrent à nouveau dans ceux de Logan.

« Je crois qu’on se ressemble un peu toi et moi....»

Elle fit une petite moue et ajouta « Ce qui veut probablement dire que là tout de suite tu te dis que ce serait pas mal de m'envoyer valser à l'autre bout de la pièce. Histoire que je me taise. »
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Sanae M. Kimura
Mer 3 Juin 2020 - 13:03
Il avait senti sa peau frémir dès lors que son regard s’était braqué en elle. Perçant, brutal presque, Logan semblait d’un geste si banal rejoindre soudainement le monde des vivants, s’incluant dans sa réalité avec une rudesse, une brusquerie qu’il faisait siennes. Comme s’il avait besoin d’entrer avec force, que ce soit dans l’esprit des autres ou dans le monde qui l’entourait. Comme si celui-ci le rejetait tellement qu’il n’y avait que cette façon de faire qui semble cohérente à ses yeux. Peut-être agir ainsi lui permettait-il aussi de simplement s’arracher à son état d’apathie, agissant non pas avec une violence dirigée contre les autres mais essentiellement contre lui-même. Après tout, il en aurait eu envie, de se laisser couler dans son abime, de cesser d’exister, sombrant doucement dans les affres d’un déni salutaire. Mais les armes semblaient gravées dans sa peau, brûlant sa chair. Il aurait été si facile de simplement laisser les choses se passer, regarder le monde exploser, compter les corps tombés. Si facile de laisser ces gens qu’il respectait, qu’il admirait, se débattre seuls, tomber seuls. Pas qu’il se décidait à rejoindre la lutte de nouveau mais du moins faisait-il le choix d’ouvrir de nouveau les paupières.

« Je t’en prie. Je l’aiderai avec plaisir. Il a besoin de se protéger. »

Toujours ce calme, cette douceur qui contrastaient tellement avec ce qu’elle était à l’intérieur d’elle-même. Cette lave, brûlante qui parfois tourbillonnait, dévastatrice. Etait-ce le cas de chacun d’entre eux ? De tous les légimens ? Pour autant, ce don, elle ne l’exploitait pas de la même manière que lui. Sanae l’avait apprivoisé, dompté, fait sien. Quand il s’agissait toujours d’une lutte pour Logan, se traduisait par la violence d’attaques maîtrisées, comme des dégâts collatéraux d’un combat acharné en lui… Sanae elle était capable la plupart du temps de finesse, comme deux vieilles amies travaillant de concert. Des ennemies qui avaient fini par apprendre à s’entendre pour collaborer. Du moins la majorité du temps. Pour ça, il l’enviait.

« En effet. »

Pourtant éloigné de toute l’effervescence que semblait être la vie en dehors d’ici, Logan voyait tout de même son cousin se débattre, conscient que le piège se refermait doucement sur lui. Il ne tarderait pas à être confronté à tout ce que leur famille leur imposait, c’était certain mais à cette évident, s’ajoutait la position dans laquelle il l’avait mis, lui. Si Logan exécrait ceux qui l’avaient mis dans cette position, il savait pourtant qu’il n’était pas légitime dans cette colère. Ce choix, il l’avait fait, entraînant avec lui d’autres personnes qu’il aurait aimé garder éloignés. A l’époque, l’enseignant qu’il avait été avançait seul. Etait-ce juste de penser que les autres avaient également fait le choix que de se poster à ses côtés dans un moment de sa vie où toutes les armes se trouvaient braquées sur le centre de son lobe frontal ? Oui, sans aucun doute. Pour autant, il savait la haine, la frustration, le jugement de certains d’entre eux. Par chacun de ses actes, par sa position, par ses regards et ses décisions, il les avait entraînés dans une guerre qui n’était pas toujours la leur.

Elle n’était pas la sienne non plus du reste.

Si son regard s’était flouté un instant, il lui était revenu dès l’instant où Sanae avait inspiré, prête à prendre la parole, se lançant manifestement dans une diatribe soudaine dont elle rassemblait les éléments avant de l’entamer.

« Sakata no Kintoki, dit-elle avec un fort accent japonais. Dans les légendes japonaises, c’est un guerrier très célèbre. Il s’appela d’abord Kintarō, le garçon « doré ». Il avait une force surhumaine, depuis tout petit. Sa mère l’a tantôt abandonné, tantôt élevé loin de son mari et de son oncle pour le protéger, et parfois, selon les légendes, il aurait été élevé par une sorcière ou conçu par un dragon rouge, ce qui lui aurait donné sa force. Il porte souvent une hache dans ses mains, signe du tonnerre. Autoritaire, audacieux, il n’aimait pas vraiment être entouré par d’autres enfants alors il vivait parmi les animaux à qui il apprit à parler. » Sanae sourit avec douceur. « Il était capable de briser des rochers avec ses mains, d’arracher les arbres, de combattre des démons, des monstres, et des ours. Respecté parce qu’il était un guerrier si doué que son nom ne pouvait qu’être sur toutes les lèvres. Il devint un glorieux samouraï et tous les enfants l’admirent depuis des générations. »

Les images défilaient, illustrant ses propos alors qu’il ne réagissait pas, seuls ses yeux s’affinaient légèrement.

« Tu me fais penser à lui, Logan. »

Un instant, son regard, intense, ne l’avait pas lâché, la sondant plus encore. Un instant seulement car il avait fini par le détourner, portant son verre à ses lèvres pour en absorber quelques nouvelles gorgées, il s’était perdu de nouvelles secondes dans la contemplation de la mer là, au loin. Il ne voyait pas Alec d’ici mais savait qu’il n’était pas loin. Il pouvait dire ce qu’il voulait, rager autant qu’il le souhaitait, mais il resterait. Au cas où. Parce que derrière ses déceptions se trouvaient un semblant d’espoir.

Dérisoire.

« Quand j’étais petite, mon père me racontait ces histoires. Je sais, ce sont des légendes idiotes. Mais il s’obstinait à me les conter tous les jours lorsqu’il m’a adoptée. Pendant des semaines, j’ai refusé de lui adresser la parole : j’étais persuadée qu’il allait m’abandonner alors, quelle importance ? Quel intérêt d’établir un contact avec quelqu’un qui se révélerait décevant, qui finirait par disparaître ? Je pensais qu’il serait comme toutes ces autres familles qui n’avaient pas voulues de moi, qui m’avaient ramenée, effrayées. Mais plus je me taisais, plus il continuait d’essayer. Parce qu’il savait que je ne faisais que j’attendais le moment fatidique où il abandonnerait et où je pourrais retourner à ma solitude. Pourtant, je n’avais pas envie d’être seule … mais je ne supportais pas qu’on m’approche, je n’aimais pas les autres enfants, je n’aimais pas les adultes - ils me battaient. Je voulais qu’on me laisse libre d’être en colère. J'étais enfermée dans mon monde et personne ne pouvait y rentrer....et pourtant, mon père a continué d'essayer, encore, encore, encore.»

Il savait, bien sûr. Sur ses prunelles noires dansait les échos des souvenirs qu’il avait glané en elle au fil du temps, volontairement ou non.

« Je crois qu’on se ressemble un peu toi et moi....»

De nouveau, il lâchait les eaux pour poser son regard sur la jeune femme.

« Ce qui veut probablement dire que là tout de suite tu te dis que ce serait pas mal de m'envoyer valser à l'autre bout de la pièce. Histoire que je me taise. »

Un demi-sourire, froid mais amusé. Et elle l’avait sentie, cette force qui la léchait de part en part, menaçant de la soulever, l’envoyant effectivement dans le mur alors qu’il dardait sur elle ses prunelles sombres.

« Tentant. »

Pour autant, il relâchait la pression, l’air autour d’elle semblant retrouver sa contenance. Aurait-il pu le faire ? L’envoyer valser au loin sans utilisation d’une baguette ? Il n’en savait rien, mais elle pouvait toujours y croire. L’air crépitait autour de lui, laissant à penser qu’il menaçait d’imploser. Pourtant non. Il faudrait le connaître, sans doute. Mais c’était le premier relan d’humour qu’il avait en dehors de sa conversation avec Dorofei.

Le temps s’était suspendu un nouvel instant alors que les vagues se brisaient sur le rivage là, à quelques mètres d’eux, isolés du vent qui se levait sur la côte.

« Quel est la pire crainte d’un samouraï ? »
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Jeu 4 Juin 2020 - 13:43
 Tout ce qu’elle lui racontait, Logan l’avait certainement déjà vu dans son esprit ; en avait aperçu des bribes, sillonné les souvenirs, attrapé les paroles et les gestes lointains. Au fil du temps, Sanae avait appris à lâcher prise, à accepter de perdre ce contrôle si rassurant, à s’accommoder d’une position moins avantageuse. Vulnérable, exposée sous le regard de celui qui lui faisait face, implacable, toutes murailles dressées, imprévisible. On aurait pu la traiter de naïve, de crédule, d’éternelle optimiste aux vaines espérances...mais ces critiques-là, la sorcière ne les entendait pas. Sourde au jugement des autres, aveugle à leur mépris, rien n’aurait pu la faire dévier de sa route. L’obstination, la détermination, le refus d’abandonner, des défauts ou des qualités - tout dépendait le point de vue - qui la constituaient entièrement. L’humilité sans doute aussi, d’avouer qu’elle n’avait pas de contrôle sur cette situation, pas de remède miracle, pas de solution : faire de son mieux, toujours de son mieux, c’était tout ce qu’elle pouvait offrir. Une humilité qui ressortait davantage encore face à Logan. Étrange figure de l’ombre où toute lumière avait été occultée par des démons intérieurs ; le corps et l’esprit hantés par les traces de tortures odieuses, passées mais toujours présentes, là sous la peau, sur la peau, au fond de l’estomac noué, dans l’esprit chaotique où tout se mêlait. Elle le voyait ce combat qu’il menait en lui-même, en permanence, s’épuisant sous l’éreintante tâche de survivre. Humble, face à Logan, oui, elle l’était. Parce qu’au fond, le respect qu’elle lui portait avait bien des raisons d’exister.

« En effet. » répondit-il.

Elle ne dit rien, sentant le regard du sorcier devenir lointain. Il sombrait souvent en lui-même, conscient à demi de ce qui l’entourait. Des voix, des gestes, des odeurs devaient le tirer de cette torpeur instable, si profondément engouffré dans son être que toute intrusion le tirait violemment jusqu’à la surface, le réveillant, un peu...parfois. Pas assez pour le maintenir complètement dans le présent, mais assez pour que sa tête soit hors des vagues. Elle inspira pour prendre la parole et elle le sentit quelque peu revenir. Il écoutait, silencieux, et lorsqu’elle lui dit que ce glorieux samouraï lui faisait penser à lui, son regard sembla devenir plus intense. Comme s’il lui fouillait l’âme. Juste l’espace d’un instant, elle avait senti cette connexion soudaine, à laquelle il mit fin. Se détournant pour regarder à travers la baie vitrée, les vagues au loin, il porta à nouveau son verre à ses lèvres.
Mais elle savait qu’il entendait toujours sa voix, l’écoutait, alors elle continua jusqu’à ce que ses yeux se posent à nouveau sur elle. Petit bout de femme qui lui faisait face, menue, avec un visage si doux qu’on aurait pu la penser à jamais paisible, à jamais joyeuse, à jamais sereine dans n’importe quelle tempête. Il n’en était rien. Il le savait. Et elle...elle savait parfaitement qu’il pouvait à tout moment l’envoyer au loin, valser contre la vitre, à la moindre contrariété, sentiment de lassitude. Ce n’était pas pour rien qu’elle redoublait de douceur et de patience.
Mais elle l’avait fait sourire...à demi. Froid pourtant, toujours, mais sans animosité. L’air semblait se décharger d’un poids, un peu.

« Tentant. »

Sanae sourit en écho, eut un petit rire de gorge discret, les yeux plantés dans les siens, soutenant ce regard si direct, si franc, brutal même dans l’intensité qu’il dégageait. Les nœuds de son ventre se défirent légèrement.

« Tu ne serais pas le premier patient à me malmener. »

Après un silence, où Sanae se concentra sur sa propre respiration, lente et profonde, Logan ouvrit à nouveau la bouche.


« Quelle est la pire crainte d’un samouraï ? »


Cette question la surprit quelque peu, parce qu’elle venait de lui, parce qu’il n’avait fait que répondre à demi à ses paroles à elle, et qu’en cet instant, c’était bien lui qui instiguait la conversation, comme une petite reprise du contrôle.
La sorcière resta quelques secondes silencieuse et posa son verre par terre, trouvant une position plus confortable, en tailleur, les mains posées sur ses genoux.

« Le déshonneur, dit-elle d’une voix ferme. »

Ses prunelles brillèrent un instant. Elles tentaient de sonder celles de Logan. Parce que cette question n’était pas anodine et qu’elle redoutait où il voulait l’emmener. Les Samouraï ne pouvaient pas vivre dans le déshonneur. Ils allaient jusqu’à effectuer le Seppuku pour retrouver l’honneur perdu, grands guerriers qu’ils étaient, affrontant la mort de leurs propres mains ou de celles d’un ami pour se délivrer des péchés qu’ils avaient commis, pour s’enlever la honte qui les rendait malades.

« Un Samouraï ne peut vivre dans le déshonneur, il le craint plus que la Mort, plus que l’écroulement du monde.  »


Elle fronça les sourcils, ses yeux cherchant quelque chose dont elle ignorait encore la nature dans ceux du sorcier.

«  Tu te sens déshonoré ? » demanda-t-elle avec douceur.

Il ne le devrait pas. Pas une seule seconde.

