Vague à l'âme - Japon - One Shot

10/02/16

Solitude.

C’était seul qu’il ouvrait les yeux, seul qu’il se levait, mangeait et observait la mer s’écraser sur le rivage là en bas. L’âme séparée en deux ressentis opposés. Il respirait. Seul face à sa tasse de thé fumante, engloutissant son petit déjeuné pour la première fois depuis des semaines, le garçon observait l’écume les vagues, les lèvres pincées, le vague à l’âme. Il était serein pour la première fois depuis des mois. Mais seul. Foutrement seul. Horriblement seul. Mais être seul ça voulait aussi dire ne pas avoir la responsabilité des autres, de leurs souffrances, de leur malheur.

S’il connaissait les raisons du départ de Dakota ainsi que celles de Jillian, Takuma avait pourtant l’impression qu’en un sens, elles avaient fuit. Quelque part, elles l’avaient fuit lui. Lui parce qu’il faisait partie de ce bordel. Cette situation lui échappait. Que pouvait faire un jeune homme seul quand il se rendait compte que la guerre grondait ? Merde, il avait pourtant réussi à remonter la pente pendant longtemps. Il s’était amusé de tout et de rien. Mais jusque là, il voyait le danger, il pouvait se le représenter et jouer avec. Ça n’était plus le cas à présent et à voir l’angoisse dans chacune des ombres… ça n’était pas une vie, se ronger les sangs sans savoir ce qui se passait derrière soi. Est-ce qu’il se sentait d’ailleurs réellement plus seul ici, alors qu’il était là depuis un mois sans croiser aucun ami ? Non. Pas plus qu’à Londres alors qu’il les voyait tous les jours. Tous les jours, il se levait, vérifiait les protections magiques, partait bosser, puis il rentrait, vérifiait de nouveau. Il partait faire les courses, s’occupait du chien, faisait le repas, rassurait parfois les uns les autres.
Le chien. Il n’était même pas revenu le chercher. Quel con.

Culpabilité.

Il les avait tous lâché. Et si les protections lâchaient. Et si quoi que ce soit se passait mal ? Bien des questions tournaient en boucle dans sa tête. Et pourtant, il respirait mieux ici. Quoi qu’il se dise, quoi qu’il fasse, quelque soit la culpabilité, quelque soit l’angoisse qu’il se passe une horreur tandis qu’il était loin… l’air autour de lui semblait simplement plus léger. Et pourtant il n’y avait pas de raisons.
Car l’hôtel dans lequel il se trouvait portait un nom bien familier : Hayato.

Est-ce qu’il les avait seulement contacté ? Non. Pas depuis qu’il était sorti de Poudlard et qu’il n’avait obtenu à ses contacts qu’un silence foutrement éloquent. Alors il se contentait de profiter de la chambre, d’observer la vue et de se forcer, doucement, à mettre le pied dehors. Car si Takuma voyait son attention se plonger intégralement dans la contemplation de la mer du Japon, il n’avait pourtant pas vu la couleur du ciel depuis un moment.

Inspirant à fond, le jeune homme s’était contenté de terminer sa boisson avant d’envoyer un texto à Aileen. Il n’avait pour l’instant pas réellement répondu aux quelques sollicitations qui avaient pu arriver mais il fallait bien qu’il donne signe de vie une fois de temps en temps non ?
Et puis, surtout, il en avait envoyé un second. Pas un signe de vie, non, plutôt un cri du cœur.

‘Tu me manques’.

Dakota ne répondrait sans doute pas. Ou pas ce qu’il souhaitait. Pourtant, l’envie de tout lâcher et de la retrouver le titillait. Pour autant, ça ne changerait sans doute rien. Si elle était partie, c’était qu’il y avait une raison. Et il faisait parti du problème, il le savait parfaitement et ce, même s’il n’arrivait pas à détacher son esprit de son fantôme. Comme si elle le suivait tous les jours. Comme si elle restait à ses côtés, parfaitement invisible mais que son souffle suffisait à lui rappeler comme il souffrait de son absence.

Lâchant un soupire, le jeune homme s’était levé, laissant là le fond de thé abandonné afin de déambuler sans réel but dans l’hôtel encore calme. Il jouait le touriste, se glissant comme une ombre pour marcher le long des allées, longeant la piscine, descendant les marches de pierre pour avancer dans les jardins jusqu’à rejoindre la plage là en bas. S’assoir, écouter les vagues. Lâcher au loin ses pensées macabres pour un temps.

Laisser Poudlard. Laisser les Supérieurs. Laisser ses défaites. Laisser ses amis. Laisser la lutte. S’abandonner lui-même juste un temps.