« Mon père avait tendance à dire que le seul déshonneur qu’il pouvait exister était d’abandonner son combat. Pas la défaite. Pas la trahison. Ces sont deux choses qui peuvent être réparées si l’on est déterminé à expier ses fautes. Mais l’abandon, lui, ne le peut pas. Parce qu’il est définitif. »

Avait-il abandonné ? Ou attendait-il de retrouver ses forces, de se retrouver lui-même ? Sanae le fixa sans ciller.

« Mais le combat n’est pas toujours extérieur à soi...et je crois que le tien est un de ceux silencieux qui n’a pas besoin de katana ou de baguette. C’est ce combat-là que tu mènes, n’est-ce pas ? Et quand je te regarde, je n’y vois aucun déshonneur. »

Ses yeux se firent plus doux, sa bouche se pinça légèrement, comme si elle avouait un respect un peu pudique, une tendresse incertaine à l'égard de quelqu'un qui souffrait et dont la souffrance résonnait parfois avec la sienne.  
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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Jeu 4 Juin 2020 - 16:44
Elle se détend, lâche un petit rire de gorge. Une réaction qui aurait eu de quoi désarçonner s’il ne la connaissait pas déjà. Brides de souvenirs, émotions, sensations fugaces. Lorsqu’on ouvre ainsi son esprit, qu’on se livre sans détour, l’intrus repart avec des traces de ce qu’est l’autre. De ce qu’il est profondément. Si l’intrus n’a pas fermé son propre esprit, il laisse lui aussi des vestiges de son passage pendant des minutes, des heures, parfois des jours selon la violence de l’intrusion, du laisser aller, du manque de maîtrise. Logan s’était toujours demandé si ce genre de violences infligées aux deux parties pouvaient changer celles-ci. Si l’impact pouvait être tel qu’un fragment de ce qu’est la personne pouvait rester là et parasiter l’hôte.
Est-ce qu’elle devrait se détendre ainsi ? Sans doute pas. Personne n’avait d’ailleurs été tout à fait détendu en sa présence depuis… eh bien, est-ce que qui que ce soit l’avait jamais été ? La question pouvait se poser.

« Tu ne serais pas le premier patient à me malmener. »

Un demi sourire presqu’amusé.

« Je doute que ce soit une excuse. »

Mince, c’est que ce serait presque une réelle conversation construite ? Oui, tout comme cette réflexion semblait sonner comme un repentir.
Ce don était utile, nécessaire même dans la situation qui était la leur et il aurait été parfaitement puérile et stupide de ne pas l’utiliser. C’était ce qu’il faisait, parfois à contrecœur, parfois non. Parce qu’il s’agissait d’une réaction de protection, parce que connaître les pensées profondes de chaque personne qui entrait ici lui procurait un certain contrôle, un besoin de sécurité qu’on pouvait comprendre. Mais aussi parce qu’il bouillait de rage et parce que sentir l’autre se briser sous son poids avait quelque chose de jouissif après avoir passé des mois à la merci de tous les sévices. Mais qu’au fond, l’enfant qu’il avait été savait ce que c’était que de se retrouver parfaitement à nu face à quelqu’un de plus violent, de plus fort que soi qui pouvait dorénavant comprendre et fouiller chaque recoin de votre conscience et s’en servir contre vous.

« Le déshonneur. »

Elle avait répondu avec une voix ferme, vibrant de force, manifestement dans son élément. En effet, c’était la réponse qu’il attendait. Le déshonneur.

« Un Samouraï ne peut vivre dans le déshonneur, il le craint plus que la Mort, plus que l’écroulement du monde. »

La mort, l’écroulement du monde, le déshonneur. Que de grands mots, de notions pompeuses.

« Tu te sens déshonoré ? »

Un petit rire de gorge passait ses lèvres en un souffle unique.

« Mon père avait tendance à dire que le seul déshonneur qu’il pouvait exister était d’abandonner son combat. Pas la défaite. Pas la trahison. Ces sont deux choses qui peuvent être réparées si l’on est déterminé à expier ses fautes. Mais l’abandon, lui, ne le peut pas. Parce qu’il est définitif. »

Est-ce qu’il avait abandonné la lutte ? Oui, sans doute. Du moins le souhaitait-il ardemment durant un temps. Il avait voulu s’enfoncer, voulu cesser d’exister. Réellement, profondément. Il aurait aimé ne simplement plus être qui que ce soit, et certainement pas cette figure qu’on avait fait de lui. Certainement pas ce qu’il aurait aimé être non plus d’ailleurs. Pourtant autant, il était bien là, connecté au monde des vivants qu’il avait pourtant tant rejeté dans les semaines passées.

« Mais le combat n’est pas toujours extérieur à soi...et je crois que le tien est un de ceux silencieux qui n’a pas besoin de katana ou de baguette. C’est ce combat-là que tu mènes, n’est-ce pas ? Et quand je te regarde, je n’y vois aucun déshonneur. »

Son regard se posait de nouveau sur elle, tranchant, direct.
Quel combat ? Celui qu’il livrait contre lui-même depuis des années ? Celui qu’il avait mené en tête d’une résistance qui n’était pas la sienne ? Celui qu’on lui prêtait sans qu’il sache s’il lui correspondait réellement ? Celui qu’on lui imposait depuis l’enfance ? A vrai dire, Logan avait tant de guerres à mener qu’il avait perdu le compte depuis bien longtemps.

Alors il s’était redressé doucement, décrochait son dos du fauteuil pour la première fois depuis sans doute des heures pour sembler se rapprocher d’elle.

« Je suis le déshonneur Sanae. Du jour de ma naissance jusqu’à celui de ma mort, je n’ai rien d’un samouraï ; et les gosses ne m’admirent pas. »

L’honneur, il n’était pas sûr d’en avoir eu, et sans doute pas celui qu’elle revendiquait si ardemment. Il n’avait rien en commun avec son Kintarō. Rien d’un héro, de toute manière et dit plus simplement. Il n’appartenait simplement pas à cette catégorie. Il n’était qu’un homme qui faisait comme il le pouvait avec les cartes qu’on lui donnait. Un homme tout désigné car placé en haut d’une lutte où les décisions seraient difficiles et que seul quelqu’un au cœur dur pourrait agir ainsi. Rien qu’un homme avec une bonne carapace, des chutes et des échecs, des erreurs et des remords. Et oui, donc, sans doute, une certaine dose de déshonneur.

Calme, Logan s’était levé, rejoignant la cuisine pour remplir de nouveau son verre.

« Garde tes fables mièvres pour toi. »
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Ven 5 Juin 2020 - 18:36


« Je doute que ce soit une excuse. »

Sanae darda son regard sur lui plus intensément encore. Elle l’avait souvent observé de loin, de près, sans avoir ce contact visuel si imprévisible, si déstabilisant ; il était resté longtemps cette figure sombre dans son fauteuil, silencieuse forteresse de marbre, pilier autour duquel on tournait sans jamais le toucher, sans jamais interagir avec. Et aujourd’hui, il lui semblait alors que c’était la première fois qu’elle le voyait vraiment. Ses prunelles tracèrent sans rien dire les traits de son visage, l’arrête du nez, les contours de la bouche, le sourcils sombres, les cheveux noirs de jais. Lignes dures et pourtant fines, contours nets, obscurité et lumière jouant ensemble. C’était presque fascinant de le voir se réveiller, d’observer ses réactions à mesure qu’ils parlaient ; réactions souvent sans paroles, mais pourtant présentes, subtiles crispations du corps. Mais ses lèvres s’étirèrent en un sourire à moitié amusé et la sorcière reporta ses yeux dans les siens. Elle s’était détendue, mais sa concentration ne vacillait pas.

Était-ce du regret qu’il exprimait ? Elle ne le souligna pas, décida de ne pas appuyer là où le sol était capable de s’enfoncer. Il était amusé, faisait preuve d’un humour aussi noir que pouvait l’être celui, bien que plus sarcastique, d’Alec. Les ressemblances s’accumulaient et la sorcière se demandait de quels sévices les deux cousins avaient pu souffrir dans l’enfance, de quels tourments ils étaient encore hantés tous deux. Sanae pinça les lèvres et sourit à demi, elle aussi.

« Je serai bien hypocrite de te blâmer pour tes excès de fureur. »

Elle-même connaissait le peu de contrôle que l’on pouvait avoir en certains moments, douloureux instants où l’esprit semblait voguer à toute allure dans des passages escarpés, incapable de se diriger autrement que par la violence, mêlant les gestes à la souffrance et à la panique, occultant la réalité, occultant les sentiments, les visages, les consciences, pour n’être qu’une boule de feu perdue dans l’obscurité d’une nuit sans fin, se heurtant à tout ce qui se trouvait sur son passage.
C’était bien une boule de feu que Sanae devait manier en cet instant. Et plus la conversation se poursuivait, plus elle tentait de s’en approcher, de la diriger dans une direction, plus le feu s’intensifiait, lui échappait. Peut-être la solution était de ne pas tenter de le diriger quelque part, mais plutôt de l’y accompagner, au risque de se brûler, compagnie distante et proche à la fois, à disposition du feu dès lors qu’il brillerait trop fort ou s’arrêterait brutalement.

Logan se redressa dans son fauteuil, son regard planté toujours plus profondément dans le sien. Elle ne le voyait quasiment jamais en mouvement et son estomac sursauta sans pourtant causer de mouvement chez elle, de réaction, parce que devant elle, le pilier bougeait, la statue se mouvait, la forteresse avançait entourée de ses tours, de ses portes closes, de ses murailles dressées. Sanae ne bougea pas un muscle devant la nouvelles proximité de Logan ; ses paupières cillaient régulièrement, montrant le calme imperturbable qui était le sien, sa respiration lente, douce, ses lèvres closes.

« Je suis le déshonneur Sanae. Du jour de ma naissance jusqu’à celui de ma mort, je n’ai rien d’un samouraï ; et les gosses ne m’admirent pas. »

Ce n’était pas tant ses paroles qui la choquèrent au fond, c’était le fait qu’il était sincère. Parce que tout ceci, il le pensait vraiment. Pas une façon de la recadrer, de lui donner tort, d’écraser ses paroles vaines, mais une façon de lui faire comprendre qui il était. Un homme brisé renfermant un enfant traumatisé? Comment le savoir sans le connaître vraiment?
Elle ne répondit pas tout de suite et déjà il se levait, calme, marchant pour la première fois en sa présence. Il se dirigea vers la table où il se resservit un verre de whisky.

« Garde tes fables mièvres pour toi. »

Sanae ne bougea pas, ses mains se posèrent, ouvertes, sur ses genoux et elle ferma ses paupières. Un roseau dans le vent, ballotté par les fortes bourrasques, se pliant tout en souplesse mais ne se tordant jamais, incapable de se briser. C’était souvent cette image qu’elle invoquait pour garder son calme. Si elle s’énervait, sa rage ferait naître celle, prête à se réveiller, de Logan.

« On est bien des choses malgré soi. » murmura-t-elle, davantage pour elle-même que pour lui.

Bien sûr qu’il trouvait ses discours mièvres. Elle n’en attendait pas moins de quelqu’un comme lui. Mais personne n’avait jamais réussi à tuer tout espoir en elle, pas même la perte de son père, toute ébranlée qu’elle était pourtant par son absence. Elle ne le voyait pas, mais elle n’en avait pas besoin.   Ses oreilles étaient attentives à ses déplacements, à ses gestes. Et son esprit, ouvert à d’éventuelles turbulences dans l’air.

« Je t’épargnerai donc mon discours sur le Destin...je n’y survivrai sans doute pas. »

Un brin d’humour noir encore, parce qu’elle n’était pas que cette figure de petite fille sage et pure et qu’il le savait. Les yeux toujours clos, la sorcière étira ses lèvres en un léger sourire amusé.

« Loin de moi également l’idée de te contrarier en te disant que tu as tort sur un point...mais dans l’intérêt partagé de ne pas voir Alec sombrer, je crois qu’il est important de souligner qu’il existe bien en lui un enfant qui t’admire encore. »

Son esprit sembla s’étaler dans l’air, suivant la brise jusqu’au dehors, imaginant, cherchant la trace d’Alec qui était aussi agité que les vagues qu’elle entendait au loin. On voyait parfois mieux les yeux fermés. Un exercice qui avait mis du temps à donner ses fruits mais qui permettait à la sorcière  de mieux appréhender certaines situations et de garder cet équilibre qui lui était nécessaire.

« Je veux bien lui apprendre l’occlumancie, mais il a besoin de quelque chose venant de toi...tu le sais mieux que personne. »


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Sam 6 Juin 2020 - 12:10
Le Chêne un jour dit au Roseau :
"Vous avez bien sujet d'accuser la Nature ;
Un Roitelet pour vous est un pesant fardeau.
Le moindre vent, qui d'aventure
Fait rider la face de l'eau,
Vous oblige à baisser la tête :
Cependant que mon front, au Caucase pareil,
Non content d'arrêter les rayons du soleil,
Brave l'effort de la tempête.
Tout vous est Aquilon, tout me semble Zéphyr.
Encor si vous naissiez à l'abri du feuillage
Dont je couvre le voisinage,
Vous n'auriez pas tant à souffrir :
Je vous défendrais de l'orage ;
Mais vous naissez le plus souvent
Sur les humides bords des Royaumes du vent.
La nature envers vous me semble bien injuste.
- Votre compassion, lui répondit l'Arbuste,
Part d'un bon naturel ; mais quittez ce souci.
Les vents me sont moins qu'à vous redoutables.
Je plie, et ne romps pas. Vous avez jusqu'ici
Contre leurs coups épouvantables
Résisté sans courber le dos ;
Mais attendons la fin. "Comme il disait ces mots,
Du bout de l'horizon accourt avec furie
Le plus terrible des enfants
Que le Nord eût portés jusque-là dans ses flancs.
L'Arbre tient bon ; le Roseau plie.
Le vent redouble ses efforts,
Et fait si bien qu'il déracine
Celui de qui la tête au Ciel était voisine
Et dont les pieds touchaient à l'Empire des Morts.

La Fontaine.

L’était-il ? Déraciné ? Epuisé ?
Etait-il tombé face aux coups ? Avait-il fini par chuter, sans même le comprendre, dès l’instant où il avait retrouvé sa liberté ?

Par moment, il semblait à Logan qu’il n’avait jamais véritablement quitté sa geôle, qu’il était mort là-bas, sur place publique. Que Johan avait eu le temps de terminer son geste, de lui arracher la vie, de mettre fin à une existence troublée dès le premier instant.
Pourtant, il n’avait cessé de résister, increvable, impossible à faire plier. Tel l’acier, il ne cessait de fendre chaque attaque, de se moquer des coups, de rire de leur insistance, de leurs inaptitudes imbéciles à trouver la faille, le levier pour le faire choir. Solide. Un roc, avait-il entendu une fois, à Poudlard, des années auparavant. Il ne vacillait pas, ne tremblait pas. Rien n’avait moins de sens pourtant. Logan se noyait depuis des années face à cette image qu’il s’était construit. Du moins, c’était le cas par moment. Comme si sa propre existence était trop lourde à porter. Ses responsabilités, ses choix, sa position. Il s’était battu, pourtant, pour l’obtenir. Battu pour exister, pour refuser cette image de pauvre petit bâtard qu’on enterrerait avant sa puberté. Il avait fait sa place, à coup de crocs, de griffes, n’avait jamais accepté de plier sous ceux de ses frères, de ses parents. Il avait été plus fort, avait prouvé sa valeur, avait forcé de le destin pour se hisser plus haut que sa condition pouvait le lui permettre. Jamais il n’avait baissé les yeux, ni dans l’enfance, ni dans la geôle. Le sang avait eu beau couler, seule l’indifférence répondait à la souffrance, l’homme se moquait des efforts de ses bourreaux, le corps cillant à peine.

Pourquoi brûlait-il tant de vie à cet instant-là tandis qu’il sombrait à présent ? Que s’était-il passé entre ces deux moments ? Manquait-il d’espoir, de force ou de vie ?

« Je serai bien hypocrite de te blâmer pour tes excès de fureur. »

Un demi-sourire. Ils présentaient tous deux bien des similitudes. A la découvrir, l’observer, forcer l’intimité de ses souvenirs, sans un bruit, il l’avait compris. Imprégnant ses émotions, ses sentiments, les réminiscences de chaque grands moments de son existence … a observer en silence la tempête mugir en elle, la lave détruire tout sur son passage et la détresse rejeter chaque once d’espoir, il avait simplement entendu les hurlements d’un esprit qui fut à l’agonie.
Mais il s’était construit.
Elle avait posé les briques sur des fondations fissurées, avait fini par accepter que ses propres failles ne pouvaient être consolidées qu’à l’aide de cet homme providentiel. Téméraire, à force d’insistance, de persévérance, il avait fini à son tour par se faire une place auprès de cette enfant réticente. Calme, il avait affronté la tempête, l’avait apaisée, maîtrisée. Par amour, sans doute, il avait su lui donner les clefs pour faire la démarche. Sans forcer.

Ce qui était ironique dans l’histoire, c’était qu’ils possédaient tous deux les mêmes origines. Le même âge.
Si son père n’avait pas décidé de prendre son sale bâtard sous son bras pour le ramener en Angleterre, sans doute aurait-il atterrit dans le même genre d’orphelinat lugubre.
Ce qui était ironique dans l’histoire… c’est que cet enfant isolé, torturé ; ça aurait simplement pu être lui.

Mais il avait eu la grande joie de grandir dans une famille. Avec une mère adoptive, avec un père, avec des frères.

L’enfer est pavé de bonnes intensions.

« Je suis le déshonneur Sanae. Du jour de ma naissance jusqu’à celui de ma mort, je n’ai rien d’un samouraï ; et les gosses ne m’admirent pas. »

Pas de fables pour lui. Pas de belles illusions dorées. Pas d’espoir.
Pas de sauveur providentiel. Il était seul.

D’autres paroles et il s’était levé, parti se servir un verre d’alcool, se mouvant pour la première fois face à elle. Ces lieux dont il restait étranger, il les imprégnait doucement, autrement que par la violence et le sang. L’homme blessé avait fini par mettre de l’ordre la veille, comme un geste de reddition face au réel. Un pas vers l’acceptation.

« On est bien des choses malgré soi. »

Comme une figure de résistance ? La tête d’un mouvement qui le dépassait parfaitement, pas même assuré d’en partager les valeurs. Il n’était pas ce qu’on avait fait de lui. Il ne l’avait jamais été.

« Je t’épargnerai donc mon discours sur le Destin...je n’y survivrai sans doute pas. »

Un souffle amusé. « Sans doute pas. »
Où se situait-il ? Le type violent à qui on ne pouvait rien dire ? Le soldat qui se battrait jusqu’à la mort ? Le renégat qui ferait de sa vengeance une finalité implacable ? L’homme de pouvoir ? Le protecteur droit et juste qui le ploierait pas face au danger ? Le juge, impartial qui prendrait toutes les décisions, ferait des choix immoraux pour sauver les faibles ? Ou simplement celui qui les abhorrait, ces êtres geignards incapables de faire les bons choix ou de voir un peu plus loin que leurs pauvres émotions incisives ?

« Loin de moi également l’idée de te contrarier en te disant que tu as tort sur un point...mais dans l’intérêt partagé de ne pas voir Alec sombrer, je crois qu’il est important de souligner qu’il existe bien en lui un enfant qui t’admire encore. »

Sans un mot, Logan s’était adossé sur le bord de la table de bois qui trônait dans la pièce, le regard perdu vers la plage.
Est-ce qu’Alec l’admirait ? Sans doute oui. Plus le temps passait plus il faisait de lui un modèle, plaçant en lui des espoirs auxquels il ne pouvait répondre.  

« Je veux bien lui apprendre l’occlumancie, mais il a besoin de quelque chose venant de toi...tu le sais mieux que personne. »

Un instant de silence, dévorant, douloureux. Et puis une phrase, tranchante, détachée, si douloureuse pourtant. La vérité. Froide et dure.

« Il a simplement besoin de se soustraire de mon influence. »
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Ven 12 Juin 2020 - 13:40
 Quelle étrange chose que le destin ! Quel concept fourbe, merveilleux, inéluctable, farceur que cette chose que nous croyons conduire alors que c’est lui qui nous conduit partout, tout le temps. Ligne invisible qui nous guide par un chemin, s’entrecroisant avec d’autres lignes tout aussi imperceptibles, tirant les êtres dans des directions parfois opposées, contradictoires, trainant le corps et l’esprit à droite pour finalement bifurquer d’un seul coup à gauche. Où était-ce nous qui bifurquions, se croyant soudainement Maître de sa propre destinée, jusqu’à être tiré à nouveau sur le chemin qui nous est propre ?
A regarder Sanae et Logan, l’on aurait facilement pu voir ces deux lignes si semblables, parallèles pendant longtemps jusqu’à ce qu’enfin depuis leur rencontre, elles ne se croisent. L’un montant, l’autre descendant. Sanae avait commencé sa vie au fond d’un trou sombre, sans issue, sans espoir, sans amour ni douceur et elle avait été repêché, entraîné jusqu’à la surface, peu à peu, pour trouver le soleil et le ciel. Logan, lui, avait eu une vie bien dure, bien sombre, mais avait lutté, avait accompli bien plus qu’elle, s’était battu, placé du côté des opprimés dans un combat dans lequel sa place était pourtant si paradoxale, et puis...et puis la descente. La chute. Le fond du trou, et plus bas encore, en lui-même, là où aucune lumière ne passait, là où tout espoir se mourrait. Etranges destinées. Etranges astres contraires, et pourtant si similaires. Le même âge. La même origine. La même force aussi. Avait-il été elle et elle, serait-elle lui un jour ? Et si l’un remontait, cela entrainerait-il la chute de l’autre ? Jamais au même endroit sur l’échelle du destin, jamais en même temps ? Etaient-ils à un croisement ? Sanae aurait voulu l’aider, le sortir de ce puits sans fond, le déterrer du Royaume des Morts pour lui faire goûter l’air, la chaleur, la lumière. Mais il aurait fallu sans doute descendre tout là-bas pour l’y trouver, pour l’arracher à l’ensevelissement qu’était devenu sa vie, au risque de rester coincée.
Il demeurait inaccessible pour le moment. Et pourtant, aujourd’hui, comme à travers des couches et des couches de terre, elle lui parlait et il lui répondait. Voix sortie d’outre-tombe, esprit instable qui reprenait soudainement conscience de tout, mais beaucoup trop fort. Un réel trop intense, trop douloureux pour vouloir le retrouver complètement. Alors, l’entre-deux, toujours...Logan semblait flotter entre deux portes ouvertes. Et Sanae, et Alec, et tant d’autres qui l’appelaient à prendre la bonne porte...alors que l’autre n’était toujours pas fermée. Allait-il le faire ? Clore cette possibilité ? Fermer la porte derrière lui pour mettre ses deux pieds chez les vivants ? Etait-ce ce qu’il faisait présentement ? Mais alors...comment le garder de ce côté-là ? L’empêcher de revenir dans l’entre-deux, ou pire ?  

La sorcière avait fermé les yeux pour lui parler. Elle entendit son souffle amusé et sa voix prononcer un « Sans doute pas » qui la fit sourire. Ils n’avaient pas besoin de se regarder pour communiquer. Il avait des décisions à prendre et elle ne voulait pas faire peser sans arrêt son regard sur lui, nouvelle pression, intrusion, agression qui pouvait le faire se refermer d’un seul coup. Etre proche en laissant de l’espace entre eux. Un concept délicat. Et naturellement, le sujet Alec revint sur le tapis. Parce qu’elle aurait voulu que Logan comprenne que son cousin avait besoin de lui. Parce qu’il fallait lui rappeler qu’il existait dans les yeux de jeune sorcier comme un modèle dont l’image s’effritait de jour en jour, alimentant une colère, une rancoeur, un sentiment d’abandon déjà bien présents.

Le silence s’était fait mordant. Lourd. Trop lourd. Jusqu’à ce que la voix de Logan vienne à nouveau le trancher à vif.

« Il a simplement besoin de se soustraire de mon influence. »

Sanae ouvrit les yeux. Elle sentait la douleur dans ces mots et ils la prirent aux tripes. Son visage se tourna vers Logan, adossé à la table, l’esprit tourné vers la plage où se déchainait les vagues ...et probablement Alec aussi. Il souffrait. C’était la pensée qui avait jailli de l’esprit de la sorcière en observant le sorcier, son verre de whisky à la main comme si l’alcool allait atténuer ses plaies internes. Il souffrait bien plus qu’il ne le laissait voir. D’un seul coup, elle eut l’impression de devoir éteindre un feu avec un verre d’eau.
« De ton influence...répéta-t-elle, pensive. Mais pas de toi. Il a besoin d’exister pour lui-même, de prendre ses propres décisions, de cesser de vouloir te convenir pour s’octroyer de la valeur…mais il a besoin de toi néanmoins, de votre lien. Est-ce que c’est ce que tu es en train de faire ? De cisailler ce lien entre vous deux ? Pour lui donner sa liberté ? »

Elle avait parlé d’une voix calme, douce, sans jugement, sans animosité. Et pourtant, intérieurement, elle brûlait de lui dire d’arrêter ce projet. Si Logan brisait tout ce qui se trouvait entre lui et son cousin, comme il semblait s’y appliquer, que resterait-il à Alec ? Etait-ce le dernier rempart entre lui et la chute ? Que ferait-il de cette liberté si douloureusement donnée ?

« N’as-tu pas peur de le perdre ? »

Il ne répondrait sans doute pas. De quoi Logan avait-il peur ? Qu’espérait-il ? Espérait-il tout court d’ailleurs ?

Elle le regardait toujours, calme. Mais ses pensées allaient à toute vitesse. Elle pencha légèrement la tête.

« Je suis curieuse : que veux-tu vraiment Logan ? Je n’arrive pas à comprendre encore si tu souhaites être abandonné ou au contraire, entouré…tu n’aimes pas vraiment qu’on vienne te voir. Et pourtant, je crois que tu n’aimerais pas non plus qu’on ne vienne pas..dit-elle, puis ajouta rapidement avec un sourire aux lèvres: A cela tu répondras sûrement quelque chose de très cynique qui t'amusera beaucoup et qui me fera sourire, mais pour gagner du temps, je te dirai maintenant que...personne ne mérite d'être abandonné, pas même lorsque cette personne se dit être le déshonneur. »

Elle détourna le regard et se repositionna, le dos droit, les paupières closes.

« On ne peut pas toujours rester dans l’entre-deux. » souffla-t-elle. « Crois-moi, j’ai essayé. »

Oui...elle avait essayé. Elle connaissait cet état où la solitude appauvrie l’âme et où pourtant, on ne supporte pas la présence de l’Autre. Entre abandon et espoir. Entre vie et mort. Elle avait choisi pourtant, s’était trouvée une issue. Il pouvait faire de même, mais encore fallait-il qu’il le veuille vraiment.
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Mar 16 Juin 2020 - 17:32
Les gens ne savent plus écouter. Bien souvent ils ne font qu’attendre que les autres se taisent pour apposer leurs pensées, déblatérer sur leurs opinions. Selon Carl Roger, il est souvent plus simple de juger que d’écouter, car une telle pratique serait risquée, mettrait à mal notre propre sécurité émotionnelle. Alors dans ce contexte, le silence s’imposait comme une réponse brutale, violente même par sa simplicité. Face au brouhaha, se taire était une arme tranchante qui déstabilisait bien souvent. Imposait par le non dit. Par ce qui ne transparaissait pas.

Elle souriait à ses piques, acceptait la dangerosité de son entreprise, le poussant à s’interroger sur qui il était, ce qu’on attendait de lui. Ce qu’on supposait être. A travers le regard que d’autres posaient sur lui, il lui semblait par moment avoir pris la place de son père. Il aurait d’ailleurs eu grande peine à déterminer s’il s’agissait d’une bonne ou d’une mauvaise chose. Mais la question actuelle ne concernait pas sa ressemblance avec un géniteur qu’il exécrait. Seulement Alec. La première raison qui faisait qu’il acceptait finalement de raccrocher avec le monde des vivants, à s’y insérer un peu plus, délaissant celui des ombres. Celui de l’abandon. Est-ce qu’il ferait marche arrière ? Sans doute. Serait-ce définitif ? A cette question, il ne pourrait pas répondre avec sincérité. Les mots prononcés l’avait ramenés, elle aussi. Paupières closes, elle avait semblé réagir soudainement lorsqu’il avait repris la parole. Comme si à présent chacun de ses mots comptait bien plus. Comme s’ils l’avaient agressée même, piquée par leur existence même, par le contenu, lourd, qu’ils évoquaient. Elle se tournait de nouveau vers lui, posant sur lui un regard analytique.

« De ton influence... Mais pas de toi. Il a besoin d’exister pour lui-même, de prendre ses propres décisions, de cesser de vouloir te convenir pour s’octroyer de la valeur…mais il a besoin de toi néanmoins, de votre lien. Est-ce que c’est ce que tu es en train de faire ? De cisailler ce lien entre vous deux ? Pour lui donner sa liberté ? »

Il posait un regard direct sur elle. Pas froid, mais incisif. Etait-ce le cas ? Est-ce qu’Alec vivait à travers son regard à lui ? Comme un enfant le ferait de son propre père. Il aurait pu sourire de l’image. Il l’aurait dû, à vrai dire. Mais il n’en avait pas le cœur. Etait-ce ce qu’il faisait ?

« N’as-tu pas peur de le perdre ? »

C’était sans doute le seul qu’il n’avait pas encore tout à fait perdu. Le seul qui s’acharnait, malgré tout. Le seul qui ne sache pas choisir ses batailles, donc. Il fallait dire que de tous, il avait toujours été le plus entêté. Le plus solide aussi. Comme lui, il avait grandit dans la fange, pourtant élevé au rang d’héritier, il savait ce que c’était que d’avancer dans les ténèbres du monde des sangs purs. Il savait. Alors il ne fuyait pas. Il encaissait le danger, se jouait des pressions qu’on exerçait sur lui, avançait malgré l’épée de Domoclès braquée sur lui. Cette ombre, elle l’accompagnait à tout moment. Mais il faisait avec. D’autres ne pouvaient pas. S’il y avait bien des liens qu’il cisaillait, c’était ceux-là. La preuve, Aileen ne venait plus. Seul lui, restait. Acharné, incorrigible. Sale gosse buté.

Là, devant, Sanae le fixait toujours tandis qu’il avait rompu le contact depuis longtemps, le regard flou.

« Je suis curieuse : que veux-tu vraiment Logan ? Je n’arrive pas à comprendre encore si tu souhaites être abandonné ou au contraire, entouré…tu n’aimes pas vraiment qu’on vienne te voir. Et pourtant, je crois que tu n’aimerais pas non plus qu’on ne vienne pas.. A cela tu répondras sûrement quelque chose de très cynique qui t'amusera beaucoup et qui me fera sourire, mais pour gagner du temps, je te dirai maintenant que...personne ne mérite d'être abandonné, pas même lorsque cette personne se dit être le déshonneur. »
«  Si ce monde fonctionnait encore au mérite, cela se saurait. »

Au tac au tac. Sans réfléchir. Comme s’il s’habituait doucement à reprendre une conversation normale, plus fluide, moins lente et lourde.

« On ne peut pas toujours rester dans l’entre-deux. » souffla-t-elle. « Crois-moi, j’ai essayé. »
« Je sais. »

Oui, les gens jugent. Car entendre est simple, mais écouter, comprendre, entrer en empathie est différent, demande une implication émotionnelle, un laisser aller, un lâcher prise de ses propres opinions, de son propre soi pour accepter celui de l’autre. C’est vrai. Mais si dérisoire pourtant chez des gens comme eux. A chaque intrusion, il devenait une partie d’elle, pendant quelques minutes, repartait avec, en lui, des brides d’émotions, des traces de ce qu’elle était au plus profond d’elle-même. Chaque fois qu’il était passé, il avait intégré son inconscient, laissé faire par une conscience qui acceptait les risques, acceptait de se livrer totalement, sans pudeur. Oui, il savait. Car il la connaissait. Avait lu en elle comme dans un livre ouvert. Il savait de quoi était fait son entre-deux.

Mais accepterait-il de quitter le sien ? Comment s’y résoudre ?

« Je préfère le déshonneur à l’espoir. » Un soupir. « Je suis fatiguée de l’espoir. »

Fatigué d’être celui dont on attendait des réponses qu’il n’avait pas. Fatigué de ce qu’on lui attribuait. Ce qu’elle lui attribuait.

« Je veux juste qu’il survivre à tout ça. »

Tu voulais savoir ? Voilà.  
Me concernant ? Qu’importe.
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M. Logan Rivers
Mar 16 Juin 2020 - 23:50
Logan darda son regard sur elle et comme à chaque fois, elle devait accuser le coup de ce contact mordant. Elle ne le regardait qu’avec une patience et un calme mêlés de franchise. Cela ne servait à rien de se mentir, de jouer un autre rôle entre eux. Il n’avait toujours pas bougé de sa place, et elle, de la sienne. Il rompit ce contact bien vite, et c’était presque une forme de soulagement. Ses regards étaient intenses, trop parfois pour être maintenus trop longtemps. Pas qu’elle ne pouvait pas les soutenir, mais il lui fallait redoubler d’efforts pour se blinder, pour renforcer sa carapace face à lui.

«  Si ce monde fonctionnait encore au mérite, cela se saurait. »

Un sourire. Un peu amusé. Elle savait bien qu’il avait raison. S’il y avait une justice, si le monde reposait sur le mérite, alors son père serait encore en vie. Comme beaucoup d’autres. Ils ne seraient pas à la merci de fascistes aux esprits étriqués et violents.

« Tu vois, j’avais raison : encore une remarque cynique. » s’amusa-t-elle avec douceur. « Toi et ton cousin, vous avez le même humour. »

Il n’avait évidemment pas répondu à ses questions, elle s’y attendait. Ce fut à lui d’acquiescer ses paroles. Un « Je sais » qui la fit un peu grimacer. Parce qu’elle savait qu’il était inutile de le lui rappeler : il était entré dans sa tête, il avait vu, entendu, ressenti les mêmes choses qu’elle. Parce qu’elle savait aussi que la question était plutôt : comment en sortir, de cet entre-deux ?

« J’oublie parfois...que tu sais beaucoup plus que n’importe qui ce qui se trouve dans ma tête...soupira-t-elle. « En voilà des échanges bien équilibrés...». Une petite raillerie amusée.

Aucun équilibre entre eux. C’était assumé. Elle l’avait accepté mais pour la première fois, elle le soulignait. Comme pour lui rappeler qu’elle naviguait à l’aveugle le concernant alors que lui avait toutes les clés nécessaires pour la comprendre. Aucune envie néanmoins d’entrer dans cet esprit-là. Ou alors, une envie muette, à peine pensée, à peine exprimée à elle-même parce qu’au fond, ça lui faisait peur tout ça.

« Je préfère le déshonneur à l’espoir. »
Il soupira. « Je suis fatigué de l’espoir. »

Un léger rire amer qui s’échappa, à peine, dans un souffle.

« C’est épuisant oui…. » souffla-t-elle.

Elle avait fermé les paupières un instant, tentant de rassembler tout l’équilibre dont elle était capable. Mais les mots de Logan lui faisaient l’effet d’un coup dans le ventre. Elle fronça les sourcils, grimaça, déglutit difficilement. L’espace d’un moment, la fatigue du sorcier résonna avec la sienne, si brutalement qu’elle faillit vaciller. Parce qu’elle aussi était épuisée, fracassée entre les longues heures de travail, les missions pour la Garde, son deuil qui semblait s’étirer d’une bien étrange manière, la douleur allant et venant. Fatiguée de devoir toujours être forte, de devoir toujours faire honneur à la mémoire de son père ; fatiguée de ne serait-ce que devoir tenir debout alors que parfois tout lui criait de s’allonger par terre et d’observer le temps passer, défiler autour d’elle ; fatiguée d’essayer de tirer le meilleur chez les autres, d’occulter le moins bon ; fatiguée de ne jamais baisser les bras, de s’interdire d’abandonner ; fatiguée...fatiguée...de tout. De respirer. De parler. De penser. Alors juste, pour une fois, arrêter. Simplement arrêter le tourbillon incessant, ne plus faire de mouvement, ne plus imaginer, ne plus rêver, ne plus former de mots, fermer les lèvres comme l’on ferme à clés, se boucher les oreilles pour ne plus entendre le bruit fracassant de la vie qui s’acharne. Ne plus être. Juste une seconde. Pour voir si on se sent léger alors, pour voir les poumons se vident de tout l’air qu’ils retiennent, pour voir si l’esprit s’apaise…

« Je veux juste qu’il survive. »

Elle entendit ses mots à demi. Consciente pourtant toujours de sa présence, de sa voix. Mais perdue dans le flot de ses pensées, ou de ses non-pensées. Survivre. Pour quoi faire ? Se laisser aller. Relâcher. Tout. Les autres, soi-même. Lâcher prise. Flotter. Abandonner l’espoir. Abandonner les armes. Oublier le passé, le présent, le futur. Tout envoyer en l’air. Cisailler les liens qui la retenaient en place. Se laisser couler. Emporter. Glisser. Oui, et si elle glissait ? Juste un peu, juste une minute. Juste pour voir, pour comprendre. Se sentir mou. Sans os. Sans muscles. Sans terminaisons nerveuses. Rien. Un flux d’énergie qui se laissait porter. Elle glissait, glissait, glissait. Et l’air autour se chargeait d’une nouvelle électricité sans qu’elle ne le perçoive. Sourde. Aveugle. Elle était en elle-même. Les mots de Logan avaient déclenché une pensée dangereuse, une idée persistante qu’elle avait déjà eu et qu’il venait de faire renaître soudainement. Et tout aussi brutalement, Sanae reprit son souffle dans une grande inspiration, comme si elle avait été en apnée. C’était ce qui s’était passé : elle avait retenu sa respiration, sans vraiment y penser. D’un seul coup alors, l’air s’engouffrait en elle douloureusement et son corps se pencha un peu en avant, ses mains agrippèrent le tapis au sol.
Haletante, elle ouvrit les yeux. Trouble. Elle voyait trouble.

«  Je crois que moi...je ne peux pas survivre sans espoir. C’est tout ce qui me fait tenir. » murmura-t-elle.

Une honnêteté un peu brutale sans doute. Pour une fois, elle n’évoquait pas un souvenir, une histoire, une généralité, un concept...non, elle parlait d’elle, de ce qu’elle ressentait. De ses faiblesses. Et c’était presque étrange d’évoquer cela avec lui, qui était pourtant son patient...un patient spécial, pour sûr, mais seulement un patient. Une sorte d’intimité s’était créée entre eux alors même qu’il lui refusait l’entrée de son esprit, alors même que c’était bien la première fois qu’il  lui adressait la parole. Mais il était entré en elle, dans son esprit, et la connaissait aussi bien qu’elle se connaissait elle-même. Et peut-être était-ce pour cela que la distance qui les séparait se faisait parfois très fine.

« C’est tentant pourtant...de se laisser glisser...de tout abandonner. »

Mais elle ne pouvait pas se le permettre. Elle le savait. Sanae se redressa, lentement. Une inspiration, profonde. Une expiration. Et elle était revenue. La sorcière se leva et fit quelques pas vers Logan, face à lui.

« Mais je crois que ça m’est interdit … Si j’arrête d’espérer, c’est le monstre en moi qui prend le relais. » Un regard vers le dehors, vers l’horizon où le soleil commençait à se coucher au-dessus des vagues. « Si tu veux qu’il survive, peut-être que c’est de ça dont il a besoin...d’un peu d’espoir. Mais tu ne peux pas le lui donner, je le sais...tu n’en as déjà pas pour toi-même. ».

Ce n’était qu’un constat, avec un brin de tendresse...Un peu triste la tendresse. Sanae se détourna et contourna la table pour saisir son sac et en sortir des boites contenant à manger. Des cookies. Des muffins. Une gâteau au rhum. Elle déposa tout ça sur la table et se saisit de son thermos pour boire une gorgée de thé en regardant toujours dehors. « Tu t’en fiches mais j’ai cuisiné. Comme d’habitude, je te conseille de manger un peu. J’ai mis du rhum dans le gâteau. Ça te changera du whisky. ». Un ton plus léger. Presque par nécessité d’enlever cet air lourd qui planait dans la pièce.

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Jeu 18 Juin 2020 - 15:57
« Tu vois, j’avais raison : encore une remarque cynique. Toi et ton cousin, vous avez le même humour. »

Un petit souffle amusé. « Stigmates de la famille Rivers. » Pourtant il ne levait pas le regard, laissait couler cette affirmation. Dans leur famille, il fallait accepter son rôle sans rechigner. Accepter, en fait. Juste, accepter. Ecouter, plier, se conformer. S’il y avait bien un point sur lequel Alec et lui se ressemblaient, c’était ce refus systématique et total qu’ils avaient eu à suivre les ordres, à entendre les injonctions, à accepter les barrières des cases qu’on leur imposait. Jamais, à aucun moment, il n’avait accepté d’être le bâtard. D’être la raclure. De n’être rien, en fin de compte. Comme Alec, il avait fixé son père, droit dans les yeux, le menton haut, l’ai dédaigneux. Comme Alec, il avait refusé, s’était battu, avait exigé un respect auquel il n’avait pas le droit. Sauf que lui l’avait fait pour une raison bien spécifique. Alec avait agit comme un gosse de riche, un privilégier qui pense avoir toutes les raisons du monde d’absoudre un mal-être qu’il se cause pourtant seul. Le garçon se complaisait dans la douleur et, au fil du temps, n’avait jamais cessé de la provoquer. Logan, lui, avait simplement refuser de n’être qu’un sous-fifre. Il s’était dressé face au statut de punching-ball que lui avaient gracieusement offert ses parents, avait agit pour prouver sa valeur, encore et encore, avec tellement d’acharnement qu’il en était devenu meilleur que les autres. Meilleurs que ses frères, meilleur que son père, meilleur même que les enseignants que les Rivers payaient grassement pour instruire leur progéniture – pas lui, bien évidemment. Meilleur. Parce qu’il se refusait à être celui qu’on laisse de coté. Celui qui s’inscrit dans les clichés, les reproches assénés chaque jour. S’il était accusé, alors qu’il le soit pour de bonnes raisons. S’il était blessé, frappé, jeté au sol… que ce soit parce qu’il avait le dessus. Que ce soit parce que les autres avaient peur. Peur de la puissance qui se cachait derrière son regard noir, que ce soit des secrets que son petit sourire cynique dissimulait. Que ce soit par cupidité, par jalousie, par couardise. Mais certainement pas par assujettissement.

« J’oublie parfois...que tu sais beaucoup plus que n’importe qui ce qui se trouve dans ma tête... En voilà des échanges bien équilibrés...»

Un petit sourire mais il n’en disait rien. Sans doute faudrait-il rééquilibrer la balance en effet. Elle restait affreusement dévoilée face à lui. Il savait, la connaissait, comprenait instinctivement, du moins en partie, certains de ses ressentis. Parce qu’il avait eu les mêmes, parce qu’il avait expérimenté les siens, directement à leur source, également. Parce qu’il était passé par là, aussi, en un sens. Pour autant, il n’ouvrait pas son esprit. Sans doute devrait-il se sentir mal d’avoir profité de ces portes ouvertes qu’elle lui avait laissé. Sans doute aurait-il dû, même, ne pas agir ainsi, comprenant que si elle s’ouvrait ainsi, c’était qu’elle n’avait rien à cacher. Mais il n’aurait pas pu se contenter de ça. Difficilement maintenant et certainement pas à l’époque.

« C’est épuisant oui…. »

Etre. Dans toute sa complexité. Juste, exister, à l’heure actuelle ; est fatiguant. Pourquoi cette réaction immédiate, brutale, totale ? Ce cynisme, ce rejet immédiat, alors qu’elle ne faisait que valider ce qu’il venait d’affirmer. Pourquoi cette rage à l’idée qu’on puisse admettre que ce qui l’épuisait pouvait l’être ? Elle ne faisait que légitimer son ressenti. Alors, bien sûr, il n’avait besoin de personne pour aller dans sn sens, pour donner du poids à ce qu’il ressentait, puisque c’était là, et par définition, existait. Pourtant il se trouvait piqué au vif, électrisé par cette sensation. Peut-être parce qu’enfant, justement, tout ce qu’il était était nié et qu’il avait dû se battre pour y donner un poids. Poids qui n’avait à présent besoin de personne pour demeurer.
Peut-être. Toujours était-il qu’il avait posé un regard froid sur la jeune femme, l’observant sans agir se noyer en elle-même. Ça n’avait pas duré longtemps, mais il n’avait rien dit, avait laissé la violence des émotions la submerger, lui coupant le souffle. Il l’observait, de loin, avec dédain, sans prendre la peine de venir en elle pour comprendre ce qu’il s’y passait. Encore moins de venir vers elle pour apporter un soutien. Il n’était pas là pour ça. Etait fatigué d’être le roc, le mentor, celui qui prenait toutes les décisions. Si elle voulait un soutien psychologique, c’était vers Maxence qu’il fallait se tourner. Pas vers lui.
Maxence. Pas de nouvelles. Ni de lui, ni d’Ismaelle.

Avait-elle raison ? Aurait-il préféré voir défiler les visages du passé ? Aurait-il aimé savoir qu’il avait compté ? Qu’il avait bien agit. Mieux, que sa résistance durant des mois avait eu un sens.

«  Je crois que moi...je ne peux pas survivre sans espoir. C’est tout ce qui me fait tenir. »

Un air froid posé sur elle, alors qu’elle se battait avec la violence de ses propres doutes. Jusqu’où les laisser s’insinuer ?

« Alors tu risques de déraper. »

Riper en dehors de ton chemin tout bordé de droiture.
L’espoir ne suffit pas.

« C’est tentant pourtant...de se laisser glisser...de tout abandonner. »

Elle revenait. Il la sentait appartenir de nouveau à son monde ; une idée qui l’avait fait sourire, en silence, amusé par l’absurdité de ce revirement de situation. Il demeurait sur la terre ferme et l’avait observée un instant manquer de se noyer. Est-ce que cela pourrait suffire ? Quelques mots pour la briser, elle et son bel optimisme, sa droiture et ses valeurs ?

« Mais je crois que ça m’est interdit … Si j’arrête d’espérer, c’est le monstre en moi qui prend le relais. » Le monstre… un concept fascinant. Des mots choisis avec attention et sincérité. « Si tu veux qu’il survive, peut-être que c’est de ça dont il a besoin...d’un peu d’espoir. Mais tu ne peux pas le lui donner, je le sais...tu n’en as déjà pas pour toi-même. »
« En effet. » Il n’en avait pas. Certainement pas à revendre. Et encore moins à Alec. « D’autant que je trouve les monstres plus aptes à la survie que les dévots. »

Un mot violent. Comme si l’espoir n’était qu’un concept, une conception en laquelle on pouvait croire aveuglement, sans jugement ni filtre. Dans une certaine mesure, c’était pourtant ce qu’il pensait.
Est-ce qu’elle n’avancerait pas mieux en compagnie de ce fameux monstre ? Dans quelle mesure avait-il eu tors de se brider, lui-même ?

Elle se relevait finalement, partie dénicher quelques boites dans son sac, s’imprimant de nouveau parfaitement dans sa propre existence, son parfait contrôle retrouvé.

« Tu t’en fiches mais j’ai cuisiné. Comme d’habitude, je te conseille de manger un peu. J’ai mis du rhum dans le gâteau. Ça te changera du whisky. ».

Il ne réagissait pas, seul un demi-sourire frémissait au coin de ses lèvres. « C’est fascinant de voir à quel point tu peux être lisse à l’extérieur. Parfaitement façonnée pour te conformer à l’image que tu souhaites renvoyer. »

Une image parfaitement nette, si loin de ce qu’il avait pu voir en elle. Sans plus de commentaires, il posait son verre, s’approchant finalement pour prendre un gâteau dans l’une des boites. Est-ce qu’il avait déjà mangé depuis son retour ? Oui, sans doute. Forcément même. Mais il ne s’en souvenait plus.
Des pâtisseries à l’étrange goût de normalité.

« Presque bonne à marier. »

Pas sûr que ce soit un compliment.
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M. Logan Rivers
Jeu 2 Juil 2020 - 19:10
 
« J'ai la tête qui éclate
Je voudrais seulement dormir
M'étendre sur l'asphalte
Et me laisser mourir
Stone
Le monde est stone
Je cherche le soleil
Au milieu de la nuit
J'sais pas si c'est la Terre
Qui tourne à l'envers
Ou bien si c'est moi
Qui m'fais du cinéma
Qui m'fais mon cinéma
Je cherche le soleil
Au milieu de ma nuit
[…]
J'ai plus envie d'me battre
J'ai plus envie d'courir
Comme tous ces automates
Qui bâtissent des empires
Que le vent peut détruire
Comme des châteaux de cartes
Stone
Le monde est stone
Laissez-moi me débattre
Venez pas m'secourir
Venez plutôt m'abattre
Pour m'empêcher d'souffrir
J'ai la tête qui éclate
Je voudrais seulement dormir
M'étendre sur l'asphalte
Et me laisser mourir »

Le monde est stone, Fabienne Thibeault

Il y avait eu des fois où Sanae s’était sentie sur le point d’éclater. Comme si son corps se gonflait de  fureur, de peur, d’angoisse, jusqu’à vouloir s’éparpiller en petits morceaux et ne plus être, ne plus exister. Et parfois, c’était les autres qu’elle avait voulu éclater. Pas par méchanceté, pas par sadisme ou cruauté, mais seulement parce qu’elle ne trouvait alors aucun autre moyen d’exprimer ce foutu sentiment d’impuissance, cette peur viscérale de ne plus tout à fait s’appartenir. Elle sentait son esprit la rejeter aussi fort qu’elle avait jadis rejeté les autres, dans ces moments de tempête où tout lui échappait. Pire, tombée par la violence de ses propres crises, écrasée par le poids incommensurable de sa magie et de sa rage toutes deux mêlées, la sorcière avait mille fois envisagée de ne pas se relever. Face contre terre, le regard vitreux, l’esprit embrumé, l’espoir vacillant, Sanae aurait pu supplier n’importe qui de l’achever. N’importe qui. Ce n’était pas pour rien qu’elle s’isolait dans ces moments-là, ce n’était pas pour rien qu’elle guettait en permanence les signes d’une prochaine crise : elle n’avait pas envie qu’on voit cela, qu’on la voit ainsi, si misérable, si faible, même pas capable de résister à son propre tourbillon. Il y avait un sentiment profond de honte, de désespoir, d’impuissance et de colère lorsqu’on apparaissait si vulnérable face aux autres alors qu’on tâchait d’ordinaire d’avoir le contrôle.
Lorsqu’elle avait vu et entendu parler des dégâts qu’avait fait Logan à son réveil, à l’hôpital clandestin, et puis ici...Sanae avait compris ce besoin de reprendre le contrôle. Comme une façon de  reprendre un bout de soi alors qu’on se sentait dérobé de tout. Vidé. Abattu. Plus tout à fait soi-même. Et pourtant, toujours coincé dans ce corps qui n’avait presque plus de force. Cette envie de tout détruire, de mettre les autres à terre pour se sentir mieux : ce n’était pas bien, ce n’était pas correct, c’était même franchement horrible mais...on faisait tant de choses affreuses pour survivre. Elle n’avait pas eu de jugement envers lui, seulement de la compassion, de la méfiance pour se protéger elle-même comme si elle avait approché un animal blessé. Du reste, il l’était. L’animal pourtant reprenait peu à peu forme humaine. Il ne se laissait toujours pas toucher, refusait d’être soigné autrement que par sa propre main et agissait toujours comme s’il était à moitié absent, mais il parlait, il bougeait, se nourrissait un tant soit peu, avait l’esprit plus dans la réalité qu’il ne l’avait eu auparavant. Alors, c’était bien de l’espoir qu’avait la sorcière le concernant. Un espoir qu’il rejetait de toute ses forces. Mais elle en avait bien assez pour eux deux.
Parce que c’était ça qui la faisait se relever à chaque fois, c’était la force de sa volonté qui lui donnait le courage de se tenir debout et de continuer à avancer, c’était l’amour qu’on lui avait donné, l’éducation et la confiance, le souvenir de la fierté de son père lorsqu’elle réussissait et sa douceur lorsqu’elle échouait, c’était ce caractère buté qui lui donnait l’envie d’essayer jusqu’à obtenir ce qu’elle voulait...c’était toutes ces choses réunies qui faisaient en sorte que Sanae survivait. Mais qu’avait donc Logan pour lui donner la force de faire de même ? L’avait-on aimé ? L’avait-on éduqué normalement ? L’avait-on soutenu, encouragé, donné de l’importance ? Avait-on un jour été fier de lui ? Avait-on un jour..voulu de lui ? Elle ignorait beaucoup de sa vie et tentait de naviguer dans le noir, entourée de brouillard, pour atteindre un quai délabré, qui n’attendait plus personne. Et elle ramait, ramait...toujours et encore dans l’obscurité. Puis, de petits flashs de lumière...des indices...des mots chargés de sens cachés, d’un lourd passé qui lui mettait la puce à l’oreille.

« Stigmates de la famille Rivers. » dit-il dans un souffle amusé.

Elle avait légèrement souri en coin, mais cela ne la faisait pas vraiment rire. Pensive, elle imaginait ce que la vie du sorcier avait été. Un regard dans sa direction, qu’elle détourna bien vite.

« J’imagine que ce n’était pas la famille que tu espérais... Je te dirais bien de te construire la tienne, à défaut d’avoir pu choisir la première...mais il faudrait que tu parles à des gens et erg...quelle horreur...Déjà, là, ça fait quoi ? Un quart d’heure qu’on discute comme des gens à peu près normaux, et on approche doucement de la limite. »

Un sourire moqueur étira ses lèvres, une moquerie qui n’était pas méchante du reste. Elle riait autant de lui que d’elle, tous deux n’ayant que peu de goût pour les foules. Sanae avait juste appris avec les années à faire confiance aux autres.

Elle avait appris à s’équilibrer aussi, et pourtant, quelques mots de Logan résonnèrent si violemment en elle qu’elle relâcha un peu de son contrôle, s’engouffra dans un sentiment dangereux. Une petite absence et elle était revenue, reprenant sa respiration comme si la sorcière s’était noyée subitement en elle-même. Le sorcier n’avait pas bougé, sa présence s’était de toute manière effacée aux yeux de Sanae jusqu’à ce qu’elle soit revenue à la surface. L’espoir oui, était bien son moteur principal.

« Alors tu risques de déraper. »
Elle sourit. Calme.
« Oh, je dérape toujours Logan. Parfois tous les mois, tous les ans, tous les deux jours, mais je me relève à chaque fois. Tu crois que j’aurais tenu jusqu’à aujourd’hui face à ton silence si je n’étais pas aussi butée que toi ? »

Sanae avait relevé légèrement un sourcil. Il y avait un peu de défi dans ses yeux, accompagné d’un amusement certain. Non ce ne sont pas quelques mots qui me mettront à terre, non ce n’est pas ton désespoir ou tes attaques qui me feront abandonner. Je tombe mais je me relève. Je plie mais je ne me brise pas.
Comme pour appuyer cette volonté de fer, la sorcière s’était relevée. Cesser d’espérer définitivement lui était interdit oui, c’était bien le fruit de son éducation qu’elle proférait ainsi.

« En effet….D’autant que je trouve les monstres plus aptes à la survie que les dévots. »

Cette fois, elle sourit plus largement encore.  

« Que ça plaise ou non, je suis les deux tout à la fois. » Deux côtés d’elle-même qui s’entendaient autour qu’ils s’affrontaient. Amusée, elle leva les yeux au ciel en ajoutant avec sarcasme « Mais je suis bien aise de voir que ton cynisme a plus de résistance que ton envie de vivre. »

Elle avait bien le droit de lui lancer de petites piques elle aussi, non ? Il se permettait tant envers elle. C’était de bonne guerre. Une guerre qui demeurait bien tendre pourtant pour des caractères comme les leurs. Aussi, elle ne tarda pas à détendre l’atmosphère en sortant de son sac de quoi grignoter, suscitant un sourire chez le sorcier.

« C’est fascinant de voir à quel point tu peux être lisse à l’extérieur. Parfaitement façonnée pour te conformer à l’image que tu souhaites renvoyer. »


Elle avait pris un gâteau dans ses mains mais releva le regard vers Logan alors qu’il posait son verre sur la table.

« Cela n’a rien de fascinant hélas, fit-elle calmement, impassible. Ce n’est que le fruit de beaucoup de travail et de beaucoup d’énergie...et ce n’est pas un résultat qui est gratuit.  »

Elle finissait toujours par le payer. Il suffisait qu’elle tire trop sur la corde, qu’elle donne un peu trop aux autres, qu’elle fasse un peu trop d’efforts et son esprit et son corps le lui faisait payer. Le prix était élevé, brutal, et il n’y avait jamais moyen de négocier à la baisse.
Il se servit et elle détourna le regard vers la baie vitrée. Il mangeait, c’était déjà ça.

« Presque bonne à marier. »


Elle éclata de rire sans pouvoir s’en empêcher. Ce n’était pas un compliment, elle le savait. D’ailleurs, elle s’en serait offusquée en d’autres circonstances, mais la réflexion prenait un sens si absurde dans ce contexte, après tout ce qu’ils pouvaient s’être dits et savoir de l’autre que l’hilarité n’avait pas pu être contenue.

« Il faudrait être fou. » rétorqua-t-elle.

Fou oui. Parce qu’elle ne savait pas si être à ses côtés était une bonne chose. Bien sûr que chacun avait envie de se sentir lié à quelqu’un, de partager avec une autre personne une vie remplie d’obstacles et de plaisirs ; évidemment que la solitude pesait souvent, que le malheur était d’autant plus lourd à porter seul. La sorcière ne se faisait pas d’illusion : si elle n’avait jamais eu personne dans sa vie, c’était parce qu’elle estimait qu’elle n’avait pas le droit d’infliger cela à quelqu’un. Elle n’imposerait pas son instabilité sur quiconque.

« En plus, il y a peu d’hommes qui accepterait d’être marié à une femme qui peut les battre dans un duel les yeux fermés. »

La sorcière fit un large sourire et croqua dans un cookie.

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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Sam 11 Juil 2020 - 2:00
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l'esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l'horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l'Espérance, comme une chauve-souris,
S'en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D'une vaste prison imite les barreaux,
Et qu'un peuple muet d'infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout à coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.

- Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; l'Espoir,
Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.


A. Baudelaire


Comment avancer quand plus rien n’a de sens ? Qui défendre, qui croire, qui protéger, quand même les victimes semblent coupables. Coupables d’avoir posé les armes, coupables de lâcheté, fautives d’une traitrise insensée. Coupable d’oubli, aussi. Coupable d’un abandon immonde, injuste.

Coupables d’attendre, inlassables ; d’espérer, ridicules ; de se débattre sans espèce de début de conviction. Coupables, surtout, d’incapacité crasse. Coupables d’une vertigineuse faiblesse. Coupables de ne pas être à la hauteur, simplement. Alors pourquoi se battre quand la cause n’a pas d’intérêt ? Pour qui ? Pour quelles valeurs ? Dans quel camp se situait-il, simple soldat, mis sur la route de l’Atrocité, sans véritablement ni but ni bannières, simplement l’espoir rageur de passer à travers la tempête, de rester debout, de prouver que force et véhémence n’ont jamais quitté ses veines. Quel intérêt lorsque le seul but de la bataille est d’être le dernier debout ? Seul.
Que faire donc, quand, finalement, cette survie semble simplement synonyme de défaite ?

Non, l’espoir, il n’en avait plus. En avait-il simplement été pourvu un jour ? Avait-il été le feu dans ses artères ou simplement un vernis, une lippe dont il se moquait lorsqu’elle ornait les prunelles mornes de ses adversaires ? Par quoi était-il poussé au fil des jours alors que sans cesse, il montait au front, la tête haute, le dos droit, affrontait les regards inquiets, les espoirs stupides, les espérances veines. Qu’est-ce qui le tenait, lui, lorsqu’un enfant s’effondrait, sacrifié par ses quelques mots, déchu par un homme qui aurait dû le sauver. Quel était son moteur lorsque les uns tombaient et que les autres ne cessaient de s’approcher. Pourquoi prendre les armes si ce n’était pour ne pas tomber soi-même ?

Alors depuis quand était-il à terre sans la moindre envie de sentir de nouveau son propre souffle emplir ses poumons ? Depuis quand avait-il cessé de laisser couler rage et pouvoir dans chaque recoin de son être ? Cette puissance, elle battait en lui pourtant. Par moment. Animal blessé, furieux, se débattant dans une cage qu’il gardait sous clef. Dans quel but ?

« J’imagine que ce n’était pas la famille que tu espérais... Je te dirais bien de te construire la tienne, à défaut d’avoir pu choisir la première...mais il faudrait que tu parles à des gens et erg...quelle horreur...Déjà, là, ça fait quoi ? Un quart d’heure qu’on discute comme des gens à peu près normaux, et on approche doucement de la limite. »

Un souffle amusé, demi-sourire revêtant plus de la grimace que d’une quelconque gaité. Construire sa famille. A partir de quoi ? Dans quel but ? A quoi ce type de sociabilité pouvait bien servir au juste dans le monde dans lequel ils évoluaient ? L’idée lui échappait. Mais oui, il fatiguait, en effet, de cette conversation, de l’espoir qu’elle dégueulait parfois sur lui comme une agression mielleuse et absurde.

« Oh, je dérape toujours Logan. Parfois tous les mois, tous les ans, tous les deux jours, mais je me relève à chaque fois. Tu crois que j’aurais tenu jusqu’à aujourd’hui face à ton silence si je n’étais pas aussi butée que toi ? »

Nouveau souffle. Nouvel amusement presque pernicieux.

« Je crois que tu n’es plus si douée en silence que tu le penses. »

Le silence de l’enfance s’était évanoui. Celui qui lui parlait, rageur, celui qui puait le rejet, débordait de haine, se dressait là, tel un pied de nez à la joie des autres gosses. Celui qui n’était qu’une provocation muette face au bruit, à l’agitation. Car dans l’ombre, l’esprit s’affinait, se nourrissait des regards en coin, des exclusions. Il s’enracinait, telles des serres qui se refermait sur chacun de ces idiots qui ne comprenaient pas, ne savaient pas quels remous se mouvaient sous la surface.
Il les comprenait.

Mais oui, il la savait butée. Assez pour encaisser la tempête autant que l’œil du cyclone. Assez pour gérer la fougue du jeune qui se tenait là, dehors, macérant sa rancœur, nourrissant ses failles. Ouais, assez pour l’encaisser, pour l’aider à avancer malgré tout. Malgré le monde. Malgré la situation. Malgré lui, même, sans doute. Et c’était le plus important.

« Que ça plaise ou non, je suis les deux tout à la fois. » Monstre et dévot. Puritaine et déchet. « Mais je suis bien aise de voir que ton cynisme a plus de résistance que ton envie de vivre. »

Cette fois, c’était un véritable rire qui avait franchi ses lèvres. Dorofei aurait pu la lui sortir celle-là tient.
Ouais, c’était assez bien résumé. Le cynisme comme première arme de défense. L’attaque n’avait pas tardé à s’affuter également. Mais en premier, il y avait eu ça. Le cynisme. L’effronterie indolente dont il n’avait cessé d’user avant d’apprendre à se taire, à récolter les informations, à encaisser, avant de frapper, fort, violemment, retournant le pouvoir pour le faire sien. Trouvant sa place. Non, volant sa place, violant les privilèges des autres, pulvérisant leurs petites certitudes absurdes, réduisant leur assurance nauséabonde au silence. Parce que lui aussi, parfois, savait changer de camp. Le silence.

« Cela n’a rien de fascinant hélas, fit-elle calmement, impassible. Ce n’est que le fruit de beaucoup de travail et de beaucoup d’énergie...et ce n’est pas un résultat qui est gratuit.  »
« Tant d’efforts… » Son verre posé, il l’avait rejoint d’une lenteur mesurée, le son de sa voix se faisait souffle, murmure, frémissement. « … pour un résultat tant fallacieux qu’abject. »

Quelle idée de se grimer ainsi. De lisser celle qu’elle pouvait être pour entrer dans le moule, pour gommer ce qui faisait sa force, ces aspérités qui faisaient d’elle quelqu’un de complet, profond, intéressant, et le cacher au monde. Pourquoi ? Se protéger ou correspondre à l’idée qu’un père pouvait se faire de l’acceptable ? Il ne saurait trancher.

Etait-ce de l’agressivité ? Pas volontairement disons. Juste une remarque parfaitement honnête. Comme la seconde sans doute, prononcée sur un ton plus léger, amusé, moqueur. Sa réaction lui avait arraché un nouveau sourire en coin. Un rire, franc, réel, parfaitement amusé. Le genre de son qui sonnait étrangement à ses oreilles, résonnait comme un écho lointain d’émotions qu’il n’avait plus croisé depuis des lustres. Une réaction qui éveillait en lui des souvenirs nets. Ceux d’une femme qui malgré toutes ses faiblesses avançait autrefois à ses côtés sans peurs. Ou du moins avec certaines d’entre elles, mais celles qu’il n’attendait pas d’elle.

« Il faudrait être fou. »

Ouais. Il faudrait être fou. Ou folle.
Il en avait connu. Mais enfin semblait-elle avoir renoncé, baissé les armes, tourné le dos. Compris qu’elle n’était pas à la hauteur des balles perdues, incapable d’encaisser les dégâts collatéraux.
Incapable, elle, de faire face au silence, et de revenir, inlassablement. Incapable. Juste ce mot, peut-être. Incapable. N’était-ce pas ce qu’elle craignait depuis toujours ? N’était-ce pas ce qui la rendait furieuse, alors qu’il en envoyait d’autres pour la protéger, conscient qu’elle chuterait si le coup de trop venait la prendre par surprise ou par force. Alec avait pris pour elle, il le savait parfaitement, l’avait envoyé pour ça, conscient que son cousin saurait gérer. Aileen ne saurait pas. La preuve, elle était finalement aux abonnés absents. Enfin.
Enfin le silence de l’absence. Enfin la déchéance de l’abandon. Enfin l’échec. Et la douleur du manque.

Enfin.

Chronique d’un désastre annoncé.

Oui, il faudrait être fou. Son geste suspendu, il s’était finalement mis à mâcher, comme un geste oublié depuis longtemps, difficile, dérisoire. Bon, mais sans saveur dans sa bouche d’ascète.

« En plus, il y a peu d’hommes qui accepterait d’être marié à une femme qui peut les battre dans un duel les yeux fermés. »

Peu de femmes, qui accepteraient la violence, insensée, lourde et brûlante d’un duel constant entre deux êtres qui ne font finalement que se détruire.

Enfin, oui. Enfin elle avait fini par s’éloigner.
Voilà Logan, t’as gagné. Content ?

Ouais… Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.

Qu’importe l’espoir, qu’importe la bataille, qu’importe l’échec.
Etait-ce ce qu’il attendait depuis tout ce temps ? Que la fuit l’emporte pour l’une. Que la rage soit victorieuse pour le second. Qu’ils se conforment enfin à ce qu’il attendait d’eux ? Qu’ils craquent, laissant place à ces tendances fourbes, humaines, qui nous échappent mais restent en nous comme des guides, nous prenant par la main quand dans les ombres la logique fini par s’éteindre ?

« Ils ne savent pas ce qu’ils ratent. »

Vas-y blesse moi. Est-il possible de n’attendre que ça ? Qu’on m’abatte. Qu’on me mette à terre, une bonne fois pour toutes. Qu’on arrache toute résistance d’un corps pourtant déjà tellement malmené. Trouver plus fort que soi, tomber, enfin, sans espoir de se relever. Lâcher, simplement, sans force aucune pour retourner au combat. Et juste se laisser couler dans les ténèbres.
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Mar 14 Juil 2020 - 12:45
« Sans cesse à mes côtés s’agite le Démon ;
Il nage autour de moi comme un air impalpable ;
Je l’avale et le sens qui brûle mon poumon
Et l’emplit d’un désir éternel et coupable. »

Charles Baudelaire, La Destruction.



Qui était-elle ?
Dualité de visage et de coeur. Elle était la face lumineuse et celle, cachée, de la Lune. Des fois croissante et des fois pleine. A moitié exposée, toujours dissimulée. Vertueuse. Honnête. Pure. Prude. Intègre. Sage. Douce. Altruiste. Tendre regard et coeur mou. Tant de mots qui la considéraient à demi, tant de mots qui passaient sous silence l’autre côté de son âme en oubli. Mais qui était-elle ? L’avait-on cachée à elle-même ? Tant et si bien qu’elle réprimait en son sein tout ce qui la rendait pleine. Entière. Les contradictions, les paradoxes passés à la trappe, frappaient à la porte avec la force d’un diable. Coup par coup ils tentaient d’échapper à sa Peur, féroce gardienne qui en barrait l’entrée. Peur d’exulter, peur d’exister pour de vrai. On lui avait dit « monstre », « démon », « abomination » et son esprit, en pleurant, s’était enfermé. Acculé dans un recoin, il souffrait des lumières qui cisaillaient son ombre ; trop vives, incandescentes barrières qui l’empêchaient de vivre. Pour le tuer, il fallait bien cela : l’assommer de pudeur, d’espoir, de convictions ; l’asperger de honte pour le faire tout petit, ratatiné sur lui-même jusqu’à ce qu’il n’ose bouger ; le convaincre de ne plus sortir, de ne plus exister. Meurs, petit démon. Meurs et fais de la place, à la lumière qui vacille dès que pointe ton orage. Sacrifie-toi pour l’honneur, pour la décence, pour les valeurs. Cesse, tout court, de rugir en arrière-fond.
Peur. Peur de voir se relever le démon, si grand debout, fièrement dressé. Monstrueuse envie, cruel désir qui affamé par de longs ennuis, titillé et provoqué à chaque ton de voix un peu trop pimenté, par les souvenirs trop lourds et malheureux, par la rage des uns et l’orgueil des autres...il se levait, rugissant et grognant, et d’un seul cri de guerre, éteignait la lumière. Destruction. Fureur. Le monstre s’étirait jusqu’à ce qu’il possède tout le corps et l’esprit, qu’il se fasse agonie et envie et plaisir, et à présent Maître de Tout, aveugle et sourd, il s’éveillait en Furie.

Mais dans sa boîte, il retournait toujours. Contraint, forcé, calmé.
C’était le prix à payer.
Alors bien sûr, la sorcière le savait : plus puissante avec lui, plus féroce et redoutable guerrière, elle aurait pu s’en servir. Mais elle avait déjà vu la peur et le dégoût dans les yeux des autres, effrayés par sa fureur qui gronde. Son âme en pleurait encore aujourd’hui. Enfant brisée, abandonnée, elle avait voulu se conformer, se mouler dans un moule trop petit pour elle, aux rebords carrés et pourtant ronde, elle était. Etait-ce ce qui l’avait sauvée ? Le fait d’être ainsi cadrée fermement par un père pourtant si aimant ? Avait-ce été la seule solution ? La réfréner, la façonner, pour qu’elle puisse s’attacher, parler, fonctionner normalement parmi les autres ; pour qu’elle puisse cesser de s’agiter et de souffrir, solitaire. Est-ce que contenir son chaos n’avait pas fait que l’amplifier ? Est-ce que l’équilibre si ardemment recherché n’était pas qu’une illusion temporaire et vaine ?
N’était-elle pas, finalement, elle-même une illusion ?

« Je crois que tu n’es plus si douée en silence que tu le penses. »

Et lui ? Qui était-il ? Avait-il été réfréné ? Comment avait été son moule à lui ? De quelle manière l’avait-on façonné ? Ou l’avait-il fait lui-même ? Avait-il du se réinventer comme elle ? Pour plaire ? Ou pour déplaire ? Pour provoquer ? Pour prouver aux autres qu’il était fort, puissant ? Son chaos à lui, n’était en rien dissimulé. Son étendue peut-être, son ampleur qu’elle devinait si large, si grande. Mais elle le voyait dans ses yeux, dans ses prunelles intenses, battre comme un coeur, frénétique et violent. Il lui renvoyait tout ce qu’elle craignait, tout ce qu’elle doutait et comme un rempart contre la tentation, contre la libération de son démon, elle l’abreuvait également du même poison. L’Espoir, en bouteille, était moins amer que le sang. Bois, Logan. Et cesse de vouloir lui faire boire la même chose qui coule dans ses veines.

« Toi non plus. »

Son regard l’avait fixé sans ciller.
Il parlait. Il bougeait. Il était sorti de son silence. Mais ce n’était toujours pas une victoire. Il se dressait là, imbattable désespoir si rigide qu’il ne bougeait pas même au vent. Un coup de sabre, une lame tranchante, aurait peut-être raison de lui. Par quelle main ? Celle d’un ennemi ou la sienne ? Lui-même si prompt à se mettre du côté de la Mort...s’il était toujours là, c’était qu’il y avait quelque chose encore qui retenait ses bras. Ce n’était pas l’Espoir. Ce n’était pas même l’envie de vivre mais plutôt, le refus de complètement abandonner ? Etait-ce cette rage du survivant, du guerrier, de celui qui a trop souffert et trop prouvé pour partir trop aisément qui le retenait ? Refuser de les laisser gagner ? Refuser d’être abattu sans un dernier combat ?
Toujours et encore dans l’entre-deux...Épuisante oscillation. Fatigante solitude.

« Tant d’efforts… Il posa son verre et s’approcha d’elle lentement, sa voix basse, seulement un souffle, acide frémissement de lèvres « … pour un résultat tant fallacieux qu’abject. »

Sanae lui faisait face mais elle ne bougeait pas. Pas de tension dans les muscles, pas de nervosité. Juste au fond de son ventre, ce pincement, mais il aurait fallu le toucher pour le sentir. Il aurait fallu ne pas être accaparé par ces deux regards qui s’accrochaient comme un duel étrange et pourtant sans vraiment de violence.
Son démon, en elle, relevait sa tête monstrueuse comme appelé par la voix du sorcier, titillé dans son égo de bête. Il en grogna d’amusement et de rage. Et comme une ombre traversant les prunelles de la sorcière, il salua Logan d’un éclair flamboyant. Juste une seconde. Imperceptible changement dans l’immobilité de la jeune femme. Une inspiration et elle relevait le menton, ses mains jointes dans son dos, et ce fut à la fois elle et son démon qui s’exprimèrent alors, presque comme une mise en garde joueuse : « L’Illusion vaut parfois mieux que la Réalité. N’est-ce pas Logan ? ». N’avait-il pas échappé à cette réalité lui-même pendant de longues semaines ? Ne s’était-il pas engouffré dans sa propre tête pour ne pas l’affronter ? N’avait-il pas fui également ?
Un léger sourire amusé étira ses lèvres, tendrement moqueuse « Mais pourquoi me soucierai-je de l’avis de celui qui se revendique être le Déshonneur ? ». Quoi ? Elle pouvait bien se moquer de ses propres mots, non ? Lui-même n’hésitait pas à se moquer d’elle.

Elle avait retrouvé son calme, lisse à nouveau. Et cela ne lui échappa pas. Rien ne lui échappait, du reste, et il fallait composer avec le fait qu’elle était exposée, vulnérable. Montrer, pourtant, qu’elle pouvait se défendre sans choisir de vraiment le faire, sans ne serait-ce qu’approcher ses propres armes. Peut-être se donnait-elle elle-même le tournis au final. Passant d’un sérieux presque solennelle à une légèreté quasi superficielle ; du tout au rien ; de la profonde à la surface ; balai incessant.

« Ils ne savent pas ce qu’ils ratent. »
Un soupire amusé. Un pincement de lèvres.
« Et cela m’arrange à vrai dire. »

Oui, ça l’arrangeait. Parce qu’elle n’aurait pas à les pousser à s’éloigner. Parce qu’elle n’aurait pas à  prétendre pouvoir leur donner ce qu’ils souhaitaient. Elle tenait tout ce qui pouvait se rapprocher d’un flirt, d’une amourette, à distance. Ce n’était pas un hasard si elle était encore vierge. Pas un hasard si elle n’était jamais allée plus loin qu’un baiser ou que des caresses. Toute terrifiée qu’elle était de perdre le contrôle, elle se privait de l’exultation primitive qui, trop liée à son chaos, menaçait de la faire vriller autant que de blesser l’autre. Elle se coupait de toutes ses pulsions pour demeurer dans cette bulle aseptisée qui lui promettait l’équilibre. Mais en elle...de plus en plus...grandissait cette envie de ressentir plus fort. Trop fort. Comme si avec son deuil s’était ouvert la trappe, plus aussi solide qu’avant, et commençait à en ressortir tout ce qu’elle voulait réprimer.

Elle se détourna de lui, et alla s’appuyer contre l’encadrement de la baie vitrée, le regard fixé sur la mer. « Que vas-tu dire à Alec quand il reviendra ? »


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Sanae M. Kimura
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Sanae M. Kimura
Mer 15 Juil 2020 - 8:28
Cold as ice
Dark as night
That's the colour of my heart
Empty paintings on the wall
As the streets I walk along
They see something inside me
That won't even let them sleep
Every bad thing you hear about me just believe

Don't get closer to me
You'll end up bleeding

Ankor

La bête est là. Elle gronde, s’agite. Il pourrait presque la sentir s’il s’agissait d’un être de chair et de sang. Mais pas besoin de choses si pragmatiques et triviales, il ne suffit finalement qu’un frémissement dan s l’air, un rougeoiement de pupilles et voilà qu’elle se trouvait là face à lui. La lave. Sa part sombre. C’est fou comme il suffit d’un rien pour faire surgir les ténèbres. Et ce qu’il était doué pour ça. Pour se fondre dans les ombres, les accrocher au sein d’un rayon clair pour qu’en un instant ou insidieusement, viennent se mouvoir les chatoiements du crépuscule. Combien d’erreurs ? Combien de démons avait-il réveillé ? Combien, à force de marcher en cadence avec les ténèbres ? De quel type de monstruosité était faite sa glaise ? Fragile et friable mais rude comme le marbre, tranchante comme le fer. Pourquoi Logan ? Pourquoi faire ça ? Pourquoi cette joie sauvage de voir apparaitre le feu, toi qui n’est fait que de cendres ? Que voulait le fauve qui rugissait, heureux de trouver enfin un semblable, même s’il ne faisait que le croiser un instant. Volonté de détruire, de briser, de faire mal. Volonté immonde et injuste, amorale, avide. Pourquoi faire plonger les autres comme tu le fais ? Parce que c’est ce que tu fais Logan. Tu pose une main solide sur leur chair, tu accroche leurs bras et tu les emmènes, sans rédemption possible, sans espoir aucun. Tu les traînes dans l’abîme. Tu les détruits. Sans remords. Non, ce serait une piètre espérance que cela se fasse sans pénitence n’est-ce pas ? Ce sang sur tes mains, il te brûle à tout instant comme les coups d’un père acharné, le mépris d’une mère haineuse, avanie du sort, injustice infâme. Il s’écoute ce sang, empoisonne tes veines depuis toujours, ne cesse de couler alors que jaillis cette résistance immonde, ce besoin de survivre, te dresser, refuser de mettre un genou à terre. Mais il ne disparait jamais pour autant. Et à chaque erreur, il te recouvre un peu plus. Pourquoi continuer quand chaque décision n’est que plus douloureuse encore ? Pourquoi être le glaive quand la guerre même n’est pas la tienne ? Tranche tes veines plus que leurs têtes et le serpent cessera de voir ses têtes poussée encore et encore sans trêves. Tu es la bête. Ses ténèbres sont tiennes. Elles résonnent, s’enchantent, se mettent à vibrer de concert dès lors que tu les aperçois. Combien en as-tu brisé Logan ?! Arrêtes-toi, laisse-là. Elle s’en est sortie, elle a avancé, elle les a bridés. Ne fais pas ça. Tais la cruauté, étouffe la rage, ne l’attise pas une fois de plus.
Pourtant c’est bien trop tard pour les moindres regrets non ? Le démon te fixe, te sourit, aime cette corde que tu fais vibrer, parfois bien malgré toi. Il pourrait l’emporter si elle n’a pas la force.

Mais c’est peut-être ce que tu souhaites. L’entraîner à tes côtés, avec d’autres. Victimes innocentes de la violence d’un bâtard. Le déshonneur, assumé, froid et dur ; violent et coupable. Peut-être saurait-elle résister. Elle n’est pas Aileen, faible et  naïve que tu n’as eut de cesse que d’éloigner de toi sans pour autant te départir de ce monstre qui gronde, cette horreur au fond de toi qui vous unissait sans cesse. Quelle force, quelle erreur assassine l’a fait s’accrocher, te revendiquer, t’affronter sans cesse alors qu’elle n’en avait pas les épaules ? Combien de fautes porteras-tu au juste ? Combien de corps sans vie, d’âmes à la dérives, d’existences détruites es-tu prêts à traîner avant de rendre les armes ?

Tu devrais lâcher, tu devrais abandonner, perdre, simplement. Mais tu n’es fait de ce sang-là. Le tien couve comme la braise, s’enflamme, se fait lave. Le tien brûle, amoral, cru, cruel même, à voir s’éveiller le monstre, à apercevoir la lave, désireux de s’en draper. Alors tu souris, connard, conscient pourtant du drame, tout comme tu souriais, amusé de sa témérité, d’une réplique tout simple, te renvoyant à tes propres dissonances.

« L’Illusion vaut parfois mieux que la Réalité. N’est-ce pas Logan ? »

Peut-être te faudrait-il un monstre finalement. Un monstre pour t’accompagner. Plonger droit dans la fange, l’accepter, t’y noyer, afin de comprendre, d’avancer ou simplement d’abandonner cette satanée morale qui reste, qui demeure solide, martiale, puissance et cogne dans tes tempes, te place là où tu ne veux pas. Là où il faut prendre des décisions impossibles. Pour quoi ? En sauver le plus grand nombre. Faire ce qu’il faut. Parce que c’est réellement ce que tu as essayé de faire n’est-ce pas Logan ? Sans cesse, sans faiblir même. Jusqu’à cet instant où mois après mois tu t’es emmuré loin de la réalité, plongé pourtant dans la tienne, replié, avachis dans les ombres, oublié là où la culpabilité te laisse quelques instants de répits.
Le déshonneur tu vois. Il n’a de cesse que de brûler tes  veines, plier tes épaules, courber ton échine.

« Mais pourquoi me soucierai-je de l’avis de celui qui se revendique être le Déshonneur ? »

Et pourtant c’est toujours un sourire qui se tend, s’exprime, se dresse comme ultime défense face à des mots qui devraient blesser mais qui ne le font plus depuis des lustres, s’amusant simplement de lui-même comme elle le faisait. Et d’elle. Parce qu’il est là, le brasier, la flamme, la rage. Elle est là la haine, la l’horreur qui n’attends que d’être poussée. Cruelle, sourde, jouissive.

Et dans ses prunelles, l’étincelle de la joie aigre.

« J’en sais rien... : c’est toi qui le fais. »

Toujours avide de plaire, de se plier aux volontés d’autrui, aux injonctions. Elle s’était taillée à la serpe, modelée dans la douleur pour correspondre à ce qu’elle devait. Et si un tel diktat imposé ne faisait que museler sa force ? C’était ainsi qu’il la voyait. Une force brute, puissante si elle s’enrageait. Quelqu’un qui, peut-être, pourrait se dresser et faire le bon choix. Le douloureux. L’immoral. Celui qu’on ne cesse de reprocher, celui qui vous suivra dans la tombe.

Et recommencer.

« Ils ne savent pas ce qu’ils ratent. »
« Et cela m’arrange à vrai dire. »

Alors oui, est-ce qu’elle pourrait le mettre à terre ? Non qu’il veuille l’épouser, bien évidemment, simplement cette idée, celle d’être désarmé, détruit de toute puissance l’attirait étrangement. Un reliquat sans doute de ce qu’ils ne cessaient de faire, l’un comme l’autre. Se maîtriser, se bloquer, se contenir. Quelle sensation douce-amère que de laisser le monstre à un autre, de le laisser dresser le fer, enfermer le feu, brider l’implosion pour une fois.

Et toi ? Ça fait quoi quand tu lâches la bride ?
Ça ferait quoi, simplement, de relâcher un instant la pression sans savoir qu’on pourrait ravager l’esprit qui demeure là en face de soi. Briser la digue…

Ames jumelles, pensées analogues.
Il n’allait pas les chercher pourtant, gardait son esprit bloqué, piégé comme il l’était sans cesse, s’interdisait toujours de venir glisser vers elle, happant les siennes sans raisons. Quelles émotions y aurait-il trouvé ? Quelles envies ?

Celle de vivre peut-être, sans doute conjointe elle aussi. Il n’en était simplement pas encore tout à fait conscient, pourtant piqué, éveillé par la présence de la bête.

« Que vas-tu dire à Alec quand il reviendra ? »

Il la fixait sans mot dire alors qu’elle se détournait déjà de lui, insaisissables pensées, impensable échec de se sentir sans cesse muselé.

« Pourquoi faudrait-il dire quoi que ce soit ? »

C’est bien là le problème avec les muselières d’ailleurs. Elles finissent pas laisser des traces, comme le cuir planté dans la chair qui fini par pousser tout autour, ne faisant plus qu’un avec les liens, marques indélébiles d’une soumission acharnée. Aux normes humaines, au socialement correct, à la morale insidieuse, pernicieuse. Celle qui dompte et enchaîne.

« Qu’est-ce que tu voudrais que je lui offre au juste ? Des excuses ? L’espoir... ? » Ce dernier mot, il l’avait prononcé avec une pointe de moquerie. « C’est d’armes dont il a besoin plus que d’espoir. »

– Ami, dit l’enfant grec, dit l’enfant aux yeux bleus,
Je veux de la poudre et des balles.




A défaut d’être grec, peut-être aurait-il au moins de quoi allumer la mèche.
Et à défaut d’avoir une enfance, peut-être aurait-il un avenir.

« Le problème avec toi comme avec moi… c’est qu’on a plus facilement appris par instinct au danger d’éviter de sortir. Lui doit l’empêcher d’entrer… »

Et il le faisait. Naturellement, face aux agressions répétées d’une armée braquée sur ses pensées, Alec avait réussi à porter des digues autour de son âme. Il pouvait être doué pour ça. Est-ce que Logan était toujours le mieux placé pour lui apprendre à placer de nouvelles briques sur ses murailles, il en doutait. Peut-être cela demanderait de nouveau trop de confiance.
Trop d’une proximité dangereuse, ça ne faisait aucun doute.

Doucement, au cours de ses paroles, Logan s’était de nouveau mis en mouvement, retournant auprès de son verre, posant une main dessus, faisant dos à la baie vitrée.

« Il ne reviendra pas de lui-même tu sais, il faudra que tu ailles le chercher. C’est un gosse en colère, il aura du mal à faire la part des choses. »

Et derrière lui, la voix d’Alec.

« Perdu. Arrête de penser que tu connais tout de tout le monde Logan, c’est épuisant. D’autant que t’es plutôt mauvais en nature humaine. »

Et, dos à lui, le regard plongé dans l’alcool ambré, l’ainé des Rivers traçait un sourire triste sans destinataire.

« T’as bien raison… »

Je n’en sais rien.
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M. Logan Rivers
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M. Logan Rivers
Ven 17 Juil 2020 - 15:10
Tous les jours, elle se produisait sur scène.
Ses pieds foulaient le plancher d’une estrade infinie et devant ses yeux s’étendaient son public. Mille et uns visages la regardaient agir, se mouver sur cette scène qui l’avait vue grandir. Elle gesticulait, parlait avec l’assurance d’une actrice qui, depuis petite, avait appris à duper. Ses sourires, ses regards, la joie qu’elle dégageait, s’orchestraient aisément pour créer la mélodie, douce et entêtante, qu’elle voulait. Tout était beau, tout était lisse. Les costumes choisis, les masques fièrement ornés, peignaient artistiquement un tableau tout doré.
Le public applaudissait, acquiesçait. On l’aimait.
Mais alors le rideau, sur son dernier salut, s’abaissait. Et l’actrice se relevant, perdait son sourire. Elle délaissait le masque, enlevait son costume. Dans la pénombre d’une scène auparavant éclairée, ses pieds, lourds, son corps sans vie, quittaient l’estrade en traînant un coeur meurtri, un espoir las, et dans sa main une bougie que par un souffle hésitant elle éteignait la flamme. Obscures coulisses embrumées de fumée, au sol jonché des cendres du passé, l’actrice aux artifices fanés rejoignait sa loge. Devant son miroir, elle regardait son propre visage et d’un geste tremblant enlevait le maquillage. Ses traits alors, ainsi découverts, se changeaient en quelque chose d’autre qu’elle aurait voulu étouffer. Oh, la tromperie. Oh, l’illusion odieuse. Elle bernait tous les coeurs et les esprits festifs qui venaient, par mégarde, dans son théâtre ; lui-même, n’était qu’un écran de fumée. Les murs, les chaises, les tapis et les tableaux. Tout était mensonge. Tout était faux. Ils y croyaient pourtant, ignoraient les détails qui sur les grandes affiches se cachaient ci et là ; petits avertissements trop souvent ignorés.
Bernés par son spectacle, ils continuaient à affluer et elle devait retourner sur cette scène qui la voyait mourir un peu plus chaque soir, laissant dans sa loge tout son désespoir. Et d’une force qu’elle puisait dans les tréfonds de son âme, Sanae récoltait les fragments de sa vie brisée, recollant les morceaux pour maintenir l’illusion d’une normalité dont elle-même, elle s’était persuadée.

Mais soudain, voilà qu’Il entrait. Tout de noir vêtu, le Déshonneur incarné. Et alors que sur scène elle répétait, les mêmes gestes, les mêmes paroles, si savamment arrangés, elle aperçut dans le public deux yeux qui la fixaient. Le public se leva, applaudit et siffla. Mais lui, immobile, restait là. L’Illusion ne prenait pas. Pire, il lui souriait, moqueur, parce qu’il savait ce qui derrière tout ceci se cachait. Mensonge, lui disait son regard. Toute troublée, ses mains se mirent à trembler. Le rideau s’abaissa et figée, l’actrice rejoignit sa loge, à nouveau, atterrée.
Un sursaut au fond de son ventre, une idée.
Et si...et si c’était vrai ?

Tous les jours, elle avait beau lui présenter son spectacle mais il n’y croyait pas. Le masque, épuisé, commençait à se fissurer. Et le monstre, intérieur, contenu, souriait. Enfin, on le voyait.




Etait-ce pour cela qu’elle se souciait de ce qu’il disait ? Elle voulait le convaincre, lui faire croire en l’espérance qui maintenait toutes les barricades de son être. Elle voulait faire taire son monstre à lui, mais le sien, en colère d’avoir été trop longtemps enfermé, semblait s’amuser et s’allier à celui qui face à elle, se moquait. Non. Chut. Ne l’écoute pas. Ne l’encense pas. Il n’attend que ça.

« J’en sais rien... : c’est toi qui le fais. »

Son sourire s’étendit sur son visage et c’était clair à présent : il l’avait vu, et il lui souriait en retour. Terre-toi petit démon, tu vois ce que tu fais ? Tu te laisses hypnotiser. Nous sommes plus forts que ça. Un souffle moqueur vint contrer l’arrogance : « Tu te donnes trop d’importance. » lui dit-elle.

Puis, se détournant, ne voulant plus soutenir ce regard, la sorcière alla près de la baie vitrée. Changement de sujet. Vite. Il se faisait tard et Alec était toujours dehors. Sa colère s’était-elle calmée ? Reviendrait-elle exploser face à son cousin ?

« Pourquoi faudrait-il dire quoi que ce soit ? »

Elle soupira, n'eut pas le temps de répliquer.

« Qu’est-ce que tu voudrais que je lui offre au juste ? Des excuses ? L’espoir... ? » La moquerie était là. « C’est d’armes dont il a besoin plus que d’espoir. »
« L’espoir est une arme. » répliqua-t-elle du tac au tac, dardant son regard sur lui quelques instants.

Elle le suivit des yeux se mouvoir alors qu’il continuait.

« Le problème avec toi comme avec moi… c’est qu’on a plus facilement appris par instinct au danger d’éviter de sortir. Lui doit l’empêcher d’entrer… »
« Il y arrivera...Je m’en assurerai.» Son ton déterminé trancha tous les doutes car au loin, elle voyait une silhouette approcher. Elle se détachait dans la pénombre de la plage, sortant du lointain pour devenir bien réelle.

Logan, lui, retournait à son verre. Il ne leur faisait pas face et n’avait pas vu Alec arriver.

« Il ne reviendra pas de lui-même tu sais, il faudra que tu ailles le chercher. C’est un gosse en colère, il aura du mal à faire la part des choses. »

Sanae croisa les bras, appuyée contre la vitre alors qu’Alec entrait. Un réprima un rire moqueur mais souriait largement.

« Perdu. Arrête de penser que tu connais tout de tout le monde Logan, c’est épuisant. D’autant que t’es plutôt mauvais en nature humaine. »


Le sorcier ne se retourna pas. Le sourire de Sanae s’élargit.

« T’as bien raison… »

Un soupire. Elle se détacha de la baie vitrée et s’approcha de la table sur laquelle était posé son sac. « Bien, maintenant que vous avez énoncé des évidences…. » fit-elle d’un ton moqueur, remballant son thermos mais laissant les pâtisseries. Elle se tourna vers Alec. « Je te contacterai très bientôt pour commencer les leçons. En attendant, tâche de rester en vie. » Et de ne pas taper dans des murs.

Elle jeta son sac sur son épaule et jeta un dernier regard à Logan. « Logan...à la prochaine pour plus d’amabilités. »

Puis, dans un CRAC qui fit écho dans la pièce, elle transplana.

Les Rivers étaient définitivement épuisants.  


Fini pour moi
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